lundi 28 avril 2014

« L’anglais exclusif en 6e année : une improvisation irresponsable »

Lettre ouverte du 25 mars dernier de Charles Castonguay, professeur retraité de mathématiques à l’Université d’Ottawa.

« Quelle est la meilleure façon d’enseigner l’anglais au Québec ? Nous semblons incapables de nous appuyer sur des données objectives pour trancher la question. Le discours populiste occupe le haut du pavé et l’envolée idéologique tient lieu de raisonnement.

Quel est, par exemple, l’âge optimal pour commencer l’anglais ? Fort du préjugé populaire en faveur de l’apprentissage précoce d’une deuxième langue et sur la foi de quelques « projets pilotes », le gouvernement Bourassa du début des années 1970 a voulu faire commencer l’anglais dès la 1re année. Il tombait mal. À l’époque, une expérience britannique d’envergure concluait qu’à un nombre égal d’heures d’apprentissage, il valait mieux retarder l’enseignement d’une deuxième langue jusqu’à un âge où l’enfant est le plus en mesure d’en profiter.

On est arrivé à ce résultat en Angleterre en suivant un protocole rigoureux. Des dizaines de milliers de sujets expérimentaux ont commencé le français au début du primaire. À la fin du secondaire, on a comparé leur maîtrise du français à celle de dizaines de milliers de sujets témoins qui l’avaient commencé trois ans plus tard, tout en ayant accumulé autant d’heures de français que les sujets expérimentaux.

Des recherches réalisées dans d’autres pays ont abouti au même constat. La commission Larose a par conséquent recommandé en 2001 de ne commencer l’anglais qu’à la fin du primaire, en l’enseignant de façon concentrée au dernier cycle ainsi qu’au secondaire.

Qu’importe. Attentif au seul préjugé populaire, Jean Charest a jugé que le fruit était mûr. En arrivant au pouvoir en 2003, il impose l’anglais en 1re année partout.

En fin de mandat, il refait le coup. Il décrète en 2011 l’enseignement « intensif » de l’anglais en 6e année dans toutes les écoles.

L’expression est trompeuse. Il s’agit de l’enseignement exclusif de l’anglais — à l’exclusion de toutes les autres matières ! — durant la totalité de la seconde moitié de la dernière année du primaire.

Comme d’habitude, le décret ne s’appuie que sur des « projets pilotes » menés par-ci par-là. Toujours avec le même succès, à en croire la Société pour la promotion de l’enseignement de l’anglais au Québec (SPEAQ), un lobby financé par Patrimoine canadien.

Le gouvernement Marois n’a pas mis fin à cette improvisation. Tout au plus a-t-il ralenti la cadence en renvoyant au conseil d’établissement de chaque école la décision de mettre le plan Charest en œuvre ou non. Sur quoi pourra-t-on fonder cette décision ?

Le gouvernement Marois a aussi confié à l’ENAP le soin d’évaluer l’enseignement exclusif de l’anglais en 6e année. Sur quoi l’ENAP s’appuiera-t-elle ?

Une évaluation adéquate comparerait le niveau atteint en anglais, en français et en mathématiques à la fin du secondaire par des sujets expérimentaux passés par l’anglais exclusif en 6e, avec le niveau atteint par des sujets témoins qui auraient bénéficié d’une augmentation identique mais plus étalée du nombre d’heures d’anglais au dernier cycle du primaire et au secondaire.

Comme celle réalisée en Angleterre, une telle évaluation ne se fait pas en criant lapin. Le rapport de l’ENAP ne pourra donc pas être concluant. Or, le temps presse. S’il devient premier ministre, Philippe Couillard s’est engagé à relancer l’anglais exclusif en 6e.

Cet engagement est-il responsable ? L’électeur est réduit à en juger avec les moyens du bord, soit les données du recensement.

La SPEAQ assure qu’après être passé par l’anglais exclusif, « l’élève s’exprime avec aisance et utilise un vocabulaire et des expressions variés dans une multitude de situations ». Quasiment tous devraient donc pouvoir soutenir une conversation en anglais, c’est-à-dire être bilingues selon le recensement. [Un Québec entièrement bilingue est-ce là la seule mesure de succès, de prospérité ?]

