lundi 29 février 2016

Abus par la DPJ et par le personnel de l'hôpital pour enfants Sainte-Justine

Les droits de plusieurs parents et jeunes patients de l’hôpital Sainte-Justine ont été lésés lorsque leurs parents ont été soupçonnés à tort de maltraitance par des professionnels de cet établissement, conclut un rapport de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Une majorité de ces parents ont par la suite été lavés de tout soupçon.

Sur 13 plaintes déposées il y a plus de 2 ans, le comité des enquêtes de la Commission identifie 8 lésions de droits dans 6 dossiers. La Commission cite plusieurs articles de la Loi de la protection de la jeunesse « enfreints » par le personnel de Sainte-Justine ou par la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ).

Dans au moins trois cas, la Commission précise que le personnel de Sainte-Justine a outrepassé sa juridiction en effectuant une partie du travail d’évaluation des signalements, une responsabilité pourtant exclusive à la DPJ. Par exemple, le personnel a fait subir à des enfants de nombreux examens uniquement destinés à confirmer la maltraitance. « Dans ces cas, le personnel du CHU Sainte-Justine a outrepassé son rôle et empêché [le Directeur de la protection de la jeunesse] de jouer le sien », estime la Commission.

Catherine Major et Jean-François Morand, un couple de musiciens, font partie des plaignants.

« On parle de 50 % des cas où les droits n’ont pas été respectés, que ça soit des parents ou enfants. C’est énorme, il me semble que c’est gigantesque. »

— Jean-François Morand

Bandes dessinées — Quand Hergé expurgeait un missionnaire chez les Esquimaux

Nous sommes en 1971. À la demande de ses éditeurs scandinaves, Hergé se voit contraint de transformer son merveilleux album Destination New York. Jo, Zette et Jocko pris dans les glaces de l’Arctique ne rencontrent plus le père Francœur, mais le professeur Henrik Nielsen, ethnologue !

Barbu comme un missionnaire pouvait l’être. Dès la page 21, le brave père Francœur a disparu. Depuis 1971, les lecteurs de 7 à 77 ans ne savent plus que des missionnaires (souvent francophones) aidaient les Esquimaux à survivre dans le désert de glace.

L’avion du brave prêtre baptisé Santa Maria II perdra son nom et sa « mission » surmontée d’une croix sera tout simplement effacé d’un coup de gomme de la part d’Hergé…

Le remplacement de la figure d’un père missionnaire catholique francophone par un ethnologue suédois mène parfois à des incohérences scénaristiques : pourquoi les Esquimaux parlent-ils français comme Jo et Zette ? Pourquoi Jo et Zette sont-ils obligés de piloter eux-mêmes l’avion dans le cas de l’ethnologue (quels soins cet intellectuel peut-il prodiguer ?) alors que le missionnaire a un rôle spirituel essentiel pour ses ouailles esquimaudes.

La version de 1949 — Un missionnaire francophone, le père Francœur, la soutane
La version post-1971, un ethnologue scandinave « Nielsen », plus de soutane
Les Esquimaux continuent mystérieusement de parler français après 1971


1949 — Les postes de la mission, l’avion Santa Maria II
Post-1971 — L’avion n’a plus de nom, de simples « déplacements »


1949 — La mission
1971 — Le camp

1949 — La croix sur la mission, le père Francœur (et pour la graphie « iglou† »)
La croix disparaît, le professeur (et au passage pour la graphie, « iglou† »)


1949 — La croix bien visible sur la mission, le baptême à l’article de la mort, la nécessité de la mission
Version d’après 1971 — La croix (?) évidée, plus de baptême, on ne sait pas trop comment cet ethnologue pourra aider ces malades

Missions catholiques de l'arctique canadien

Parmi les missions du monde, celles du Grand Nord canadien ont souvent été considérées comme héroïques. Les Oblats s’y sont dévoués pendant plus de quarante ans. C’est en 1910 que Mgr Breynat décida de reprendre l’évangélisation des Esquimaux en la confiant au jeune Père Rouvière, âgé de trente ans. Le missionnaire partit l’année suivante pour le nord-est du Grand Lac de l’Ours où il avait appris que les Esquimaux du cuivre venaient commercer avec les Indiens. Lire sur ce sujet par exemple « La conquête missionnaire de l’Arctique ».





† Les dictionnaires Petit Robert et Larousse (« l’usage » comme disent certains) privilégiaient à l’époque « igloo » bien que l’on retrouvât depuis 1880 « iglou » (voir la traduction en français de Deux ans chez les Esquimaux de C. F. Hall). Le Dictionnaire de l’Académie (9e édition, 2005) n’écrit qu’« igloo ». Depuis 1990, la réforme orthographique préfère « iglou » (voir aussi ici). Sur le sujet de ces corrections orthographiques, voir Nénufar peut s’écrire ainsi depuis le XVIIe siècle.


Voir aussi

Comtesse de Ségur épurée

La Comtesse de Ségur déchiffrée : son vocabulaire est-il encore compris aujourd’hui ?

« Le Club des Cinq » caviardé car trop politiquement (et religieusement) incorrect et à la langue trop compliquée

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dimanche 28 février 2016

France — « C'est dans les écoles libres qu'on trouve les meilleures formations »

Anne Coffinier dirige une fondation qui favorise le développement d’écoles privées hors contrat, plus performantes, selon elle, que les écoles publiques. Entretien avec Jean-Paul Brighelli, enseignant et essayiste.

Jean-Paul Brighelli. — Vous dirigez la Fondation pour l’école. Pourriez-vous présenter brièvement cette organisation, ses buts, ses principes et ses réalisations ?

Anne Coffinier. Le but de la Fondation pour l’école est de contribuer à l’amélioration du système éducatif français dans son ensemble en le stimulant par le développement d’un secteur éducatif libre. Le développement d’établissements indépendants ou hors contrat n’est pas pour nous une fin en soi, mais, selon nous, le meilleur moyen de stimuler la réforme du système éducatif dans son ensemble, car l’Éducation nationale a montré son incapacité à le faire par elle-même. Nous voulons démontrer par les faits que des écoles authentiquement libres peuvent rendre à la société un service de bien meilleure qualité et à plus bas coût que les écoles publiques actuelles. Nos actions sont multiples. Je vous renvoie au site www.fondationpourlecole.org pour les découvrir plus précisément.

J’ajouterai une précision sur le statut de notre organisation. La Fondation pour l’école est une fondation reconnue d’utilité publique en 2008 par décret du Premier ministre après avis positifs du Conseil d’État et des ministères de l’Éducation nationale et de l’Intérieur. Une procédure donc contraignante et exigeante. Son statut de fondation reconnue d’utilité publique est parfaitement justifié au regard du caractère constitutionnel de la liberté d’enseignement, et donc de la nécessité d’encourager cette liberté dans un contexte où l’État ne s’en est pas suffisamment préoccupé (contrairement à d’autres pays comme la Suède, les Pays-Bas, le Danemark, qui prévoient un financement paritaire pour leurs établissements libres, tout en respectant effectivement leur liberté).

Notre fondation n’est financée que par des dons privés librement consentis par les personnes. Cette implication financière désintéressée de la société civile dans le secteur éducatif est une chance pour notre pays qui doit reconquérir ses avantages comparatifs en matière d’éducation. Chaque enfant scolarisé dans une école indépendante fait économiser entre 6 000 et 9 000 euros par an à la collectivité publique. Ces financements par don des écoles indépendantes ne lèsent donc personne, et surtout pas l’école publique.

samedi 27 février 2016

« The » Revenant, Hollywood et le Canadien français

Des Canadiens français du XIXe siècle sanguinaires et impitoyables dans « The » Revenant d’Alejandro Iñárritu, il n’en fallait pas moins pour mettre en colère Roy Dupuis selon le Huffington Post. L’acteur québécois qui devait interpréter un rôle dans le sixième long métrage du réalisateur mexicain juge le film mauvais et anti-canadien-français.


Bande-annonce du Revenant (apparemment le film sort en français avec un titre « en français » affublé de l’article anglais THE, difficilement prononçable pour le francophone moyen)

Un film historiquement faux

« The » Revenant — douze nominations à la prochaine cérémonie des Oscars — est un western sauvage tourné dans le Grand Nord canadien. Ancrée dans le XIXe siècle, cette production à 130 millions de dollars américains revient sur la vengeance du trappeur Hugh Glass, interprété par Leonardo Di Caprio (en lice pour l’Oscar du meilleur acteur).

« Je n’ai vraiment pas tripé sur ce film, a ajouté Dupuis. Au niveau de la trame, il arrive des événements qui n’ont tout simplement pas de bon sens ! J’espère qu’il ne gagnera pas l’Oscar du meilleur scénario, car le récit, c’est un peu n’importe quoi. Il n’y a aucune crédibilité dans cette histoire de vengeance ».

Un film fort éloigné du roman homonyme

Le film d’Iñárritu se veut l’adaptation du roman LE Revenant de Michael Punke. À la page « remerciements » de son roman, l’auteur parle d’une « centaine de lectures éprouvantes ». Mark L. Smith, le jeune coscénariste du film avec Iñárritu, dans les entrevues disponibles sur Internet, ne pointe, quant à lui, vers aucune recherche historique précise et confie n’avoir conservé, du livre, que l’attaque du grizzly et l’abandon du héros. Tout le reste, a-t-il reconnu sur craveonline.ca est « original ». C’est ainsi qu’il précise au sujet de l’attaque importante dans l’histoire des Arikaras « nous l’avons inventée » ou à propos d’un dialogue avec Dieu « C’est quelque chose qu’ils ont en fait inventé ».

