jeudi 19 février 2009

Espagne — non à l'objection de conscience et non au prosélytisme

Se penchant sur quatre jugements de cours inférieures contre lesquels se pourvoyait le gouvernement socialiste espagnol, la Cour suprême espagnole a conclu dans quatre arrêtés similaires que le contenu du programme d’Éducation à la citoyenneté (EC) était compatible avec le droit à la liberté de conscience et de religion garantie par la Constitution espagnole et qu’il n’existe donc pas, par conséquent, un droit à l’objection de conscience à son encontre.

Toutefois, la Cour suprême permet aux parents de recourir aux tribunaux s’ils considèrent qu’un manuel ou un professeur commet de l’endoctrinement ou du prosélytisme, plus particulièrement pour des sujets qui ne font pas l’objet d’un consensus moral dans la société espagnole. La Cour ne permet « ni au Ministère, ni aux écoles, ni aux professeurs d’imposer ou inculquer, même de manière indirecte, des points de vue particuliers sur des questions morales controversées dans la société espagnole. »

Le tribunal justifie sa décision en déclarant qu’elle découle du pluralisme, consacré comme valeur supérieure de notre ordre juridique, et du devoir de neutralité idéologique de l'État, qui interdit à celui-ci de se livrer à toute forme de prosélytisme.

Dix des 29 juges de la Cour suprême ont émis des opinions particulières, sept d’entre elles tranchent avec la décision majoritaire quant au droit à l’objection de conscience et le droit des parents de choisir la formation de leurs enfants. Les trois autres juges sont globalement d’accord avec la majorité des magistrats, mais apportent des nuances. Les critiques de la minorité portent principalement sur le contenu des arrêtés royaux des régions autonomes espagnoles, à savoir le programme officiel dans ces régions, « qui contiennent des appréciations morales qui frisent l’inconstitutionnalité ». Ces juges considèrent que la neutralité idéologique du programme d’Éducation à la citoyenneté n’est pas garantie.

Raisonnement de la majorité

« Au moment d'examiner s'il existe un droit à l'objection de conscience en ce qui concerne le cours d’Éducation à la citoyenneté, il faut commencer par une explication : l'idée même d'objection de conscience a seulement un sens, en principe, quand on s’oppose à des devoirs juridiques valables, c'est-à-dire qui émanent d'une loi qui ne nuit à aucune autre loi de rang supérieur. Si la loi qui impose le devoir juridique est inconstitutionnelle – ou, s'agissant d'un règlement, illégal – la réponse ne peut jamais être l'objection de conscience, mais l'activation des procédures prévues dans notre ordre juridique pour l'annulation de cette règle : le recours et la motion d'inconstitutionnalité quand il s’agit d’une loi; la contestation directe ou indirecte devant la juridiction du contentieux administratif pour ce qui est des règlements. Bref, dans un État démocratique de droit, il est clair que la réaction à adopter face à une loi invalide ne peut consister à en réclamer la dispense, mais à en réclamer l’annulation. »

Devoir de l'État d'intervenir dans l'instruction publique

Le programme d’Éducation à la citoyenneté s’inspire de la Recommandation Rec (2002) 12 du Comité des ministres aux États membres relative à l'éducation à la citoyenneté démocratique. Dans celle-ci, le comité des ministres se disait « préoccupé par le niveau croissant d'apathie politique et civique, et par le manque de confiance dans les institutions démocratiques, ainsi que par l'augmentation des cas de corruption, de racisme, de xénophobie, de nationalisme agressif, d'intolérance à l'égard des minorités, de discrimination et d'exclusion sociale, qui constituent des défis majeurs à la sécurité, à la stabilité et au développement des sociétés démocratiques » et affirmait que « que, dans son acception la plus large, l'éducation à la citoyenneté démocratique devrait être au centre des réformes et de la mise en œuvre des politiques éducatives ».

[Soit dit en passant, il est intéressant de noter que la réaction de ces ministres devant l’apathie de la population vis-à-vis de la politique et une montée de la xénophobie n’est pas de considérer la possibilité d’un déficit démocratique, d’une trop grande emprise de la technocratie et de mauvaises politiques migratoires, mais un renforcement de l’éducation des jeunes…]

Pour le tribunal suprême espagnol, l’État se doit d’intervenir dans l’éducation, il s’agit de la concrétisation du droit à l’éducation. Cette intervention n’a pas pour seul but d’assurer la transmission de connaissances sur le cadre institutionnel de l’État, mais également de proposer une formation sur les valeurs nécessaires au bon fonctionnement du système démocratique.