Comme exemple de réussite, la SPEAQ cite à répétition le projet pilote d’anglais « intensif » mené dans la Commission scolaire du Lac-Saint-Jean. La CSLSJ s’est appliquée à répandre cette méthode dans ses écoles primaires dès 2005. Le recensement de 2011 devrait par conséquent révéler un niveau élevé de bilinguisme parmi ses écoliers.

Pas du tout. Il n’a compté que 10 % de bilingues parmi les enfants francophones âgés de 10 à 14 ans dans la CSLSJ.

Peut-être est-ce mieux qu’ailleurs ? Non plus. Dans les trois autres commissions scolaires du Saguenay–Lac-Saint-Jean, où l’enseignement « intensif » de l’anglais était moins répandu, le taux correspondant se situait entre 7 et 11 %. Aucune différence significative avec la CSLSJ.

Le niveau était-il encore plus médiocre auparavant ? Pas davantage. En 2006, le taux de bilinguisme était de 9 % parmi les 10-14 ans dans la CSLSJ. Aucune évolution significative, donc.

Le site de Statistique Canada remonte jusqu’au recensement de 2001 pour les agglomérations urbaines. Celle d’Alma regroupe 63 % de la population de la CSLSJ. Le taux de bilinguisme des 10-14 ans y était de 13 % en 2001, 10 % en 2006 et 11 % en 2011.

En définitive, l’anglais spécialement intensif dans la CSLSJ depuis 2005 n’a rien donné de plus que son enseignement plus habituel offert auparavant ou dans les trois commissions scolaires avoisinantes.

La SPEAQ nous assure encore que « les élèves ayant suivi un cours intensif au primaire ont maintenu un niveau élevé de compétence fonctionnelle en anglais [au secondaire] et tiennent à [le] maintenir en lisant, en regardant la télévision, en cherchant des occasions de parler en anglais, en naviguant sur Internet, et ce, tout en anglais ». [En s'assimilant donc à l'anglosphère ?] Or sur le territoire de la CSLSJ, 29 % des 15-19 ans étaient bilingues en 2011, comparativement à un taux variant entre 28 et 30 % dans les trois commissions scolaires avoisinantes. Le taux dans la CSLSJ était de 28 % en 2006.

Rien ne fait ressortir non plus du rang le degré de bilinguisme en 2011 des jeunes francophones du Saguenay–Lac-Saint-Jean et, en particulier, de la CSLSJ, par comparaison avec les taux correspondants en 2011 dans les autres régions administratives à population très fortement francophone. Bref, une surdose d’anglais au dernier cycle du primaire ne serait qu’un coup d’épée dans l’eau, sans effet durable. [Mais quel effet sur la maîtrise des autres matières qui ne sont plus enseignées comme le français ?]

L’efficacité tant vantée de l’anglais «nbsp;intensif » serait-elle une fumisterie ? Les données de recensement indiquent que oui. Certes, elles ne permettent pas d’évaluer l’effet d’un arrêt de l’enseignement des mathématiques et du français, par exemple, à la fin du primaire, sur le degré d’aisance des élèves dans ces matières l’automne suivant, en arrivant au secondaire. Mais de toute évidence, cet effet ne saurait être positif. »

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L'écart de salaire entre diplômés du secondaire et de l'université diminue

Aller à l'école avec pour gagner plus peut constituer une erreur stratégique, selon une étude de Statistique Canada sur l'écart entre les revenus des jeunes diplômés.

L'étude démontre que les diplômés du secondaire ont rétréci l'écart de salaire horaire qui les sépare des diplômés universitaires. Du moins, c'est le cas pour les cohortes étudiées, soit celles des années 2000-2002 à 2010-2012 au Canada. Cette étude ne prend pas en compte le coût d'obtention du diplôme universitaire (endettement et manque à gagner par rapport aux jeunes qui commencent à travailler dès la fin du secondaire).

Les jeunes diplômés du secondaire, âgés de 20 à 34 ans, ont haussé leur salaire horaire pour le faire passer de 68 % à 75 % de celui gagné par leurs congénères détenteurs d'un baccalauréat.

Les femmes du même âge ont également rétréci cet écart, faisant passer leur salaire horaire de 64 % à 68 % de celui d'une détentrice d'un baccalauréat du même âge au cours de la période.