Dans le livre, la soif de vengeance du héros Glass est motivée par le fait que deux hommes l’ont volé alors qu’il était à l’article de la mort, qu’il veut recouvrer son précieux fusil et sa dignité. Dans le film, Iñárritu et Smith inventent à Glass (Leonardo Di Caprio) un fils métis qui sera assassiné devant ses yeux par le raciste Fitzgerald (Tom Hardy).

Les producteurs du film avouent d’ailleurs leur très libre interprétation du livre au générique de fin où l’on voit que le long métrage est « Inspiré en partie du roman de Michael Punke », pas « Inspiré du roman », mais « en partie ». C’est plus honnête.

Canadiens français qui violent, pendent et tuent

Un plan en particulier du film d’Iñárritu a fait sursauter l’acteur Roy Dupuis, celui où l’on découvre plusieurs Amérindiens empalés, pendus à des arbres. Une inscription en français — « On est tous des sauvages » — ne laisse aucun doute quant à l’identité des coupables. « On les voit à peine pendant le film, mais quand on les voit, c’est pour les montrer comme d’affreux barbares. C’est les Canadiens français qui violent, qui pendent et qui possèdent les esclaves sexuelles. »

Outre qu’il dresse un portrait peu flatteur de nos ancêtres venus explorer l’Amérique du Nord, le long métrage est historiquement faux puisque, selon Dupuis, ce sont plutôt les Anglo-saxons qui ont été sans pitié envers les communautés amérindiennes de l’Amérique du Nord.

« Les Français sont arrivés avec la mission de faire des alliances avec les Premières Nations. Je ne dis pas qu’il n’y avait pas des brutes parmi les Français, mais la plupart d’entre eux ont épousé des Amérindiennes. Ils ont fondé des familles, ce qui a créé un peuple métissé nommé les Canadiens français, et voilà que Iñárritu les mets en scène en train de trucider les autochtones. Par contre, les Américains qui avaient pour mission de conquérir les terres, eux, n’ont rien à se reprocher. C’est complètement stupide ! »

Les remarques de Roy Dupuis sont globalement justes, bien qu’il semble céder à la mode récente du métissage généralisé en Amérique du Nord (de très nombreux artistes américains se découvrent ces jours-ci des ancêtres amérindiens sans apporter beaucoup de preuves, jusqu’à Justin Bieber : « Je suis en partie Inuit ou quelque chose »). Nous y reviendrons ci-dessous.

Plaire au public états-unien et anglo-saxon

Pour Roy Dupuis, le fait que le réalisateur de Babel ait eu le soin de préciser que les assassins n’étaient pas Américains est loin d’être anodin. « Le film est censé être basé sur l’histoire d’un vrai coureur des bois américain. Pourquoi donc le cinéaste n’a-t-il pas montré les meurtres commis par les Américains ? Sans doute pour ne pas les choquer ou les blesser, il a préféré insulter l’histoire. »

Ce n’est évidemment pas la première fois que le cinéma américain cherche à dorer la pilule pour ne pas briser l’image élogieuse que se font d’eux-mêmes les Américains. À notre connaissance, il n’y a pas de films américains sur :
  • les guerres meurtrières contre les Indiens au début de la colonisation (voir le Massacre de 1622), guerres féroces et implacables expulsions qui ont pu être renforcées par le fait que les colons anglais n’ont pratiqué qu’une faible évangélisation et par l’idée commune que les Indiens étaient de nouveaux Cananéens en face de nouveaux israélites, les puritains anglais. Walt Disney a fait un Pocahontas béat sur cette époque qui, selon le Guardian, révise l’histoire et blanchit la colonisation anglaise en Virginie ;
  • Les ravages des Anglais et des Américains en Nouvelle-France et en Acadie lors de la Conquête (la moitié des villes ont été détruites, un très grand nombre de maisons et de fermes le long du Saint-Laurent incendiées, la colonie avait perdu un septième de sa population et le peuple acadien avait été déporté) ;
  • la guerre contre Pontiac ; Amherst écrivait alors à un colonel « Vous ferez bien d’infecter les Indiens avec des couvertures, de même que toute autre méthode qui permettrait d’extirper cette race exécrable » ;
  • les prétextes fallacieux de la Guerre hispano-américaine de 1898, après l’explosion du USS Maine en baie de La Havane (explosion sans doute accidentelle) alors que l’opinion publique américaine fut atteinte, suivant l’expression d’un diplomate européen, « d’une sorte de furie belliqueuse », des manifestants brûleront alors des Espagnols en effigie dans les rues ;

    Résultat de la guerre contre l’Espagne en 1898 : 10 000 milles des Philippines à Porto Rico
  • la guerre et la répression aux Philippines (1899-1902) pendant lesquelles des centaines de milliers de Philippins seraient morts (voir ici en espagnol et là en anglais), le tout fut accompagné dès 1898 par une campagne pour y éliminer l’espagnol et le remplacer par l’anglais ;
  • Épisode de la répression américaine aux Philippines : « Tuez tous ceux de plus dix ans ! »
  • le très nombreux viols en Europe occidental par des soldats américains pendant la Seconde Guerre mondiale (en France dès le débarquement ainsi qu’en Allemagne), l’historienne Miriam Gebhardt avance le chiffre de 860 000 victimes allemandes, parmi lesquelles 190 000 auraient été violées par des GIs, c’est bien moins que les deux millions de violées avancés par Helke Sander.
  • etc.
Autres films populaires à la trame modifiée

« The » Revenant n’est évidemment pas le premier film américain qui arrange les faits (ou le scénario inspiré de livres) pour flatter les Américains et se moquer (parfois gentiment) des Français, minorer ou évacuer leur rôle.
  • Dans Le Patriote (The Patriot) avec Mel Gibson, un seul Français au rôle sympathique, mais un peu ridicule (Jean Villeneuve) incarne l’aide de la France. À la fin, à la Bataille de Yorktown, on voit succinctement au loin la flotte française, c’est tout. Or, il y avait autant sinon plus de soldats français à terre que de soldats américains à cette bataille et l’influence de la flotte française fut décisive dans la guerre. Il faut se rappeler que les choses allaient mal pour l’armée continentale avant l’intervention de la France (voir Valley Forge). La France prêta 12 millions de livres aux Américains, et en donna 12 autres millions. Elle consentit également à une avance de 6 millions de livres pour la reconstruction du pays. En tout, selon certains historiens, dont Stacy Schiff, la France dépensa près d’un milliard de livres pendant cette guerre. Tout cela résumé à un histrion de major Jean Villeneuve dans Le Patriote. Notons que le personnage de Mel Gibson, largement inspiré de Francis Marion, dit Le Renard des marais, aurait chassé (persécuté) brutalement des Indiens Chéraquis (Cherokees à Paris) et qu’il aurait violé ses esclaves. Le Patriote occulte d’ailleurs totalement l’esclavage pratiqué à l’époque, y compris par Francis Marion qui se plaignit que les Anglais libèrent les siens.
  • Maître à bord : de l’autre côté du monde avec Russel Crowe combine des éléments tirés de différents romans de Patrick O’Brian, inspiré de la vie du marin Thomas Cochrane. L’intrigue principale est tirée de De l’autre coté du monde, rapportant un épisode de la guerre anglo-américaine de 1812. Toutefois, dans la version cinématographique, l’action prend place en 1805, soit lors des guerres napoléoniennes, au lieu de 1812, à la demande, semble-t-il, des producteurs, afin de ne pas dépeindre des Américains comme des méchants devant une audience américaine. En conséquence, un vaisseau français fictif, l’Achéron, remplace la frégate américaine USS Norfolk du roman homonyme. Des vils français à bord de l’Achéron ont recours à de non moins viles ruses pour tenter de vaincre le noble et brave capitaine anglais. 
  • Jusqu’en 1870, c’est la France qui modernise l’armée du Shogun au Japon. Jules Brunet est un des officiers militaires français qui fera partie d’une mission d’instruction au Japon. Cet instructeur d’artillerie modernisera l’armée de samouraïs du Shogun, Dans Le Dernier Samouraï en 2003, Brunet est évacué et remplacé par un Américain fictif (il n’y a pas d’instructeur militaire américain au Japon à l’époque) interprété par Tom Cruise.
  • Il existe un film hollywoodien sur l’expédition de Lewis et Clark. Il s’agit d’Horizons lontains tourné en 1955 avec Charlton Heston (un an avant sa participation dans la superproduction Les Dix Commandements). Le film tend à évacuer quasiment totalement le rôle des Français dans l’expédition et mythifie celui de Sacagawea. Toussaint Charbonneau dans la vie réelle était l’époux de Sacagawea et le père de leur jeune fils pendant l’expédition. Dans le long métrage, il n’apparaît que, brièvement au demeurant, comme une brute sale, grassouillette, cupide, fourbe et mal embouchée qui réclame sa propriété, Sacagawea. Mais elle n’a d’yeux que pour le beau Charlton Heston, l’officier américain Clark qui lui conte fleurette et la séduit par ses discours et sa tendresse civilisés. Clark est l’auteur du journal de l’expédition. Celle-ci comptait effectivement l’Indienne Sacajawea (également nommée la « Femme-oiseau »). Elle servit d’interprète et guida à certains moments les explorateurs. Mais, à l’inverse de sa situation dans le film où elle tombe amoureuse de Clark, elle fut accompagnée durant tout le voyage par le trappeur « canadien » Toussaint Charbonneau qu’elle avait épousé avant le départ et dont elle avait un jeune enfant. Charbonneau, contrairement à sa description dans Lointains Horizons, était loin d’être antipathique, même s’il n’était pas sans défauts évidents.

