mercredi 1 juillet 2020

Le climat change mais ce n'est pas la fin du monde, ni même le principal problème écologique

Michael Shellenberger est un « héros de l’environnement » pour l’hebdomadaire Time et président de Environmental Progress, une organisation indépendante de recherche et de politique. Il vient de publier Apocalypse Never : Why Environmental Alarmism Hurts Us All qui dénonce le catastrophisme climatique.

Michael Shellenberger se bat depuis des décennies pour une planète plus verte. Il a participé à sauver les derniers séquoias non protégés du monde.  Il a également dirigé avec succès les efforts des climatologues et des militants pour maintenir les centrales nucléaires en fonctionnement, pour limiter une augmentation des émissions de CO2.




Nous proposons ci-dessous la traduction d’un article dans Quillette où il explique ce qui l’a mené à écrire ce livre.

Au nom des écologistes du monde entier, je voudrais présenter mes excuses officielles pour la peur climatique que nous avons créée au cours des 30 dernières années.

Le climat change. Ce n’est pas la fin du monde. Ce n’est même pas le problème environnemental le plus grave. Je peux paraître étrange quand je dis cela. Pourtant, je suis un activiste climatique depuis 20 ans et un écologiste depuis 30 ans.

Mais en tant qu’expert en énergie auquel le Congrès a demandé de témoigner à titre d’expert objectif et invité par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) à servir de réviseur expert pour son prochain rapport d’évaluation, je me sens obligé de présenter mes excuses pour la façon dont nous, écologistes, avons induit le public en erreur.

Voici quelques faits que peu de gens connaissent :
  • Les humains ne provoquent pas une « sixième extinction de masse » ;
  • L’Amazonie n’est pas « le poumon de la planète » ;
  • Le changement climatique n’aggrave pas les catastrophes naturelles ;
  • Les incendies ont diminué de 25 % dans le monde depuis 2003 ;
  • La quantité de terres que nous utilisons pour produire la viande — la plus grande utilisation des terres par l’humanité — a diminué d’une superficie presque aussi grande que l’Alaska ;
  • L’accumulation de combustible ligneux (la broussaille) et davantage de maisons construites près des forêts, et non le changement climatique, explique pourquoi il y a davantage d’incendies plus dangereux en Australie et en Californie ;
  • Les émissions de carbone diminuent dans la plupart des pays riches et diminuent en Grande-Bretagne, en Allemagne et en France depuis le milieu des années 1970 [Ces émissions ont été déplacées avec les emplois industriels associés vers l’Asie.] ;
  • Les Pays-Bas sont devenus riches, pas pauvres tout en s’adaptant à la vie sous le niveau de la mer ;
  • Nous produisons 25 % de nourriture en plus que ce dont nous avons besoin et les excédents alimentaires continueront d’augmenter à mesure que le monde se réchauffera ;
  • La perte d’habitat et la mise à mort directe d’animaux sauvages sont des menaces plus importantes pour les espèces que le changement climatique ;
  • Utiliser du combustible ligneux (du bois) est bien pire pour les humains et la faune que les combustibles fossiles ;
  • La prévention de futures pandémies nécessite une agriculture qui sera davantage « industrielle » et non le contraire.
Je sais que les faits énoncés ci-dessus sonneront comme du « déni climatique » pour beaucoup de gens.

Mais cela ne démontre que la puissance de l’alarmisme climatique.

En réalité, les faits ci-dessus proviennent des meilleures études scientifiques disponibles, y compris celles menées par le GIEC ou acceptées par le GIEC, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et d’autres organismes scientifiques de premier plan.

Certaines personnes s’imagineront, en lisant ceci, que je suis un anti-environnementaliste de droite. Je ne le suis pas. À 17 ans, j’ai vécu au Nicaragua pour montrer ma solidarité avec la révolution socialiste sandiniste. À 23 ans, j’ai recueilli des fonds pour les coopératives de femmes guatémaltèques. Au début de la vingtaine, je vivais dans la semi-Amazonie, faisant des recherches avec de petits agriculteurs luttant contre les invasions de leurs terres. À 26 ans, j’ai participé à la dénonciation les mauvaises conditions de travail dans les usines Nike en Asie.

Je suis devenu environnementaliste à 16 ans lorsque j’ai organisé une collecte de fonds pour Rainforest Action Network. À 27 ans, j’ai aidé à sauver les derniers séquoias séculaires non protégés de Californie. Dans la trentaine, j’ai défendu les énergies renouvelables et j’ai réussi à persuader l’administration Obama d’y investir 90 milliards de dollars. Au cours des dernières années, j’ai aidé à éviter de remplacer suffisamment de centrales nucléaires par des combustibles fossiles pour éviter une forte augmentation des émissions de gaz à effets de serre.