L'essor du secteur pétrolier des années 2000 et l'augmentation marquée du nombre relatif de titulaires d'un baccalauréat sont notamment responsables du rétrécissement de cet écart dans la rémunération horaire en dépit de l'écart de scolarisation.



L'expansion pétrolière et son impact sur la croissance économique seraient ainsi responsables du cinquième de ce rétrécissement d'écart du salaire horaire entre les deux groupes, selon l'étude. L'embellie de l'industrie pétrolière a davantage fait augmenter la demande pour des travailleurs plus faiblement scolarisés.

Le nombre de jeunes femmes titulaires d'un baccalauréat a augmenté de 42 % pendant que le nombre de titulaires d'un diplôme de niveau secondaire augmentait de 5 %.

Chez les hommes, le nombre de bacheliers a augmenté de 30 % au cours de la même période pendant que le nombre de diplômés du secondaire augmentait de 16 %.

L'étude précise que la forte augmentation de bachelières est responsable de 40 % de la réduction de l'écart des salaires chez les femmes, alors que l'augmentation de ce nombre de diplômés n'a eu que peu d'effet sur la variation de l'écart salarial du côté masculin.


En revanche, la différence des taux d'emploi à temps plein s'est accentuée. La proportion des jeunes bachelières occupant un emploi à temps plein est demeurée autour de 63 % au cours de la période, alors que ce taux est passé de 49 % à 44 % pour les diplômées du secondaire.

Chez les hommes, le taux d'occupation d'un emploi à temps plein est passé de 68 % à 61 % pour les diplômés du secondaire pendant qu'il passait de 72 % à 68 % pour les bacheliers.

L'étude « Salaires et taux d'emploi à temps plein des jeunes titulaires d'un diplôme d'études secondaires et des jeunes titulaires d'un baccalauréat, 1997 à 2012 », s'appuie sur les données de l'Enquête sur la population active des jeunes hommes et femmes de 20 à 34 ans de 1997 à 2012.

Résumé

Trois grandes constatations se dégagent de l’étude.

Premièrement, alors que la hausse des prix mondiaux du pétrole qui a eu lieu pendant la plupart des années 2000 a eu tendance à réduire l’avantage salarial lié aux études chez les jeunes hommes ainsi que chez les jeunes femmes, l’effet des autres facteurs déterminants variait selon le sexe. Les augmentations du salaire minimum réel et de l’offre relative de titulaires d’un baccalauréat ont joué un rôle important pour les jeunes femmes, mais pas pour leurs homologues masculins. Les variations du taux de syndicalisation et de l’importance relative de l’emploi temporaire ont eu une incidence sur l’avantage salarial lié aux études chez les jeunes hommes, mais non chez les jeunes femmes.

Deuxièmement, les variations du salaire minimum réel semblent avoir eu un effet double chez les jeunes femmes. Alors que la hausse du salaire minimum réel était associée à une diminution des écarts salariaux entre les niveaux de scolarité, elle était également associée à un accroissement des différences de taux d’emploi rémunéré à temps plein. Ce résultat met en relief le fait que les changements institutionnels pourraient avoir un effet différentiel sur les résultats des travailleurs, c’est-à-dire qu’ils pourraient modifier la structure de la rémunération et de l’emploi de façons différentes.

Troisièmement, la diminution des écarts salariaux entre les jeunes titulaires d’un baccalauréat et ceux titulaires d’un diplôme d’études secondaires occupant un emploi à temps plein a été compensée par un accroissement des différences de taux d’emploi rémunéré à temps plein entre ces deux groupes. Par conséquent, les différences entre les gains hebdomadaires moyens non conditionnels ou la rémunération annuelle moyenne des jeunes titulaires d’un baccalauréat et de ceux titulaires d’un diplôme d’études secondaires ne présentaient aucune tendance durant la période de référence de l’étude. Cette constatation est importante, car elle enrichit le débat sur l’inégalité des gains entre les titulaires d’un baccalauréat et ceux titulaires d’un diplôme d’études secondaires. Elle montre que, même si l’inégalité de la rémunération annuelle entre les deux groupes ne présentait aucune tendance durant les années 2000, l’inégalité des salaires horaires (ou des salaires hebdomadaires) entre les deux groupes s’est amenuisée en raison de plusieurs facteurs, dont les fluctuations du prix du pétrole, la hausse du salaire minimum réel et les effets de l’offre relative de main-d’œuvre. En résumé, après s’être accentuées de 1980 à 2000, les différences de prix de la main-d’œuvre selon le niveau de scolarité ont effectivement diminué chez les jeunes travailleurs au cours des années 2000.