    Clark ne mentionne à aucun moment dans son journal la moindre amourette. Clark et Sacageawa ne pouvaient d’ailleurs se parler en toute intimité puisque pour lui parler Clark devait passer par François Labiche qui comprenait l’anglais. Labiche traduisait ensuite en français pour Charbonneau qui ne parlait pas anglais et qui traduisait à son tour en meunitarri (gros ventre) à sa femme... Labiche n’est pas le seul absent du film, on ne voit pas plus le métis George Drouillard, qualifié de meilleur chasseur de l’équipée par Lewis. Cette mythification de Sacageawa (dont on sait peu de choses en réalité) et cette dépréciation du rôle des Français ne sont pas le seul fait de ce film, on le retrouve également dans plusieurs romans qui traitent de cette expédition. Voir Anti‑French Sentiment in Lewis and Clark Expedition Fiction. Le film The Revenant adopte à nouveau une « représentation libre » du personnage de Toussaint Charbonneau, incarné par l’acteur français Fabrice Adde, qui commet un viol. C’est ce rôle que Roy Dupuis a refusé.

Seulement métissé à 1 %

Roy Dupuis affirme que la « plupart d’entre [les Français] ont épousé des Amérindiennes. Ils ont fondé des familles, ce qui a créé un peuple métissé nommé les Canadiens français ».

Mais qu’en est-il au juste ?

Comme le rappelait Gérard Bouchard, la plupart des communautés autochtones ont toujours été situées à bonne distance des habitats québécois, ce qui mine l’idée de contacts fréquents. En outre, l’Église a toujours découragé les unions mixtes. La proportion de gènes amérindiens dans le bassin génétique des Québécois est donc très faible (moins de 1 %), comme l’ont démontré des analyses rigoureuses appuyées sur le fichier de population BALSAC.

Il faut aussi se méfier d’une illusion généalogique : combien faut-il d’ancêtres indiens (et à quelle génération ?) pour conclure qu’un Québécois a « du sang indien dans les veines » ? Je rappelle qu’à la onzième génération, chacun d’entre nous compte plus de 2000 ancêtres...

Que signifie la présence de quelques Autochtones ?

Le métissage n’a donc été une réalité importante que dans les Prairies et dans l’Ouest là où il n’y avait pas ou peu de femmes françaises. Louis Riel avait ainsi un huitième de sang indien. Ce peuple métissé ce sont précisément les Métis établis dans l’Ouest et non les Canadiens français en général.  

Les traits sociaux et culturels

Gérard Bouchard poursuit :

« Selon la thèse du métissage intensif, notre société aurait hérité ses principaux traits des Autochtones : la mobilité géographique, l’amour de la nature et de la liberté, une sensibilité sociale-démocrate, la recherche de la consultation, du consensus et du compromis, le communautarisme, le goût de la médiation, l’aversion pour les divisions et conflits.

Je relève ici quatre difficultés.

D’abord, tout cela suppose des transferts intensifs, à grande échelle et sur une longue période à partir des Autochtones vers les Québécois. On ne trouve rien de tel dans notre histoire, les contacts se faisant principalement aux marges.

Deuxièmement, le mépris que les Blancs ont porté aux Autochtones a fait obstacle à des emprunts sociaux massifs. Cependant, des éléments de culture matérielle autochtone se sont largement diffusés.

Troisièmement, les traits mentionnés peuvent tous être imputés à d’autres sources et avec beaucoup plus de vraisemblance. Par exemple : le fait d’une petite nation minoritaire, qui sent le besoin d’une intégration étroite, de solidarité et de concertation, ou le fait d’une société neuve par définition proche de la nature, contrainte à l’entraide et éprise de liberté. Les traits invoqués se retrouvent du reste dans le passé de toutes les collectivités du Nouveau Monde.

Enfin, le canal de transmission fait problème : il opérait à l’envers. Les présences soutenues de Blancs parmi les Autochtones sur le territoire québécois ont consisté dans l’action du clergé et celle du gouvernement fédéral, l’une et l’autre visant à réduire la culture indigène afin d’implanter la culture occidentale. Quant aux coureurs de bois, ils se sont beaucoup “ensauvagés”.

On aimerait que la thèse du métissage intensif soit fondée et qu’elle engendre les vertus recherchées. Malheureusement, les faits sont réfractaires. Le danger ici, c’est de remplacer un stéréotype par un autre. Sur ce sujet, le lecteur aura profit à consulter les écrits plus nuancés de Denys Delâge (qui parle de 1 % de mariages mixtes). »

Coexistence et alliances


Ce qui est vrai c’est que les Français n’ont pu tenir la Nouvelle-France qu’à l’aide de nombreuses alliances avec les peuples autochtones. De même, les trappeurs français n’auraient pu commercer sur des territoires aussi vastes où ils étaient très minoritaires qu’en vivant en bonne intelligence avec les Indiens. Comme l’a montré l’historien Denis Vaugeois, le commerce des fourrures demandait des talents de négociateur et la connaissance des langues autochtones.

Il faut rappeler que, très tôt, il y aura environ 20 fois plus de colons anglais que français en Amérique du Nord. Sans l’aide des Indiens, les Français n’auraient pu tenir aussi longtemps un si vaste territoire.

Ces alliances n’étaient pas feintes. C’est ainsi qu’après la défaite des Français à Québec et à Montréal, les Outaouais se soulevèrent pour ramener les Français en Amérique du Nord et rétablir un certain équilibre des forces dans cet immense territoire. Au début, la révolte fut fulgurante ; les forces de Pontiac s’emparèrent de tous les postes de la région des Grands Lacs (sauf Niagara et Détroit) et les détruisirent.

Les Britanniques mobilisèrent des forces et utilisèrent pour éteindre cette révolte tous les moyens possibles, dont la dissémination planifiée de la petite vérole. Finalement, voyant que par le traité de Paris de 1763 la France renonçait à revenir, les guerriers de Pontiac firent une dernière action militaire, le siège du fort Détroit, pour en chasser les Britanniques. Mais après plusieurs mois de blocus, ils rentrèrent chez eux et la révolte s’éteignit lentement.

Cette révolte força le roi George III à faire la proclamation royale de 1763, qui affirmait les droits illimités des Indiens sur les terres qu’ils occupaient et interdisait toute nouvelle colonisation au-delà des Appalaches, entraînant le mécontentement des marchands et des spéculateurs américains. Le rattachement ultérieur de toute la zone autour des Grands Lacs au Québec en 1774 (une « loi intolérable » selon les colons anglais) sera d’ailleurs une des causes indirectes de la Révolte des Treize Colonies.


Pour finir par un ouvrage de culture populaire, mais cette fois français et non hollywoodien, mentionnons la série Capitaine perdu de Jacques Terpant qui revient sur la fin de la Nouvelle-France dans les Pays-d’en-Haut et la très grande proximité des Français avec les tribus locales.


Présentation de l’éditeur

 1763. Suite au traité qui met fin à la guerre de Sept Ans, Le Roi de France cède l’Amérique aux Anglais. Mais contrairement à ce que pensait Voltaire, il ne s’agit pas de quelques arpents de neige, mais de l’équivalent du Canada d’aujourd’hui et d’une vingtaine d’États des États-Unis. Alors que les soldats français, peu nombreux, abandonnent leurs possessions aux tuniques rouges, les Indiens se soulèvent, et sous le drapeau à fleurs de lys du Roi de France, menés par le chef Pontiac, ils reprennent les fortifications des Français.

À Fort de Chartres, sur les bords du Mississippi, le dernier des capitaines français en place, devra remettre l’ultime fort à l’Anglais. Mais comment abandonner ses alliés indiens avec lesquels on a vécu, et parfois pris femme ? Comment obéir aux ordres du Roi sans les trahir ? Comment les aider sans se perdre ? Mais au fond, que veut vraiment le Roi ?

Après l’adaptation des romans de Jean Raspail (Sept Cavaliers), c’est dans l’un de ses livres de voyage que Jacques Terpant apprend l’existence, sur les bords du Mississippi, de Saint Ange [Louis Groston de Bellerive de Saint Ange est né à Montréal en 1700], le dernier des capitaines français qui dut remettre aux Anglais les clés de toute l’Amérique. Il signe en deux tomes et en couleurs directes une fresque de cette épopée ignorée, qui signa la fin du premier empire colonial [français].
Sur la page de couverture de Capitaine perdu cette citation de Francis Parkman : « La civilisation espagnole a écrasé l’Indien ; la civilisation anglaise l’a méprisé et négligé ; la civilisation française l’a étreint et chéri. »

Michèle Tribalat : La discrimination positive est une machine à fabriquer du ressentiment et qui favorise l’irresponsabilité

Michèle Tribalat est démographe, spécialisée dans le domaine de l’immigration. Elle a notamment écrit Assimilation : la fin du modèle français, a été publié aux éditions du Toucan (2013). Son dernier ouvrage Statistiques ethniques, une querelle bien française vient d’être publié (éditions de l’Artilleur).