La liberté de conscience et de religieuse est protégée par l’article 16.1 de la Constitution espagnole en ces termes : « La liberté idéologique, religieuse et des cultes des individus et des communautés est garantie; elle n’a pour seule limitation, dans ses manifestations, que celle qui est nécessaire au maintien de l’ordre public protégé par la loi. »

En ce qui a trait à ce droit, la majorité des magistrats affirment qu’il « n’est pas nécessairement incompatible avec l’éducation au pluralisme pour autant que celle-ci se fasse dans la neutralité et sans endoctrinement. »

« Cela signifie que, lors de cette formation et l’exposition de différentes conceptions, il faut s’assurer de ne pas exercer de pression en faveur d’une de ces conceptions et cela sera le cas quand l’enseignement sera donné de façon à aiguiser le sens critique de l’élève auquel on laissera très clairement le choix d’évaluer ces différentes conceptions selon sa réflexion et ses critères personnels. »

« Tout ce qui vient d'être exposé devrait suffire pour établir que l'existence du programme d’Éducation à la citoyenneté ne contrevient pas au droit, car il n'est pas correct de soutenir, comme l’affirme la sentence [andalouse] contestée [par le procureur de la Couronne], que l'État n'ait rien à dire en matière de formation des mineurs ou qu’il ne doive pas transmettre de valeurs par le biais du système éducatif. On a déjà dit quels sont les équilibres que la Constitution exige dans ce domaine. »

Par ailleurs, la Cour suprême affirme qu’il est évident que « la Constitution espagnole ne proclame pas un droit à l’objection de conscience à portée générale », mais qu’il existe bien explicitement, par contre, dans le domaine du service militaire.

Avis dissidents

L’avis de la Cour suprême n’était pas unanime, comme nous l’avons dit ci-dessus, 10 des 29 juges n’ont pas approuvé l’avis majoritaire. Le juge Juan José Gonzalez Rivas reproche ainsi que la majorité de ses collègues ait omis de considérer les critères d’évaluation mentionnés dans les arrêtés royaux (plus particulièrement celui du 29 décembre 2006) où il apparaît qu’on évalue la conscience morale des élèves, même si les parents s’y opposent, pour vérifier que l’élève « accepte » certaines valeurs morales (on prétend ainsi vérifier s’il reconnaît les sentiments et les émotions des personnes qui l’entourent, s’il accepte les différences interpersonnelles, s’il reconnaît l’importance et les limites éthiques des accords [« límites éticos de los acuerdos »]) alors que l’article 27.2 de la Constitution espagnole n’exige que le « respect » : « L’éducation a pour objet le plein épanouissement de la personnalité humaine, dans le respect des principes démocratiques de la vie en commun et des droits et libertés fondamentales. »

Selon le juge Gonzalez Rivas, les parents objecteurs tirent la conclusion que le programme d’Éducation à la citoyenneté va au-delà de l’article 27.2 et porte atteinte à l’article 27.3 (« Les pouvoirs publics garantissent le droit des parents à ce que leurs enfants reçoivent une formation religieuse et morale en accord avec leurs propres convictions ») en raison de plusieurs risques patents dans le programme d’Éducation à la citoyenneté.

Le premier risque d’infraction apparaît dans le régime pédagogique pour l’école secondaire obligatoire (ESO) où l’on expose l’élève à des dilemmes moraux parce qu’« ils permettent aux élèves de former un jugement éthique qui leur est propre fondé sur les valeurs et les pratiques démocratiques » (arrêté royal 1631/2006). Il ne s’agit pas uniquement d’une exposition qui empiète sur les compétences des parents en matière de formation morale de leurs enfants, mais cette formation morale est indépendante des convictions des parents et établit d’autres critères et d’autres références morales.

Le second risque se présente, par exemple, quand figure parmi les objectifs du programme « la reconnaissance du droit des femmes, la valorisation des différences entre les sexes et l’égalité des droits entre ceux-ci et le refus des stéréotypes et préjugés qui entraînent la discrimination entre les hommes et les femmes » ou qu’on y trouve des références au sexisme et à l’homophobie qui impliquent des jugements de valeur négatifs dans la conception de l'homme et de la femme alors que ces jugements de valeur peuvent être fondés sur des conceptions légitimes, mais qui sont d'emblée qualifiées comme des préjugés et de la discrimination.

Réaction du Centre juridique Thomas More

Le Centre juridique Thomas More a émis ces commentaires (sous bénéfice d’un examen ultérieur plus complet) :

« 1. – Les membres de ce Centre juridique ont rarement eu l’occasion d'étudier des sentences de notre Cour suprême aussi déroutantes du point de vue logique. En effet, il est difficile d’arriver aux conclusions juridiques de ce jugement à partir des fondements juridiques invoqués dans ce même jugement.