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Idées fausses sur les différences salariales entre hommes et femmes

Les attentes salariales des étudiants canadiens sont irréalistes

Pourquoi l'université coûte tellement cher aux États-Unis

La bulle universitaire aux États-Unis va-t-elle crever ?

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Recension de Economic Facts and Fallacies de Thomas Sowell

États-Unis — Diplômés et surendettés





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vendredi 25 avril 2014

Priorité du nouveau ministre : renforcer l'immersion en anglais et la médicamentisation ?

Yves Bolduc, nouveau ministre de l'Éducation du Parti libéral du Québec (PLQ), compte aussi « ranimer » le dossier des cours d'anglais intensifs (uniquement) en sixième année du primaire.

Dans un entretien avec Le Soleil, le ministre a déclaré « On est absolument pour. L'orientation, c'est que tous les étudiants de sixième année puissent avoir accès à l'anglais intensif. » Cette « offre » se fera sans doute — comme si souvent au Québec — en rendant la matière à la mode obligatoire :  « Probablement que ça va être ça », avant de préciser qu'il n'a pas encore en main toutes les informations pour prendre une décision définitive.

Pour justifier cette imposition, M. Bolduc dit n'avoir rencontré aucun parent qui voudrait que ses enfants ne connaissent pas l'anglais. Petite remarque démagogique : qui dit que les besoins sont pareils partout ? Faut-il imposer l'anglais à l'école à Montréal pour que les écoliers se débrouillent en anglais ? Quel niveau d'anglais faut-il que les écoliers atteignent ? Des linguistes affirment qu'à même dose d'anglais, l'apprendre au secondaire est plus efficace pourquoi alors l'imposer au primaire à la place des matières de base ? (Déjà que l'emploi du temps est grugé par le cours idéologique cher aux mêmes libéraux d'éthique et de culture religieuse...)

Entretemps, le niveau de lecture en français des écoliers québécois francophones a fortement baissé récemment. Voir ici et ici.

Le ministre compte également s'attaquer au décrochage scolaire durant son prochain mandat. Il croit qu'une piste de solution repose dans la collaboration avec les autres ministères. Par exemple, il estime que si l'on diagnostique un trouble de déficit de l'attention chez un enfant et qu'on le médicamente, l'effet se fera sentir à l'école. Rappelons que, plusieurs mettent en doute la réalité de cette épidémie de trouble de l'attention, que les jeunes écoliers québécois sont déjà parmi les plus « médicamentés » et que ce traitement n'a pas prouvé son efficacité. (Voir ci-dessous.)

Voir aussi

« L’anglais exclusif en 6e année : une improvisation irresponsable »

Recul du français comme langue de travail au Québec et à Montréal

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La déséducation





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jeudi 17 avril 2014

Malaise de l'Occident — Vers une révolution conservatrice ?


Présentation de l'éditeur

L'état de crise générale qui règne aujourd'hui dans la société française, comme l'a révélé, entre autres, l'ampleur sans précédent de la « Manif pour tous », menace aujourd'hui l'universalité même de notre modèle sociopolitique national. Depuis que les trois notions qui fondent nos « valeurs républicaines » - liberté, égalité, fraternité - ont été détournées de leur sens véritable. La « liberté », devenue illimitée, consacre un sujet dominé par son seul ego, l'« égalité" est désormais synonyme d'une abolition de toute différence, fût-elle biologique, et la « fraternité » se réduit à des promiscuités imposées. D'une promesse d'élévation citoyenne passant par l'accession de tous à l'autonomie, les principes des Lumières semblent bien conduire aujourd'hui à la négation même de ce qui définit notre humanité. Comment pareille grandeur humaniste a-t-elle pu dégénérer, en moins de trois siècles, en humanitarisme hygiénique de base ? Ne faut-il pas chercher dans l'échec métapolitique du libéralisme mondialisé la réponse à cette question, qui dépasse de loin la banale scission gauche/droite ? Paul-François Paoli passe au crible les mensonges et les contradictions criantes de la « religion laïque » en convoquant tour à tour dans le débat saint Augustin, Nietzsche, Raymond Boudon ou encore Pierre Manent.