Dans un article sur Atlantico, elle déclare au sujet de la discrimination positive :

« L’expérience américaine montre que les politiques préférentielles à l’Université pénalisent ceux à qui elle est censée profiter et qu’elles ont aidé de plus en plus souvent, au fil du temps, les classes supérieures.

Au début des années 1970, la moitié des Noirs qui entraient dans les universités d’élite venaient de familles dont les revenus étaient inférieurs à la médiane.

Au début des années 1990, ce n’était plus le cas que de 8 %.

L’expérience américaine, comme l’expérience indienne, montre aussi que les catégories ainsi “protégées” ont tendance à s’étendre indéfiniment et qu’il est pratiquement impossible d’y mettre fin.

 C’est une machine à fabriquer du ressentiment chez les bénéficiaires comme chez ceux qui en sont exclus et qui favorise une culture du grief, de la plainte et de l’irresponsabilité. »

Source

Rupture ou continuité : comment enseigner l’histoire ?

Extraits d’un article intéressant de Francis Denis, détenteur d’un baccalauréat en philosophie et une maitrise en théologie : 

Depuis quelque temps, le débat sur l’histoire du Québec et le problème de sa transmission refont surface. Méthode, mission, orientation, esprit, valeurs, toutes les raisons inimaginables sont aujourd’hui mises de l’avant pour justifier une énième réforme de son enseignement.

[...]

Modèle collectiviste s’il en est un, le Québec, nous dit-on, doit se limiter à un seul curriculum. De là émergent les différentes batailles de points de vue découlant de ce que l’on croit être le Québec d’hier et d’aujourd’hui.

[...]

Revisitez les manuels d’histoire des cent dernières années et vous remarquerez que l’orientation générale et le sens donnés aux évènements ont grandement changé. Historia semper reformanda pourrait-on dire ! Comprendre le débat actuel nécessite selon moi davantage un regard sur le présent que sur le passé.

Perte d’intérêt ?

[...]

Pourquoi est-il si difficile de transmettre le gout de la connaissance historique aux jeunes d’aujourd’hui ? Parce que notre vision de l’histoire est foncièrement contradictoire.

[...]  Elle se contredit parce que l’image que nous projetons de nous-mêmes et de notre époque entre en conflit avec la logique même de la transmission et de l’histoire.

Je m’explique. Notre temps, que d’aucuns ont qualifié de « fin de l’histoire », se targue d’être le summum de l’Histoire. Notre époque en serait donc une où la vraie moralité aurait enfin pris le dessus, où la vérité aurait pris la place de l’obscurantisme et où la technologie pourrait désormais accomplir la mission du salut de « l’homme par l’homme ».

Vision quelque peu caricaturale, néanmoins partagée par grand nombre de nos contemporains suivant ainsi docilement une certaine intelligentsia. Cette projection utopique de nous-mêmes serait le point d’arrivée auquel l’enseignement de l’histoire devrait mener. D’où la nouvelle sélection d’évènements et d’insistances saupoudrée de moralité politiquement correcte afin de bien reconnaitre pas à pas les signes et les héros avant-gardistes qui auraient travaillé à établir ce royaume eschatologique tant attendu.

Avant 1960, le déluge

[...] S’il n’a jamais fait aussi bon vivre qu’aujourd’hui, à quoi bon s’intéresser à ce qui nous a précédés ?

Si l’époque de la « Révolution tranquille » continue d’être présentée comme un évènement politique et culturel en rupture avec le passé, comment pourrons-nous susciter l’intérêt des jeunes Québécois pour leur patrimoine ?

Vous aurez remarqué la difficulté de ma position. Lorsque le seul terme qui me permet de qualifier l’évolution du Québec durant la deuxième moitié du vingtième siècle est celui de « révolution », nous voyons comment il sera difficile d’effectuer cette révision si nécessaire à l’enseignement de l’histoire.

[...]


En effet, comment un professeur m’enseignant la rupture historique pourra-t-il me convaincre de l’utilité et de la beauté de ce qui est venu avant moi ?
[...]
Présenter l’histoire du Québec comme étant centrale à la vie humaine tout en rédigeant, en caractères gras, l’indépendance historique de notre époque m’apparait contradictoire. Je crois que les jeunes comprennent assez vite ce genre de chose et c’est pourquoi ils s’en désintéressent.

En ce sens, ce ne sera pas seulement l’enseignement de l’histoire qu’il faudra réformer, mais la vision même par laquelle nous la regardons. Une histoire en continu et dans laquelle aucune période n’est le moindrement du monde indépendante de celle qui l’a précédée.

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Québec — Menace sur la liberté d'expression : le projet de loi 59

Texte de Mathieu Bock-Côté sur le projet de loi 59. Une nouvelle loi du cadenas ? Les intertitres sont de nous

Depuis quelques mois, on a cessé de suivre les débats entourant le projet de loi 59, grâce auquel le gouvernement Couillard entend lutter contre les discours haineux.

À tort.

Car nous sommes là devant une menace sans précédent pour la liberté d’expression.

Mais on apprenait il y a quelques jours que la députée du Parti québécois Agnès Maltais pratique contre lui une obstruction systématique. Elle veut nous alerter.

Car sous le couvert de la lutte aux discours haineux, c’est à la liberté d’expression qu’on s’en prend.

Propos haineux, concept vague et liberticide

La ministre de la Justice Stéphanie Vallée (ci-contre), qui porte le projet de loi, prétend l’avoir amélioré. Pourtant, nous sommes toujours devant une proposition catastrophique.

Qu’est-ce qu’un propos haineux ? Quoi qu’en dise le gouvernement, cela demeure terriblement flou. Ce grand flou autorisera toutes les dérives.

En fait, chaque minorité identifiée par la Charte des droits pourra se présenter comme victime de propos haineux.

Sera-t-il encore permis de critiquer l’islam comme religion et l’islamisme comme idéologie ? Sera-t-il permis de dire que certaines communautés culturelles s’intègrent moins bien que d’autres à la société occidentale ?

En fait, chaque minorité identifiée par la Charte des droits pourra se présenter comme victime de propos haineux. Comme d’habitude, ce sont les radicaux de chaque communauté qui décideront s’ils se sentent heurtés et qui militeront pour la censure.

Voyons plus loin. Qu’il s’agisse du souverainiste excité, du fédéraliste enragé, de la féministe radicale, du militant homosexuel sourcilleux ou de l’islamiste, chacun pourra se tourner vers son contradicteur obstiné et l’accuser de propos haineux.

Museler par le bras de l’État les opinions divergentes

Tous ceux qui dérangent l’idéologie dominante ou un groupe trop sensible pourraient le payer très cher. La liberté de critiquer la religion sera muselée.

Cette loi accorderait des pouvoirs exceptionnels à la Commission des droits de la personne et de la jeunesse (CDPDJ), qui porte bien mal son nom.

Car pour peu qu’on s’intéresse aux travaux de cette dernière, on constate qu’elle rêve fondamentalement d’une chose : devenir une police politique et trier entre les opinions respectables et celles qui ne le sont pas.

Nous n’avons pas besoin de contrôleurs idéologiques payés à temps plein pour surveiller les propos des uns et des autres.

Donner des droits à la CDPDJ, c’est en enlever aux citoyens.

Islamophobie ?

Martin Lemay, ancien député du Parti québécois de Sainte-Marie–Saint-Jacques, dans un texte paru il y a quelques mois, a parlé de la « loi du cadenas de Philippe Couillard ». La formule était aussi percutante qu’éclatante de vérité.

On s’en souvient, il s’agissait alors, sous le gouvernement Duplessis, au nom de la lutte contre la propagande communiste, de casser les mouvements sociaux progressistes.

Aujourd’hui, la déviance politique a changé de nom. Officiellement, on veut lutter contre l’islamophobie, ce mot fourre-tout qui vise à faire croire que la simple critique de l’islam ou de ses dérives relève de l’agressivité pathologique.

Dans les faits, ce sont les critiques du multiculturalisme et tous ceux pour qui la « diversité » peut poser problème qui sont visés. Au nom de la lutte contre les discriminations, on cherchera à les museler.

Stéphanie Vallée devrait mettre sa loi à la poubelle.

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jeudi 25 février 2016

Québec — L'immigration et son augmentation pour consolider l'option fédéraliste ?

Texte de Mathieu Bock-Côté dans La Vie agricole :

On parle en ce moment d’une nouvelle politique d’immigration à Québec. Mais nous pouvons déjà être à peu près certains du résultat : le gouvernement libéral proposera une hausse des seuils d’immigration. C’est normal : elle contribue à la consolidation de sa base électorale. Alors que le PLQ peine à obtenir plus de 25 % du vote francophone, il obtient des scores soviétiques chez les immigrants et les anglophones.

Cela lui permet aussi de cadenasser constitutionnellement l’avenir du Québec. On sait qu’en 1995, ce sont les immigrants et les anglophones qui ont fait pencher la balance vers le camp du Non en l’appuyant à peu près à l’unanimité. Il n’y a aucune raison de croire que lors d’un prochain référendum, les choses se passeraient autrement. Voyons-y un réalisme démographique élémentaire.

S’ils avaient un peu de vision et de courage, les partis d’opposition nationalistes militeraient pour une baisse significative des seuils d’immigration. Ils rappelleraient, comme on nous l’a encore confirmé récemment, qu’elle contribue à l’anglicisation de la métropole. 60 % des immigrants qui ne connaissent pas le français en arrivant ici ne veulent pas l’apprendre et se dérobent aux cours de francisation.

