mercredi 18 mai 2022

«La religion chrétienne est de loin la plus attaquée en France»

Dans son premier ouvrage, le journaliste Marc Eynaud relate les actes de profanation et les agressions à l'encontre des catholiques. Il explique au Figaro comment la France, fille aînée de l'Église, en est arrivée à ce calvaire contemporain. Marc Eynaud est journaliste et auteur de Qui en veut aux catholiques ? aux éditions Artège.

Le Figaro. — Votre ouvrage s'intitule « Qui en veut aux catholiques ? » Ne craignez-vous pas de tomber dans un des travers de notre époque : la victimisation ? Quel est son objet ?

Marc EYNAUD. — La victimisation c'est « l'action de victimiser » si on en croit le Larousse. L'objectif de ce livre est justement l'inverse. Les profanations, incendies, attaques et autres apparaissent peu dans l'actualité sinon totalement décorrélées et traitées comme des faits divers banals. Pardonnez-moi de citer cette phrase d'Albert Camus qui a été trop employée mais « Mal nommer les choses c'est ajouter au malheur du monde ». On ne provoque pas de peur en nommant les choses, en les mettant en lumière mais surtout en les expliquant. Bien au contraire, on rejette le fantasme pour en appeler au palpable, on bannit le sentiment pour faire apparaître la réalité. L'objectif c'est de regarder la réalité en face, de l'appréhender et surtout de comprendre pourquoi nous en sommes arrivés là. « Qui en veut aux catholiques » ne veut pas dire « Les catholiques sont des victimes ». On pourrait d'ailleurs pousser le raisonnement en citant le Christ lui-même sous la plume de l'évangéliste Matthieu : « Vous serez haïs de tous à cause de Mon Nom ». Ce n'est ni un avertissement, ni une phrase destinée à faire peur mais un constat qui sonne comme une évidence tranquille.

—  Les catholiques sont-ils particulièrement touchés par les agressions et les profanations ?

—  Indubitablement oui. Les quelques chiffres que lâchent du bout des lèvres les services du ministère de l'Intérieur le prouvent : 1052 faits recensés, qui se décomposent en 996 actions et 56 menaces. La religion chrétienne est de loin la plus attaquée. Je demande au lecteur de faire l'expérience de taper les mots-clefs « Profanation église » ou « effraction église » dans un moteur de recherche pour s'en rendre compte. Objectivement c'est assez effrayant. Bien entendu, on peut expliquer ce sinistre record en partie par le fait que les églises et calvaires sont les édifices religieux les plus nombreux sur le territoire, certains d'entre eux abritent des trésors qui excitent l'attrait des voleurs, ferrailleurs et trafiquants d'art. En revanche, les actes purement malveillants sans objectif de vol se multiplient en parallèle. En outre, il ne faut pas l'oublier mais les chrétiens sont les cibles privilégiées des attentats islamistes. L'assassinat du Père Hamel est le plus symbolique mais on peut rajouter les attentats manqués de Villejuif et de Notre-Dame de Paris. Celui, réussi hélas, de la basilique de Nîmes et je révèle dans ce livre qu'un attentat au couteau a été déjoué in extremis à Montmartre.

L'Église a démontré en plus de deux mille ans d'existence qu'elle résistait bien mieux aux coups portés de l'extérieur qu'à ses propres turpitudes.

—  Comment expliquez-vous l'effondrement de la pratique catholique en France, fille aînée de l'Église ?

— Je laisse aux historiens le soin du détail mais on peut parler d'une déchristianisation en plusieurs étapes : les Lumières, la Révolution française, le rationalisme, la séparation de l'Église et de l'État et enfin la sortie de la Seconde guerre mondiale.

Pendant la Révolution française on parlait même de « déprêtrisation ». Cela a entraîné une hémorragie sans précédents dans l'Église de France, une hémorragie aggravée par la perte de son pouvoir temporel, traduite par l'éparpillement de ses biens devenus nationaux. Si cette période n'a pas été fatale à l'Église, elle a cependant provoqué de tels dégâts que les effets s'en font encore sentir aujourd'hui. La séparation de l'Église et de l'État a quant à elle largement sorti l'Église catholique de la place publique, perdant ainsi le monopole de l'Éducation, et plus largement du tissu social. Il faudra attendre la tragédie de 14/18 pour que la République prenne conscience de l'importance du religieux chez les hommes qui mourraient en masse pour elle. Ils auront quand même été 32.000 à servir dans les tranchées. L'Église affronta aussi la modernité, l'essor du marxisme et la confusion entre universalisme et mondialisation… Pour finalement finir dans une société postmoderne dont les valeurs et les envies sont aux antipodes de sa doctrine. On est en train d'assister à une véritable sortie de route.

— La pédocriminalité au sein de l'Église a-t-elle participé de cet effondrement ?