Critique du Figaro

La déroute des socialistes aux municipales illustre en profondeur un changement d’époque. Quels que soient les thèmes abordés, les Français, dans leur majorité, ne pensent plus selon les concepts qui ont fait les succès de la gauche. Une tendance que confirme Paul-François Paoli, essayiste et chroniqueur au Figaro littéraire. Poussant loin la généalogie intellectuelle, l’auteur remonte jusqu’à la Révolution française et à son rêve de régénération de l’humanité, ambition qui, selon Paoli, porte deux cents ans plus tard des fruits mortifères. Liberté ? Devenue un absolu, cette idée dissout le bien commun en autorisant l’individu qui s’en prévaut à ne faire que ce qui lui plaît. Égalité ? Le concept s’est transformé en machine de guerre assignée à la chasse aux différences, y compris celles, anthropologiques, qui distinguent l’homme de la femme. Fraternité ? Qu’en est-il quand le recul du lien national au profit des communautarismes aboutit à édifier des murs entre les hommes qui vivent sur le même territoire ? Dans sa conclusion, prenant le contrepied du relativisme et de la « théologie des droits de l’homme », Paoli plaide pour la nécessité des normes, des frontières et des distinctions, ajoutant que la tradition catholique « paraît la mieux armée pour résister aux mirages subversifs de la postmodernité ». Appelant de ses vœux une « révolution conservatrice », il achève de bousculer le politiquement correct, ce qui confère à cet ouvrage bien sérieux son caractère jubilatoire.


Malaise de l'Occident : Vers une révolution conservatrice ?
par Paul-François Paoli
publié chez Pierre-Guillaume de Roux Éditions
le 20 mars 2014
à Paris,
303 pages.
ISBN-13: 978-2363710840





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mercredi 16 avril 2014

Pauline Marois, la famille et la déconfessionnalisation des écoles

Pauline Marois en des temps plus glorieux
Concert d'éloges aujourd'hui sur la radio et la télévision d'État au sujet de Pauline Marois. On aurait cru assister à de longs éloges funèbres, rien que des points positifs, aucune critique.

Selon la SRC (radio), Mme Marois a beaucoup fait  « pour la famille ». Il vaudrait mieux dire qu’elle a fait beaucoup pour étendre l’influence de l’État dans la sphère familiale : son réseau de garderies extrêmement coûteux vise d’abord à ce que les femmes n’élèvent pas elles-mêmes leurs enfants en bas âge, mais les confient à des tiers payés et surveillés par l’État, pendant que les femmes travaillent à l’extérieur du foyer. Ces garderies n’ont pas eu globalement de vertus positives sur l’instruction des tout-petits, sur leur comportement, ni probablement sur la démographie (voir les liens ci-dessous). Pour certaines familles de la classe moyenne supérieure qui voulaient trouver des places de garderie à bon marché, cette politique a été bénéfique puisqu'elles sont fortement subventionnées par l'ensemble des contribuables. Mais cela s’est accompagné d’un manque de liberté, d'un manque de choix de modèles de gardes (il faut passer par ces garderies homologuées) et une absence inique d’aide pour les familles qui veulent élever elles-mêmes leurs enfants en bas âge. En quoi ces garderies Marois ont-elles donc été positives « pour la famille » québécoise moyenne ? On aurait pu donner l'argent aux parents et leur laisser le choix de garde de leurs enfants. Mais cela n'était sans doute pas assez dirigiste.

Le décrochage scolaire pour Pauline Marois en 1996
Pour ce qui est de la déconfes­sion­na­li­sation du réseau scolaire, nous ne reviendrons pas ici sur les pro­messes reniées de Mme  Marois : les écoles individuelles pourraient rester confessionnelles seules les commissions seraient linguistiques, le cours de religion demeurerait (voir lien ci-dessous), etc.