Ils démonteraient les légendes urbaines entretenues par la propagande patronale et relayées par un système médiatique convaincu des vertus de la mondialisation entourant la nécessité économique et démographique de l’immigration. On le sait, sa contribution économique est généralement neutre, et contrairement à la mythologie qui circule dans les médias, elle ne parviendra pas à rajeunir la population.

Mais nos partis d’opposition, pour l’instant, sont timorés. Le PQ et la CAQ se sont laissés convaincre que baisser les seuils ne se fait pas. Il suffit de poser la question pour risquer les injures habituelles des roquets au service du politiquement correct, pour qui la diversité est automatiquement une richesse, même si la multiplication des cas d’accommodements déraisonnables nous donne régulièrement la preuve du contraire.

Ils jouent même contre leurs intérêts électoraux, et préfèrent se faire croire qu’il suffirait de mener une politique plus « inclusive » à l’endroit des immigrants pour les faire basculer vers la grande famille nationaliste. Comme si le marketing diversitaire était la solution à tout. Si l'on considérait les choses froidement, on comprendrait que les nouveaux arrivants ne voient pas trop pourquoi ils rejoindraient le camp nationaliste.



Dans ce débat, on en trouvera pour nous revenir avec l’habituelle solution miracle : il suffirait de régionaliser l’immigration pour réussir son intégration. Théoriquement, ce serait l’idéal. Un immigrant qui s’installe dans une région où les Québécois francophones sont la norme a beaucoup plus de chance de s’intégrer à eux. À Québec, à Sherbrooke, à Trois-Rivières ou à Chicoutimi, on s’intègre mieux au Québec qu’à Montréal.

Mais depuis le temps qu’on nous en parle, c’est à se demander pourquoi nous ne nous y mettons pas. La réponse est pourtant simple : les immigrants n’en veulent pas. Massivement, ils s’installent à Montréal, parmi leurs proches. Ils ne veulent pas de la splendide mission qu’on leur réserve : repeupler des régions que les Québécois francophones désertent eux-mêmes. Ils préfèrent vivre en métropole, dans une grande ville.

Parlons franchement : l’heure est venue de réduire les seuils.

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France — Enseignant condamné pour pédophilie autorisé à enseigner par sa hiérarchie

Une histoire qui choque en France. Un professeur a été autorisé par la hiérarchie de l’enseignement public à donner cours dans un collège alors qu’il avait été condamné pour pédophilie en Grande-Bretagne. Il a de nouveau commis des attouchements sur mineurs et a été arrêté.


Un professeur condamné pour pédophilie en Grande-Bretagne embauché en France

L’Éducation nationale française savait qu’un professeur, mis en examen pour agression sexuelle d’un mineur de moins de 15 ans, avait déjà été condamné pour de tels faits en Grande-Bretagne, mais l’a laissé continuer à enseigner, a révélé vendredi Najat Vallaud-Belkacem, pointant un dysfonctionnement « insupportable ».

Ce professeur de maths au collège Blaise Pascal de Villemoisson-sur-Orge, dans l’Essonne, a été mis en examen jeudi, également pour détention d’images pédopornographiques, et placé en détention provisoire. « Dès lors que nous l’avons appris, il a été suspendu », a déclaré la ministre de l’Éducation lors d’une conférence de presse convoquée à la hâte. « À ce stade, rien ne permet de penser que ses élèves ont été victimes de ses agissements. »

Mais l’examen de son dossier a révélé « des faits d’une extrême gravité », a-t-elle ajouté : il « avait déjà été condamné par un tribunal britannique en 2006 pour relations sexuelles avec un enfant à partir d’un poste de confiance et pour voyeurisme » à 15 mois d’emprisonnement, condamnation versée à son dossier professionnel.

Une commission paritaire de l’enseignement réunie en formation disciplinaire en mars 2007 « avait conclu à l’unanimité de ses 35 membres à l’absence de sanctions ayant constaté que la “matérialité des faits” reprochés était sujette à caution et que le doute devait lui profiter », a-t-elle précisé, qualifiant d’« insupportable » le fait qu’il ait été autorisé à continuer d’enseigner. « L’Éducation nationale est responsable cette fois-ci puisqu’elle était informée. Elle n’aurait pas dû laisser ce monsieur continuer à exercer au contact d’enfants », a martelé la ministre, qui a lancé « une enquête administrative » et prendra, « le cas échéant, les sanctions qui s’imposent ».


Il a reconnu les faits

Depuis l’affaire de Villefontaine — un directeur d’école mis en examen au printemps pour viols d’une partie de ses élèves alors qu’il avait été condamné pour recel d’images pédopornographiques en 2008 —, l’Éducation nationale s’est engagée à passer au peigne fin le casier judiciaire de ses agents, a rappelé Najat Belkacem. Un projet de loi en cours d’examen au Parlement doit garantir que toutes les affaires mettant en cause ses personnels dans des affaires de pédophilie « soient transmises en temps utile » pour que des sanctions disciplinaires puissent être prises.

Une cellule psychologique a été mise en place au collège Blaise Pascal. « Je suis atterrée. On n’a pas été mis au courant » de la condamnation en Grande-Bretagne avant les déclarations de la ministre, a réagi Catherine Lucas, représentante de la fédération de parents d’élèves FCPE au collège de l’enseignant. « L’équipe pédagogique était déjà très choquée » après la mise en examen.

Les enquêteurs sont remontés jusqu’au professeur après l’arrestation le 10 février « pour des faits distincts » d’un jeune homme à Corbeil-Essonnes, qui leur a expliqué avoir été recruté par « des jeunes » pour « organiser une expédition punitive à l’encontre d’un individu susceptible d’avoir commis des faits d’agressions sexuelles », selon un communiqué du parquet d’Évry.

Le jeune homme remet alors spontanément à la police un téléphone portable récupéré par les personnes qui avaient fait appel à lui, dans lequel les enquêteurs retrouvent « plusieurs milliers d’images et de vidéos pédopornographiques ». Ils y trouvent également « un film vidéo » dans lequel un homme, qui s’avérera plus tard être l’enseignant, « était en présence d’un mineur sur lequel il commettait une agression sexuelle ».

Le suspect, un homme de 55 ans rapidement identifié, est interpellé mercredi matin à son domicile de Sainte-Geneviève-des-Bois, le lieu où « l’enfant avait été filmé ». Il a reconnu les faits en garde à vue, évoquant « des pulsions homosexuelles à tendances pédophiles ». Il a également raconté avoir fait « plusieurs voyages dans des pays du Sud-est asiatique pour y rencontrer de jeunes hommes au physique juvénile ».

L’enseignant, originaire de l’Essonne, dit sur sa page « Copains d’avant » être marié et avoir quatre enfants. Il a aussi « mis en musique Rimbaud, Baudelaire, Verlaine, Apollinaire », des disques qu’il propose à l’achat sur son site internet, où il offre aussi des fiches de révision pour le brevet de mathématiques.

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Pédophilie — un rapport sur l'affaire Jimmy Savile révèle que la hiérachie (de la BBC) savait

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Pédophilie — Un rapport sur l'affaire Jimmy Savile révèle que la hiérarchie (de la BBC) savait

Affaire Jimmy Savile (ci-contre) : un rapport révèle que la BBC savait, mais prend soin de disculper la haute hiérarchie.

La culture de la peur et de la déférence envers les célébrités à la BBC a favorisé les agissements pédophiles de son ancienne vedette Jimmy Savile, mort en 2011, selon une enquête interne publiée jeudi, qui absout toutefois la direction d’une responsabilité directe.

« Ma conclusion est que certains responsables juniors et de rang intermédiaire étaient au courant de la conduite sexuelle inappropriée de Savile dans le cadre de son travail pour la BBC » pendant des dizaines d’années, écrit Janet Smith, l’auteur de ce rapport de près de 800 pages.

« Cependant, je n’ai trouvé aucune preuve que la BBC, en tant que personne morale, était au courant » des agissements de l’animateur, qui a agressé 72 personnes dans le cadre de son travail à la BBC, a ajouté cette ancienne magistrate de la Cour d’appel, à qui cette enquête fut confiée en octobre 2012.

En cause : une culture de la peur et de la déférence envers les célébrités du groupe audiovisuel qui persiste encore aujourd’hui, une réticence du personnel à se plaindre ou à parler de leurs préoccupations par crainte de perdre leur travail ou encore le fait que les responsables les plus hauts placés n’encourageaient pas le dialogue.

Janet Smith prend ainsi l’exemple du révérend Colin Semper, responsable des contenus religieux de la BBC pendant de longues années, qui a eu des soupçons sur la conduite de Savile envers les jeunes filles sans aller jusqu’à les exprimer.

« Il y avait une culture hiérarchique au sein de la BBC qui favorisait l’idée que ce n’était pas à lui de soulever le problème de la conduite de Savile, mais que c’était de la responsabilité de quelqu’un de plus haut placé. Après tout, tout le monde semblait connaître les rumeurs », rapporte l’ancienne magistrate.

Le directeur général de la BBC, Lord Hall, a accueilli le rapport en exprimant ses regrets.

« Ce terrible épisode nous apprend que la célébrité est un pouvoir (...). Et comme tout pouvoir, il doit être mis face à ses responsabilités, il doit être remis en cause et il doit être surveillé, ce qui n’a pas été le cas », a-t-il dit, en présentant ses excuses aux victimes.

