jeudi 13 mai 2021

Le théologien Guilbeault s'embrouille dans sa volonté de bannir « la haine » de l'internet

(Ottawa) Alors qu’à Ottawa, les conservateurs continuent de s’opposer au projet de loi C-10, les élus à Québec ont adopté sans tambour ni trompette une motion unanime (le Québec en est un spécialiste) affirmant l’appui de l’Assemblée nationale aux mesures proposées par cette réforme de la Loi sur la radiodiffusion, mais apparemment uniquement parce que ce projet protégera le contenu québécois (francophone) sans mentionner de réserves sur les aspects liberticides potentiels de ce projet de loi.

Dimanche, Guilbeault a déclaré dans une interview à CTV que le projet de loi conférerait au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) le pouvoir de règlementer  les comptes YouTube qui rapportent de l’argent ou qui comptent des millions de téléspectateurs. Il est revenu sur cette déclaration à CTV que ce n’était pas le cas et qu’il s’était exprimait de façon « peu claire » lors de l’entrevue. Alors que le projet de loi, qui octroie au CRTC le pouvoir de réguler le contenu canadien sur des plateformes numériques comme Netflix, a été déposé en novembre, la controverse sur son impact sur la liberté d’expression n’est apparue qu’il y a seulement quelques semaines. C’est alors que le gouvernement a supprimé un amendement qui exemptait auparavant de la réglementation du CRTC le contenu produit par des particuliers.

En réponse à ces menaces, Jordan Peterson qui a près de 3,7 millions d’abonnés sur YouTube (1 million de plus que la CBC) a défié Trudeau de réglementer son compte YouTube :


Ignorant cette controverse importante, la motion, déposée par la députée solidaire Catherine Dorion, invitait l’Assemblée nationale à rappeler « que la production culturelle québécoise et sa spécificité sont menacées par l’absence d’encadrement des grandes plateformes de contenu en ligne comme Netflix ou Spotify ».

Elle visait aussi à reconnaître que « l’actuel projet de loi C-10 […] constitue une avancée significative pour la protection et la promotion de la culture québécoise et que, par conséquent [l’Assemblée nationale] affirme son appui aux mesures proposées par ce projet de loi ».

Enfin, elle exigeait que le gouvernement canadien réglemente les plateformes numériques de façon stricte et de façon à assurer « une large part » de contenu francophone. 

Québec solidaire a fait envoyer par le président de l’Assemblée nationale du Québec le texte de la motion au ministre du Patrimoine canadien, Steven Guilbeault, ainsi qu’à tous les chefs de partis d’opposition fédéraux. L’appui des 125 élus québécois s’ajoute à la liste grandissante des acteurs des milieux culturels et des communications qui se mobilisent en faveur de l’adoption du projet de loi C-10 qui cause la controverse à Ottawa depuis plusieurs jours et qui embarrasse le ministre Guilbeault.

Transcription du « débat » parlementaire :

Reconnaître que le projet de loi fédérale modifiant la Loi sur la radiodiffusion constitue une avancée pour la protection et la promotion de la culture québécoise et affirmer l’appui de l’Assemblée aux mesures proposées par ce projet de loi

Mme Dorion — M. le Président, je demande le consentement de cette Assemblée pour débattre de la motion suivante conjointement avec la ministre de la Culture et des Communications, la députée de l’Acadie, le chef parlementaire du troisième groupe d’opposition et la députée de Marie-Victorin :

« Que l’Assemblée nationale rappelle que la production culturelle québécoise et sa spécificité sont menacées par l’absence d’encadrement des grandes plateformes de contenu en ligne comme Netflix ou Spotify ;

« Qu’elle souligne l’importance des nombreuses représentations faites de longue date par le Québec pour défendre son droit à l’exception culturelle, notamment auprès de l’UNESCO et du gouvernement canadien ;

« Qu’elle reconnaisse que l’actuel projet de loi C-10 déposé à la Chambre des communes, qui vise à assurer une contribution des grandes plateformes en ligne à la production culturelle canadienne et québécoise ainsi qu’une assurance de découvrabilité de ce contenu culturel sur ces plateformes, constitue une avancée significative pour la protection et la promotion de la culture québécoise et que, par conséquent, elle affirme son appui aux mesures proposées par ce projet de loi ;

