jeudi 30 novembre 2017

Repentance permanente — Les manipulateurs de l’histoire québécoise sont parmi nous

Extraits de textes de Mario Dumont et Mathieu Bock-Côté sur l’initiative de Valérie Plante, la nouvelle mairesse de Montréal, de commencer les réunions du conseil de ville non plus par une prière — laïcité oblige — mais par un rituel pénitentiel où elle affirme que Montréal qu’il s’agit d’un territoire agnier (mohawk en anglais) non cédé. La mode est à la contrition des Québécois de souche européenne et à la valorisation de « nos » racines amérindiennes. C’est également le cas à l’école (voir les liens ci-dessous).

De Mario Dumont :

La mairesse de Montréal tient son premier conseil de ville. Ses premiers mots sont pour rappeler qu’elle siège en « territoire autochtone non cédé ». Son prédécesseur Denis Coderre amorçait des discours avec les mêmes mots. Est-ce pertinent ? Pas vraiment. Est-ce vrai ? Pas sûr du tout.

En fait, la plupart des historiens s’entendent pour dire qu’à la fondation de Montréal en 1642, il n’y avait même plus d’établissement fixe des Iroquoiens du Saint-Laurent, la nation qui aurait auparavant habité Hochelaga. Quant à la prétention d’un territoire mohawk, ceux-ci se trouvaient plus au sud, surtout dans l’État de New York. [Les Agniers installés autour de Montréal aujourd’hui sont en fait des réfugiés qui fuyaient les persécutions de leurs congénères agniers et recherchaient la protection des Français autour de Montréal. Voir le cas de Sainte Kateri Tekakwitha (1656-1680), le Lys des Agniers, qui se réfugiera ainsi près de Montréal.]

Officiellement, les Mohawks souhaiteraient qu’on parle toujours d’un territoire mohawk non cédé. Les Hurons-Wendat revendiquent aussi Montréal, puisque l’île fait partie de la vallée du Saint-Laurent et des Grands Lacs. Compliqué ? Qui a été où, et à quel moment ? Plusieurs étaient plutôt nomades. Établi dans quel lieu en quelles années ? Difficile d’être certain.

Les fouilles archéologiques permettent aux historiens d’en apprendre encore. Dans un tel contexte, imaginez combien les politiciens se couvrent de ridicule en tranchant ces questions historiques.

Opportunisme politique

Alors pourquoi des élus en autorité répètent-ils à satiété une affirmation probablement erronée ? Réponse simple : parce qu’ils pensent que c’est politiquement payant. Ils pensent qu’il est de bon ton à l’ère Trudeau que la majorité s’autoflagelle. Ils pensent que dans la bien-pensance dominante, une telle approche donne bonne bouche.

Oui, je souhaite qu’on trouve des solutions concrètes pour que les jeunes Autochtones aient un avenir plus reluisant. Oui, je veux que les femmes autochtones retrouvent respect et sécurité. Mais je trouve totalement inutiles ces réinterprétations opportunistes et grotesques de ce qui s’est passé à Hochelaga entre 1600 et 1650.

Commencer chaque réunion du conseil par ce rappel constitue un symbole vide et tordu. Si Valérie Plante veut agir pour le bien des Autochtones en 2017, qu’elle le fasse.

Le rituel pénitentiel de la mairesse Plante s’inscrit parfaitement dans l’esprit qui anime le mandat de Djeustine Trudeau

De Mathieu Bock-Côté :

Ainsi, Valérie Plante a décidé de soumettre sa ville à un rituel pénitentiel. Elle commence les réunions du conseil de ville en disant de Montréal qu’il s’agit d’un territoire mohawk non cédé.

Denis Coderre n’était pas étranger à cette pratique, mais on sentait chez lui que cela relevait de l’opportunisme politique le plus grossier. Chez Valérie Plante, on devine le zèle idéologique dont a l’habitude une certaine gauche qui n’a de cesse de faire le procès du monde occidental.

Montréal

C’est ce que le philosophe français Pascal Bruckner avait appelé au début des années 1980 « le sanglot de l’homme blanc », qui ne cesse de se flageller publiquement à cause de son passé. Il témoigne aussi ainsi de sa supériorité sur ses ancêtres, qu’il présente comme des ploucs malfaisants.