Selon un rapport d’enquête publié il y a trois ans par la police, Jimmy Savile avait profité de son statut de célébrité pour commettre 214 « actes criminels », dont 34 viols, entre 1955 et 2009.

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Pédophilie — Autre scandale dissimulé par la hiérarchie ?

Complicité de la hiérarchie de l’institution pour dissimuler de nombreux cas de pédophilie

États-Unis — Pédophilie dans une école primaire

Canada — La pédophilie : une orientation sexuelle comme l’hétérosexualité pour des experts

Scouts Canada s’excuse des cas de pédophilie qui auraient pu survenir

Pédophilie dans l’enseignement

États-Unis — pédophilie et sévices sexuels dans les écoles américaines

École laïque et républicaine — Enseignants pédophiles, on n’en parle que depuis récemment

Deux poids, deux mesures ? (artistes pédophiles excusés par des journaleux)

Mark Steyn : Penn State’s institutional wickedness (avec des détails scandaleux)



mardi 23 février 2016

Guernesey – Un devoir sur la conversion à Islam des élèves provoque la colère des parents

L’île de Guernesey, dépendance de la couronne britannique est secouée depuis peu par une polémique. Des élèves ont eu comme devoir à effectuer chez eux, la rédaction d’une lettre expliquant à leurs parents, leur choix d’embrasser l’Islam. Les jeunes élèves âgés de 12 à 13 ans devaient expliquer en détail les raisons de cette conversion. Un devoir qui n’a pas été du goût de nombreux parents qui ont fustigé cette initiative proposée dans un des collèges de l’île anglo-normande située non loin des côtes françaises, dépendance de la couronne britannique.

Pour beaucoup d’entre-deux, il s’agit ici d’une dérive dangereuse au regard de l’actualité marquée par le nombre croissant de ressortissants britanniques rejoignant les groupes terroristes en Syrie. Une mère de famille prénommée Gemma Gough a rapporté au DailyMail qu’elle et son mari avaient décidé de porter plainte auprès du département de l’éducation de Guernesey. « Les enfants sont trop influençables, imaginez si ces lettres tombent dans de mauvaises mains au cours des années à venir », a-t-elle ajouté.

Une inquiétude qui n’est pas partagée par le département de l’Éducation qui a déclaré : « Il est important que nos élèves soient capables d’apprendre, de comprendre, d’enquêter et d’interroger tout ce qui est autour d’eux. » De son côté, l’actuel Premier ministre de Guernesey Jonathan Le Tocq a récemment invoqué « l’islamophobie et la négativité » qui règnerait sur l’île pour justifier sa décision de ne pas accueillir les réfugiés syriens. Moins d’un pour cent de la population de Guernesey est musulmane et les autorités locales de l’île ont récemment refusé d’accueillir des réfugiés syriens.

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lundi 22 février 2016

Éthique — Pourquoi les médecins ont des réticences envers l'euthanasie

Texte de la docteur Dominique GARREL, médecin.

On a récemment observé que depuis que l’« aide médicale à mourir » est devenue légale au Québec, un nombre significatif de médecins ont manifesté leur refus de poser eux même le geste qui mettra fin à la vie de leur patient. Certains s’en étonnent, vu le consensus qui semblait régner lors de l’adoption du projet de loi 52 [adopté sous le nom Loi concernant les soins de fin de vie].


Je crois qu’on assiste à un retour du réel après une longue période de confusion. La première confusion est celle qui veut faire croire que l’euthanasie, rebaptisée « aide médicale à mourir », est un geste médical. [Le nom de la loi a bien sûr participé à cette confusion, à dessein.]

La deuxième confusion découle de la première, à savoir qu’un médecin, comme tout citoyen, peut parfaitement être en accord avec la légalisation de l’euthanasie, incluant le suicide assisté, au nom du droit à disposer de sa vie, sans accepter l’idée que non seulement il s’agisse d’un geste médical, mais d’un soin qu’il a l’obligation de prodiguer ou de contribuer à donner.

Le principe fondamental de la pratique médicale est de proposer des gestes dont les bénéfices l’emportent sur les risques. Toute la médecine rationnelle repose sur ce principe, qu’elle soit curative ou palliative.

« Mourir dans la dignité » autre euphémisme utilisé pour faire passer la loi autorisant l’euthanasie au Québec

Or le geste de donner la mort [même s’il était considéré comme moralement juste par d’aucuns,] ne peut d’aucune façon être qualifié de médical.

En effet, personne ne connait les conséquences de la mort. Nous savons seulement qu’elle est irréversible et que la personne qui meurt ne revient pas. Le médecin, comme tout le monde, ne sait rien d’autre. L’idée que la personne va cesser de souffrir si on met fin à ses jours est très répandue, mais elle repose sur des croyances quant à ce qui se passe, ou ne se passe pas, après la mort. Il n’y a rien de scientifique dans ces croyances.

C’est devant cette ignorance que les médecins ont toujours refusé l’euthanasie et pas seulement à cause de convictions morales ou religieuses. La Loi [sur l’euthanasie et « les soins de fin de vie »] instrumentalise les médecins pour poser un geste dont la justification est une question de philosophie politique. Il n’est pas étonnant que certains d’entre eux ne veuillent pas collaborer.

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L’euthanasie, jusqu’où ?

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Euthanasie au Québec — Quid de l’autonomie des médecins ? Consensus fondé sur la confusion des termes.


vendredi 19 février 2016

Le Maroc enterre trente ans d’arabisation pour retourner au français

Le 1er décembre 2015, le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, apprend que le ministre de l’Éducation nationale, Rachid Belmokhtar, unproche du palais, avait présenté au cabinet royal un important programme visant à « franciser » l’enseignement des mathématiques, des sciences naturelles et des sciences physiques. Ce projet, qui prévoit aussi l’enseignement du français dès la première année du primaire au lieu de la troisième actuellement, a été préparé en catimini et présenté par le ministre au roi sans que Benkirane en soit informé. Benkirane est le principal dirigeant du Parti de la justice et du développement (arabe : حزب العدالة والتنمية, Hizb al-εadala wa at-tanmia) ou PJD, un parti politique marocain islamiste.

Celui-ci est hors de lui et devant les députés médusés, il ne mâche pas ses mots en s’adressant à son ministre de l’Éducation : « Tu t’es attelé à l’introduction du français, mais alors le feu va prendre ! Cela, c’est le chef du gouvernement qui l’estime et l’évalue... C’est pour cela que quand Sa Majesté le roi a décidé un jour de choisir un chef du gouvernement, il n’a pas désigné Belmokhtar, il a choisi Benkirane… S’il voulait Belmokhtar, il l’aurait pris, il le connaît avant moi. Il m’a désigné moi pour que ce soit moi qui décide… et c’est pour cela que je [t’ai] adressé une lettre pour [te] dire que cette décision de franciser ces matières, il faut que [tu] l’ajournes afin que nous y réfléchissions parce que moi je n’étais pas au courant et que [tu] n’y as pas accordé d’importance. »

Mais rien n’y fait. Le 10 février, l’enterrement de l’arabisation de l’enseignement est validé lors du dernier conseil des ministres présidé par le roi à Lâayoune, chef-lieu du Sahara occidental. La bataille pour la mise à l’écart de ce projet paraît définitivement perdue pour les islamistes qui dirigent l’actuel gouvernement, se réjouissent les partisans du retour à la langue de Molière dans les écoles et les lycées. Notons que le roi Mohammed IV a également fortement soutenu les revendications des berbérophones au Maroc (environ 30 % de la population), le berbère est enseigné dans les écoles marocaines depuis une dizaine d’année, un Institut royal de la culture berbère (IRCAM) est richement et responsable de la normalisation de la langue.

Enseignement du berbère (avec des tifinaghs) dans une école marocaine


« Arabisation et islamisation vont de pair »


« Pour eux [les islamistes], arabisation et islamisation vont de pair, car la langue est liée à la pensée », se félicite Ahmed Assid, un professeur de philosophie aux positions laïques. « Ce retour aurait dû se faire depuis longtemps. Nous avons perdu trente ans à cause de petits calculs idéologiques. Avant d’arabiser, l’État marocain aurait dû d’abord réformer la langue arabe dont le lexique et les structures n’ont pas varié depuis la période préislamique », ajoute-t-il.

C’est dans le début des années 1980, avec l’arrivée au gouvernement du parti conservateur de l’Istiqlal, que l’arabisation de l’enseignement public a été mise en place avec la bénédiction implicite du roi Hassan II (1961-1999). Renforcer les conservateurs et les islamistes au détriment de la gauche marocaine (moins enthousiaste à l’égard de l’arabisation) était un objectif majeur du palais.

« À partir des années 1960, le Maroc a commencé à “importer” des enseignants d’Égypte et de Syrie afin de conduire le processus d’arabisation. C’est à cette époque que le wahhabisme et la pensée des Frères musulmans se sont progressivement introduits dans le royaume », souligne l’historien Pierre Vermeren. Plus de seize ans après la mort d’Hassan II, la réforme de l’éducation n’a toujours pas eu lieu alors que l’enseignement privé ne cesse de s’amplifier au détriment de l’école privée : de 9 % en 2009, la part des élèves scolarisés dans le privé est passée à 15 % en 2015, selon Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights, un centre de recherches sur les inégalités dans l’accès à l’éducation.

