mercredi 7 décembre 2022

La religion, un tabou chez les Québécois ?

Une étude menée par une équipe de chercheurs canadiens, La Pluralité religieuse au Québec, a été publiée début décembre. Le résultat de dix ans de recherches et de terrain, qui laisse entrevoir un certain tabou dans les pratiques religieuses des Québécois.

Bon nombre de Québécois auraient des « réticences à parler du religieux, même avec leurs proches » : c’est l’une des conclusions de l’étude sur « La pluralité religieuse au Québec », publiée début décembre aux Presses de l’université de Montréal. Mené par une équipe de chercheurs, ce travail se veut être « une synthèse lisible et concise de la diversité des croyances actuelles de la province ». Sur une période de plus de dix ans, ils se sont ainsi penchés sur 230 groupes religieux ou spirituels répartis dans plusieurs régions du Québec.

Parmi les principaux constats de cette étude, celui d’un certain « tabou » des Québécois à l’égard de leur pratique religieuse. « Nous avons été frappés par la grande discrétion que nos répondants issus de la majorité sociale au Québec affichaient à l’endroit de leurs pratiques et de leurs croyances religieuses », observent les chercheurs.

Autocensure

Comment expliquer cette autocensure ? « Les gens sont d’une très grande discrétion par peur soit de provoquer des chicanes, soit d’être tournés en ridicule ou de scandaliser », rapporte l’anthropologue Deirdre Meintel, qui a dirigé cette étude, citée par le quotidien Le Devoir. Par ailleurs, « la visibilité de certains lieux de culte évangéliques et pentecôtistes a fait l’objet de conflits dans certains quartiers », au même titre que le port de certains signes religieux, tel que le voile musulman.

Et ce alors que les lieux de culte évangéliques et musulmans se sont multipliés dans la province. Par exemple, dans les années 1970, « les grandes Églises protestantes (anglicane, unie, presbytérienne) ont fait de nombreuses conversions chez les Québécois francophones, mais vingt ans plus tard, elles en avaient perdu 90 %, dont probablement la majorité a été récupérée par les Églises évangéliques ».

Des immigrants plus pieux ?

Religion majoritaire et autorité prépondérante jusque dans les années 1960, l’Église catholique connaît aujourd’hui une vague de fermeture de ses édifices et un déclin progressif du nombre de ses fidèles. En outre, détaillant la diversité religieuse présente au Québec, l’étude note un intérêt de la population pour d’autres formes de spiritualité, tels que le druidisme ou le néo-chamanisme.

Les chercheurs s’attachent à déconstruire des préjugés concernant le religieux dans la province canadienne, comme celui que « les Québécois sont généralement présentés comme peu religieux et les immigrants comme l’étant beaucoup plus ». Or, « les immigrants se déclarent plus fréquemment “sans religion” que les personnes nées au Québec, soit 15 % contre 12 % ».

Au sujet de l’immigration, les instances religieuses restent toutefois des outils d’intégration privilégiés, rappelle l’étude : « Les groupes religieux offrent ainsi à leurs membres l’aide dont ils ont besoin pour s’adapter à la nouvelle société. » Cette dimension d’inclusion se manifeste en particulier dans le cadre de l’aide des prétendus mineurs isolés.

Voir aussi 

Des cours de « médium » au cégep

L'éducation religieuse remplacée par l’« animation spirituelle » dans les écoles publiques québécoises 

« Animation spirituelle et ECR » : deux piliers du multiculturalisme à l'école québécoise  

Cérémonie, prière, danse sacrées dans une école laïque publique 

Spiritualité autochtone, écologie et norme universelle moderne

Chasser la religion et la remplacer par la spiritualité (suite)

L'animation de la vie spirituelle et d’engagement communautaire dans les écoles québécoises

Sortir le religieux de l'école pour y laisser entrer l'ésotérisme et les gourous (2012)

Scène de classe en ECR : ambivalence, ambivalence ?

Trois ans d'ECR, son relativisme, ses cérémonies chamaniques, les parents réduits au silence

4.1 — « L’enfant a refusé de méditer et de laisser entrer un animal en lui »

« Hare Krishna ! Hare Krishna ! » en visite au cours d'ECR
 

« Nos ancêtres, les Amérindiens »

 
 


Aucun commentaire: