vendredi 12 avril 2019

Le Canada se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète... Est-ce grave ?

Par la plus grande des coïncidences, le 1er avril, la ministre de l’Environnement, Catherine McKenna, a divulgué à Radio-Canada le dernier rapport officiel de son ministère sur les changements climatiques, le jour même de l’imposition du nouveau régime de taxe sur le carbone de son gouvernement dans quatre provinces.

Le Téléjournal de Radio-Canada a claqué des talons, s’est mis au garde-à-vous et s’est fait la caisse de résonance de ce rapport « alarmant ». Céline Galipeau lançait l’émission du lundi soir sur fond de musique menaçante, les basses continues vibrant : « Un rapport alarmant : le réchauffement climatique deux fois plus rapide au Canada qu’ailleurs sur la Planète ». Suivent des images dramatiques de sols asséchés, d'ours polaire esseulé, de falaises glaciaires qui s’effondrent, le tout ponctué de « très préoccupant », « données inquiétantes » ou « dramatique ».


Musique dramatique au début, à la fin on annonce une nouvelle tempête de neige pour la première semaine d'avril 2019...

Selon Radio-Canada, « Le Canada se réchauffe, en moyenne, à un rythme deux fois plus élevé que le reste de la planète, et le nord du pays se réchauffe encore plus rapidement, selon un rapport d’Environnement Canada rendu public lundi. Le document, intitulé Rapport sur les changements climatiques au Canada, indique que, depuis 1948, la température moyenne annuelle sur la terre ferme au Canada s’est réchauffée [sic] de 1,7 °C, les taux étant plus élevés dans le Nord, les Prairies et le nord de la Colombie-Britannique. Dans le nord du Canada, la température moyenne annuelle a augmenté de 2,3 °C. En comparaison, selon la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) des États-Unis, depuis 1948, les températures moyennes mondiales ont augmenté d’environ 0,8 °C. »

L’animatrice Rosemary Barton du National de la CBC a lancé l’émission du lundi soir en augmentant le volume alors qu’elle annonçait le « Rapport sur les changements climatiques au Canada » rédigé par « des scientifiques d’Environnement Canada » en ces termes dramatiques :

« Ce soir, un avertissement terrible pour le climat du Canada. Le pays se réchauffe deux fois plus vite que le reste du monde. Selon pratiquement tous les scientifiques du climat, le changement climatique est déjà là. Les températures ont augmenté et devraient continuer à augmenter avec des conséquences dramatiques et de plus en plus catastrophiques. Et aujourd’hui, nous apprenons qu’au Canada, c’est le double. Un rapport gouvernemental d’Environnement et Changement climatique Canada, fruits d’années de travail, confirme que le Canada se réchauffe deux fois plus vite que le reste du monde. Loin d’être un refuge, le Canada a été en plein en ligne de mire du climat. Et à moins d’actions radicales à l’échelle planétaire, cela continuera. »

Est-ce grave ? Est-ce important ?

Mais est-ce grave ? Est-il si évident qu’il s’agit d’une mauvaise chose ? Et ces chiffres indiquent-ils un événement important ?

Il y a quelques années, le climatologue Lennart Bengtsson déclarait : « Le réchauffement que nous avons connu au cours des 100 dernières années est si minime que si nous n’avions pas eu les météorologues et les climatologues pour le mesurer, nous ne l’aurions pas remarqué du tout. »

Et voilà pourquoi on nous inonde de rapports, de tableaux et de graphiques très précis pour nous informer des changements que nous n’avons pas remarqués.

Qui se souvient de l’été dernier, quand nos chers médias (plus d’un milliard de subventions par an, rien que pour Radio-Canada/CBC) avaient annoncé avec enthousiasme qu’un rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) nous prévenait que le réchauffement de 1,5 degré Celsius (par rapport à l’époque préindustrielle, vers 1880) constituait un seuil catastrophique que nous devions à tout prix ne pas dépasser ? Voilà que nous apprenons maintenant que le Canada s’est réchauffé de 1,7 degré Celsius depuis 1948, nous avons donc allègrement dépassé ce seuil en deux fois moins de temps...

Loin de fuir ce pays devant une telle calamité, les Canadiens et le Québecois se sont enrichis, nous sommes en meilleure santé, vivons plus longtemps et notre niveau de vie a fortement augmenté. Une catastrophe ? Vraiment ?

En outre, dire que le Canada s’est réchauffé deux fois plus vite que la planète ne prouve pas grand-chose. À peu près tous les grands pays de la planète se sont réchauffé plus rapidement que la moyenne mondiale, car les pays sont sur terre, le sol. Or les océans couvrent 70 % de la Terre et le fonctionnement du système fait que, lorsque le climat se réchauffe, les continents se réchauffent plus vite que les océans. Donc, ces manchettes effrayantes ne font que confirmer que le Canada est sur le continent et non une étendue de mer. Ceci dit, il est vrai que le Grand-Nord se réchauffe plus que le Sud du Canada, mais est-ce grave ?

Aucune réserve ? Aucun aspect positif ?

Si la couverture médiatique vous rend anxieux, le meilleur antidote consiste à passer au chapitre quatre du rapport du ministère de l’Environnement et à commencer à le lire. La section sur les changements observés en 1948 est factuelle, centrée sur les données et résolument non alarmiste. Il faut cependant signaler que le rapport a comme dernières données celle de 2016, or 2016 a été une année d’El Niño fort, le résultat final des données est donc artificiellement élevé.

Certaines des cartes rouge vif du rapport auraient probablement un aspect différent si elles étaient arrêtées en 2014, par exemple. Quand les auteurs parlent d’attribuer des changements aux gaz à effet de serre par rapport à la variabilité naturelle, ils n’expliquent pas les incertitudes profondes inhérentes à de tels calculs. Et ils font des projections jusqu’à 2100 sans discuter de la qualité — parfois  médiocre — de leurs modèles de prévisions à long terme. Médiocrité pourtant avérée : les modèles informatiques ont tendance à surchauffer, nous avons maintenant assez de recul pour comparer les prévisions des modèles avec les observations satellitaires.

Le rapport indique à la page 119 qu’« Il y aura de plus en plus de degrés-jours de croissance (une mesure de la saison de croissance, importante pour l’agriculture) et moins de degrés-jours de gel (une mesure de la rigueur de l’hiver), un travail de concert avec le changement de la température moyenne. » Cela semble être deux bonnes nouvelles. Pourquoi les médias n’en ont-ils pas parlé ? Pour ne pas soutirer un soupir des lecteurs ou spectateurs qui préfèrent sans doute des hivers moins longs que l’interminable hiver de 2019...


Le rapport, dans le détail, est plus mesuré que les titres des médias et plus mesurés quand il relate les observations que dans ses prédictions. Alors que le rapport prédit : « Des températures plus élevées dans le futur contribueront à une augmentation de la possibilité d’incendies (“conditions météorologiques propices aux incendies”). Les précipitations extrêmes sont également projetées d’augmenter dans le futur », il tempère ces prédictions en rappelant que les « observation[s] n’[ont] pas encore montré des données probantes de changements cohérents dans les précipitations extrêmes de courte durée dans tout le pays. » Bref, les observations ne correspondent pas (à ce stade) avec les prédictions.

Le rapport devient toutefois sensationnel quand il se tourne vers l’avenir à long terme, principalement sur la base d’une sélection de modèles climatiques et de projections qui sont hors de portée de la plupart des humains, y compris de certains scientifiques. Un bon exemple est la projection du niveau de la mer jusqu’en 2100. Tous les adultes d'aujourd'hui seront sans doute morts, il est donc difficile de vérifier si les prédictions se vérifieront.

Parmi les problèmes liés à cette projection : dans certaines régions du Canada les terres s’élèvent alors que dans d’autres elles s’affaissent. Au Canada atlantique, où les masses continentales s’affaissent, l’élévation du niveau de la mer est plus importante qu'au Québec. Le niveau de la mer à Halifax, où les terres s'affaissent, monte depuis plus d’un siècle de 3,3 mm/an, soit 0,33 m par siècle. En général, le sol du Québec s’élève (voir illustration ci-dessus) et la hausse du niveau de la mer est (très) modérée (à Rimouski elle est de 0,6 mm/an soit 0,06 m par siècle...)



Comme pour la plupart des prédictions en climatologie, il existe des raisons de douter des prédictions apocalyptiques. C’est notamment le cas pour l’élévation du niveau de la mer. Bien que les médias aient répercuté les prédictions les plus catastrophistes, ces prédictions restent hautement hypothétiques, voire improbables.


Dans un article de l’année dernière, Judith Curry, spécialiste des sciences du climat des États-Unis, a averti que « les valeurs extrêmes d’une éventuelle élévation du niveau de la mer sont considérées comme extrêmement improbables ou tellement improbables qu’on ne peut même pas leur attribuer une probabilité ».

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Ils se veulent sauveurs de la planète, mais ne sont-ils pas d’abord des égoïstes, des pessimistes malthusiens ou des extrémistes liberticides ? Lors d’un débat, Yann Moix rappelle que la Terre existe pour l’homme et Thérèse Hargot insiste sur la contradiction entre un « écologisme » qui prône une contraception chimique généralisée et sur le rôle essentiel de la famille nombreuse pour un monde moins individualiste.


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Des « antiracistes » réclament l’interdiction de l’exposition « Toutânkhamon » à Paris, car son origine africaine serait cachée. L’égyptologue Bénédicte Lhoyer réagit dans les colonnes du Point.

Inaugurée il y a moins d’un mois, l’incroyable exposition « Toutânkhamon » à la Grande Halle de la Villette fait déjà l’objet d’une controverse que l’on qualifierait volontiers d’« ubuesque » si elle n’était pas aussi et avant tout dangereuse. À l’heure où un petit groupe d’individus dits « antiracistes » parvient à obtenir la censure des Suppliantes d’Eschyle, d’autres, issus des mêmes mouvances, réclament l’interdiction de l’exposition « Toutânkhamon », dont les égyptologues et commissaires d’exposition tenteraient de cacher l’origine africaine. Selon eux, le célèbre pharaon était noir, tout comme l’ensemble des habitants de l’Égypte ancienne. Une théorie bien connue des sites complotistes et des égyptologues français, qui observent depuis plusieurs années sa propagation, y compris dans leurs salles de cours.

Bénédicte Lhoyer. — Depuis plusieurs années, un discours africanocentriste s’est développé pour affirmer que le royaume d’Égypte était noir. Pour appuyer leur thèse, ceux qui la propagent assurent, par exemple, que les égyptologues blancs auraient brisé les nez des statues et des momies pour dissimuler le caractère épaté de ces derniers, preuve de l’origine africaine des Égyptiens. Ce serait notamment, affirment-ils, pour cette raison que le Sphinx fut abîmé à cet endroit stratégique... Cette théorie est évidemment farfelue, car il y avait toutes les variantes de couleurs de peau possibles chez les Égyptiens, mais elle est surtout dangereuse, car elle se répand de façon alarmante dans la communauté noire depuis plusieurs années.