Entrée du lycée français d’Agadir, section maternelle

Une école publique marocaine de piètre qualité

L’enseignement dans les écoles publiques est considéré comme de mauvaise qualité (ce que semblent prouver les chiffres de l’OCDE qui classent le Maroc au bas des pays évalué 73e sur 76) alors que les écoles privées francophones y sont réputées comme strictes. Alors que les écoles publiques sont musulmanes (les élèves doivent y apprendre des passages du Coran par cœur, ce qui insupporte certains parents progressistes), les écoles francophones sont généralement laïques. Il existe des écoles officielles subventionnées françaises, une belge francophone et plusieurs des missions laïques françaises non subventionnées.

Les autres pays du Maghreb (l’Algérie et la Tunisie) ont également connu cette même arabisation forcée (parfois de populations berbérophones...) et une radicalisation religieuse croissante. Le chef spirituel du parti islamiste tunisien Ennahda, Rached Ghannouch, refuse de parler français.

« Inutile et contreproductif »

Ouvertement hostiles au projet, les islamistes du PJD adoptent pour l’instant un profil bas. « Franciser notre enseignement n’est pas la meilleure solution, mais nous n’allons pas entrer en conflit avec la monarchie. C’est inutile et contreproductif. Ce projet montre à quel point le lobby francophone est encore puissant et à quel point notre pays dépend de la France », commente, désabusé, un député du PJD qui a préféré garder l’anonymat.

Selon les derniers chiffres officiels, le réseau des établissements scolaires d’enseignement français au Maroc est tout simplement le plus dense au monde avec, à la rentrée de 2015, plus de 32 000 élèves dont plus de 60 % des Marocains. Ces établissements (près de vingt-cinq aujourd’hui) couvrent les principales villes du royaume. Seuls les Marocains les plus aisés ont les moyens financiers d’y inscrire leurs rejetons. Voir les prix pratiqués.

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mercredi 17 février 2016

Mathieu Bock-Côté : L’école brisée

Texte de Mathieu Bock-Côté publié aujourd’hui :

L’école, l’école ! Péquistes, libéraux et caquistes, tous ensemble, répètent à quel point ils y tiennent.

Ces temps-ci, on parle d’un plan pour encourager la persévérance scolaire. C’est très bien.

Mais une question demeure : pourquoi les jeunes sont-ils si nombreux à croire l’école superflue et à décrocher ? Comment leurs parents peuvent-ils les laisser faire ?

Cela témoigne de la persistance d’une vieille croyance remontant à la part la plus triste de notre passé : les meilleurs s’instruiront, les autres se débrouilleront. C’est une croyance funeste.

À quoi sert l’école ? Cette question nous hante.

La droite économique a sa réponse : préparer les jeunes gens au marché du travail.
Nous avons renoncé au culte des livres : on les traite comme des objets désuets, faits pour accumuler la poussière.

Elle insiste pour que l’école soit connectée à l’entreprise. On convaincra les jeunes d’y aller et d’y rester en leur montrant qu’elle sert à quelque chose. Avec elle, on peut faire de gros sous.

La gauche pédagogique prend le problème autrement : pour elle, l’école sert à combattre les inégalités.

C’est une machine de nivellement social. Et pas toujours vers le haut. On l’invite aussi à lutter contre les préjugés, les discriminations et tout le tralala qui alimente le politiquement correct.

La culture

Ce qui se perd, ici, c’est la valeur de l’éducation en soi.

On continue de croire que la culture est un luxe, une passion pour les riches, et peut-être même un signe de snobisme.

Honte à celui qui parle bien sa langue ! Ce ne peut être qu’un prétentieux. Si c’est un garçon, c’est encore pire : on veut qu’il se passionne pour le basketball et le motocross, pas pour Woody Allen ou Alexandre Dumas. Sans quoi, on doutera de sa virilité.

Il y a quelques années, une femme ardemment engagée dans la vie publique m’avait expliqué que l’enseignement de l’histoire était superflu au niveau collégial.

Sa raison ? Les uns aiment l’histoire, les autres non. Il faudrait respecter les goûts personnels de chacun et ne pas imposer une matière commune.

La technophilie débile en rajoute. On s’imagine que Google est l’encyclopédie dont chacun a besoin. Mais on peut s’y perdre si on ne s’y aventure pas avec une solide culture.

Quant à elle, la pédagogie des compétences, qui a remplacé celle des connaissances, a programmé l’inculture du plus grand nombre.

L’âme

Nous avons renoncé au culte des livres : on les traite comme des objets désuets, faits pour accumuler la poussière. Nous nous comportons comme des barbares.

On l’oublie, mais la culture a quelque chose de sacré. Elle parle à l’âme. Elle touche à ses besoins les plus fondamentaux. Ceux qu’on ne peut chiffrer, mais que tous ressentent intimement.

Elle modèle de jeunes esprits en leur apprenant à admirer plus grand qu’eux.

Elle sème dans le cœur le désir des belles et grandes choses.

La littérature nous fait aimer la langue.

L’histoire nous délivre d’un présent refermé sur lui-même.

La philosophie nous rappelle l’existence de questions éternelles.

On ne raccrochera les jeunes à l’école qu’en comprenant qu’elle doit transmettre un patrimoine de civilisation aussi nécessaire à la vie que l’oxygène.

Nous en sommes loin.

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Le PQ et l'éducation, la méthode comptable : ne penser qu'à lutter contre le décrochage

France — Le pédagogiste, symbole de l'égarement intellectuel


La réforme du collège, défendue par Najat Belkacem (ci-contre) et censée entrer en vigueur à la rentrée 2016, peine toujours à faire l’unanimité du côté des professeurs. Enseignant de lettres classiques dans l’académie de Strasbourg, Didier Jodin dénonce la fascination de la ministre et de ses conseillers pour les dogmes de ce qu’il est convenu d’appeler le « pédagogisme » dans les colonnes du Nouvel Obs, l'hebdomadaire emblématique de la gauche parisienne :

La réforme du collège provoque une vaste indignation chez les professeurs. Oscillant entre mensonges condescendants et silence méprisant, Najat Belkacem ajoute à cette exaspération sans précédent. Une ministre qui donne des leçons de pédagogie, et de manière si dogmatique, est comparable à un notaire qui prétendrait entraîner une équipe de curling.

Les éléments idéologiques destinés à justifier la réforme, à défendre contre tout bon sens ses absurdités et ses incohérences, lui ont été donnés par ses conseillers. Ils n’approchent jamais, ni de près ni de loin, ce qui pourrait ressembler, de près ou de loin, à un élève. Mais ils ont su collecter les dogmes de ce qu’il est convenu d’appeler le « pédagogisme ».

En suivant le mot-croisillon #College2016 [ils acceptent pourtant les accents...] sur Twitter, on voit le terme apparaître souvent. La colère des professeurs y est vive, depuis bientôt un an, et ils utilisent ce néologisme pour synthétiser l’égarement intellectuel qui a guidé cette réforme. Très minoritaires, les pédagogistes utilisent parfois la même balise pour dire leurs louanges au sort jeté sur le collège.

De quoi tenter, par ce double éclairage, l’ébauche d’un portrait du pédagogiste.

Une passion pour le gadget

Le dogme de base, celui auquel se réfère tout pédagogiste digne de ce nom, peut s’énoncer ainsi : ce qui est innovant est bon.

Il se passe volontiers de toute analyse de ce qui fonctionne mal au collège tel qu’il est, et n’analyse pas plus les vertus réelles ou supposées de l’innovation. Il ne considère que cet axiome : si c’est nouveau, c’est bien — et l’on sait qu’un axiome n’a pas à être démontré. Le pédagogiste est la victime de la mode de tout ce qui peut se présenter comme neuf.

Explose ainsi une passion furieuse pour les « cartes mentales ». Cette nouveauté, vieille comme le monde, est ce qui s’appelle en français un schéma, à ceci près qu’il s’agit ici d’un schéma à la modalité unique : les liens entre les notions abordées se présentent en embranchements multiples, avec des subdivisions à l’infini. Buissonnant de tous ses mots, l’exposé ainsi créé est le plus souvent d’une complexité qui rend l’ensemble illisible.

Par son principe, la « carte mentale » est censée imiter les réseaux neuronaux du cerveau, et certaines cartes conduisent à s’inquiéter de l’équilibre psychiatrique de leurs auteurs. Mais ce qui étonne, c’est l’attitude du pédagogiste face à ce jouet. Il en fait une panacée innovante, donc un objet à vénérer, et de fait on le voit célébrer les enchevêtrements comme il le ferait d’une divinité.

Une fascination pour l’informatique

La « classe inversée » est une autre de ces modes. Il s’agit de faire les exercices en classe, après que l’élève, chez lui et seul, a lu ou vu la leçon. Le pédagogiste ayant une méfiance naturelle pour les manuels scolaires — structurés, donc suspects —, la leçon, rebaptisée « capsule », devra de préférence prendre la forme d’une vidéo.

Avec son esprit de système, le pédagogiste ne fait pas de la « classe inversée » un dispositif ponctuel, mais un rituel dont il serait malvenu de s’écarter.

Dans un extraordinaire paradoxe, il cherche l’innovation en renouant avec l’enseignement scolastique dont Rabelais et Montaigne nous avaient débarrassés. Et tant pis pour l’élève qui, chez lui, ne comprend pas pourquoi son professeur de français s’est déguisé en Superman pour sa capsule vidéo sur le superlatif (non, ce n’est pas une caricature, cela existe).


