jeudi 19 août 2021

Sixième rapport du GIEC : et si on passait à autre chose, l'adaptation

Texte Benoît Rittaud dont le dernier ouvrage est  Geocratia, Éditions du Toucan. Âgé de 45 ans, normalien et agrégé, Benoît Rittaud est mathématicien. Auteur de plusieurs livres remarqués, dont L’Assassin des échecs (Le Pommier, 2004) et Voyage au pays des nombres (Le Pommier, 2007) il étudie depuis de nombreuses années la manière dont la science contribue à forger nos représentations collectives.

Le sixième rapport du GIEC sur l’état climatique de la planète a commencé à être publié. Il a pour écrin ­médiatique les récentes inondations d’ici et les nouveaux ­incendies de là-bas car, comme on le sait, les pluies diluviennes n’existaient pas avant l’invention des 4 x 4 et les feux de forêt étaient inconnus avant les Trente Glorieuses.

Le résumé de 40 pages redit ce que le GIEC répète en boucle depuis longtemps, y compris ses prospectives tout en conditionnels et en probabilités. L’humour involontaire s’y glisse lorsque n’est « pas exclue » l’éventualité que la mer monte de plus de 15 mètres d’ici à 2300. (L’horizon maximal prévisible ­atteint péniblement le dixième, ordre de grandeur comparable à celui du dernier siècle écoulé.) La principale évolution dans le discours est sans doute que doubler la quantité atmosphérique de gaz à effet de serre ferait gagner à la planète entre 2,5 et 4 °C, sans exclure les valeurs entre 2 et 5 °C. Jusque-là, le GIEC disait entre 1,5 et 4,5 °C…

Cette nouvelle bande-annonce ­hollywoodienne sur le thème du déluge et des flammes de l’enfer signale donc l’épuisement de la franchise. On devine le scénario de ce sixième opus dès la ­séquence prégénérique. Les débats vont désigner les ­méchants habituels que sont les multinationales (sans foi ni loi), le consumérisme (débridé), les politiciens (qui ne ­pensent qu’à leur réélection) ou encore la démographie ­(galopante, chez les autres cela va de soi). L’optimisme réglementaire rappellera qu’il n’est pas trop tard pour agir, et que le drame se nouera à Glasgow en novembre lors de la COP26. Tel sera le nouveau rendez-vous de la dernière chance, tout comme Paris l’avait été en 2015.

En attendant, entre alarmistes inquiets et sceptiques de l’apocalypse les lignes resteront les mêmes. Symbole de cette situation figée : un tableau du GIEC indique que l’évolution de la température globale d’ici à 2040 ne dépendra que très peu de l’évolution de nos émissions.

Pour avancer, tournons-nous ailleurs et observons deux informations essentielles apportées par la triste expérience des confinements de 2020. La première : le quasi-arrêt de vastes secteurs économiques à l’échelle mondiale n’a eu aucun effet mesurable sur la courbe du CO2 atmosphérique. Les immenses restrictions que nous avons subies, ­inimaginables il y a moins de deux ans, sont dérisoires en regard des objectifs de réduction des émissions. La ­seconde : le colossal trou d’air économique de l’an dernier est déjà pratiquement surmonté. La sobriété imposée par les événements ne s’est donc nullement révélée un horizon dont le corps social aurait « enfin compris » le caractère prétendument joyeux et désirable.

L’alternative n’est donc pas pour ou contre ce que le consensus factice sur le climat appelle la science, mais pour ou contre le réel. Celui-ci nous invite à prendre acte que l’énormité des exigences des politiques climatiques restera à jamais bien au-delà du seuil de la douleur économiquement et socialement supportable. Une politique raisonnable devrait donc se focaliser sur l’adaptation. Prendre son parapluie et non prétendre arrêter la pluie. Or, le parapluie, c’est le développement. Certes, celui-ci fait souvent de gros dégâts, mais c’est grâce à lui que l’humanité n’a jamais été aussi bien équipée face aux catastrophes naturelles. C’est aussi grâce à lui que les pays les plus vulnérables, qui sont aussi les plus pauvres, réduiront les effets des aléas météorologiques à des ­niveaux acceptables.

Plus concrètement, partisans du développement et alarmistes du climat devraient se retrouver sur certains points tels que le nucléaire, car, même si on l’ignore souvent, les ­centrales nucléaires n’émettent pas de CO2. Enfin, la France devrait rappeler plus souvent qu’à la toise de l’environnement notre pays fait très belle figure. Avant d’exiger quelque chose de nous, la plupart de nos partenaires devraient d’abord balayer devant leur porte.

Ce n’est malheureusement pas le GIEC qui nous le dira. ­Prisonnière de ses discours passés, la bureaucratie climatique semble condamnée aux redites et aux vieilles lunes.

* Dernier livre : Geocratia, 
paru le 7 juillet 2021
aux Éditions du Toucan,
par Benoît Rittaud
Fiction, 416 p., 
10 €.
ISBN : 978-2810009909
 
 
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