2. – Les [quatre] jugements prononcés par la Cour suprême démontrent que le programme d’Éducation à la citoyenneté y a suscité la même polarisation qui existe dans la société espagnole. Le nombre, la profondeur et la profusion des opinions minoritaires démontrent que ce programme ne s’accompagne pas du consensus indispensable à son enseignement dans les établissements scolaires.

3. – L'interprétation restrictive que [la Cour suprême fait] de l’objection de conscience présente un danger pour la démocratie espagnole, car la Cour suprême laisse le citoyen désarmé devant l’arbitraire des pouvoirs publics. L'ampleur de la reconnaissance du droit fondamental à l'objection de conscience est le véritable thermomètre pour mesurer la santé d’une démocratie. L'histoire nous montre que toute restriction à l'objection de conscience restreint implicitement la liberté.

4. – La Cour suprême abdique son rôle, car sa mission principale est celle de protéger les droits des citoyens et non de faire des recommandations aux pouvoirs politiques. Les avertissements constants que la Cour suprême adresse aux pouvoirs politiques pour qu'ils s’abstiennent de tout endoctrinement ne sont qu’autant de démonstrations tacites du danger de manipulation que le Haut Tribunal a détecté dans les contenus du programme en question; malgré cette alarme la Cour suprême n'a pas donné raison aux parents objecteurs.

5. – Les citoyens, à tort ou à raison, n’accorderont pas à ces arrêtés [de la Cour suprême] le respect qu’il leur est dû, car de nombreux Espagnols soupçonnent que des pressions politiques ont été exercées sur les magistrats. En effet, depuis qu’on a appris que la déclaration télévisée de la ministre socialiste de l’Éducation où elle se réjouissait de la décision du tribunal avait été enregistrée avant que celui-ci n’ait fait connaître publiquement cette décision, le sentiment général est que la ministre de l’Éducation avait rendu un bien mauvais service aux libertés civiques, à l’indépendance des tribunaux et à la modération politique.

La ministre de l'Éducation espagnole, Mme Cabrera, à gauche une heure et demie après la décision de la Cour suprême et à droite sur Youtube, sous-titrée, deux jours avant, se réjouissant déjà de cette même décision.


[La vidéo de la ministre Cabrera était disponible sur Youtube le 26 janvier alors que la décision orale de la Cour suprême n’a été rendue que le 28 janvier ! Il a fallu attendre le 17 février pour que le jugement écrit soit disponible. Voir Libertad digital.]

Pour tous ces motifs, et après avoir pris connaissance du contenu du jugement de la Cour suprême, ce Centre juridique considère qu’il est de son devoir moral et civique de continuer à soutenir, encourager et stimuler l'objection de conscience quant au programme d'Éducation à la citoyenneté et de continuer à approfondir la possibilité d’utiliser d’autres moyens pour garantir la liberté des parents qui refusent de livrer leurs enfants à la manipulation idéologique. »

Réaction des évêques espagnols

La décision motivée de la Cour suprême a été publiée mardi alors que les évêques espagnols étaient réunis en leur Commission permanente de la conférence épiscopale. Ceux-ci ont réitéré leur position : «  l’État ne peut supplanter la société comme éducateur moral ; il lui faut plutôt promouvoir et garantir l’exercice du droit à l’éducation par les personnes dont c’est la fonction, dans le cadre d'un ordre démocratique respectueux de la liberté de conscience et du pluralisme social.

Mais, depuis l'introduction de ce programme – tel qu’il est défini dans les arrêtés royaux –, l’État s’arroge un rôle d’éducateur moral qui ne lui revient pas dans un État démocratique de droit. Il en aurait été tout différemment d’un cours qui n’aurait pas empiété sur la formation de la conscience et qui se serait limité, par exemple, à l’explication de l’ordre constitutionnel et des Déclarations universelles des droits de l’homme. Cette formation aurait été acceptable et, peut-être, même désirable. »

Sur le front des objecteurs de conscience

Depuis le jugement de la Cour suprême qui ne portait que sur 4 jugements de tribunaux régionaux, de nouvelles mesures conservatoires, notamment en Andalousie et en Castille-La Manche, ont été rendues en faveur des parents objecteurs : leurs enfants ne doivent pas assister au cours d’Éducation à la citoyenneté. Trois magistrats parmi les dix-sept qui ont voté en faveur de la décision majoritaire de la Cour suprême ont admis que l'objection de conscience est recevable quand des contenus précis du cours de l'Éducation à la citoyenneté ne sont pas neutres et vont au-delà d'un enseignement des libertés fondamentales et des institutions démocratiques.

