mercredi 7 décembre 2022

La santé des jeunes élèves au Québec se dégrade de façon « alarmante »

Des chercheurs de l’Université de Sherbrooke se sont penchés sur la santé cardiométabolique des jeunes élèves au Québec. Ils observent une baisse importante des capacités physiques des enfants et adolescents de 6 à 17 ans.

De 2012 à 2017, le chercheur Mario Leone et son équipe se sont rendus dans six villes du Québec, soit Montréal, Québec, Laval, Trois-Rivières, Sherbrooke et Saguenay, pour soumettre 3700 jeunes au test Léger navette, mieux connu sous le nom du test du BIP.

Selon l’étude, les adolescents pèsent en moyenne environ 7 kg de plus qu’en 1982, mais leur taille moyenne n’a pas changé en 40 ans. Notons que l’origine ethnique des enfants a fortement changé : près de 50 % des enfants à Montréal sont désormais immigrés ou issus de l’immigration. Il est donc possible que la taille des jeunes blancs au Québec ait bien augmenté en 40 ans, mais que la moyenne soit demeurée inchangée par l’afflux d’immigrés, notamment Asiatiques ou latinos, plus petits.

Ce test consiste à faire courir les participants sur une distance de 20 mètres, à répétition, à un rythme qui augmente chaque minute. L’inventeur de ce test reconnu mondialement, Luc Léger l’avait fait passer aux enfants du primaire et du secondaire en 1982.

Il est aussi coauteur de l’étude qui sera publiée dans la revue scientifique Frontiers in Public Health.

« On est retournés faire passer le test de la même façon, dans les mêmes villes, pour les mêmes groupes d’âge et je vous dirais même que dans certains cas on s’est probablement pointés dans les mêmes écoles. La situation est catastrophique. On s’en doutait, mais là, on en est certains », lance Mario Leone.


Des jeunes moins résistants à l’effort

Comparativement aux données de 1982, les chercheurs observent une diminution de la capacité VO2 max de 20 % à la fin de l’adolescence et une diminution de 30 % de la capacité fonctionnelle, c’est-à-dire la capacité d’effectuer une activité d’intensité modérée à intense.

« Ça a diminué de telle sorte que chez les garçons, à 17 ans, tu as 58 % des jeunes qui ont un niveau qui les expose à des problèmes de santé. Chez les filles, c’est encore pire. C’est 70 % des filles qui, à 17 ans, sont exposées à développer des problèmes cardiométaboliques importants dans les années à venir », a affirmé le Dr Mario Leone en entrevue à l’émission Première heure, diffusée sur ICI PREMIÈRE.

Les résultats de la recherche démontrent également que 20 % des garçons et 30 % des filles ont réussi deux paliers ou moins lors du test, ce qui correspond à un effort faible à modéré pendant deux minutes. Et 10 % du groupe est tout simplement incapable de réussir un seul palier.
 

Des effets sur le réseau de la santé

Mario Leone s’inquiète pour la santé des jeunes, mais aussi pour les répercussions que cette dégradation aura sur le système de santé dans les années à venir.

« On regarde beaucoup en avant chez les personnes âgées en se disant : “la population vieillit, ça va coûter plus cher”. Il faut aussi regarder ce qui s’en vient. Ce sont des jeunes qui vont devoir avoir des traitements pendant les 50, 60, 70 prochaines années », estime le professeur associé à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke.

La recherche s’est aussi intéressée au poids, à la taille et à l’indice de masse corporelle des participants. Elle a permis de constater que les adolescents pèsent en moyenne environ 7 kg de plus qu’en 1982, mais que leur taille moyenne n’a pas changé.

« Aujourd’hui, on note chez des jeunes de 8, 9, 10 ans, des cas de diabète de type 2 de façon assez régulière, alors que ce n’était pas le cas dans les années 1980. On voit des adolescents qui ont des problèmes d’hypertension artérielle », illustre Mario Leone.

Au banc des accusés, l’augmentation de la sédentarité

« On sait très bien que depuis l’avènement des ordinateurs, des téléphones cellulaires, des jeux vidéo, le nombre de minutes et d’heures dédiées à des activités sédentaires a augmenté de façon exponentielle. Le temps que les jeunes passaient dehors ou dans des activités physiques est maintenant investi dans la sédentarité », se désole Mario Leone.

Le temps passé devant les écrans est sans doute en cause, mais il faut aussi, selon lui, prendre en compte le contexte socio-économique pour expliquer cette tendance.


Une des solutions : ajouter des heures d’éducation physique

Mario Leone estime tout de même qu’il est possible de renverser la vapeur. Il propose notamment d’ajouter des heures d’éducation physique au primaire et au secondaire. Sans augmenter le nombre d’heures à l’école. En coupant dans quelles matières ?

Il faut aussi, selon lui, « se doter d’outils de surveillance qui permettent d’enquêter sur la condition physique des jeunes plus souvent qu’aux 40 ans », dit-il.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

"Sédentarité" : bien sûr ce vient de sedere, mais on emploie sédentaire par opposition à nomade, or aujourd'hui on est bien plus nomade qu'autrefois.

L'aberration de l'école maternelle (qui sans rien apprendre inculque l'immobilité prolongée, si peu naturelle aux enfants) et la télé (encore bien pire) devraient être sur la sellette.