Mais jusqu’à l’année dernière, j’ai surtout évité de dénoncer la peur du climat. En partie parce que j’étais gêné. Après tout, je suis aussi coupable d’alarmisme que n’importe quel autre environnementaliste. Pendant des années, j’ai qualifié le changement climatique de menace « existentielle » pour la civilisation humaine et l’ai parlé de « crise ».

Mais surtout, j’avais peur. Je suis resté silencieux au sujet de la campagne de désinformation climatique parce que j’avais peur de perdre des amis et du financement. Les quelques fois où j’ai appelé le courage de défendre la science du climat contre ceux qui la dénaturent, j’ai subi des conséquences sévères. Et donc je me suis surtout tenu à côté et je n’ai pratiquement rien fait alors que mes collègues environnementalistes terrifiaient le public.

Je suis même resté les bras croisés alors que des gens à la Maison-Blanche et de nombreux médias ont tenté de détruire la réputation et la carrière d’un scientifique exceptionnel, d’un homme bon et d’un de mes amis, Roger Pielke, Jr., un démocrate et environnementaliste progressiste de longue date qui a témoigné en faveur d’une réglementation carbone. Pourquoi ont-ils fait ça ? Parce que ses recherches prouvent que les catastrophes naturelles n’empirent pas.

Mais, l’année dernière, les choses sont devenues incontrôlables.

Alexandria Ocasio-Cortez a déclaré : « Le monde prendra fin dans 12 ans si nous ne nous attaquons pas au changement climatique. » Le groupe environnemental le plus en vue de Grande-Bretagne a déclaré que « le changement climatique tue les enfants ».

Le journaliste écologiste le plus influent du monde, Bill McKibben, a qualifié le changement climatique de « plus grand défi auquel les humains aient jamais été confrontés » et a déclaré qu’il « anéantirait les civilisations ». Les journalistes traditionnels ont rapporté à plusieurs reprises que l’Amazonie était « le poumon de la planète » et que la déforestation s’apparentait à l’explosion d’une bombe nucléaire.

En conséquence, la moitié des personnes interrogées dans le monde l’année dernière ont déclaré qu’elles pensaient que le changement climatique entraînerait l’extinction de l’humanité. Et en janvier, un enfant britannique sur cinq a déclaré aux sondeurs qu’il faisait des cauchemars sur le changement climatique. Que vous ayez ou non des enfants, vous devez savoir à quel point c’est faux.

J’avoue que cela me touche probablement parce que j’ai une fille adolescente. Après lui avoir parlé des faits scientifiques, elle a été rassurée. Mais ses amis sont profondément mal informés et donc, naturellement, effrayés. J’ai donc décidé que je devais parler. Je savais qu’écrire quelques articles ne serait pas suffisant. J’avais besoin d’un livre pour présenter correctement toutes les preuves.

Et donc mes excuses formelles pour notre alarmisme viennent sous la forme de mon nouveau livre, Apocalypse Never : Why Environmental Alarmism Hurts Us All All. Il est basé sur deux décennies de recherche et trois décennies d’activisme environnemental. Avec 400 pages, dont 100 de notes et références, Apocalypse Never couvre le changement climatique, la déforestation, les déchets plastiques, l’extinction des espèces, l’industrialisation, la viande, l’énergie nucléaire et les énergies renouvelables.

Quelques faits saillants du livre :
  • Les usines et l’agriculture moderne sont les clés de la libération humaine et du progrès environnemental ;
  • La chose la plus importante pour sauver l’environnement est de produire plus de nourriture, en particulier de la viande, sur moins de terres ;
  • La chose la plus importante pour réduire la pollution atmosphérique et les émissions de carbone est de passer du chauffage au bois à celui au charbon, puis au pétrole, puis au gaz naturel et finalement l’uranium ;
  • 100 % d’énergies renouvelables nécessiteraient d’augmenter la superficie utilisée pour l’énergie de 0,5 % aujourd’hui à 50 % ;
  • Nous devrions demander que les villes, les fermes et les centrales électriques aient des densités de puissance plus élevées, et non plus faibles ;
  • Le végétarisme réduit nos émissions de moins de 4 % ;
  • Greenpeace n’a pas sauvé les baleines, le passage de l’huile de baleine au pétrole et à l’huile de palme ;
  • Le bœuf « fermier » nécessiterait 20 fois plus de terres et produirait 300 % d’émissions en plus ;
  • Le dogmatisme de Greenpeace a aggravé la fragmentation des forêts de l’Amazonie ;
  • L’approche colonialiste de la conservation des gorilles au Congo a produit un contrecoup qui pourrait avoir entraîné la mort de 250 éléphants.
Pourquoi avons-nous tous été induits en erreur ?

