samedi 13 juin 2020

La responsabilité des universités, des politiciens dans l'américanisation de l'imaginaire et des conflits

Chronique d’Éric Zemmour parue le 12 juin dans le Figaro Magazine.

C’est le débarquement tous les jours. Beaucoup de bombardements et beaucoup de destructions. Tous les événements et tous les concepts idéologiques venus d’Amérique sont acceptés et digérés sans aucun esprit critique par les cerveaux français. Régis Debray n’a pas tort lorsqu’il explique que la fille est devenue la mère et que la « civilisation américaine » règne désormais sur les « cultures » européennes. On peut le constater avec cette affaire Floyd, du nom de ce jeune Noir tué par un policier de Minneapolis. Aussitôt, les esprits s’embrasent. Les manifestations (interdites) se multiplient. Le discours victimaire se répand comme une traînée de poudre. Les militants noirs vitupèrent contre le « privilège blanc » et des Blancs s’agenouillent en signe d’expiation. Jadis, on apprenait que « comparaison n’est pas raison ». Désormais, comparaison est passion. Nous sommes tous des Américains. Les Noirs africains nés en France ont été esclaves en Amérique et les descendants de paysans français ont tous eu des esclaves comme dans Autant en emporte le vent ! George Floyd et Adama Traoré sont frères de race et de destin, tous deux victimes du racisme blanc. Les races n’existent pas, mais les racistes existent quand même. Les Noirs, de part et d’autre de l’Atlantique, sont victimes du même « racisme d’État », dont le bras armé est la police qui ne lutte pas contre les trafics, mais persécute en fonction de la couleur de la peau.

La quasi-totalité des pancartes à la manifestation « antiraciste » à Montréal était en anglais. Naïvement, on a faire croire que la loi 101 allait assimiler des masses d’immigrants alors que la natalité québécoise s’effondrait.

Cette soupe conceptuelle est en vogue sur les campus américains. Elle a été cuisinée — ironie du sort — par quelques intellectuels français dans les années 1960, adeptes de la déconstruction. Cette « French theory » nous est revenue en boomerang. Elle rassemble les minorités sexuelles et raciales contre leur seule cible : l’homme blanc hétérosexuel. Avant le confinement, c’étaient les féministes qui s’en prenaient à lui, multipliant les lynchages médiatiques et les accusations de féminicides. Désormais, ce sont les militants d’extrême gauche, alliés à leurs acolytes antiracistes qui tentent d’imposer leur discours victimaire et racialiste. Peu importe que la France n’ait jamais connu l’esclavage sur son sol.

Le travail idéologique des universitaires a été favorisé par la prédominance, dans les banlieues, d’une culture inspirée des ghettos américains. L’imaginaire de nos banlieusards venus d’Afrique est encombré de sons et d’images nés dans les ghettos de Detroit ou de Chicago. Les Américains avaient un problème noir consubstantiel à la naissance de leur pays. L’esclavage était le péché originel (avec le génocide indien) d’une nation née autour de la liberté. La guerre raciale menace l’Amérique depuis l’origine. Avec une opiniâtre volonté suicidaire, nos élites l’ont importée sur notre sol par des décennies d’une immigration inouïe venue de nos anciennes colonies, sans craindre ni l’éloignement des cultures exotiques guère assimilables, ni le ressentiment de nos anciens colonisés. Nous payons aujourd’hui — et paierons plus encore demain — un tel aveuglement habillé dans les oripeaux de l’humanisme et de la générosité.

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