Diverses stratégies sont actuellement évoquées par les objecteurs :
  1. Continuer à demander le statut d’objecteur de conscience (il y a près de 50 000 demandes qui n’ont pas été entendues) ;
  2. il reste encore près de 1500 jugements favorables aux parents à casser par les gouvernements (bien que certaines régions autonomes aux mains du PSOE ont dit vouloir les ignorer et forcer les élèves à désormais assister aux cours d'EC) ;
  3. demander par la voie juridique de modifier les programmes, les manuels en invoquant explicitement ce jugement de la Cour suprême pour éliminer les parties les plus litigieuses sur la lutte contre l’homophobie, la théorie du genre, etc. quitte à engorger les tribunaux de la sorte ; certains évoquent même que des demandes similaires puissent être faites à l’encontre d’autres cours à fort contenu idéologique comme les Sciences sociales et du monde contemporain et l’Histoire ;
  4. présenter un recours devant le Tribunal constitutionnel espagnol et la Cour européenne des droits de l'homme à Strasbourg.

Préfet de la Congrégation pour l'éducation catholique : l'imposition du cours ECR viole le droit des parents

Traduction d'un extrait d'une dépêche de l'agence de presse Zenit.org :
« ROME, 19 février 2009 (Zenit.org) — Le nouveau programme sur la diversité religieuse imposé aux écoles québécoises constitue une violation des droits parentaux et frôle l'« anticatholicisme » selon le préfet de la Congrégation pour l'éducation catholique.

Le cardinal Zenon Grocholewski a discuté du programme québécois d'Éthique et de culture religieuse avec l'agence ZENIT lundi, après la tenue d'une conférence à l'université pontificale Antonianum sur « le financement public des écoles catholiques » organisée par l'Institut Acton.

En septembre 2008, le ministère de l'Éducation du Québec a introduit un nouveau programme dans toutes les écoles publiques et privées de la province. Le nouveau cours obligatoire remplace le « programme d'enseignement moral et religieux catholique », l'« enseignement moral et religieux protestant » et l'« enseignement moral » parmi lesquels les parents pouvaient choisir.

Le nouveau programme confronte les élèves à une diversité de religions et à une éthique laïque.

« Aborder toutes ces religions viole le droit des parents à pouvoir éduquer leurs enfants conformément à leur propre religion » a expliqué le cardinal polonais qui se fait ainsi l'écho des parents qui affirment que les manuels ne sont pas neutres sur le plan idéologique.

« Parler de toutes les religions de la même manière, a poursuivi le cardinal Grocholewski, est quasiment une éducation anticatholique, car ceci crée un certain relativisme. » Il a conclut en soulignant que cette méthode d'instruction pourrait en fin de compte être antireligieuse puisque les jeunes ont l'impression que chaque foi est un récit imaginaire. »

Le cardinal Grocholewski a commenté la récente élimination des heures de cours de religion sur le catholicisme et le protestantisme au Québec

mardi 17 février 2009

Suivre ta conscience, pas les règles

Le plan de cours d'éthique et de culture religieuse de secondaire IV d'une école estrienne affirme :
« Ne plus agir en fonction de règles et/ou de lois, mais en fonction de ma conscience pour un mieux-être individuel et collectif. »
Gageons que de nombreux élèves trouveront la chose excellente, surtout le mieux-être individuel. La partie collective étant bien vague et susceptible de longs débats parfois stériles.

Les publicitaires aiment aussi ce thème de l'infraction des règles.

Un panneau publicitaire en anglais — enfreignant par l'exemple une loi, la loi 101 ? — de la boisson Rage situé près du restaurant La casa du spaghetti à Sherbrooke.

lundi 16 février 2009

C'est le temps des inscriptions

C'est le temps des inscriptions de nos enfants pour l'année scolaire 2009-2010.

Si vous êtes contre le cours d’Éthique et culture religieuse (ÉCR), nous vous suggérons de :
  1. Écrire en bas du formulaire d’inscription : « Je refuse que mon enfant suive le cours d’ÉCR dans le respect des droits protégés par les Chartes canadienne et québécoise quant à la liberté de conscience et de religion. »
  2. Joindre une copie du formulaire d'exemption (voir www.Coalition-CLE.org) dont l’original pourra être posté séparément à la commission scolaire. Ainsi, les familles ayant demandé l'exemption pour l’année scolaire 2009-2010, seront admissibles dans l’éventualité d’un jugement en faveur du respect de nos droits et libertés.

Québec — Front commun contre le décrochage scolaire l’école privée

Comme nous l'avions prévu — nous sommes au Québec après tout —, la lutte contre le décrochage scolaire allait dériver en un appel à encore plus d'État, plus de monopole, plus de règles restrictives et moins de choix.

C'est ainsi que la Centrale des syndicats du Québec et son président, Réjean Parent, accusent le gouvernement actuel et ceux qui l'ont précédé de n'avoir jamais pris le problème du décrochage scolaire au sérieux.