Nous avons trouvé comique quand Louise Harel a déclaré au micro du 15-18 (radio) à 16 h 46 que la décon­fession­na­lisation a été une très bonne chose, surtout à Montréal, pour y intégrer les enfants d'im­migrants. Le journaliste amorphe de la SRC n’a pas réagi.

Mais cette affirmation résiste-t-elle à l’épreuve des faits ? En quoi une école publique laïciste en français intègre-t-elle mieux les immigrés qu’une école publique catholique ou protestante en français ? Rappelons que les immigrés sont souvent plus religieux que les Québécois de souche... Faut-il rappeler que, dans les pays où des écoles religieuses sont totalement subventionnées, comme la France ou la Belgique, les immigrants s’y inscrivent en masse et la préfèrent à l'école publique « laïque ». Certaines écoles « catholiques » en France ont ainsi 90 % d’élèves musulmans… Pourquoi ? Parce qu’on y respecte plus la religion, la morale traditionnelle, la discipline, parce qu’on n’en a pas évacué Dieu, parce qu’on n'y enseigne pas la théorie du genre, etc.

Voir aussi

Étude sur les garderies qui se paieraient d'elles-mêmes : la multiplication des pains.

« Le Québec, leader en matière de petite enfance ».

Étude Fortin, Godbout sur les garderies : « étude loufoque », système injuste, Ottawa premier gagnant

Les CPE ont échoué sur le plan pédagogique... comportemental et démographique

Maternelle publique et gratuite : sans effet sur les résultats au primaire

Pauline Marois embobine Guy A. Lepage sur le dossier des CPE

Comment Pauline Marois modifie une constitution... et une charte

Selon les secteurs géographiques, les écoles privées catholiques peuvent accueillir jusqu’à 90% de musulmans.

Québec — La popularité des écoles privées et plus particulièrement catholiques augmente.

En Belgique, les élèves musulmans aiment l'école catholique.




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Démographie et déflation


Le chroniqueur financier Marc Fiorentino revient sur les liens entre la démographie.

J'ai toujours été passionné par l'impact de la démographie sur les cycles économiques. Le timing de la crise de 2008 est troublant: c'était le point de basculement des baby boomers vers le papy boom. Et aujourd'hui une des causes de la tendance à la déflation est le vieillissement de la population. Le cas du Japon est une illustration spectaculaire.

Le très vieux Japon

Si le Japon se débat avec la déflation depuis si longtemps c’est aussi du fait de sa population. Pour la troisième année consécutive, la population Japonaise a baissé. 127 millions d’habitants. Avec un taux de natalité et de fertilité parmi les plus faibles du monde. Pour la première fois de son histoire, les seniors de plus de 65 ans ont dépassé le quart de la population ; la population en âge de travailler est au plus bas depuis 32 ans, et il y autant de seniors de plus de 75 ans que de jeunes de moins de 14 ans.

Le reste du monde développe vieillit aussi 

La situation au Japon est certes très spécifique notamment du fait de l’absence d’immigration. Mais les pays développés subissent à des degrés différents une accélération du vieillissement de la population. C’est même le cas en Chine. Et c’est un des facteurs d’explication du cycle de croissance molle dans lequel nous sommes entrés. La déflation pourrait venir du vieillissement de la population.
Voir aussi

Chute record de la population japonaise en 2012


Japon — Les vieux priés de mourir, et vite !

Japon — les adultes consomment désormais plus de couches que les bébés

Japon — malaise démographique





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France — école catholique scrutée par l'État parce qu'elle enseigne la doctrine catholique ?

L'État français a décidé de passer à l'offensive dans ce que l'on nomme « l'affaire du lycée Gerson ».

Le groupe scolaire Gerson sera donc soumis à une inspection, réclamée par le ministre de l'Éducation nationale, le socialiste Benoît Hamon.

Selon le ministère socialiste, l'inspection devra aussi déterminer « dans quelle mesure ce qui relève de l'éducation nationale dans le respect du contrat souscrit avec l'État [...] est respecté ».

Une polémique, suscitée par la mairie socialiste de Paris, agite le lycée catholique sous contrat Gerson, du XVIe arrondissement de Paris. Des enseignants, des élèves et leurs parents s'inquiètent du contenu des enseignements catholiques de ce lycée. En cause, des interventions de l'association Alliance Vita (pro-vie), aux séances de catéchèse, au cours desquelles la position de l'Église catholique de l'avortement est clairement enseignée, à savoir qu'il s'agit d'un meurtre.