[...]

Le 2 avril dernier, j’ai fait une conférence sur la naissance de la civilisation égyptienne et j’ai de nouveau eu une question sur les nez cassés des statues. J’ai constaté qu’il était impossible d’avoir une discussion apaisée sur ce sujet lorsqu’on se retrouve face à des gens qui refusent d’emblée tout ce que l’on peut leur objecter. Comment peut-on nous accuser de profaner des cadavres ? On a l’impression d’être des médecins accusés d’amputer volontairement leurs patients ! Alors, on répond que le nez fait partie des éléments les plus fragiles des statues, que dans certains musées, les statues ont encore leur nez, etc. Mais rien n’y fait.

Aujourd’hui, ce discours est récupéré par des gens qui expriment une espèce de violence identitaire dans le but de faire une sorte d’OPA sur l’Égypte ancienne. L’archéologie est devenue une arme pour eux. Leur raisonnement est le suivant : l’Égypte ancienne a été étudiée en premier lieu par les Européens, donc il faut obligatoirement prendre le contrepied ! Un ami égyptologue a essayé, il y a quelque temps, d’engager une discussion avec eux sur un de leurs blogues, il s’est fait démolir par des internautes qui le taxaient de raciste, l’accusant d’empêcher « l’homme africain de prendre sa véritable place dans l’histoire ».

Portrait réaliste du Fayoum
(dépression du Nord de l’Égypte)
époque romaine
C’est horrible, car c’est une accusation frontale qui ferme la porte à toute objection possible, accompagnée d’une sorte d’intimidation. Ces comportements se retrouvent aujourd’hui dans les salles de cours à l’université. Certains étudiants nous accusent de propager une vision blanche de l’histoire, on nous explique que nous n’avons aucune légitimité pour parler de la civilisation africaine, que nos travaux et notre pensée s’assimilent à du racisme. Il n’y a plus de dialogue possible, ce qui est à la fois terrible et dommageable pour toutes les parties.

[...]

Cheick Anta Diop est un historien et anthropologue sénégalais. Il a cette aura de personne savante, car il a fait ses études à Paris (notamment au Collège de France, il me semble) en chimie puis dans les sciences sociales, c’est la référence absolue pour les africanistes. À chaque fois que je me suis retrouvée dans une salle de séminaire en égyptologie où un bon nombre de doctorants étaient réunis pour suivre un cours, nos collègues originaires de pays d’Afrique, comme le Cameroun, par exemple, posaient des questions sur l’africanocentrisme avec toujours la même question : « Que faites-vous des travaux de M. Diop ? » Soit c’était une simple curiosité avec une réelle envie de dialogue, soit au contraire on sentait une sorte de reproche. Ce qui est très difficile à supporter, c’est qu’on nous accuse de cacher la vérité. Depuis plusieurs années et depuis le Colloque du Caire en 1974, l’idée d’une Égypte uniquement issue du Proche-Orient est tombée, personne ne le nie, au contraire !

J’ajoute que ces dernières années, beaucoup de découvertes ont été faites sur le peuplement de l’Égypte ancienne, il s’agissait de gens venant de partout, l’Égypte est un couloir, on sait également qu’il y avait des mariages mixtes dans la population. C’est donc n’importe quoi de nous accuser de vouloir blanchir les Égyptiens ! Nous n’avons jamais dit qu’ils étaient blonds aux yeux bleus !

Le camp africaniste brandit souvent comme argument l’iconographie sur laquelle on voit des hommes à la peau rouge….

L’iconographie égyptienne ne représente pas la réalité, mais la conception qu’avaient les Égyptiens de leur monde. Il existe un code couleur : la femme est plutôt représentée en jaune, et l’homme est le plus souvent représenté en rouge sombre, ce que nous interprétons par l’idée de l’homme actif, en plein soleil, et de la femme à la carnation plus claire au foyer, à l’abri du travail des champs en plein jour. Malheureusement, la raison n’a pas lieu d’être, nos détracteurs sont capables de toutes les manipulations d’images !

Ils se servent de photographies de statues noircies de Toutânkhamon pour affirmer qu’il avait la peau noire. Même chose pour sa momie, alors que ce sont les résines de l’embaumement, déversées en très grande quantité, qui ont noirci. On le sait, ce n’était pas un pharaon originaire d’Afrique. D’autres statues ont la peau noire, car, dans l’Égypte ancienne, c’était la couleur de la résurrection. On nous accuse même d’avoir blanchi la peau de Ramsès II. Il existe d’autres théories délirantes : les Égyptiens appellent leur pays « Kemet » (« la noire »), ce qui serait la preuve ultime de l’africanité de l’Égypte, selon la mouvance africaniste. Mais non ! « La noire », c’est la terre fertile, la couleur du limon, et le désert se dit « la rouge », la terre stérile, sur laquelle rien ne peut pousser.

Ramsès II, sur son char, et Égyptiens à la peau rouge écrasent les Nubiens à la peau noire
[...]

Nous leur présentons des images de pharaons qui écrasent des populations nubiennes, par exemple. Mais ils réfutent cet argument. Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux comme YouTube ou Facebook, tout le monde a son mot à dire, et surtout ceux qui n’ont rien à dire. Malheureusement, ces gens-là ont un public friand de ces absurdités, car elles flattent une identité. Pourtant, quand on regarde l’histoire de l’Afrique, la splendeur de royaumes tels que celui du Dahomey par exemple, cela rend incompréhensible ce besoin de faire de l’Égypte un royaume uniquement africain. [Note du carnet : Il y a eu des pharaons nubiens, « noirs » donc, la XXVe dynastie.] C’est dangereux pour la science et pour le dialogue.