Rappelons qu'au Québec 1 élève sur 4 abandonne l'école avant la fin du secondaire (pour nos lecteurs européens, il faut se rappeler que le secondaire se termine plutôt au Québec qu'en Europe : vers 16-17 ans, au niveau de la première en France).

Dans le cas des garçons, c'est 1 sur 3 qui décroche et dans le cas des filles, c'est 1 sur 5. Les régions éloignées sont particulièrement touchées, mais Montréal n'est pas en reste avec 40 % des jeunes qui n'obtiendront pas leur diplôme du secondaire avant l'âge de 20 ans, ou ne l'obtiendront jamais. Une analyse plus fine montre que l'éloignement n'est pas vraiment déterminant : le Saguenay-Lac Saint-Jean a le taux de décrochage le plus bas du Québec suivi du Bas Saint-Laurent. Toutefois, la région avec le plus d'autochtones souffre énormément : dans le Nord du Québec plus de 7 jeunes sur 10 ne terminent pas leurs études secondaires, à savoir 3 garçons sur 4 et près de 7 filles sur dix.

Réjean Parent et la Centrale des syndicats du Québec proposent diverses pistes de solutions. La CSQ croit qu'il faut d'abord agir dès la petite enfance pour contrer le décrochage scolaire, entre autres dans les milieux défavorisés. Le système d'éducation devrait aussi favoriser la mixité sociale et culturelle dans les salles de classe. M. Parent veut-il dire ethnique quand il parle de mixité culturelle ? L'immigration serait donc un problème et plus seulement une richesse ?

Par ailleurs, M. Parent répète qu'il faut retirer des écoles publiques les programmes qui sélectionnent leurs élèves. Il déplore le fait que ces programmes vident les classes de leurs meilleurs éléments et les laissent composées d'élèves en difficulté et à risque. Il existe une solution mitoyenne : avoir des classes de niveau qui regroupent au sein d'une même école les élèves les plus forts pour un sujet donné. Ainsi, il y a mixité sociale. Cela se faisait aux heures les plus sombres du Québec. Mais on n'en parle plus, sans doute par idéologie.

Le président de la CSQ demande aussi la fin du financement des écoles privées, qui privent aussi, selon lui, les écoles publiques des meilleurs élèves.

Conclusion : l’État doit fausser encore plus le marché en ne subventionnant que les écoles publiques et en rendant la concurrence plus chère ce qui ne permettra qu'aux enfants de riches d'avoir le choix et souvent une éducation de qualité.

La CSQ affirme que le décrochage scolaire commande une approche intégrée. Elle suggère donc que le sommet qu'elle réclame pour le printemps regroupe non seulement des enseignants et des représentants du ministère de l'Éducation, mais aussi des ministères des Finances, de l'Immigration, de l'Emploi, des Affaires autochtones et de la Famille.

Tiens, des enseignants et des fonctionnaires, mais pas de représentants des parents. Comme c'est étrange.

dimanche 15 février 2009

Capsules sur le cours ECR

Deux capsules de l'historien Réal Gaudreault sur le cours d'éthique et de culture religieuse.





Voir aussi un article cité par Réal Gaudreault : Bouchard-Taylor : fabriquer l’Homme Nouveau par la dictature de l’harmonie.

vendredi 13 février 2009

Le cours d'ECR vu de Paris (Radio Notre-Dame)

Extrait d'un bulletin de nouvelles internationales de Radio Notre-Dame, une radio religieuse diffusée à partir de Paris, reprise par de nombreuses antennes régionales et même internationales.

Écoutez l'extrait (2 min 15) :



Le cours d'ECR — « multiculturalisme 101 »


L'Action nationale publie une recension de l'ouvrage d'un des pères du cours d'ECR, Georges Leroux, Éthique, culture religieuse, dialogue. Arguments pour un programme.

Quelques extraits, les intertitres sont de nous :

Libéraux et péquistes s’apprêtent à faire ce que même le pire des gouvernements libéraux fédéraux n’aura jamais réussi : la « trudeauisation » de nos écoles dans chacun de nos villages et chacune de nos villes du Québec.

Mario Dumont, 15 décembre 2007

Noyé parmi les étagères débordantes des ministères et gommé de jargon technocratique, le nouveau programme scolaire d’éthique et culture religieuse aurait très bien pu passer inaperçu si ce n’était de la tribune offerte par les forums de la commission Bouchard-Taylor aux parents inquiets, et de la récupération habile de leurs revendications par Mario Dumont. Sa demande de moratoire ayant été rejetée par les libéraux et les péquistes, le programme a fait son entrée dans nos écoles en septembre 2008. Heureusement pour ceux qui répugnent à lire un document ministériel, l’essai de Georges Leroux, Éthique, culture religieuse, dialogue.Arguments pour un programme résume en une centaine de pages les ancrages idéologiques et les visées pédagogiques de ce programme qui pourrait être rebaptisé « Multiculturalisme 101 ».