« Qu’elle exige du gouvernement canadien qu’il réglemente strictement ces plateformes, afin d’assurer une large part de création, de production et de présentation d’émissions originales de langue française pour la protection et la promotion de la culture québécoise et que, par conséquent, elle affirme son appui aux mesures proposées par ce projet de loi ;

« Qu’elle exige du gouvernement canadien qu’il réglemente strictement ces plateformes, afin d’assurer une large part de création, de production et de présentation d’émissions originales de langue française, comme demandé par de nombreux acteurs [du] milieu de la culture et des communications aux Québec ;

« Qu’elle exige du gouvernement fédéral qu’il respecte les compétences législatives et les interventions du Québec dans ce domaine ;

« Que l’Assemblée nationale rappelle l’existence d’un consensus politique historique en faveur du rapatriement au Québec de tous les pouvoirs en matière de culture et de communications et de tous les budgets fédéraux en culture et communications selon la proportion historique du Québec et qu’elle demande au gouvernement du Québec de travailler en ce sens. »

Le Président — Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion ?

M. Jolin-Barrette — Consentement, sans débat, M. le Président.

(Mise aux voix)

Le Président — Consentement, sans débat. Je vous demande vos votes respectifs. M. le leader du deuxième groupe d’opposition ?

M. Nadeau-Dubois — Pour.

Le Président — M. le leader du gouvernement ?

M. Jolin-Barrette — Pour.

Le Président — M. le leader de l’opposition officielle ?

M. Fortin — Pour.

Le Président — M. le leader du troisième groupe d’opposition ?

M. Ouellet — Pour.

Le Président — Mme la députée de Marie-Victorin ?

Mme Fournier — Pour.

Le Président — Cette motion est donc adoptée. M. le leader du deuxième groupe d’opposition.

M. Nadeau-Dubois — Oui, merci, M. le Président. Je vous demanderais de faire parvenir une copie de cette motion d’abord au ministre du Patrimoine canadien, M. Steven Guilbeault, ainsi qu’aux chefs des différentes formations politiques représentées à la Chambre des communes du Canada.

Le Président — Et ce sera fait. M. le chef du troisième groupe d’opposition.

 


Steven Guilbeault, le Ministre du Patrimoine canadien, a effectué des études en morale internationale et en théologie de la libération. Il a depuis de nombreuses années taillé ses longs cheveux, qui lui ont longtemps valu le surnom de « Jésus ». Il a été très influencé par un oncle missionnaire à Haïti, dont il avait pensé suivre les traces et à cause de qui ses parents ont adopté l’une de ses deux sœurs, d’origine haïtienne. C’est d’ailleurs ce qui l’a poussé à s’inscrire en sciences religieuses à l’Université de Montréal, au milieu des années 1990. Il abandonna cependant rapidement l’idée de devenir missionnaire religieux. Il a, toutefois, gardé une fibre moralisatrice de gauche, de prophète écologiste et de missionnaire du correctivisme politique.

Voilà donc que le ministre du Patrimoine présentera le tout premier projet de loi sur le contrôle d’Internet (C-10) à être déposé au Parlement fédéral canadien dans les « prochaines semaines », a-t-il révélé lors d’une vidéoconférence.

« Mon travail consiste à assurer la sûreté et la sécurité de la population canadienne », a déclaré le ministre. Nous croyions naïvement qu’il s’agissait de promouvoir le patrimoine canadien comme la production artistique en langue française, de conserver les libertés ancestrales des citoyens, de les protéger de la censure arbitraire des monopoles du BigTech.

Guilbeault a révélé que le projet de loi qui sera déposé sera la première étape dans la création d’un « environnement plus sûr pour toutes les personnes en ligne et pas seulement pour une poignée de gens ». Le projet de loi réglementerait le contenu blessant au-delà de ce qui est déjà réprimé par le Code criminel, selon Blacklock’s Reporter.