Dans les trois derniers chapitres d’Apocalypse Never, je dénonce les motivations financières, politiques et idéologiques. Les groupes environnementaux ont accepté des centaines de millions de dollars provenant du lobby des combustibles fossiles. Des groupes motivés par des croyances anti-humanistes ont forcé la Banque mondiale à cesser d’essayer de mettre fin à la pauvreté et de rendre la pauvreté « durable ». La peur du déclassement social, la dépression et l’hostilité à la civilisation moderne sont à l’origine d’une grande partie de l’alarmisme.

Une fois que vous vous rendez compte à quel point nous avons été mal informés, souvent par des personnes aux motivations manifestement peu recommandables ou malsaines, il est difficile de ne pas se sentir dupé. Apocalypse Never changera-t-il quelque chose ? Il y a certainement des raisons d’en douter.

Les médias font des déclarations apocalyptiques sur le changement climatique depuis la fin des années 80 et ne semblent pas disposés à s’arrêter. L’idéologie derrière l’alarmisme environnemental — le malthusianisme — a été démystifiée à plusieurs reprises pendant 200 ans et pourtant elle est plus puissante que jamais.

Mais il y a aussi des raisons de croire que l’alarmisme environnemental, s’il ne prend pas fin, verra sa puissance culturelle s’émousser. La pandémie de coronavirus est une véritable crise qui met en perspective la « crise » climatique. Même si vous pensez que nous avons réagi de manière excessive, COVID-19 a tué près de 500 000 personnes et bouleversé les économies du monde entier.

Les institutions scientifiques, parmi lesquelles l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le GIEC, ont sapé leur crédibilité par leur instrumentalisation politicienne répétée de la science. Leur existence et leur pertinence futures dépendent de nouveaux dirigeants et de réformes sérieuses. Les faits ont encore de l’importance et les médias sociaux permettent à un plus large éventail de voix nouvelles et indépendantes de contourner les journalistes environnementaux alarmistes dans les médias traditionnels.

Les nations reconsidèrent ouvertement leur intérêt propre et s’éloignent du malthusianisme et du néolibéralisme, ce qui est bon pour le nucléaire et mauvais pour les énergies renouvelables. Les preuves sont accablantes que notre civilisation fortement consommatrice d’énergie est bien meilleure pour les gens et la nature qu’une civilisation faiblement consommatrice d’énergie vers laquelle les alarmistes climatiques veulent nous ramener.

Les invitations du GIEC et du Congrès que j’ai reçues sont des signes d’une ouverture croissante à une nouvelle réflexion sur le changement climatique et l’environnement. Un autre signe encourageant a été la réponse à la publication de mon livre de la part de climatologues, d’écologistes et de spécialistes de l’environnement. « Apocalypse Never est un livre extrêmement important », écrit Richard Rhodes, auteur primé par le prix  Pulitzer pour The Making of the Atomic Bomb. « Il s’agit peut-être du livre le plus important jamais écrit sur l’environnement », déclare l’un des pères de la science climatique moderne, Tom Wigley.

[...] L’ancien chef de The Nature Conservancy, Steve McCormick [a écrit au sujet d’Apocalypse Never]:  « Shellenberger nous livre une dose d’“amour vache” : il remet en cause nos croyances orthodoxes bien ancrées, nos mentalités rigides et autodestructrices. Apocalypse Never lance à l’occasion des piques, mais elles sont fondées sur des preuves,  elles sont bien argumentées qui aideront à développer le “muscle mental” dont nous avons besoin pour envisager et concevoir non seulement un avenir plein d’espoir, mais réalisable. »

Voilà ce que j’espérais accomplir en écrivant ce livre. Si vous êtes arrivé jusqu’ici, j’espère que vous conviendrez que ce n’est peut-être pas aussi bizarre qu’un écologiste de longue date, progressiste et militant pour le climat ait ressenti le besoin de dénoncer l’alarmisme.

J’espère en outre que vous accepterez mes excuses.

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Colbert et le Code noir, la vérité historique

Dans le contexte des statues vandalisées en France, signe de l’américanisation et ethnicisation croissantes de la France, l’historien Jean-Christian Petitfils revient dans les colonnes du Figaro sur le rôle de Colbert dont la statue à Paris a été attaquée par des manifestants radicaux. La pression extrémiste désire également débaptiser les places, les rues et les salles Colbert en France.

Auteur d’une trentaine d’ouvrages, Jean-Christian Petitfils a notamment publié une biographie de Louis XIV (Perrin, coll. « Tempus », 2002), grand prix de la biographie de l’Académie française et « Histoire de la France. Le vrai roman national » (Fayard, coll. Pluriel, 2018).