— Une chose est certaine, l'Église a démontré en plus de deux mille ans d'existence qu'elle résistait bien mieux aux coups portés de l'extérieur qu'à ses propres turpitudes. Le Père Abbé du Barroux, Dom Louis-Marie, m'avait confié ceci : « C'est une tristesse, mais aussi une réalité, de dire que les premiers coupables de profanation sont bien des hommes d'Église. Les révélations sur les crimes de mœurs en ont montré l'horreur. Des prêtres habitués à des turpitudes des plus abjectes ont célébré la messe. Le pape François a même comparé leur crime à des messes noires ». Indubitablement, ces crimes commis et trop souvent cachés ont fait plus de mal que les pires persécutions antichrétiennes. Elles actent tout de même une défaillance collective chez de trop nombreux évêques. « Pardonne-nous d'avoir pris ta miséricorde pour une tolérance devant le mal », s'était exclamé Mgr de Moulin-Beaufort devant la Grotte de Lourdes, le 6 novembre dernier. L'abjection de ces crimes commis c'est encore le Christ qui en parle le mieux : « Quiconque scandalise un de ces petits qui croient en moi, il lui vaudrait mieux qu'on lui pendît une meule d'âne au cou, et qu'on le jetât au fond de la mer. » Oui, la pédocriminalité a porté un rude coup à l'institution, mais surtout à la confiance des fidèles abusés et de leurs familles et à tous ceux qui voyaient en l'Église une institution bienveillante.

— Vous écrivez : « Les catholiques sont coincés entre leur aspiration à la charité et leur inquiétude de voir les mosquées pousser tandis que les églises se vident lorsqu'elles ne sont pas profanées ou incendiées. » Ce tiraillement semble s'être dessiné dans le vote des catholiques pratiquants lors du premier tour de l'élection présidentielle. Comment y répondre ?

— Les chiffres des sondeurs et les nombreuses enquêtes nous montrent une chose : la répartition des votes chez les catholiques, tout degré de pratique confondu, est sensiblement identique à la répartition nationale. Il n'y a pas d'électorat catholique ou plutôt il n'y a pas de candidat derrière lequel ils seraient susceptibles de se ranger majoritairement. Il y a indubitablement les mêmes fractures chez les catholiques que dans le reste du corps électoral. Scindés entre la génération des baby-boomeurs qui sera portée vers un vote centriste ou social et une jeunesse plus identitaire, plus conservatrice que ses ainés, cela s'est vu à de nombreuses reprises ces dernières années. Les dignitaires de l'Église doivent composer avec une jeunesse attendant davantage « Les cosaques et le Saint-Esprit » pour reprendre la formule de Léon Bloy qu'un « synode sur la synodalité ».

— Jean-Luc Mélenchon est le troisième homme de ce scrutin. Le candidat de la France insoumise a semble-t-il bénéficié d'un vote communautaire, en témoignent ses importants scores à Bobigny (60%), Creil (56%), Roubaix (52%), Dreux (45%), ou Grigny (56%), et les divers appels au vote dans la communauté musulmane les semaines précédant le scrutin. Le discours de la France insoumise sur la laïcité est-il ambigu ?

— Il est surtout incompréhensible sur le plan intellectuel et totalement cynique sur le plan politique. Les Insoumis savent qu'ils reposent sur une imposture : celui de faire croire qu'ils représentent la France des périphéries et des ouvriers alors qu'ils portent l'indigénisme et l'islamisme à bout de bras. Ce n'est pas un hasard si 69 % des musulmans de France ont voté Jean-Luc Mélenchon, ce n'est pas un hasard si les principaux leaders islamistes comme Hani Ramadan ont appelé à voter pour lui. Mélenchon est le candidat des musulmans. Sa famille politique dispute avec EELV la primauté de l'islamo-gauchisme. C'est à l'université d'été de la France Insoumise qu'Henri Pena-Ruiz a été chahuté pour avoir simplement combattu le concept d'islamophobie. C'est à cette occasion que l'élue écologiste Bénédicte Monville, chef de file de l'opposition écolo à Melun s'était exclamée : « Personnellement, je n'ai rien à voir et je combats ces tenants d'une “laïcité” qui exclut, stigmatise, humilie et nous divise ». Cette même élue qui livre un combat acharné contre la mairie de Melun coupable d'avoir voulu installer… une crèche de Noël ! Sans compter que tous ces élus ont évidemment manifesté main dans la main avec des islamistes à cette scandaleuse « Marche contre l'islamophobie ».

Source: Le Figaro


Qui en veut aux catholiques ?

Incendies. Profanations. Ces faits qu'on ne veut pas voir
par Marc Eynaud,
publié aux Éditions Artège,
le 6 avril 2022,
à Paris,
232 pp.,
ISBN-13 : 979-1033612377.





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