Pour l'Alliance Vita, « on dirait que certains souhaitent que le sujet de l’interruption volontaire de grossesse reste tabou. Pourtant, le sujet de l’avortement est un vrai sujet de société qui mérite d’être abordé auprès des jeunes. La prévention de l’IVG des mineures est une préoccupation nationale qui a donné lieu à plusieurs rapports ministériels et parlementaires ces dernières années. Alliance VITA aborde cette réalité sans stigmatiser personne, à partir de son expérience d’écoute et d’accompagnement des femmes et des couples. »

La mairie socialiste de Paris s'en est émue et a publié un communiqué réclamant une inspection de ce lycée trop catholique :

« Le lycée reconnaît avoir fait intervenir sans contrôle, auprès de jeunes élèves, l’association Alliance Vita, proche du mouvement Opus Dei [horresco referens]. Les propos contre la contraception et l’avortement qui auraient été proférés hier par cette association au sein du Lycée ont manifestement pour but de manipuler les consciences des jeunes élèves.

Nous dénonçons fermement ces propos qui soumettent les élèves parisiens à une guerre idéologique d’un autre temps. [...] La Mairie de Paris demeure vigilante quant au respect du droit de chaque adolescente et adolescent d’être informé sur sa sexualité et les moyens de contraception existants, au moyen d’informations validées par les professionnels.

Nous demandons aujourd’hui au Rectorat de diligenter une enquête administrative au sein de ce lycée privé sous contrat, soumis au respect des devoirs et règles républicains, et faire toute la lumière sur les évènements du lundi 14 avril. »

La promotion de l'avortement et de la contraception, gratuits et obligatoires, un « devoir républicain » ?

Aucune plainte des parents ou des enseignants n'est parvenue aux autorités, le ministère réagit sur dénonciation dans la presse et la mairie socialiste de Paris : « Nous n’avons eu aucune remontée des parents ou des professeurs. L’information selon laquelle des familles auraient été heurtées par certains propos nous est parvenue via la presse », dit-on au rectorat de Paris.

Entretemps, l’association Alliance Vita porte plainte pour diffamation :
« Deux membres de l’association ont été accusées anonymement de propos outranciers qu’elles n’ont jamais tenus. Ces termes sont étrangers non seulement au vocabulaire de VITA mais aussi à son état d’esprit et à son approche des questions liées à la vie. VITA dénonce donc fermement le mensonge, et le procédé lâche visant à salir son image et à jeter le discrédit sur son travail ; elle va porter plainte pour diffamation. Les accusations anonymes sont inquiétantes et inacceptables, et VITA souhaite que la lumière soit faite sur ces propos calomnieux. »





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L’essor de l’école privée pour les pauvres en Inde

Un cercle de réflexions, l’India Institute, vient de publier une étude portant sur la scolarisation des enfants dans la région du Bihar, une étude de ce type à l’échelle d’un pays aussi peuplé que l’Inde étant sans doute très difficile à réaliser.

L’étude démontre que l’État n’a pas la moindre idée du nombre d’écoles privées actives sur son territoire. Il en dénombrait 350 alors qu’il y en avait 1 574 ! Ce sont des écoles privées à prix modique (low cost private schools) qui prennent en charge essentiellement des classes moyennes et des populations pauvres. L’étude a prouvé que 68 % des parents préfèrent envoyer leurs enfants dans une école privée non subventionnée plutôt qu’à l’école publique pourtant intégralement soutenue par l’État et ouvrant droit à bien des avantages comme un uniforme, la cantine gratuite (parfois une chose dangereuse), un diplôme reconnu et la facilité de réintégrer l'école publique si les revenus de la famille venaient à baisser. Cette situation peut donc surprendre.

Colère des Indiens après l'empoisonnement d'écoliers à l'école publique (Bihar)

L’étude montre que la raison du succès du privé tient au plus faible taux d’absentéisme des professeurs (10 % contre 36 % dans les écoles publiques) et aux plus faibles effectifs (21-26 élèves contre 42 par classe dans le public). Aux tests (et en particulier au test annuel ASER), les écoles privées ont de meilleurs résultats que les écoles publiques.