Un agent de la Mairie de Paris nettoie la statue de Jean-Baptiste Colbert

Dans le vandalisme frénétique qui a saisi la France depuis la mort de [l’Américain] George Floyd, des associations antiracistes et des groupuscules mènent une campagne passionnelle et outrancière destinée à abattre les statues, à débaptiser lycées, places et rues portant le nom de grands hommes de notre histoire, soupçonnés d’esclavagisme ou de colonialisme. Est visé en particulier le ministre de Louis XIV, Jean-Baptiste Colbert, pour avoir été l’auteur du « Code noir ».

Dans ce délire idéologique qui sature l’espace public, où le souci de la vérité historique ne pèse pour rien, on ne sait trop ceux qui sont le plus à blâmer, les « indigénistes », qui ne rêvent que de déconstruire l’histoire de notre pays, ou les hommes politiques — dont, hélas, un ancien premier ministre — et les édiles tétanisés qui mettent genou à terre et se prêtent complaisamment aux injonctions terroristes des discours anti-Blancs.

Bourreau de travail, brutal, hautain, froid (« Le Nord », comme le surnommait Mme de Sévigné), Colbert fut un des géants du Grand Siècle. Derrière son abord rebutant se cachaient une belle intelligence, une ardeur, une ambition peu commune, doublée d’une passion extrême d’agir et de servir. Il cumula des fonctions qui correspondraient aujourd’hui à celles de ministre de l’Intérieur, de l’Économie, des Finances, de la Marine, de la Justice, du Commerce, de la Construction et de la Culture. Son œuvre au service du roi et de la centralisation de l’État est immense, même si des ombres ont entaché son action.

L’élaboration de l’édit royal de mars 1685 « touchant la police des îles de l’Amérique française », appelé ultérieurement « Code noir », prend place dans sa politique d’unification du droit et de codification législative : ordonnances sur la procédure civile (1667), les eaux et forêts (1669), la procédure criminelle (1670), le commerce (1673) et la marine (1681). Il s’agissait en l’occurrence de clarifier le statut civil et pénal des esclaves d’outre-mer « tant pour la punition de leurs crimes que pour tout ce qui concerne la justice qui doit leur être rendue ».

À l’image des autres entreprises, Colbert lança sur place des consultations préalables, car la pratique de l’esclavage était interdite en France métropolitaine et n’existait pas dans d’autres colonies comme le Canada. C’est ainsi qu’en avril 1681, il demanda à Charles de Courbon, gouverneur général des îles d’Amérique, et à l’intendant Jean-Baptiste Patoulet, de collationner la jurisprudence locale et de recueillir les avis des membres des Conseils souverains — petits parlements locaux — de la Martinique, de la Guadeloupe et de Saint-Christophe. Ce travail prit du temps, car il s’agissait de rationaliser des pratiques et usages répandus depuis plusieurs décennies.

Suivirent un premier rapport en mai 1682, puis un avant-projet d’ordonnance en février 1683, qui arriva sur le bureau du ministre trois mois plus tard. On ignore la part que ce dernier prit dans la rédaction du texte final qui comporte 60 articles. Malade, il mourut le 6 septembre 1683. Laissée en souffrance, l’ordonnance royale, qui reprenait 90 % de l’avant-projet, ne fut donc promulguée qu’en 1685, sous la signature de Louis XIV et le contreseing du fils du ministre, Jean-Baptiste Colbert de Seignelay, secrétaire d’État à la Marine.

Lourd de contradictions, le texte faisait la part belle aux planteurs, tout en introduisant un cadre légal. Si les esclaves étaient assimilés juridiquement à des biens meubles dans les transactions, ils étaient néanmoins considérés comme des êtres humains aux droits limités. Ils devaient être nourris convenablement, vêtus, baptisés, instruits dans la religion catholique, et bénéficier du repos du dimanche. Ils pouvaient se marier avec l’accord de leur maître, mais les enfants nés de ces unions devenaient esclaves à leur tour. Les sujets âgés ou malades devaient être pris en charge et les morts enterrés dans des cimetières catholiques. Les affranchissements, les mariages mixtes maître-esclave étaient possibles, mais encadrés. Le Code autorisait les maîtres à avoir recours au fouet, prohibant toutefois les « traitements barbares et inhumains ». Aucune mutilation ou torture ne leur était permise. Celle-ci était réservée aux décisions de justice.