« Avec le projet de loi que nous déposerons, peu importe que l’entreprise soit canadienne ou non », a déclaré Guilbeault. Peu importe où l’entreprise est enregistrée ou où se trouvent leurs serveurs.

« Une fois qu’une publication sera signalée, elle devra être retirée dans les 24 heures suivant son signalement », a-t-il déclaré. « Il n’y a pas beaucoup de pays qui le font actuellement. »

« Je pense que ce sera un très bon remède à un certain nombre de problèmes, mais cela ne résoudra pas tout », de dire M. Guilbeault.

Guilbeault a déclaré que le discours de haine fera « certainement » partie du projet de loi déposé, ainsi que d’autres « préjudices en ligne ».

Le respect des ordonnances de suppression des propos « haineux » sera contrôlé par un organisme de réglementation nouvellement créé. Les entreprises informatiques qui ne censureront pas les messages qui déplaisent au gouvernement s’exposeront à des sanctions financières, selon un rapport publié par iPolitics.

Le ministre Guilbeault a tourné en dérision la liberté actuelle d’Internet la décrivant comme « un cauchemar » pour beaucoup de gens, forçant certains à « se retirer de ce débat public parce que les conditions dans lesquelles nous leur demandons de participer ne sont tout simplement pas durables ». Il n’a fourni aucun exemple précis ou explicatif.

« Nous savons qu’il s’agit d’une minorité d’acteurs, mais une minorité très organisée, très forte, et quelque chose doit être fait », a-t-il déclaré de manière cryptique.

Tout en évoquant la censure des commentaires « blessants » en ligne, Guilbeault n’a pas divulgué plus de détails sur les tenants et aboutissants de la nouvelle législation. Il s’est contenté de commentaires vagues et généraux sur la sauvegarde des « valeurs fondamentales partagées par les Canadiens », notamment « la démocratie, une gouvernance inclusive et responsable, un pluralisme pacifique et le respect de la diversité et des droits de la personne ». Le respect de « la diversité », l’euphémisme pour désigner l’imposition de l’idéologie diversitaire, voire woke.

Guilbeault a admis que le gouvernement n’a pas tenu « de consultation publique » sur les détails du projet de loi. « Cela étant dit, il est évident qu’une fois le projet de loi déposé, il y aura d’autres consultations par un comité parlementaire, et une fois le projet de loi adopté — et j’en suis convaincu — il y aura d’autres consultations.

« Les gens verront ce que contiendra le projet de loi une fois qu’il sera déposé », a-t-il commenté.

Pourquoi encore renforcer la réglementation sur la haine alors que le Canada a déjà des lois sur le discours haineux depuis au moins 1970 ?

Pour le directeur des campagnes Coalition pour la vie, David Cooke, « discours de haine en ligne » est un terme utilisé par le Parti libéral pour attaquer et dénigrer tout discours qui ne correspondrait pas aux valeurs « non canadiennes » de la gauche. « Si M. Guilbeault arrive à ses fins, ce qui était naguère des canaux de communication libres et ouverts — où les idées pouvaient être échangées et où les différences étaient diffusées — deviendra le porte-voix de la propagande gouvernementale », d’ajouter David Cooke. Il s’agirait de reprendre en mains les moyens de communication qui échappent au contrôle du gouvernement depuis l’avènement de l’internet.

Pour Mark Buell, vice-président pour l’Amérique du Nord à l’Internet Society, le véritable défi est plutôt l’« environnement politique qui a permis aux géants de la technologie de devenir si puissants. Le plan de Guilbeault ne résout pas ce problème et pourrait, par inadvertance, renforcer ces mêmes entreprises, qui ont à la fois l’argent et les ressources nécessaires pour se conformer à toutes les exigences réglementaires, contrairement à leurs plus petits concurrents. Cela consoliderait la position dominante de Big Tech et empêcherait de nouveaux joueurs — y compris des jeunes pousses canadiennes innovantes — de les concurrencer. » 

On ne voit pas en quoi cela serait dans l’intérêt de l’économie canadienne, des Canadiens et du Patrimoine que M. Guilbeault devrait préserver.

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