Sur la banderole des manifestants contre l’exposition, on pouvait lire « votre génome est criminel, hypocrite, menteur »…

Ils récupèrent des discours nauséabonds, ils nous traitent de racistes, mais ce sont eux qui le sont. Sauf que c’est presque tabou d’en parler. Même avec certains de mes étudiants. Pour eux, le racisme n’est que dans un sens ! Et comme l’émotivité est d’abord convoquée plutôt que la réflexion et le recul, le résultat est assez détonnant. Chaque personne qui a une certaine conception de sa supériorité va considérer les autres comme inférieures, et ça n’a rien à voir avec sa couleur de peau.

Comment peuvent-ils nous traiter de racistes alors que le plus grand égyptologue qu’on ait jamais eu en France était antillais ? Il s’agit de Jean Yoyotte. On le respecte énormément, ses articles sont des merveilles de réflexion qui sont toujours valables. Il fait vraiment autorité, c’était l’un des égyptologues modernes sans doute le plus proche de la pensée égyptienne. De toute manière, travailler dans la recherche suppose de collaborer avec des personnes venues de tout horizon au gré des travaux entrepris... Ce serait un véritable cauchemar pour un raciste autoproclamé.

[...]

Cela nous ferait rire si les implications n’étaient pas aussi graves. On sent qu’il existe un courant qui veut nous interdire la réflexion et la pensée, c’est très dangereux, car c’est ce qui nourrit les extrémismes. L’université commence à abdiquer, on est en train de tout aseptiser, quitte à modifier les choses au nom d’un pseudo-respect de la personne.

Évidemment et heureusement, cela dépend des endroits, mais plusieurs de mes collègues s’inquiètent de voir ces théories, cette défiance, arriver dans la plus grande indulgence. On ne veut pas faire de vagues, on ne veut pas d’histoire, on ne veut pas de procès, donc, on courbe la tête… L’épisode des Suppliantes d’Eschyle annulées au prétexte que les masques des acteurs et la coloration factice de leur peau s’apparentaient à un « blackface » s’inscrit dans cette logique. Alors, oui, nous sommes assez inquiets. Comment voulez-vous réussir à poser un regard plus neutre et apaisé sur l’histoire quand vous vous confrontez à cette violence, à ces accusations ?

Je me fiche de savoir d’où vient l’élève que j’ai en face de moi, en premier lieu, je souhaite avoir des esprits à qui je vais pouvoir ouvrir les chemins de la réflexion et de la critique, c’est tout. Mais quand on se retrouve avec des étudiants qui nous accusent d’être racistes, on sait que ça va être dur, qu’ils vont considérer tout ce qu’on veut leur apprendre comme biaisé. Ils ont toujours l’impression qu’on les manipule, et il faut déployer des trésors de pédagogie pour calmer le jeu.

Heureusement, tout n’est pas perdu, car beaucoup de nos collègues étrangers qui fréquentent le milieu universitaire et qui sont sensibles à la recherche regardent avec critique ce type de théorie. Nos collègues égyptiens, dans nos écoles ou en fouilles, ne cachent pas leur étonnement face à ces théories complotistes. L’Égypte ancienne, comme l’actuelle, est issue d’un mélange, eux aussi le soulignent. Reste à espérer que nos étudiants n’oublient jamais en sortant de nos cours que la critique et le recul sont les deux armes qui leur permettront de défendre la science, mais aussi la liberté.


Bénédicte Lhoyer est docteur en égyptologie (École du Louvre, université Paul-Valéry-Montpellier-3). Après des études à l’École du Louvre et à la Sorbonne, ancienne stagiaire épigraphiste du CFEETK (Centre franco-égyptien d’étude des temples de Karnak), elle est chargée de cours à l’École du Louvre et à l’Institut catholique de Paris. Elle travaille principalement sur l’étude de la différence et du handicap dans la civilisation égyptienne, ainsi que sur les traces du crime et de l’illégalité en Égypte ancienne.

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Le patrimoine génétique des momies égyptiennes enfin décrypté (plus proche de l’Europe et du Levant que de l’Égypte actuelle). Pendant des décennies, les scientifiques n’ont pas réussi à analyser leur ADN. Jusqu’au mardi 30 mai 2017. Un groupe de scientifiques de l’Institut Max-Planck et de l’université de Tübingen en Allemagne ont publié une nouvelle étude dans la revue scientifique Nature Communications. « Ils affirment avoir réussi à séquencer 90 génomes de momies de l’Égypte ancienne. Tous appartiennent à 151 momies retrouvées sur le site d’Abousir el-Melek, au sud du Caire », rapporte le site Mashable. L’étude montre ainsi que l’ADN des momies analysées, datant de 1 400 avant J.C. à l’an 400, est plus proche de celui des habitants de l’Europe actuelle que de l’Égypte d’aujourd’hui. En effet, les Égyptiens modernes partagent environ 8 % de plus de leur patrimoine génétique avec les populations d’Afrique subsaharienne que les Égyptiens anciens.

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Houellebecq & Lejeune sur l'histoire, la religion, Zemmour, le catholicisme

Dans la revue américaine First Things, Michel Houellebecq et Geoffroy Lejeune (rédacteur en chef de Valeurs Actuelles) ont dialogué au sujet de l’histoire, de la religion, de Zemmour, plus généralement du catholicisme.