Implacables alors étaient les sanctions pénales : les coupables étaient marqués au fer rouge, mutilés aux oreilles ou aux jarrets et dans les cas les plus graves exécutés. Tout maître ou contremaître qui tuait un esclave se rendait en revanche coupable d’un crime. Sous réserve de quelques variantes, ces dispositions furent étendues à Saint-Domingue, aux îles de France (Maurice) et de Bourbon (La Réunion), à la Guyane et à la Louisiane.

Si Colbert n’a pas contresigné le « Code noir » on peut penser qu’il en aurait approuvé les termes. La vérité est qu’il fut seulement l’héritier de la politique coloniale de la monarchie absolue, commencée sous le ministériat du cardinal de Richelieu en 1626 avec la création de la Compagnie de Saint-Christophe.

L’installation d’esclaves dans les Antilles commença en 1635 en dehors de tout statut juridique, principalement en vue de la culture de la canne à sucre. À l’époque, une bonne partie du monde acceptait sans état d’âme l’esclavage. Les monarques et chefs de nombreux royaumes africains vivaient de la traite des Noirs (souvent occultée, leur complicité est « une donnée objective » souligne l’historien et anthropologue sénégalais Tidiane N’Diaye), et l’Europe rachetait les esclaves chrétiens aux Barbaresques d’Afrique du Nord, qui en faisaient un trafic lucratif.

Bien entendu, philosophiquement, le « Code noir » est injustifiable en ce qu’il légitimait et légalisait un système d’esclavage, enrobé de quelques principes d’humanité et de christianisme. Aucune définition, aucune justification n’étaient d’ailleurs données de cette institution barbare, qu’il faut replacer dans son contexte historique. Au lieu de pratiquer la rhétorique de l’indignation morale, avec 335 ans de retard et une lecture anachronique et vindicative de l’histoire, nos belles âmes « indigénistes » ne feraient-elles pas mieux de dénoncer la persistance actuelle de ces pratiques dans certains pays du monde arabo-musulman, sur lesquelles pèse un silence gênant, rarement entrecoupé de protestations ?

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Qu’a-t-on mis dans la tête des jeunes ?

Denise Bombardier se demande (ci-dessous) dans les colonnes du Journal de Québec ce qu’on a bien pu mettre dans la tête des jeunes. Nous pensons que ce désastre était annoncé de longue date, tous les partis politiques (PQ, CAQ, PLQ) ont imposé par le Monopole de l’Éducation du Québec une éducation qui livre ses fruits.

Les souverainistes et autres nationalistes ont approuvé les réformes de l’éducation, l’imposition du multiculturalisme à l’école, l’immigration de masse qui rend vaine toute tentative d’assimilation des jeunes immigrants à la majorité « francophone » dans les villes comme Montréal, les jeunes immigrants étant désormais la majorité des jeunes...


Ces mêmes nationalistes appuient toujours, bien sûr, les mesures et valeurs sociales qui dépriment la natalité. Ils n’osent même plus en parler. Or, la population québécoise francophone de souche se contracte ; l’allongement de l’espérance de vie cache ce phénomène pour l’instant. Il apparaîtra brutalement quand les très nombreux babyboumeurs mourront. En effet, avec 1,5 enfant/femme francophone au Québec, chaque génération est 25 % plus petite que la précédente : 8 grands-parents, 6 parents, 4,5 enfants.

Entretemps, les « nationalistes modernes » semblent vouloir se concentrer sur l’éphémère, l’évènement du jour, une dernière salve jouissive contre la religion catholique qui n’en peut mais. On aime tirer sur les ambulances au Québec. Rappelons que Pauline Marois (ci-contre), censément nationaliste, a approuvé l’imposition du seul programme controversé d’éthique et de culture religieuse, relativiste et multiculturaliste dans l’âme, pour enfin chasser la religion (catholique) de l’école alors que les parents québécois n’en demandaient pas tant.



Le choc des générations a toujours existé. Il est normal et sain que les plus jeunes contestent les acquis transmis par les parents. Mais encore faut-il qu’ils reçoivent en héritage une éducation qui les prépare intellectuellement pour l’avenir.

Le pari de la démocratisation de l’enseignement est de faire accéder tous les jeunes aux connaissances afin de les armer pour comprendre la vie et leur vie.

Dans les dernières décennies, il semble que l’approche psychologique s’est idéologisée. À la morale inspirée de la religion s’est imposé un relativisme qui mène les jeunes dans un cul-de-sac.


Nombre de jeunes font, par exemple, l’amalgame entre l’Église catholique et le mouvement de Raël. On leur a enseigné aussi à ne juger personne. Sauf ceux qui ne pensent pas comme eux si on fréquente les réseaux sociaux.