Face au nombre croissant d’écoles privées, l’État a décidé de faire fermer, par la Loi sur le droit à l’éducation (Right to Education Act), les écoles privées non agréées sous prétexte qu’elles violeraient la législation sur les minima salariaux des professeurs et la taille des terrains de sport… Cette étude affirme qu’il serait immoral de faire fermer les écoles privées, tant que l’État ne peut pas garantir un service public de qualité, car ce serait pénaliser les pauvres.

Pour les auteurs de cette étude réalisée avec l’aide de l’Université de Manchester, la qualité de ces écoles privées non subventionnées vient de leur exposition à la compétition des autres écoles qui les pousse à l’excellence. Inversement, la dégradation de la qualité de l’école publique est née de l’absence de lien entre le paiement du professeur et son implication dans son travail. L’absentéisme des fonctionnaires de l’enseignement n’est pas du tout sanctionné.

Pour sortir l’école publique de l’impasse, l’institut recommande d’instaurer un test national et d’autoriser les écoles privées si les résultats de leurs élèves aux tests sont satisfaisants et que les normes de sécurité minimales sont respectées. Pour eux, la bonne nouvelle, c’est l’implication des parents pauvres dans l’éducation de leurs enfants qui est prouvée par l’essor des écoles privées dans les quartiers pauvres. Elle mérite d’être encouragée, et non pénalisée dans le cadre de leur objectif national de « l’éducation pour tous ».

Consulter le rapport : The Private School Revolution in Bihar, Findings from a survey in Patna urban




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Georges Leroux dans un film dénonçant la « violence policière »

Georges Leroux, un des pères du cours d'Éthique et de culture religieuse (ECR), a participé à un petit documentaire qui dénonce la « violence policière », L'Étau.


Georges Leroux commence à parler à partir de 5:15 min.

L'Étau raconte d'abord la manifestation (déclarée illégale) contre la brutalité policière [organisée par le COBP – Collectif opposé à la brutalité policière] du 15 mars 2014 alors que plus de 450 personnes ont été arrêtées avant même que le cortège ne se mette en marche. Puis, il est question de la répression policière de façon plus large et plus spécifiquement depuis 2012, du traitement médiatique qui, « par son silence, la cautionne ainsi que du contexte social et politique actuel ».

Voir aussi

George Leroux : L’État doit viser à déstabiliser les systèmes absolutistes de croyance des parents.

« Georges Leroux est mon gourou », déclare le directeur de la fédération des écoles privées au sujet d'ECR.

Georges Leroux – le pluraliste jacobin (1 sur 2).

Georges Leroux – le pluraliste messianique (2 sur 2).





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Orthographe rectifiée en français acceptée au primaire par le Ministère de l'Éducation

Dans les écoles du Québec, l’orthographe d’au moins 3000 mots fréquents doit être acquise à la fin du primaire. Le monopole de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) offre maintenant aux enseignantes et aux enseignants une liste de référence.

Dans cette liste, la nouvelle orthographe est donnée avec la mention « OR » (orthographe rectifiée) pour chaque mot touché.

Par exemple, on trouve dans la liste du ministère :
apparaître / apparaitreOR

asseoir / assoirOR

brûlure / brulureOR

événement / évènementOR

L’orthographe rectifiée est donc acceptée par le ministère (MELS).

En effet, vous constaterez que l’orthographe traditionnelle et l’orthographe moderne sont placées sur un pied d’égalité dans la liste. Il s’agit de deux variantes permises pour un même mot, comme déjà on avait clé / clef, ou encore cuillère / cuiller.


Présentation de la liste orthographique du MELS :
https://www7.mels.gouv.qc.ca/DC/liste_orthographique/index.php.


Liste complète en ligne :
 https://www7.mels.gouv.qc.ca/DC/liste_orthographique/index.php?page=ensemble


Interface Web avec possibilité de tris :
http://www.franqus.ca/MELS/liste_orthographique/outil_de_recherche/

Accès à la version PDF :
http://www.mels.gouv.qc.ca/references/publications/resultats-de-la-recherche/detail/article/liste-orthographique-a-lusage-des-enseignantes-et-des-enseignants/




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