Extraits :

Michel Houellebecq. — On peut repérer dans l’histoire de la pensée une étrange famille d’esprits, qui admirent l’Église catholique romaine pour son pouvoir de direction spirituelle des êtres humains, et surtout d’organisation des sociétés humaines, sans pour autant être chrétiens.

Le premier, et le plus remarquable représentant de cette tendance, est certainement Auguste Comte. À son inimitable manière, Comte qualifie la dénomination « protestant » de caractéristique. En effet, un protestant ne sait rien faire d’autre que protester, c’est dans sa nature. De Maistre, dont Comte se réclame, notait déjà qu’un protestant sera républicain sous la monarchie, anarchiste sous la république. Pour De Maistre, il est encore pire d’être protes­tant que d’être athée. Un athée peut avoir perdu la foi pour des motifs respecta­bles, il est possible de l’y ramener, cela s’est vu ; alors que le protestan­tisme, écrit-il, « n’est qu’une négation ».

Intellectuellement le plus remarquable dans cette étrange famille des « catholiques non chrétiens », Comte est également le plus sympathique, en raison de sa pittoresque mégalomanie qui le conduit sur la fin à multiplier les appels à tous ceux qu’il juge prêts à rejoindre le positivisme : les conservateurs, les prolétaires, les femmes, le tsar Nicolas Ier… Au fond il se serait très bien vu remplacer le pape à Rome, et il aurait repris l’ensemble de l’organisation catholique ; il aurait suffi que les catholiques accomplissent ce geste, à ses yeux tout simple : se convertir à la foi positive.

Se réclamant à son tour de Comte, Charles Maurras accorde une importance trop grande à l’efficacité politique, ce qui finit par le conduire des compromissions aussi funestes qu’immorales.

L’avatar contemporain le plus intéressant de cette tendance est certainement, en France, Eric Zemmour. Depuis des années il me rappelait quelqu’un, sans que je parvienne à retrouver qui. Et puis, tout récemment, la solution m’est apparue : Zemmour, c’est exactement Naphta dans La montagne magique. Léon Naphta est sans doute le jésuite le plus fascinant de la littérature mondiale. Dans l’interminable controverse entre Settembrini et Naphta, Thomas Mann a une position ambigüe, on sent que ce n’est pas simple pour lui. Indiscutablement Naphta a raison contre Settembrini, sur tous les points ; l’intelligence de Naphta surpasse celle de Settembrini, autant que l’intelligence de Zemmour surpasse celle de ses actuels contradicteurs. Mais, de manière également indiscutable, toute la sympathie de Thomas Mann (et cela de plus en plus nettement, à mesure que le livre avance) se porte vers Settembrini, et ce vieux radoteur d’humaniste italien finit par nous tirer les larmes, ce que serait bien incapable de faire le brillantissime Naphta.

Si nous changeons radicalement d’ambiance, quittant les rivages de l’Europe civilisée des années 1900 pour nous transporter au cœur de l’hystérie russe, nous pouvons verser une autre pièce au dossier : la célèbre scène des Frères Karamazov, mettant en scène le Christ et le Grand Inquisiteur, où Dostoïevski s’en prend violemment à l’Église catholique, en particulier au pape et aux jésuites. Revenant sur Terre, le Christ est aussitôt emprisonné par les autorités ecclésiastiques. Le Grand Inquisiteur, venant lui rendre visite dans sa cellule, lui explique que l’Église s’est très bien organisée sans lui, qu’ils n’ont plus besoin de lui — et que, même, il les dérange. Il n’a donc d’autre choix que de le faire exécuter à nouveau.

Cette scène dans laquelle Freud voyait « une des plus hautes performances de la littérature mondiale » plonge le lecteur catholique dans un malaise profond et prolongé. Car que se passerait-il en effet si le Christ revenait et déambulait dans les rues de Rome, prêchant et accomplissant des miracles ? Comment le pape actuel réagirait-il ?

Geoffroy Lejeune. — Eric Zemmour aime beaucoup l’histoire, mais dans quelques siècles, il compliquera considérablement la tâche des historiens. Ceux qui se pencheront sur l’étude de son cas pour comprendre notre époque auront beaucoup de mal à en tirer des conclusions justes : il incarne un courant intellectuel très puissant en France, qu’on pourrait qualifier de réactionnaire, mais se retrouve quasiment seul pour défendre ces idées, et il est combattu de manière farouche.

La posture de « catholique non chrétien » que vous décrivez lui convient à merveille, il est en réalité l’un des derniers du genre. À l’époque d’Auguste Comte, et même plus tard, il en existait beaucoup, pour une raison assez simple : le catholicisme était, en Europe en tout cas, dans une situation d’hégémonie culturelle, pour parler comme les communistes italiens. Dans un continent chrétien, où le catholicisme était souvent religion d’État en même temps que socle culturel commun, il était possible pour les grands esprits, croyants ou pas, d’influencer l’Église. Dans une époque déchristianisée, dans un continent qui a oublié ses racines, avec des systèmes juridiques visant à effacer les traces de la religion, les « catholiques non chrétiens » se font rares, il n’y a déjà presque plus de catholiques tout court.

De manière générale, regretter le temps des controverses entre grands penseurs au sujet de la foi me paraît anachronique. L’Église elle-même a renoncé, en même temps qu’elle se retirait de la sphère publique, à jouer un rôle et à influencer les esprits. En France, la loi de 1905 a été trop bien appliquée : en séparant l’Église de l’État, le pouvoir politique ne pensait sans doute pas qu’il réussirait, en moins d’un siècle, à opérer ce gigantesque effacement. L’Église a sa part de responsabilité, même si elle a été âprement combattue, en se soumettant trop facilement. Elle paie aujourd’hui la facture. […]

Michel Houellebecq. — Le précepte de « rendre à César » était clair ; il ne me semble pas que l’Église catholique l’ait appliqué avec suffisamment de rigueur.