L’ouvrage est divisé en deux parties, la première situant le nouveau programme dans le parcours historique de la laïcisation des institutions scolaires et dans le cadre normatif du pluralisme, la seconde abordant le contenu du programme lui-même et les arguments historique et politique justifiant sa mise en œuvre, l’argument politique reprenant la démonstration présentée en première partie voulant qu’il soit nécessaire d’inculquer le pluralisme à nos enfants.

En effet, la première section, intitulée « Accueillir le pluralisme : les défis de la laïcité dans l’école », est essentiellement un plaidoyer en faveur du pluralisme et de son enseignement. À maintes reprises, il est question des «  exigences de la diversité  », comme si le fait que le Québec accueille des immigrants venus des quatre coins du globe avait pour conséquence nécessaire l’adhésion au multiculturalisme. Il s’agit alors de «tenir compte du pluralisme de fait qui caractérise la société », ce qui implique que sa « jeunesse  » soit « éduquée à la richesse de ce pluralisme et à ses exigences ».

Point de départ du raisonnement de Leroux contestable

Le point de départ du raisonnement, la diversité religieuse de la société québécoise, est en soi contestable. Au recensement de 2001, 83 % de la population du Québec se déclarait catholique. La saga Hérouxville nous a également rappelé que la diversité religieuse est à peu près absente à l’extérieur du Montréal multiculturel. Toutefois, le problème ne réside pas tant dans cette affirmation de l’auteur que dans les conclusions qu’il en tire, soit, dans un premier lieu, que le pluralisme de fait appelle une adhésion au pluralisme normatif et, dans un second lieu, que cette idéologie doive être inculquée à l’école.

Dernière utopie fataliste des bien-pensants

Selon Leroux, « la société québécoise commence à peine à comprendre qu’elle doit faire le deuil de son ancienne unanimité : elle découvre la richesse de la différence, mais aussi les exigences de la diversité et de la liberté  ». Il y aurait ainsi un processus inéluctable allant de la diversité à sa célébration, en passant par son enseignement, cette conversion des masses impliquant une prise de conscience graduelle de la richesse que représente toute diversité, ce que Taguieff a si justement qualifié de « dernière utopie fataliste des bien-pensants ».

Idéologie qui s'auto-justifie par ce qu'elle produit

Or, pour emprunter au langage constructiviste, le pluralisme ne découle pas de la diversité, mais au contraire, il la « produit » en créant des identités ethniques à l’intérieur de la nation qui devient alors strictement civique. La fatalité décrite par Leroux n’est que pure idéologie, et c’est cette idéologie qu’il propose d’enseigner à nos enfants.

Le pluralisme normatif s'imposerait même dans une société homogène...

Leroux l’admet d’ailleurs dans un passage qui vient contredire ses affirmations répétées sur les « exigences » de la diversité. Le pluralisme normatif, qui était au départ une conséquence naturelle du pluralisme de fait devient plus tard une exigence de la modernité  : « Notre société demeurerait homogène sur le plan des convictions et des croyances que ce principe ne s’en appliquerait pas moins », puisqu’il résulte du « principe fondamental de l’égalité ». Ainsi, « il émerge comme le seul principe capable de régler notre rapport à la diversité  ». Nouvelle argumentation, même fatalisme.

[...]

L'argument historique pour le cours d'ECR

La deuxième section de l’essai, intitulée « Le choix du Québec », entre davantage dans le vif du sujet : le programme d’éthique et culture religieuse. Le
premier argument en sa faveur, qualifié d’historique résiderait dans l’importance de transmettre aux générations futures le savoir moral et religieux qui s’est développé au fil de l’histoire du Québec. Pour reprendre à son compte cet argument généralement invoqué par ceux qui souhaitent conserver l’enseignement religieux catholique, Leroux procède à une réécriture de l’histoire. Ainsi, le Québec serait l’héritier d’un savoir moral marqué par les valeurs d’égalité et de tolérance et d’un savoir religieux issu, bien sûr [selon Leroux] de religions diverses.

S’il s’agit bien de transmettre un « patrimoine », celui-ci ne peut être que pluriel, puisque, aux dires de l’auteur, « tous [l]es aspects moraux et spirituels de l’histoire chrétienne du Québec, nous devons aussitôt les compléter par les aspects qui proviennent de son histoire amérindienne et de son histoire juive, qui représentent les partenaires indissociables d’un récit dont ils ont été trop souvent exclus ».

