L'Estonie, qui compte 1,3 million d'habitants, arrive en tête des pays européens au classement Pisa, et à la quatrième place au niveau mondial. D'excellents résultats qui découlent d'un système très différent du nôtre, comme le détaille Kristina Kallas, ministre de l'Éducation estonienne.
Rentrée des classes à Tallinn (anciennement Réval en français) en Estonie |
L'Estonie arrive en tête du classement, quel est votre secret ?
KRISTINA KALLAS. Tout repose, selon nous, sur le processus d'apprentissage. En Estonie, les écoles comme les enseignants ont beaucoup d'autonomie, à la fois dans leur façon d'enseigner mais aussi dans leur fonctionnement. Ce sont eux qui connaissent le mieux les élèves, et c'est notre force. Le ministre de l'Éducation n'a que très peu de pouvoir de décision. Ce ne sont pas les bureaucrates ou le ministère qui disent comment apprendre les maths aux enfants. Nous ne donnons pas, par exemple, les livres à étudier, ni les programmes à suivre. En revanche, nous avons des attendus très ambitieux sur les compétences que doivent maîtriser les élèves selon leur âge.
Chez vous, pas de réforme de l'enseignement ?
Certains principes n'ont pas changé depuis des décennies, c'est le cas de l'autonomie qui est fondamentale et qui n'a jamais été remise en cause. Les enseignants touchent le salaire moyen estonien, et ils sont très respectés dans la société. Même si cela change, comme ailleurs. Il y a une pression des parents mais nous les impliquons dans l'école pour qu'ils aident les élèves à atteindre les objectifs.
Les mathématiques sont-elles une discipline majeure de l'enseignement ?
En 6e, il y a quatre heures de maths par semaine, et en 5 e et 4 e, c'est plutôt cinq heures. Mais ceci est une moyenne. Encore une fois, chaque collège et chaque enseignant sont libres d'utiliser certaines heures pour d'autres matières, étudier la presse ou faire davantage de mathématiques.
L'école n'est pourtant obligatoire qu'à partir de 7 ans...
Nous sommes le pays d'Europe où l'école obligatoire commence le plus tard, en effet. Mais l'importance n'est pas le nombre d'années que vous passez à l'école, c'est comment vous apprenez. La preuve : à 15 ans, nos élèves ont tout à fait le niveau. Nous sommes aussi l'un des pays où il y a le moins de jours de classe par an : 175 en moyenne. De même, les journées terminent généralement vers 14 heures ou 15 heures. Le nombre d'élèves par classe est limité par la loi à 24 en primaire. Mais il est exceptionnel d'atteindre ce chiffre, cela doit arriver uniquement dans des écoles de la capitale, Tallinn. En moyenne, nous sommes à 18 élèves par classe. Au lycée, les classes sont de maximum 36 élèves, mais la plupart des enseignements se font en demi-groupes. L'une de nos forces, c'est que nous ne faisons pas de groupes de niveau, tous les élèves sont dans la même classe, il y a très peu de séparations des plus faibles qui sont entourés d'élèves qui les stimulent.
Le numérique a-t-il une grande place à l'école ?
Le numérique n'est pas magique, c'est un outil comme un autre. Nous ne parlons pas de marque de tablette mais seulement des compétences que cela peut apporter aux élèves et ce que ça peut apporter en termes d'enseignement aux professeurs. Nous avons commencé à travailler sur les compétences numériques il y a cinq ans, en proposant aux enseignants d'y être formés. Ainsi, quand ils ont dû donner des cours en ligne au moment de la pandémie de Covid, en 2020, ils ont su faire et ils avaient le bagage pédagogique. Il en va de même avec l'intelligence artificielle, elle ne doit pas être bannie de l'école mais il faut voir quels outils pédagogiques elle peut apporter. Cela peut, par exemple, donner le temps au professeur pour faire de la pédagogie individualisée. Je ne crois pas qu'il faille réguler son utilisation mais garder un esprit ouvert sur tout ce que cela peut nous apporter.
Source : Le Parisien
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