Absolument dénué de base théologique, le schisme anglican n’a pour origine que le refus du pape Clément VII d’annuler le mariage d’Henri VIII. Affaibli par cette lutte, le clergé anglican s’est montré incapable d’enrayer le développement du puritanisme. Sans l’obstination de Clément VII, les États-Unis seraient peut-être aujourd’hui un pays catholique ; c’est malin.

Si les mariages royaux ne sont plus aujourd’hui qu’une cérémonie folklorique, l’Église catholique n’a nullement renoncé à se mêler du gouvernement des États (à intervenir, par exemple, dans leur politique migratoire), et cela finit, il faut bien le dire, par agacer tout le monde.

Geoffroy Lejeune. — Avec son « rendez à César », Jésus invente la laïcité ; le problème, c’est que les catholiques l’ont appliqué avec un peu trop de zèle. L’histoire de ce dernier siècle pourrait se résumer ainsi : une déchristianisation massive de presque tout l’occident, principalement en Europe, où on a défait en quelques décennies ce qu’on avait bâti en quinze siècles.

On peut faire tous les reproches à l’Église catholique, mais au début du XXe siècle, elle jouait encore un rôle politique et surtout, elle restait culturellement majoritaire. En France, le drame se noue en 1905, avec la loi de séparation des églises et de l’État, qui est imaginée pour achever son influence autant que pour la chasser des esprits. Le grand principe de cette laïcité à la française est au fond compatible avec celui édicté par Jésus : il y a la foi intérieure, et la liberté est préservée de ce point de vue, et il y a l’espace public, où le religieux ne peut exercer une influence. Selon cette séparation, l’État est laïc, certes, mais à aucun moment il n’est précisé que la société doit être athée. Le problème, c’est que l’Église a intégré qu’elle était chassée, et a abandonné sur tous les terrains.

Son influence politique s’est rapidement affaissée, mais elle a surtout abandonné ce qu’on appelle le « catholicisme social » qui lui donnait une assise populaire. Longtemps, les gens ont vécu dans un bain culturel catholique. Leur journée était rythmée par les cloches, ils suivaient quelques offices, se retrouvaient à la messe le dimanche. Même si dans le secret de leur conscience, ils n’étaient pas nécessairement animés d’une foi intense, ils avaient recours aux services du curé dans les moments importants de leur vie : le mariage, la maladie, la mort. J’aime beaucoup l’idée de « foi du charbonnier » parfois décrite par Balzac comme le fait « d’aimer la Sainte Vierge comme on aime sa femme » : une piété filiale, un attachement dénué de réflexion théologique ou philosophique, une fidélité à une histoire et à des racines davantage qu’une révélation mystique. Je me situe parfaitement dans cette catégorie-là ; cette foi simple constitua le ciment d’une civilisation.

Après 1905, et durant son vaste mouvement de retrait, l’Église a confondu « disparaître de la sphère publique » et « disparaître tout court ». Elle s’est effacée du monde. Autrefois, elle gouvernait les âmes ; aujourd’hui, son influence politique est nulle, et son rôle dans la société réduit à presque rien : on peut vivre en France sans voir un prêtre durant toute sa vie. Ils n’ont pas disparu, simplement on les voyait auparavant parce qu’ils portaient des soutanes et organisaient des processions lors des grandes fêtes religieuses, aujourd’hui, ils s’habillent en civil et se cachent comme au temps des catacombes.

Et l’Église semble s’excuser d’exister encore. Récemment, en France, nous avons vécu un vaste mouvement d’insurrection de la part de ceux qu’on pourrait appeler les « laissés pour compte de la mondialisation », les gilets jaunes. Ces gens criaient une colère venue de loin et ils étaient soutenus par une majorité de la population. Un phénomène social de cet ordre ne peut échapper à aucune institution revendiquant d’avoir un projet pour les hommes. À défaut d’exercer une influence politique, l’Église aurait pu jouer son rôle en offrant un projet spirituel à ceux qui se battent contre une perte de sens globale. Il existe 104 diocèses en France, soit autant d’évêques, qui sont les représentants de l’Église dans le pays. Un d’entre eux, un seul, a jugé bon de se rendre à la rencontre des gilets jaunes. Peut mieux faire. […]

Splendeur catholique.

Michel Houellebecq. — L’Église catholique peut-elle retrouver son ancienne splendeur ? Oui, peut-être, je ne sais pas. Il serait bien qu’elle s’éloigne définitivement du protestantisme, et qu’elle se rapproche de l’orthodoxie. S’y intégrer complètement serait la meilleure solution, mais ne sera pas facile. La question du Filioque peut être aisément résolue par les théologiens compétents. Le problème de l’installation des barons francs au Proche-Orient ne se pose plus, même Donald Trump a laissé tomber. Mais, pour l’évêque de Rome, renoncer à son ambition universelle, n’avoir qu’une prééminence honorifique sur les patriarches de Constantinople ou d’Antioche, sera peut-être difficile à avaler.