Le problème, avec la déclaration de Valérie Plante, c’est qu’elle est historiquement fausse, comme en conviennent les historiens. Les esprits subtils diront qu’elle est problématique. Les esprits exaspérés la diront franchement mensongère.

Mais pourtant, les politiciens montréalais continuent de répéter ce bobard historique, comme s’ils n’avaient aucun scrupule à manipuler le passé, à déformer les faits, pour peu que cela corresponde à leur programme idéologique.

[...]

Tous conviennent qu’il faut aujourd’hui accorder une plus grande attention aux besoins des populations amérindiennes. Mais il n’est nul besoin de trafiquer la vérité historique pour cela.

[Note du carnet : une plus grande attention consisterait à abroger la Loi sur les Indiens comme le suggère Tom Flanagan. Les politiques indiennes actuelles assurent pouvoir et richesse à une petite élite d’activistes, de politiciens, d’administrateurs, d’intermédiaires et d’entrepreneurs privilégiés, tout en enfonçant davantage dans la misère la population qu’elles sont censées aider. Voir aussi le livre Au-delà de la Loi sur les Indiens Rétablir les droits de propriété autochtone au Canada de Tom Flanagan, Christopher Alcantara et André Le Dressay]

À moins que la déclaration de Valérie Plante ne repose sur la conviction suivante : fondamentalement, les nations d’ascendance européenne que sont le Québec, le Canada et les États-Unis n’ont pas leur place en Amérique.

Veut-elle nous dire, en répétant cette ânerie, que les Européens, en Amérique, n’ont été finalement que des envahisseurs et qu’ils ne devraient pas être ici ?

Ne se rend-elle pas coupable alors d’un anachronisme gênant ? Il y a des limites à réécrire l’histoire à partir des obsessions idéologiques du présent.

Mais la manipulation historique ne s’arrête pas là. On le sait, le gouvernement Couillard mène une consultation sur le racisme systémique, même s’il a cherché à la camoufler sous un autre nom.

Esclavage

On oublie souvent que les promoteurs de cette cause ont tendance à présenter l’esclavage comme un phénomène majeur dans l’histoire du Québec, qui aurait conditionné négativement notre société depuis ses origines à l’endroit de la diversité.

Mais on oublie de dire que l’esclavage a été marginal et qu’il n’a aucunement structuré notre société comme cela a été le cas dans le sud des États-Unis.

Mais encore une fois, cette histoire réécrite par des idéologues incultes et militants vise à culpabiliser les Québécois.

Cette entreprise de culpabilisation va bon train médiatiquement et personne n’ose s’y opposer vraiment.

Montréal n’est pas un territoire mohawk non cédé. Et la Nouvelle-France n’a pas été une aventure criminelle. Il serait temps de le rappeler à ceux qui nous gouvernent.

Si l'histoire de France et de l'Europe est singulièrement absente des écoles québécoises, les prières autochtones et le rapprochement délibéré entre l’écologisme et la spiritualité autochtone (en partie fantasmée) sont bien présents dans le matériel scolaire québécois. Ici une prière amérindienne à la Terre-Mère, illustration du manuel d’ECR Près de moi, publié par les éditions CEC, destiné à la 2de année du premier cycle du primaire, manuel B, p. 60

Voir aussi

Les habitants de Montréal à l’arrivée des Français parlaient-ils agnier (mohawk) ?

Spiritualité autochtone, écologie et norme universelle moderne

L’utilité de la glorification des Premières Nations

ECR — obsession pour les amérindiens écologistes


« Nos ancêtres, les Amérindiens » à l’école

Cérémonie, prière, danse sacrées amérindiennes dans une école laïque publique

« Notre » patrimoine matrimoine religieux autochtone

Le faux « sang indien » des Québécois

(Suite d’une autre prière amérindienne à la Terre-Mère, illustration du manuel d’ECR Près de moi, publié par les éditions CEC, destiné à la 2de année du premier cycle du primaire, manuel B, p. 61)

ECR — obsession pour les Amérindiens écologistes

Québec — Le peu de place consacrée à l’Europe (à la France) dans les programmes d’histoire

Canada — Financement par élève serait supérieur pour les écoles autochtones aux écoles publiques


Illustration du manuel d’ECR Mélodie, publié par Modulo, destiné au 1er cycle du primaire, manuel B, p. 8

Québec — Les professeurs sont-ils prêts au retour de l’enseignement des connaissances ?