Multiculturalistes

Les jeunes sont nombreux à croire que la défense de l’identité québécoise a des relents d’intolérance, car vivant selon les valeurs multiculturalistes à la Justin Trudeau, ils en adoptent le catéchisme. La loi 21 sur la laïcité en rebute plusieurs. Le voile pour eux est l’équivalent d’un bandana ou d’un capuchon de veste molle.

Ils ignorent les valeurs universelles héritées des grands écrivains du XVIIIe siècle, celui des Lumières, qui a apporté la modernité au monde occidental. À la limite, ils croient que le siècle des Lumières est celui de l’électricité grâce à la fabrication de l’ampoule électrique par Thomas Edison.

Les jeunes se réclament d’une planète sans frontières où ils peuvent se déployer.

Ils se définissent comme des êtres humains avant tout. Et la langue de communication, l’anglais jusqu’à nouvel ordre, ils la parlent plus ou moins, mais sans problème. D’ailleurs, les jeunes Québécois sont aussi devenus décomplexés quant à la langue française. Leur franglais a remplacé le joual d’antan. En fait, ils sont plutôt fiers du franglais, car cela les différencie des « vieux » nationalistes. 

[Le franglais étant évidemment aussi la solution de facilité, dans un contexte de colonisation américaine : pas d’effort s’il vous plaît nous avons été « socialisé » à l’école québécoise.]

Culpabilisation

Ils sont antiracistes, ce qui est une qualité. Sauf qu’ils s’affichent comme racialistes même en ignorant le mot. Car ils se revendiquent comme Blancs et à ce titre se croient les héritiers des esclavagistes et se culpabilisent. Certains ont même honte d’être Blancs.

Car la rectitude politique est leur credo. Ils sont à l’affût de tout ce qui semble socialement inacceptable. Ainsi, ils ne se scandaliseraient pas si le livre de Pierre Vallières, Nègres blancs d’Amérique, était interdit, voire brûlé. Mais on doute qu’ils connaissent le mot « autodafé » ou même « l’Inquisition ».  [Voir Journaliste sanctionnée pour avoir cité le titre du livre Nègres Blancs d’Amérique.]

N’étant pas à une contradiction près, les jeunes d’aujourd’hui qui veulent racialiser de nouveau la société adhèrent souvent à la déconstruction des genres. Ils estiment que le féminin et le masculin sont des concepts discriminatoires et non des réalités biologiques. Leur ouverture d’esprit à cet égard correspond à l’obsession actuelle d’être dans l’air du temps. Ou à la mode, à dire vrai. Car vieillir n’a aucun sens pour eux dont la vie se décline seulement dans le présent.

L’école a failli

La jeune génération a été privée de mémoire, de la protection d’adultes, de parents, mais aussi de maîtres au sens ancien du terme. L’école et la société ont failli à la tâche. Oui, il y a de quoi en pleurer.

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Face à John Wayne qui ne veut pas mourir, le changement démographique et l'argent des progressistes

Sur John Wayne, les démocrates veulent débaptiser l’aéroport John-Wayne de comté d’Orange, en Californie (anciennement bastion républicain avant le changement démographique de ces 50 dernières années), en raison des prises de position « racistes » de l’acteur.


Éric Zemmour : « John Wayne est le symbole de l’homme blanc et patriote, qui défie les minorités ! »







Chronique d’Éric Zemmour du Figaro sur le livre d’une jour­na­liste fran­co-amé­ri­caine et l’Amé­rique de Trump : un ouvrage qui ne res­semble pas du tout à ce qu’on pou­vait craindre.




Long­temps, elle a été comme les autres. Jour­na­liste, donc de gauche, for­cé­ment de gauche ; chef de bu­reau de Ra­dio France à Wa­shing­ton, cette ba­rou­deuse ac­com­plie (Af­gha­nis­tan, Chine, Afrique du Sud, etc.) s’iden­ti­fiait à ses confrères, pour la plu­part dé­mo­crates ; fran­çaise, elle se rê­vait Amé­ri­caine, se­lon un pro­ces­sus im­pé­rial dé­crit ad­mi­ra­ble­ment par Ré­gis De­bray. Un mo­dèle ac­com­pli de confor­misme. Quand elle ac­quiert en­fin sa pré­cieuse na­tio­na­li­té amé­ri­caine, Lau­rence Si­mon croit avoir at­teint son Graal ; elle en­tame son che­min de Da­mas. Elle nous le dé­crit avec une rare hon­nê­te­té et un pro­fes­sion­na­lisme jour­na­lis­tique qu’on ne peut que louer, ce qu’on ne fe­ra pas pour son style, ex­ces­si­ve­ment re­lâ­ché et par­lé.

