vendredi 21 février 2014

L'« art contemporain » et les masses laborieuses

L’« art contemporain » est réservé à une élite. À la galerie Sala Murat, à Bari (dans le Mezzogiorno italien), Anna Macchi, femme de ménage, a jeté à la poubelle des papiers, du carton et des miettes de biscuit… Ils se sont révélés être en fait une œuvre de l’artiste new-yorkais Paul Branca estimée à 14.000 dollars, selon 24 Heures.

Le matin du 19 février 2014, à l’ouverture de la galerie, la sécurité s’était aperçue qu’il manquait des objets. Une enquête a établi qu'il s'agissait d'une erreur commise par la femme de ménage qui, selon l'entreprise qui l'emploie, « ne faisait que son travail ». La dame pensait qu’il s’agissait de détritus abandonnés par les personnes chargées de monter l’exposition.

« Je ne me suis rendu compte de rien », explique-t-elle, en verve, à La Repubblica.

« Je suis allée ouvrir la salle, j’ai vu tout ce capharnaüm au sol, les cartons, les bouteilles de verre au-dessus ses cartons, un vrai foutoir. Alors j’ai pris les cartons, les bouteilles, j’ai tout sorti ».

« Comment j'aurais pu savoir ? Est-ce que je me sens coupable ? Non, j'ai simplement fait mon travail. Mais est-ce que je suis triste ? Triste, oui. »

Il ne s'agit pas du premier incident du genre

Le critique d'art italien Achille Bonito Oliva estime, dans les colonnes de La Republica, qu'il s'agit là « de situations d'ambiguïté saine ». Selon lui, l'art contemporain se sert d'objets déjà existants, extraits de la vie quotidienne. Une installation n'est pas délimitée par un cadre comme c'est le cas pour un tableau, elle déborde.

« Il est donc facile que le regard trébuche et méprenne une œuvre d'art. Cela est arrivé notamment en 1978 à la Biennale de Venise, quand un peintre en bâtiment avait repeint ce qu'il pensait être une simple porte. C'était un chef-d'œuvre de Marcel Duchamp. » Cette détérioration avait valu à la Biennale de devoir rembourser à la galerie le prix de l'œuvre...

D'autres installations ont aussi fait l’objet d’une méprise. En 2011, une femme de ménage, à Dortmund en Allemagne, avait confondu une installation de l'artiste allemand Martin Kippenberger avec une baignoire sale et avait retiré la patine de la baignoire en caoutchouc placée sous des planches en bois empilées.

En Allemagne, encore, en 1986, une « motte de beurre suintante » comme la décrit Le Figaro, de l'artiste allemand Joseph Beuys, dans un musée de Düsseldorf avait aussi été « nettoyée ».

En 2004, un sac-poubelle qui faisait partie d'un œuvre exposée dans la galerie d'art Tate Britain avait été accidentellement jeté par un nettoyeur. Le sac rempli de papier et de carton jeté faisait partie d'une œuvre de Gustav Metzger, il soulignait « l'existence finie » de l'art. Le sac avait été jeté par un nettoyeur à la galerie de Londres, qui avait ensuite récupéré le sac endommagé.

Recréation de Gustave Metzger de la première démonstration publique d'« art autodestructif  elle comprend une « peinture » au nylon endommagée et un sac-poubelle qui servent à représenter la fragilité de l'art.
 

Reconstitution de l’œuvre de Damien Hirst
En octobre 2001, une œuvre de l'artiste britannique Damien Hirst, 35 ans, avait été sauvée de justesse de la benne à ordures après qu'un agent d'entretien eut déblayé le travail de l'artiste, qu'il avait confondu avec un tas de détritus. L'œuvre (créée la veille au terme de la soirée de vernissage) avait été réalisée à partir de bouteilles vides, de cendriers pleins de mégots, de tasses à café sales et autres vieux journaux disposés de façon aléatoire dans un coin de la galerie londonienne Eyestorm. Damien Hirst, lauréat du célèbre prix Turner en 1995. Plaidoyer du fautif: « Pour moi, ça ne ressemble pas vraiment à de l'art, c'est pour ça que j'ai tout mis dans un sac poubelle et que je l'ai jeté ». L'erreur a été réparée en replaçant les objets récupérés conformément à leur disposition, en se référant à des photos.


Ces mésaventures dues à une mauvaise réception de l'art contemporain par des éléments peu éduqués ne sont pas sans rappeler certaines critiques simplistes de l'art contemporain :


L'art contemporain dans le film La Grande Bellezza




Héritier génial de la pensée et de l’œuvre de Stupalacci, Juan Romano Chucalescu nous fait partager sa vision de l'art contemporain sous l'ère mitterrandienne. Vision toujours d'actualité, semble-t-il.






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