Substituer à l'histoire nationale celles des différents groupes au Québec

Le contenu historique du cours d’éthique et culture religieuse se veut ainsi au diapason de celui du nouveau cours d’histoire du Québec et du Canada, tous deux ayant passé par le filtre pluraliste qui substitue à l’histoire nationale LES histoires de différents groupes plus ou moins nombreux et de leur cohabitation sur le territoire du Québec.

[Voir Il faut que l'enseignement de l'histoire cesse d'être « une catéchèse du multiculturalisme]

L'argument politique

Quant à l’argument politique, il s’agit d’une traduction dans les termes de la pédagogie issue de la réforme de l’éducation de l’apologie du pluralisme répétée inlassablement par l’auteur.

Le nouveau programme est présenté comme un moyen pour les élèves de développer une « compétence » prescrite par le ministère : celle de « pratiquer le dialogue ».

ECR comme aboutissement de la réforme en éducation

Le programme d’éthique et culture religieuse apparaît alors comme l’aboutissement du projet de la réforme de l’éducation et constitue l’exemple le plus flagrant des dangers qu’elle comporte. On a souvent, et à juste titre, dénoncé le nivellement par le bas qui accompagne l’approche par compétences en raison du rôle secondaire accordé aux savoirs, mais rares sont ceux qui s’en sont pris au contenu des « compétences » elles-mêmes. Avec le programmed’éthique et culture religieuse, on constate que les «compétences» que l’on se propose d’enseigner ne comportent pas uniquement des habiletés,mais également des postures normatives.

Développer la compétence multiculturaliste...

Lorsque l’auteur nous apprend qu’en plus de l’instruction et de la qualification, l’une des missions de l’école primaire et secondaire est de « socialiser dans un monde pluraliste », on comprend ce que signifie la « compétence relative à la pratique du dialogue dans un horizon de vivre-ensemble ». Il s’agit finalement de former de bons petits pluralistes.

Convertir les masses, transformer la société

L’ancrage idéologique du programme ne saurait être plus clair. Leroux l’admet lui-même : ce programme reçoit « de la réforme de l’éducation un cadre normatif et une philosophie de l’éducation avec laquelle il doit apprendre à travailler ». Ce cours, avec celui d’histoire du Québec et du Canada, représente l’aboutissement du projet idéologique de la réforme de l’éducation. Convertir les masses, transformer la société, voilà le rôle que l’on veut voir jouer par l’école.

La fin justifierait les moyens peu démocratiques

À défaut de passer par le processus démocratique pour faire valoir leur point de vue, les pluralistes ont décidé que la fin justifiait les moyens. « L’urgence d’une éthique » se présente comme une réponse aux « dérives extrémistes » qui se manifestent dans la population. Vite !

Sauvons les enfants de l’intolérance de leurs aïeux pendant qu’il en est encore temps ! L’école doit former les esprits à penser selon les termes du multiculturalisme pour s’assurer que les citoyens de demain, contrairement à ceux d’aujourd’hui, accepteront avec enthousiasme les politiques multiculturalistes du Canada. Selon les termes mêmes de Leroux, il faut « reconfigurer un vivre-ensemble fondé sur les principes » du pluralisme normatif, « mettre à la place des anciennes orthodoxies et des anciens pouvoirs un nouvel exercice de la pensée et de la parole ».

Aveu du projet multiculturalisme trudeauiste

C’est sans détour que l’auteur révèle le véritable projet des concepteurs du programme d’éthique et culture religieuse à l’égard du multiculturalisme trudeauiste : « L’école pourrait […] concevoir sa mission comme une responsabilité dans le processus qui fait passer chaque jeune de la constatation du pluralisme de fait à la valorisation du pluralisme normatif ». Aussi déconcertante que puisse apparaître cette affirmation, on ne pourra pas reprocher à Leroux d’avoir dissimulé ses intentions. Les concepteurs de la réforme de l’éducation nous ont répété qu’il fallait non seulement que les enfants apprennent, mais qu’ils « apprennent à apprendre ». On constate, à la lecture de cet ouvrage, qu’il s’agit finalement de leur apprendre comment penser.

Résister à la majorité, les concepteurs d'ECR savent ce qui est bon

La conclusion, intitulée «Enjeux de la réussite pour le programme», consiste en une série de défis qui attendent les défenseurs du nouveau programme, notamment les réticences qu’il suscite. D’une part, les enseignants sont invités à développer « des convictions civiques », c’est-à-dire à accepter de subir eux-mêmes un lavage de cerveau avant d’endoctriner les enfants à leur tour. Quant aux parents, il s’agit tout simplement de les bâillonner, le programme devant « se situer à bonne distance […] des seules exigences de la majorité » et résister à « la poussée de facteurs qui, comme la mondialisation, l’économisme et, en général, la promotion des modèles de l’individu triomphant, contaminent de l’extérieur le projet contemporain de l’éducation ». En dépit des objections fusant de toutes parts, les promoteurs du projet éducatif multiculturaliste gardent le cap sur leurs objectifs. Eux savent ce qui est bon pour nos enfants !