Lettre ouverte de Gilles Laporte, porte-parole de la Coalition pour l’histoire, parue dans Le Devoir, 27 novembre 2017.

À la suite de l’action menée notamment par la Coalition pour l’histoire, les élèves québécois ont enfin droit depuis septembre 2017 à un cours d’histoire réformé en 3e et 4e secondaire. Unanimement salué, ce nouveau cours d’histoire du Canada et du Québec emprunte désormais une trame chronologique, résolument axée sur l’acquisition de connaissances et l’apprentissage de la méthode historique. Dans ce contexte, il y a lieu de se demander si la formation que reçoivent les enseignants québécois les prépare adéquatement à offrir des cours désormais plus substantiels.

C’est le point de départ de l’étude que j’ai pilotée avec mes collègues Laurent Lamontagne et Myriam d’Arcy à propos de la formation des futurs enseignants dans les universités québécoises et sur le niveau de satisfaction qu’ils en ont tiré une fois leur carrière commencée. On a ainsi passé au crible chacun des 14 programmes de formation des maîtres dans dix universités québécoises. On a ensuite interrogé plus de 200 enseignants d’histoire à propos de leur cheminement universitaire et sur le profit véritable qu’ils en ont tiré. On a enfin mené des entrevues approfondies avec certains d’entre eux pour mieux interpréter le sens des données obtenues.

Les résultats de l’enquête sont accablants. Tous établissements confondus, le baccalauréat en enseignement secondaire de quatre années accorde la part du lion aux cours de didactique, de psychopédagogie et de science de l’éducation en général. En revanche, moins de la moitié des cours suivis concerne la formation disciplinaire des futurs enseignants, soit la géographie et l’histoire.

Le constat est particulièrement dramatique à propos de l’histoire du Canada et du Québec. Tandis que les futurs enseignants doivent offrir 200 heures de cours sur ce thème dans le programme d’Univers social, ils n’auront eux-mêmes suivi pour s’y préparer que trois ou quatre cours de 45 heures, dont seulement deux obligatoires, généralement les cours d’histoire du Canada avant et depuis 1867.

En somme, si les enseignants semblent adéquatement formés pour gérer une classe, évaluer une compétence et évoluer dans le système d’éducation, il est évident qu’ils n’ont pas reçu le bagage disciplinaire suffisant pour enseigner adéquatement l’histoire nationale et exposer leurs élèves à des connaissances qui aillent un tant soit peu au-delà de ce qu’ils peuvent trouver dans le manuel de classe ou sur Internet.

Recommandations

Forts de ces constats, mais conscients de la complexité des enjeux et des dilemmes auxquels font face l’enseignant et l’école québécoise, nous soumettons neuf recommandations nuancées qui visent d’abord à soutenir le travail déjà mené dans les établissements. Ces recommandations consistent, primo, à renforcer d’urgence la formation disciplinaire, notamment en géographie et en histoire du Canada et du Québec.

Secundo, qu’on accroisse la souplesse de la filière de la formation de sorte, par exemple, que le détenteur d’un baccalauréat disciplinaire puisse accéder à l’enseignement après une année de cours d’appoint en pédagogie, et que les directions d’écoles aient davantage la liberté de répartir à leur guise les ressources enseignantes pour atteindre les objectifs et standards.

Tertio, qu’on institue enfin un véritable dialogue entre les facultés d’éducation — qui forment les enseignants — et les établissements scolaires qui auront à les embaucher de sorte de mieux définir les outils dont auront besoin les futurs enseignants.

Notre conclusion est finalement que les lacunes observées dans la formation disciplinaire des enseignants d’Univers social se vérifient aussi dans d’autres programmes, comme l’enseignement du français ou des sciences de la nature : le nombre de crédits [unités] accaparés par la formation en sciences de l’éducation aux dépens de la formation disciplinaire y est tout aussi disproportionné. Les constats et les recommandations faits par notre étude nous apparaissent donc généralisables à l’ensemble de la formation des maîtres au Québec et tous les intervenants de cette filière névralgique pour l’avenir du Québec sont invités à en prendre connaissance.