Mais l’in­té­rêt du fond l’em­porte sur la mé­dio­cri­té de la forme : Lau­rence Si­mon nous montre une Amé­rique qui res­semble de plus en plus à la vieille Eu­rope et en par­ti­cu­lier à la France, le plus sou­vent pour le pire, et ra­re­ment le meilleur. Notre jour­na­liste fran­co-amé­ri­caine nous dé­crit la mort an­non­cée de l’Amé­rique de Toc­que­ville, cette Amé­rique blanche, chré­tienne, très chré­tienne, fon­dée sur les va­leurs du tra­vail et de la li­ber­té, pour être rem­pla­cée par une Amé­rique de plus en plus athée, de plus en plus ca­tho­lique et mu­sul­mane, au dé­tri­ment des pro­tes­tants, de moins en moins blanche, de plus en plus so­cia­liste, de plus en plus gou­ver­née par le po­li­ti­que­ment cor­rect, de plus en plus do­mi­née par les « mi­no­ri­tés » eth­niques et sexuelles, qui bé­né­fi­cient d’un fi­nan­ce­ment mas­sif de mil­liar­daires pro­gres­sistes dont So­ros est la tête de proue — et la tête de Turc des po­pu­listes — mais loin d’être la seule. Ain­si la Fon­da­tion Car­ne­gie avait-elle dé­pen­sé en 2003 100 mil­lions de dol­lars pour dé­fendre l’im­mi­gra­tion (lé­gale et illégale).

C’est une des ca­rac­té­ris­tiques amé­ri­caines : l’ar­gent coule à flots pour l’ex­trême gauche, qu’elle soit im­mi­gra­tion­niste, fé­mi­niste, LGBT, ou car­ré­ment is­la­miste. Toutes ces or­ga­ni­sa­tions, sou­te­nues par les bo­bos d’outre-At­lan­tique, ont noyau­té les uni­ver­si­tés, les mé­dias, et uti­lisent la jus­tice pour faire taire et rui­ner leurs ad­ver­saires. Comme en France. Plus qu’en France. La ri­chesse des do­na­teurs et l’ins­ti­tu­tion­na­li­sa­tion des lob­bys, qui trans­forment la quête de voix en achats de voix, fa­vo­risent les riches (les do­na­teurs) et les bien or­ga­ni­sés (les mi­no­ri­tés). Dans le pays d’Oc­ci­dent qui fut le plus ré­tif au so­cia­lisme et au mar­xisme, le po­li­ti­que­ment cor­rect a conquis de haute lutte l’hé­gé­mo­nie cultu­relle dont par­lait Gram­sci. Lau­rence Si­mon n’hé­site pas à mettre en cause Ba­rack Oba­ma icône dans les mé­dias fran­çais — et les in­fluences so­cia­listes, voire com­mu­nistes, qui ont nour­ri sa jeu­nesse mi­li­tante.

Cette femme si mo­derne dé­nonce sans fard l’évo­lu­tion des mou­ve­ments fé­mi­nistes. Ayant in­ter­viewé avant sa mort la Si­mone de Beau­voir amé­ri­caine, Bet­ty Frie­dan, elle ose rap­pe­ler qu’« en pri­vé, comme dans ses écrits, elle ex­pri­mait sur le tard ses craintes de voir le mou­ve­ment fé­mi­niste in­ves­ti par les les­biennes [et désormais les hommes trans, voir le président de la Fédération des femmes du Québec...], au nom de l’in­clu­sion, mais aus­si au risque de l’ex­clu­sion des autres femmes. L’his­toire lui a don­né rai­son ».

Cette triple ré­vo­lu­tion dé­mo­gra­phique, idéo­lo­gique, so­cio­lo­gique est en train de trans­for­mer la gauche amé­ri­caine. Le Par­ti dé­mo­crate trouve un charme nou­veau aux thèses so­cia­listes, mais pas seule­ment : le fé­mi­nisme, l’ho­mo­sexua­lisme, voire le tran­sexua­lisme agres­sifs forment un couple bi­zarre et pa­ra­doxal avec la mon­tée en son sein de l’is­la­mo-gau­chisme, et son frère de lait, l’an­ti­sé­mi­tisme. Il­han Omar siège voi­lée à la Chambre des re­pré­sen­tants. Les uni­ver­si­tés amé­ri­caines sont ar­ro­sées par la manne fi­nan­cière dé­ver­sée par l’Ara­bie saou­dite et le Qa­tar. Dès l’école pri­maire, l’en­doc­tri­ne­ment pro­gres­siste prend le pas sur l’ins­truc­tion.