Au minimum, il faudrait que l’Église catholique, imitant la modestie orthodoxe, limite ses interventions dans les domaines qui ne sont pas directement de son ressort (j’ai cité la recherche scientifique, le gouvernement des États, l’amour humain). Qu’elle renonce à cette manie d’organiser des conciles, qui sont surtout l’occa­sion de déclencher des schismes. Qu’elle renonce également aux encycliques, et mette un frein à son inventivité doctrinale (l’Immaculée Conception, et surtout l’infaillibilité pontificale heurtent trop directement la raison ; la raison est un gros animal paisible, qui s’endort sans difficulté à l’heure du culte ; mais il faut éviter, à son égard, les provoca­tions inutiles).

Elle peut s’inspirer du pentecôtisme, de la même manière que la pop music s’est inspirée du gospel et du blues ; d’autre part il ne faut pas oublier une dose nécessaire de folie, en version russe c’est Dostoïevski : « S’il faut choisir entre le Christ et la vérité, je choisis le Christ », en version française nous avons Blaise Pascal.

Tout se résume au fond à ce que l’Église catholique a, au cours de son histoire, accordé beaucoup trop d’importance à la raison (et cela s’est aggravé au long des siècles, sans doute, peut-être est-ce que j’insiste trop, mais enfin je ne crois pas, sous l’influence du protestantisme). L’homme est un être de raison — si on veut, cela arrive, de temps en temps. Mais il est avant tout un être de chair, et d’émotion : il serait bien de ne pas l’oublier.

Geoffroy Lejeune. — L’Église catholique peut-elle retrouver son ancienne splendeur ? Oui, sans doute, mais la route est longue. Si on devait résumer les dernières décennies, on pourrait dire que l’Église, après avoir perdu le pouvoir temporel, a tenté de survivre en se faisant tolérer ; elle s’est pour cela essentiellement adaptée aux dérives d’un monde qu’elle est censée sauver. Cette inversion de rôle la conduit en effet au suicide, mais même aux yeux de Dieu, il existe, après ce geste tragique, une possibilité de salut : le saint curé d’Ars a dit un jour à une mère désespérée par le suicide de son fils qu’entre le pont d’où il s’était jeté et l’eau où il s’était noyé, il avait eu largement le temps de regretter, et de se retourner vers la miséricorde divine.

Pour sauver ce qui peut l’être, il faudrait peut-être rompre avec le relativisme en vogue depuis les années soixante. Peut-être l’Église retrouverait-elle un peu de sa splendeur si elle cessait de vouloir être cool, et qu’elle enseignait à nouveau la crainte de Dieu, sans laquelle il n’y a pas d’amour ; c’est exactement comme pour l’éducation des enfants, on a laissé se saper l’autorité parentale, avec les mêmes conséquences.

L’Église devrait peut-être modérer sa fascination pour les autres religions. Au sujet du protestantisme, comment tolérer des chevaux de Troie tels le secrétaire général de la conférence des évêques d’Italie, monseigneur Nunzio Galantino, qui a dit il y a peu de temps que « la Réforme lancée par Martin Luther il y a 500 ans a été un événement du Saint-Esprit » ? Je précise qu’il est proche du pape et appelle à une nouvelle Réforme. Le pape François lui-même multiplie les signes à l’égard des musulmans, comme en témoigne son récent voyage aux Émirats arabes unis, et avait pris soin de se définir comme simple « évêque de Rome » le jour de son élection, un gage de bonne foi donné cette fois aux orthodoxes.

Il faudrait en finir avec la quête permanente d’émotion, de ce point de vue, l’Église ne peut pas lutter avec les concerts ou le cinéma ; mais si elle se cantonne à sa mission, annoncer Dieu, et conduire les hommes à la vie éternelle, elle reste absolument indispensable.

Peut-être l’Église retrouverait-elle un peu de crédibilité si elle cessait de se concevoir comme une ONG vaguement caritative, mais qui n’assume pas la source de sa générosité, le Christ. En politique, elle gagnerait peut-être à cesser de jeter le discrédit moral sur certains gouvernements (les critiques du pape sur la gestion des migrants par le ministre de l’intérieur italien Matteo Salvini sont un bon exemple). De manière générale, depuis qu’elle est devenue minoritaire, l’Église en Europe s’est recroquevillée sur des noyaux durs, sociologiquement très homogènes, elle s’est presque constituée en classe sociale, et s’est coupée de la majorité des âmes. Son embourgeoisement est peut-être, finalement, le plus grand fléau qui frappe l’Église en ce début de XXIe siècle.

Michel Houellebecq. — La restauration du catholicisme dans son ancienne splendeur peut-elle réparer notre civilisation endommagée ? Là nous sommes d’accord, c’est beaucoup plus simple, évident presque : la réponse est oui.

Allemagne — parents mis à l'amende pour avoir refusé que leur fils visite la mosquée

La mosquée de Rendsbourg (minarets de 26 mètres)
Deux parents de Rendsbourg (nord de l’Allemagne) n’ont pas envoyé leur fils à l’école pour l’empêcher de se rendre à la visite organisée d’une mosquée. Le tribunal régional supérieur (OLG) du Schleswig-Holstein (frontière avec le Danemark) a imposé une amende de 50 euros et n’a pas autorisé le dépôt d’une plainte contre le verdict.

En juillet 2018, le tribunal de district a statué que les parents de l’élève devaient payer l’amende après que ceux-ci ont interdit à leur fils d’assister en juin 2016 à la mosquée de Rendsbourg dans le cadre des cours scolaires.

Le droit de recours des parents a maintenant été rejeté par la première chambre d’applications des amendes du tribunal d’instance supérieur du Schleswig-Holstein. Le tribunal de district avait déjà maintenu l’imposition de l’amende parce que les parents avaient empêché non seulement la participation de leur fils à la visite de la mosquée lors de la cinquième et sixième heures de la journée scolaire, mais l’avaient aussi retiré pendant les heures précédentes.

