Carl Bergeron revient sur les ratés des communicants du Monopole de l'Éducation (ainsi que de Radio-Canada et la mairie de Montréal).
Il y a d’abord eu le cafouillage du programme collégial « Arts et lettres », que les communicants au pouvoir à Québec ont cru nécessaire de rebaptiser « Culture et communication ». Par la voix de leur porte-parole, le ministre de l’Éducation, dépêché dans tous les médias pour défendre l’indéfendable, ils ont laissé dire au peuple que ce changement de nom ne changeait presque rien sur le fond. Très bien. Alors, pourquoi faire l’effort d’un changement de nom ? Un conseiller pédagogique proche du dossier a lâché au Devoir : « Le mot lettres, ça faisait vieilli ». Il s’agissait, en somme, de rafraîchir la « marque » du programme et de la « repositionner » auprès des « jeunes ».
[...]
La bonne nouvelle malgré tout est l’ironie avec laquelle, pour une fois, l’opinion publique a accueilli les manœuvres des communicants, qu’elle ne conteste d’ordinaire à peu près jamais.
La modification du nom du programme « Arts et lettres » a suscité l’indignation et a dessillé les yeux du public sur l’alliance objective entre les communicants et les « pédagogistes », du nom de ces fonctionnaires du ministère de l’Éducation qui fabriquent en coulisses, depuis de trop nombreuses années, les réformes byzantines que l’on sait. Le public a bien compris que le changement de nom n’était pas innocent et dérivait d’un esprit qui s’opposait à la culture, autrement dit aux fondements de l’éducation. D’ailleurs, dans le nouveau programme, on ne parle déjà plus « d’œuvre » mais « d’objet culturel ».
[...]
Éducation, service public d’information et vie politique : trois piliers de la société, où, semble-t-il, le communicant continue d’imposer sa loi. Il n’y a pas de hasard.
Le communicant triomphe au milieu du confort et de l’indifférence. Mais il suffit que la communauté politique traverse une crise profonde et exige de lui de l’intelligence et de la résolution dans les actes pour que son impuissance se dévoile.
Il célèbre l’aura et la beauté de la jeunesse, mais sans consentir à ce qu’elle peut avoir de tragique : sourd à son appel moral profond, il la récupère au profit de l’hédonisme marchand le plus cynique. Il est le prêtre d’une religion civile de bazar qui n’est pas sans rapport avec « la fin de l’Histoire » et un certain matérialisme désenchanté, balisé, d’un côté, par les protections doucereuses de l’État-Providence et, de l’autre, par l’appétit insatiable du capitalisme post-industriel.
Sa psychologie répond à un drôle d’état d’esprit fait de jeunisme, de carriérisme et d’autocensure, composé peu original qui a fini, contre toute raison, par s’imposer comme le symbole du raffinement mondain et médiatique. Dans cet univers, on ne nomme pas les choses, on les embrume ; on ne s’adresse pas au peuple, on parle à des « clientèles » ; on n’a pas des vocations, mais des plans de carrière. On n’y brille qu’à la condition d’être fade.
Or, la société n’est pas qu’un marché à séduire ou une clientèle à flatter. Elle est une communauté de sens à qui il arrive, dans de graves moments de crise, de prendre une soudaine conscience de sa vulnérabilité et de sa valeur. Elle comprend alors d’un seul coup, sans qu’il soit besoin de le lui expliquer, qu’elle ne peut plus se permettre, sous l’influence du communicant : d’enseigner indéfiniment l’ignorance à ses enfants (plus la méconnaissance de l’histoire et de la langue est grande, plus le règne du communicant est fort) ; de sacrifier le nom de ses plus grandes institutions sur l’autel de la publicité ; ou encore, de remettre ses destinées entre les mains de politiciens qui ne savent pas ce qu’ils font.
Elle comprend que le communicant, derrière ses airs de séducteur vaguement inoffensif, est en fait un ennemi public.
Il y a d’abord eu le cafouillage du programme collégial « Arts et lettres », que les communicants au pouvoir à Québec ont cru nécessaire de rebaptiser « Culture et communication ». Par la voix de leur porte-parole, le ministre de l’Éducation, dépêché dans tous les médias pour défendre l’indéfendable, ils ont laissé dire au peuple que ce changement de nom ne changeait presque rien sur le fond. Très bien. Alors, pourquoi faire l’effort d’un changement de nom ? Un conseiller pédagogique proche du dossier a lâché au Devoir : « Le mot lettres, ça faisait vieilli ». Il s’agissait, en somme, de rafraîchir la « marque » du programme et de la « repositionner » auprès des « jeunes ».
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La bonne nouvelle malgré tout est l’ironie avec laquelle, pour une fois, l’opinion publique a accueilli les manœuvres des communicants, qu’elle ne conteste d’ordinaire à peu près jamais.
La modification du nom du programme « Arts et lettres » a suscité l’indignation et a dessillé les yeux du public sur l’alliance objective entre les communicants et les « pédagogistes », du nom de ces fonctionnaires du ministère de l’Éducation qui fabriquent en coulisses, depuis de trop nombreuses années, les réformes byzantines que l’on sait. Le public a bien compris que le changement de nom n’était pas innocent et dérivait d’un esprit qui s’opposait à la culture, autrement dit aux fondements de l’éducation. D’ailleurs, dans le nouveau programme, on ne parle déjà plus « d’œuvre » mais « d’objet culturel ».
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Éducation, service public d’information et vie politique : trois piliers de la société, où, semble-t-il, le communicant continue d’imposer sa loi. Il n’y a pas de hasard.
Le communicant triomphe au milieu du confort et de l’indifférence. Mais il suffit que la communauté politique traverse une crise profonde et exige de lui de l’intelligence et de la résolution dans les actes pour que son impuissance se dévoile.
Il célèbre l’aura et la beauté de la jeunesse, mais sans consentir à ce qu’elle peut avoir de tragique : sourd à son appel moral profond, il la récupère au profit de l’hédonisme marchand le plus cynique. Il est le prêtre d’une religion civile de bazar qui n’est pas sans rapport avec « la fin de l’Histoire » et un certain matérialisme désenchanté, balisé, d’un côté, par les protections doucereuses de l’État-Providence et, de l’autre, par l’appétit insatiable du capitalisme post-industriel.
Sa psychologie répond à un drôle d’état d’esprit fait de jeunisme, de carriérisme et d’autocensure, composé peu original qui a fini, contre toute raison, par s’imposer comme le symbole du raffinement mondain et médiatique. Dans cet univers, on ne nomme pas les choses, on les embrume ; on ne s’adresse pas au peuple, on parle à des « clientèles » ; on n’a pas des vocations, mais des plans de carrière. On n’y brille qu’à la condition d’être fade.
Or, la société n’est pas qu’un marché à séduire ou une clientèle à flatter. Elle est une communauté de sens à qui il arrive, dans de graves moments de crise, de prendre une soudaine conscience de sa vulnérabilité et de sa valeur. Elle comprend alors d’un seul coup, sans qu’il soit besoin de le lui expliquer, qu’elle ne peut plus se permettre, sous l’influence du communicant : d’enseigner indéfiniment l’ignorance à ses enfants (plus la méconnaissance de l’histoire et de la langue est grande, plus le règne du communicant est fort) ; de sacrifier le nom de ses plus grandes institutions sur l’autel de la publicité ; ou encore, de remettre ses destinées entre les mains de politiciens qui ne savent pas ce qu’ils font.
Elle comprend que le communicant, derrière ses airs de séducteur vaguement inoffensif, est en fait un ennemi public.
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