Mais le plus tra­gique, et le plus poi­gnant, est le ta­bleau qu’elle des­sine de l’Amé­rique blanche : un dé­clin dé­mo­gra­phique qui s’ac­com­pagne d’un dé­clin pro­fes­sion­nel, so­cial, sa­ni­taire, et même sexuel. Un vé­ri­table dé­sastre : « Par­mi les pays riches, les É.-U. ont le taux de mor­ta­li­té in­fan­tile le plus haut et l’es­pé­rance de vie la plus basse. (…) Un en­fant sur cinq a faim et quatre sur cinq sont mal nour­ris (sans ou­blier la dépendance mé­di­cale aux opia­cés) (…). Le ni­veau de tes­to­sté­rone a chu­té dans les pays de l’Ouest et sur­tout chez les hommes blancs de la classe ou­vrière et de la classe moyenne. (…) Les chances des en­fants de la classe moyenne de faire mieux que leurs pa­rents ont chu­té de 90 à 50 %, mais les re­ve­nus des Amé­ri­cains les plus riches ont plus que tri­plé. » Entre 1999 et 2014, aug­men­ta­tion de 43 % des sui­cides chez les hommes blancs et 10 % des hommes blancs de 25 à 54 ans n’ont plus de tra­vail.

Chiffres en ra­fale qui s’ex­pliquent par une double po­li­tique née dans les an­nées 1960 : d’une part, une ou­ver­ture mas­sive à l’im­mi­gra­tion ve­nue du monde en­tier, alors qu’elle était li­mi­tée, jus­qu’en 1965, à ceux ve­nus d’Eu­rope ; une mise en œuvre des mé­thodes de dis­cri­mi­na­tion po­si­tive en fa­veur des Noirs, puis des femmes, qui s’est trans­for­mée au fil des an­nées en une po­li­tique de dis­cri­mi­na­tion pure et simple des hommes blancs, même très qua­li­fiés, au pro­fit des femmes, sur­tout si elles ap­par­tiennent à une mi­no­ri­té eth­nique.


Cette double pression conduit la majorité blanche à devenir minoritaire dans son propre pays et les hommes blancs hétérosexuels à devenir des citoyens de troisième catégorie au pays de John Wayne.

On aura compris que les progressistes auront ramené l’Amérique à la guerre des sexes, et à la guerre des races, et à la guerre des classes. On aura compris que le vote Trump aura été le dernier cri de ces « hommes blancs des classes populaires » (et souvent de leurs femmes) qui refusent de mourir. On aura compris que notre journaliste non seulement comprend, mais approuve ce sursaut vital. On aura compris que cette course de vitesse contre le temps et la mort de l’Amérique blanche donne au mandat de Trump une couleur tragique, bien loin des insultes dont il est abreuvé et des clowneries dont il est coutumier.

Les bobos américains
de Laurence Simon
paru le 1 juillet 2019
aux éditions Balland
à Paris,
540 pagesISBN-13 : 978-2940556274
Présentation de l’éditeur

Les Français n’ont pas le monopole du Bobo, ni du Coco. Bobos Sans Frontières est une organisation à but lucratif qui a traversé l’Atlantique depuis longtemps. Ses membres américains sont honteux d’être américains et veulent désespérément ressembler aux français (du 6e arrondissement de Paris, ou de l’Ile de Ré.) Ils ont donc décidé d’entrer en résistance. Il n’y a pas de décalage horaire entre les bobos français et les U.S. bobos qui louent le système socialiste. Les résistants français se battaient contre les troupes allemandes au péril de leurs vies. Foin de ce détail pour les bobos américains qui jouissent, dans une démocratie certes imparfaite, du droit d’expression le plus libre au monde. Les élites gauchistes formées à Yale et Harvard, à force de blâmer les péquenots et de défendre des minorités radicalisées ont poussé la frange modérée des États-Unis à refuser de voter pour Hillary Clinton en 2016. L’élection de 2020 ne se présente pas beaucoup mieux pour les bobos, surtout avec une économie qui repart et des « affaires » qui se dégonflent.

Biographie de l’auteur

Laurence Simon a parcouru de nombreux pays comme grande reporter de 1986 à 2001 (Turquie, Irak, Afghanistan, Chine, Inde, Soudan, Allemagne de l’Est où elle couvre la chute du Mur de Berlin en direct, Afrique du Sud où elle couvre la libération puis l’élection de Nelson Mandela, Serbie, Kosovo, Liban, Israël, Somalie, Kenya, URSSS et Russie...) avant d’être nommée en poste à Washington pour Radio-France et de devenir correspondante à la Maison-Blanche. Laurence a été accréditée Défense pendant de nombreuses années et elle a vécu l’expérience du combat. Elle a étudié à l’IHEDN (Institut des Hautes Études de la Défense Nationale.) Journaliste franco-américaine, elle vit aux États-Unis depuis 2000. Elle a aussi un Master en addictologie.