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À qui sont ces enfants au juste ? (rediff)

Multiculturalisme : un groupe autochtone canadien en accuse un autre d'appropriation culturelle

Connie Legrande
Un important gala pour la musique autochtone au Canada a été plongé dans la tourmente après qu’un groupe d’artistes interprètes esquimaux ait accusé un chanteur folk cri d’appropriation culturelle.

Plusieurs chanteurs esquimaux1 bien connus ont rompu tout lien avec les Indigenous Music Awards (IMA), un gala annuel qui devait avoir lieu à Winnipeg le 17 mai, au sujet de la nomination de Connie Legrande, qu’ils accusent d’avoir mal utilisé le chant à la gorge esquimau.

Ces dernières années, des peuples autochtones ont commencé à accuser publiquement des artistes blancs d’« appropriation culturelle » parce qu’ils utilisaient une iconographie ou des récits autochtones dans leur propre travail.

La dispute actuelle, cependant, implique deux peuples autochtones distincts.

La chanteuse crie Connie Legrande, dont le nom d’artiste est Cikwes, est au centre de la controverse. Nommée dans la catégorie « meilleur album folk » des IMA, elle est accusée de s’être approprié le chant de gorge de style inuit.

Mme Lisa Meeches dirige le festival Manito Ahbee et ses Indigenous Music Awards. Cikwes a appris d’une famille esquimaude, a fait valoir Mme Meeches : « Elle est convaincue d’avoir reçu les enseignements appropriés. »

La directrice du Manito Ahbee a cependant reconnu que la ou les personnes qui lui ont montré comment s’y prendre ont regretté de l’avoir fait.

Territoire traditionnel des Cris


Dans un message publié en 2015 sur Facebook et republié mercredi par un autre utilisateur, Connie Legrande avait dit être « fascinée par le chant gorge inuit ». Elle avait ajouté : « J’ai décidé de me l’enseigner moi-même en écoutant la musique de Tanya [Tagaq] ». Elle n’avait alors pas encore trouvé ceux qui allaient la former.

D’après Tiffany Ayalik du duo PIQSIQ, Connie Legrande s’était fait expliquer les bases du chant de gorge dans un contexte particulier : « Deux personnes ont été invitées à chanter de la gorge lors d’un événement artistique organisé par le gouvernement fédéral. Comme l’une d’elles n’a finalement pas pu y prendre part, Mme Legrande a appris les bases minimales du chant de gorge spécifiquement pour cette occasion. »

« Ce n’était pas pour lui permettre d’ensuite s’approprier quelque chose qui ne lui appartenait pas pour en faire un album, le mettre sur iTunes et le vendre », a-t-elle ajouté.



Tanya Tagaq, Kelly Fraser et le duo PIQSIQ ont décidé de retirer leurs candidatures au prix en plus de refuser d’effectuer une performance lors du gala tant que l’organisation n’inclura pas de représentants inuits au sein de sa direction.

L’élément déclencheur de leur colère est la mise en nomination d’une personne issue des Premières Nations qui inclut le chant de gorge dans son répertoire.

« C’est faire preuve d’insensibilité d’avoir une organisation comme les IMA célébrer une artiste qui n’est pas inuite, qui ne chante pas correctement et qui manque de respect, et qui ne rend pas compte du contexte et de l’histoire entourant le chant de gorge », estime Tiffany Ayalik du duo PIQSIQ.

Le duo a d’ailleurs retiré la candidature de son album Altering the Timeline, en nomination pour le meilleur album de musique électronique.



Exemple de chant de gorge

Note

1 Il existe deux principales étymologies concurrentes proposées pour le nom « Esquimaud », toutes deux dérivés de la langue montagnaise (innu-aimun), une langue algonquienne de la côte de l’océan Atlantique. La proposition la plus communément acceptée aujourd’hui semble être celle d’Ives Goddard de la Smithsonian Institution, qui tire le terme du mot montagnais signifiant « tresseur de raquettes » ou « tresser des raquettes ». Le mot « assime·w » signifie « elle tresse une raquette » en montagnais. Les locuteurs montagnais parlent de leurs voisins, les Micmacs, en utilisant des mots qui ressemblent à « esquimau ».

En 1978, José Mailhot, anthropologue québécois qui parle le montagnais, a publié un article suggérant qu’esquimau signifiait « des gens qui parlent une langue différente », ce qui explique mieux le fait qu’on retrouve des termes similaires pour désigner les Esquimaux au nord et à l’ouest des Montagnais et les Micmacs au sud (Mailhot, J. [1978]. « L’étymologie de “Esquimau” revue et corrigée, » Études Inuit/Inuit Studies 2-2 : 59–70). Les commerçants français qui ont rencontré les Montagnais dans les régions orientales ont adopté leur mot pour les peuples les plus occidentaux sur la côte du Labrador.

Certaines personnes considèrent « esquimau » comme péjoratif, car on a dit qu’il signifierait « mangeurs de viande crue » dans les langues algonquiennes de la côte atlantique. Cette hypothèse n’a plus vraiment cours chez les linguistes. Il s’agirait d’une étymologie populaire. Il n’est d’ailleurs pas clair pourquoi « mangeurs de viande crue » serait péjoratif, si tant est que ce soit la véritable origine, ce serait plutôt un descriptif.

Ajoutons que le terme esquimau aujourd’hui regroupe plusieurs langues et peuples : les Inuits du Canada et du Groenland (et leur langue, l’inuktituk) et de l’Alaska (et leurs langues le yupik et l’inupiat).