Conflits familiaux en vue avec des jeunes reprogrammés

On peut s’inquiéter de l’impact qu’un tel programme aura sur les enfants qui recevront à l’école une éducation radicalement différente de celle qu’ils recevront à la maison, la première ayant tendance à délégitimer la seconde. Ils apprendront que leurs parents sont des intolérants, qu’ils manquent d’ouverture d’esprit, qu’ils s’accrochent à une vision dépassée du Québec. Et ils finiront bien par y croire.

jeudi 12 février 2009

Répit pour les parents objecteurs de conscience de Granby

Communiqué de la Coalition pour la liberté en éducation :
Le 12 février 2009 - La Cour supérieure du district de Bedford a rendu hier une ordonnance de sauvegarde en faveur des six parents de Granby dont les enfants ont été récemment suspendus. La Cour a ordonné à la Commission scolaire du Val-des-Cerfs et à l'école secondaire Joseph-Hermas-Leclerc de n’imposer aucune sanction disciplinaire aux élèves qui ne fréquentent pas le cours d'ÉCR d’ici au 4 mars prochain, date à laquelle le dossier reviendra à la Cour.

Cette décision soulage les parents concernés. Un des enfants va atteindre lundi prochain le nombre de 35 absences non motivées du cours ECR, ce qui l’expose à une demande de renvoi définitif de l’école. L’ordonnance de la Cour écarte pour le moment ce danger.

« Je suis agréablement surpris », a déclaré Me Jean-Yves Côté, qui représente les familles concernées. « Nous étions en cour hier concernant un désaccord procédural sur l’échéancier de la cause. La Cour a renvoyé les avocats faire leurs devoirs et a préféré rendre immédiatement une ordonnance pour protéger les enfants. Le Tribunal a fait passer l’intérêt des enfants avant les disputes procédurales d’avocats. C’est sage ; mes clients en sont rassurés. »

Le Tribunal ordonne en outre aux parents de retirer physiquement leur enfant de l’école pendant la durée du cours ECR. S’ils ne sont pas en mesure de le faire personnellement, les parents devront identifier à l’avance, auprès de l’école, le mandataire qui exercera ce retrait en leur nom.

Le Tribunal se trouve ainsi à préciser les modalités d’exercice du « droit de retrait » des parents : s’ils ne sont pas en mesure de l’exercer personnellement, ils peuvent désigner un autre adulte responsable qui retirera leur enfant de l’école pendant la durée du cours ECR.

Rappelons que même si le cours d’ÉCR n’est pas nécessaire pour l’obtention du diplôme de fin d’année, par les récentes suspensions d’élèves, les directions d’école les privaient de leurs cours de français, de mathématiques et de sciences physiques, ces cours étant quant à eux sujets à sanction des études.

Pour Diane Gagné, mère d’un des enfants suspendus, « cette décision nous donne raison en plaçant le bien des enfants avant celui des technocrates de l’État et du Ministère de l’Éducation. »

Selon les parents demandeurs, l’école J.-H.-Leclerc a outrepassé ses pouvoirs légitimes, causant un « préjudice grave » aux élèves – au sens de l’article 222 de la Loi sur l’instruction publique –, et niant la liberté de conscience et de religion proclamée par les Chartes canadienne et québécoise.

Selon cette demande d’injonction, la Commission scolaire du Val-des-Cerfs doit suspendre l’exécution des sanctions à encourir en vertu du Code de vie de l’école, pour absences prétendument non motivées au cours d’ÉCR. La Coalition pour la liberté en éducation s’est donnée comme mission d’informer les parents sur leurs droits face au caractère obligatoire du cours d’éthique et de culture religieuse.

Le professeur Gary Caldwell sur l'école, la culture commune, le vivre-ensemble

Trois vidéos où le sociologue Gary Caldwell s'exprime sur plusieurs thèmes reliés à l'école et le cours d'éthique et de culture religieuse :
  1. les aspects positifs du cours d'ECR ;
  2. les aspects négatifs du cours d'ECR ;
  3. le cours d'ECR est-il relativiste ?
  4. on dit que le cours d'ECR est neutre ;
  5. à qui appartient l'école ?
  6. l'État n'a-t-il pas le droit de favoriser la cohésion sociale de la société ?
  7. la diversité croissante du Québec ne justifie-t-elle pas l'imposition de ce cours ?
  8. que penser de la volonté de créer une culture commune publique ?
  9. qu'en est-il du vivre-ensemble actuel ?
  10. le cours d'ECR va-t-il favoriser la transmission de la foi ?