Une salle d’ordinateurs dans une école secondaire

Plus généralement, tant pis pour l’élève qui n’a pas des parents en mesure de décoder pour lui ces « capsules » venues de l’espace, ces cours magistraux donnés ex cathedra, sur un ton comique pas drôle, sans aucune interaction d’aucune sorte entre le professeur et l’élève, pas même celle d’un croisement de regards.

Un point commun de ces deux exemples : cartes mentales et capsules vidéo se conçoivent en bricolant avec des logiciels. Probablement frustré par des parents qui ne l’ont pas laissé jouer à Mario Bros, le pédagogiste idolâtre l’informatique, même utilisée à contre-emploi.

Aussi pauvre soit-il, tout logiciel le fait entrer en transe.

La culture est un tabou

Si l’innovation est un totem, la culture est un tabou. Le pédagogiste a lu l’« Émile » sans comprendre qu’Émile n’existait pas, et en ignorant que Rousseau avait abandonné ses cinq enfants.

Il a lu Bourdieu et en a tiré la conclusion que tout héritage et toute transmission de connaissances étaient des œuvres du diable. Il a lu « La Pluie d’été » de Marguerite Duras en s’imaginant que le personnage d’Ernesto était un philosophe de l’éducation, lui qui déclare :

« Je retournerai plus jamais à l’école parce qu’à l’école on m’apprend des choses que je ne sais pas. »

Le pédagogiste est donc entré en croisade contre l’idée hérétique que les professeurs seraient là pour apprendre des choses aux élèves. L’UNSA, syndicat autoproclamé « utile » — et vite rebaptisé « futile » —, est le repaire des quelques professeurs favorables à la réforme.

Pour minoritaire, groupusculaire et crépusculaire qu’elle soit, cette chapelle permet, grâce aux interventions de ses membres, de révéler une autre ligne de force de leur idéologie : la condamnation du savoir. Un syndiqué futile a ainsi brillé par ce gazouillis :

« Et si on arrêtait de donner aux élèves des réponses à des questions qu’ils ne se posent pas ! »

Ce rejet de la culture peut aller très loin

On comprend l’idée : le professeur ne doit pas transmettre une culture tant que l’élève n’est pas avide de la recevoir.

Quand le collégien se préoccupera de connaître la hauteur d’une pyramide, quand cette question hantera ses nuits, quand il ne pensera plus qu’à cela, alors seulement il sera permis à son professeur de mathématiques de lui parler de Thalès, avec force cartes mentales et capsules vidéo. Mais lui imposer la compréhension d’un théorème alors que cela ne correspond à aucun de ses besoins premiers aurait quelque chose de sacrilège.

Dans l’Académie [grosse commission scolaire française] de Lyon, lors d’une présentation de la réforme à ses collègues atterrés, un pédagogiste (sans humour, par définition) a proposé (sans humour, donc) que la lecture de « Madame Bovary » soit commentée avec les élèves curieux d’étudier le régime alimentaire d’Emma, inquiets de vérifier s’il était équilibré, intéressés par l’action du vinaigre sur l’indice de masse corporelle, anxieux de connaître la dangerosité de l’arsenic.

Dans les écrits de Flaubert, ce ne sont pas le thème de la bêtise et le registre de l’ironie qui sauraient retenir l’attention du pédagogiste.

Le pédagogiste n’aime la liberté que corsetée

Liée à sa méfiance pour la culture, l’aversion du pédagogiste pour l’enseignement des disciplines trouve un bel écho dans la réforme du collège, elle qui fait de l’interdisciplinarité un saint Graal.

Chaque professeur, depuis toujours, fait des liens entre sa matière et les autres : un professeur de français situe une œuvre littéraire dans son contexte historique, un professeur de maths dit qui était Pythagore avant d’aborder son théorème. Ils se réunissent aussi, par affinités et librement, sur des projets interdisciplinaires précis et auxquels ils croient, avec un objectif clair et pour une durée limitée.

Mais le pédagogiste n’aime la liberté que corsetée, et il se réjouit que tout cela subisse le cadrage bureaucratique d’une réforme qui impose de l’interdisciplinarité quantifiée, sur 20 % du temps de l’élève, selon six thèmes parmi les huit qui sont imposés, répartis à raison de deux par année sur 3 ans.

Pourquoi 20 %, pourquoi six, pourquoi huit, pourquoi deux, pourquoi trois ? Voilà des questions auxquelles le pédagogiste de base aurait tout autant de peine à répondre que ses coreligionnaires ministériels. Peu lui chaut : souvent isolé dans son établissement, il n’aura plus à attendre qu’un collègue le trouve sympathique pour pouvoir travailler avec quelqu’un.

Une pensée qui empêche de fait l’interdisciplinarité

Attaché au constructivisme, théorie de l’éducation selon laquelle l’élève élabore son savoir par lui-même et librement, le pédagogiste aime paradoxalement recevoir la vérité révélée, quand c’est le ministère qui impose ses thèmes et ses cadrages. C’est alors une parole qui ne se critique pas, même lorsqu’elle empêche de fait l’interdisciplinarité qu’elle prétend mettre en place.

Des disciplines comme les langues et cultures anciennes étaient en effet interdisciplinaires par définition. La réforme casse cela, et le pédagogiste se réjouit de cette incohérence innovante : un saupoudrage de civilisation éventuellement dispensé ici, et un peu de langue éventuellement abordée là-bas.

Les programmes de français et d’histoire favorisaient naturellement l’interdisciplinarité, parce que pour chaque niveau les époques abordées étaient communes aux deux matières.

Il n’en est plus rien, car un cyclone dévastateur est passé par là, avec des programmes qui envisagent désormais les niveaux de 5e [12/13 ans], 4e [13/14 ans] et 3e [14/15 ans] en bloc, dans ce qui est curieusement appelé un « cycle », comme si les pédagogistes ministériels savaient confusément qu’en fin de 3e un élève resterait au niveau qu’il avait en début de 5e.

Le pédagogisme, un objet hors-sol

Peu importe qu’on casse les liens qui étaient cohérents, car l’interdisciplinarité n’a plus à se justifier par sa pertinence, il faut simplement qu’elle soit. Le pédagogiste ne lui demande rien d’autre que cela : être.

La réalisation de maquettes d’éoliennes est un exemple donné par le ministère, et c’est un sujet d’extase pour le pédagogiste, d’autant plus qu’il considère que la matière « développement durable » doit primer sur l’allemand, le latin ou le grec.

Après un trimestre consacré aux maquettes, mais sans crédits pour acheter des alternateurs, le professeur de physique pourra expliquer aux élèves pourquoi leurs éoliennes ne donnent pas d’électricité, et cela ouvrira leur esprit. Une interdisciplinarité aura été, et le pédagogiste sera ravi.

Ces éoliennes en carton sont une belle allégorie, à la fois de la réforme et du pédagogisme qui la sous-tend : un brassage de vent et une perte d’énergie. Chaque discipline a une pédagogie qui lui est propre, c’est une évidence.


Classe d’une école française

Le pédagogisme, lui, est un objet hors-sol, qui ne se soucie d’aucune culture ni d’aucun savoir. C’est un objet qui se contient lui-même et ne contient rien d’autre.

Dans « La crise de l’Éducation », Hannah Arendt a analysé ce contresens d’un enseignement autocentré et vidé de son contenu. Si le pédagogiste avait lu la philosophe, il se ferait apostat. Mais ce n’est pas le cas, et le personnage continue à s’essouffler en agitant ses petits bras dans le vent. Sans les dégâts culturels que ses gesticulations provoqueront chez les élèves, il ferait rire.

Mais le désastre est annoncé.

Très soucieux des questions d’évaluation, passionné par les myriades d’items disparates à valider pour chacune des microactivités innovantes de ses élèves, le pédagogiste a en commun avec l’Éducation nationale d’être incapable de s’évaluer lui-même. Mais les Québécois, eux, savent le faire.



Baisse de niveau et accroissement des inégalités

Une étude scientifique, menée rigoureusement et sur le long terme, est parue en 2015 pour évaluer le « Renouveau Pédagogique », réforme qui a commencé chez eux à toucher le secondaire il y a dix ans, et dont la réforme française est jumelle : organisation par cycles, interdisciplinarité et pédagogie de projet, système de notation abscons, acquisition de compétences préférée à la transmission de connaissances. Le constat des Québécois est sans appel : baisse de niveau et accroissement des inégalités.

Cela s’explique aisément. Les élèves issus de familles favorisées ont la chance d’avoir la culture à la maison, même quand l’école s’égare et défaille. En revanche, plus un élève est en difficulté, plus il a besoin d’un cadre clair, d’un enseignement structuré, avec une progression connue. C’est tout cela que le pédagogiste lui refuse. Les Québécois recommandent donc maintenant un renforcement de l’enseignement disciplinaire et une élévation du niveau culturel.

De leur côté, sur Twitter, les professeurs en colère recommandent aux pédagogistes de terrain et aux pédagogistes ministériels de lire le rapport québécois. En vain. Il faut dire que Florence Robine, conseillère proche de la ministre, en première ligne pour tenter de défendre une réforme indéfendable, a fait cette recommandation :

« Faites comme moi, ne lisez rien. »

Le pédagogiste est docile.

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