lundi 29 juin 2009

France comme au Québec — déconfessionaliser l'école confessionnelle au nom de la « laïcité »

Deux examinatrices à l'oral du baccalauréat de français se sont plaintes jeudi et vendredi de la présence de croix dans des salles d'examen du lycée privé Saint-André de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne), a-t-on appris lundi de sources concordantes.

« Deux professeurs ont demandé à retirer les croix mais c'est chose impossible car il n'y a pas de raison de le faire, comme me l'a indiqué le directeur de la maison des examens d'Arcueil (SIEC) », a déclaré à l'AFP Gérard Meunier, le proviseur de ce lycée catholique.

« Je comprends, je suis d'une grande tolérance mais il est difficile de retirer tous les signes religieux d'une école catholique », a-t-il ajouté, en précisant qu'il s'agissait du premier incident de ce type dans son établissement, qui est un centre d'examen depuis une dizaine d'années.

Les deux examinatrices, qui enseignent dans d'autres lycées, ont été remplacées pour cette épreuve, selon le syndicat de gauche SNES-FSU de Créteil.

Dans un communiqué, le syndicat déplore « l'attitude de la direction du SIEC qui préfère le remplacement des enseignants à l'application de la loi républicaine et de ses principes laïcs ». Il appelle à « une mise au point officielle » de la part du SIEC.

Le directeur du SIEC n'a pas pu être joint dans l'immédiat par l'AFP.

« Tous les candidats doivent avoir les mêmes conditions d'examen et la consigne de bon sens est de tout retirer des murs d'une salle d'examen pour ne pas influencer les candidats », a souligné Dominique Chauvin, secrétaire général adjoint du syndicat.

jeudi 25 juin 2009

Réal Gaudreault — trois capsules pour finir la saison



Capsule 39 - Les experts cooptés en amont de la démocratie

Résumé de Réal Gaudreault :
« En 1999, le Groupe de travail sur la place de la religion à l’école accouche du Rapport Proulx. Il faut prendre le temps d’y jeter un coup d’œil pour se rendre compte de tout le mépris qu’avaient les membres de ce groupe de travail envers la volonté des Québécois au sujet de la religion à l’école. De l’avis de ce groupe de travail, l’opinion du peuple exprimée dans les sondages est souvent ou bien « irréfléchie », sinon « aberrante ». »


Le rapport Proulx

Claude Ryan, sur le Rapport Proulx

« Notre rôle [celui des experts] se situe en amont du vote à venir. Nous souhaitons simplement contribuer à nourrir la délibération commune. Car la mesure de la démocratie ne se réduit pas au décompte du vote, encore moins aux pourcentages des sondages, même les mieux faits; un vote peut être irréfléchi et une opinion, même majoritaire, peut être aberrante. »

(page 9 du rapport, c'est une perspective gramsciste qui a fort bien réussi)


Capsule 40 - Commission des droits de la personne - YOGA

Résumé de Réal Gaudreault :
« En juin 2008, la Commission des droits de la personne publie un texte de réflexion dans lequel elle semble fort bien s’amalgamer aux désirs gouvernementaux en ce qui concerne le cours ÉCR. Pis encore, le texte mentionne que les enseignants devront « inciter » les élèves à critiquer les valeurs religieuses qui ne sont pas exactement alignées sur les lois étatiques. Aussi, cette capsule est l’occasion de revenir sur la présence du YOGA à l’école. »


La Charte et la prise en compte de la religion dans l’espace public.

« Une des pistes à envisager à cet effet serait, pour l’enseignant, de cultiver chez les élèves une capacité à poser un regard critique sur les différentes expressions du phénomène religieux sans pour autant laisser transparaître ses opinions personnelles en la matière. »

(page 24 du rapport de la Commission des droits de la personne et de la protection de la jeunesse)



Capsule 41 - Le YOGA et l'éveil spirituel à l’école québécoise

Résumé de Réal Gaudreault :
« Au cours de la dernière année, des parents ont découvert que leurs enfants étaient exposés à des séances de yoga à l’école. Cette capsule vous informe davantage sur les dangers que peuvent représenter cette pratique religieuse. Comment le gouvernement justifie-t-il cette présence religieuse dans les écoles après avoir déconfessionnalisé les structures scolaires québécoises ? »



La mouvance wiccane au Québec : un portrait de la sorcellerie contemporaine (mémoire de maîtrise)


Les sorcières sont des femmes comme les autres

(page 103, du cahier d'éthique et de culture religieuse, Dialogue II, publié par les éditions La Pensée, 2008)

Dans une école publique près de chez vous, sans votre permission et avec vos impôts :

« Divers exercices (mandala, méditation guidée, rêve éveillé, psychagogie, etc.) dans le but, par exemple, de :
  1. s’initier à l'intériorité, au silence, à la méditation (S);
  2. trouver la « source en soi », son ancrage dans la vie (S);
  3. prendre conscience de son monde intérieur, de sa dimension spirituelle (S).
 »

(Page 10 du rapport Des « agir » [sic!] liés à la vie spirituelle et à l'engagement communautaire)

Détails sur le second procès ECR (Loyola)

Loyola High School c. Michelle COURCHESNE (ministre)

Loyola a été représenté par Borden Ladner Gervais SRL (Me Mark Phillips et Me Jacques Darche).

Première lettre à la ministre.
Requête du collège Loyola.
Seconde lettre à la ministre.

Le Monopole de l'éducation par Justice Québec (Me Benoît Boucher et Me Lucie Jobin).

Défense du ministère de l'éducation.


Lieu :

Palais de Justice de Montréal
1, rue Notre-Dame Est
Montréal

Début : lundi, le 8 juin à 9 h 00

Salle : 15.07

Durée : 5 jours

Accès : Public


Comptes rendus

Compte rendu de la première journée du procès.

Compte rendu de la deuxième journée du procès.

Compte rendu de la troisième journée du procès.

Jeudi : M. Jacques Pettigrew défendra le programme ECR.

Vendredi : plaidoiries orales des avocats de Loyola et du Monopole de l'Éducation.

Plaidoirie écrite de Loyola.

Plaidoirie écrite du Monopole de l'Éducation.

Décision du tribunal favorable à Loyola.




Pour le premier procès ECR (Lavallée c. Commission scolaire des chênes, voir ici)

mardi 23 juin 2009

Daniel Weinstock se mêle de droit

Nous avons eu la semaine passée Jean-Pierre Proulx qui se trompait longuement dans les colonnes complaisantes du Soleil sur les tenants et aboutissants du procès de Drummondville.

Cette méconnaissance grossière du dossier permit à ce chaud partisan de l'imposition du cours gouvernemental d'ECR d'écrire un second article dans le même journal pour y pérorer doctement sur les fautes qu'il avait commises dans le premier et que lui avait signalées ce carnet (voir son commentaire honnête ici).

Cette semaine nous avons droit à un autre juriste amateur : Daniel Weinstock, mais cette fois-ci dans le plus grand magazine d'actualités du Canada, Maclean's.

Reproduisons (en traduction) des extraits de cet article d'un tiers de page consacré à l'affaire de Loyola. Commençons par le laïus habituel du gouvernement reproduit gracieusement par Maclean's :
« Le nouveau cours a été introduit par le ministère d'Éducation pour faire connaître les diverses traditions religieuses présentes dans la société québécoise dans le but d'augmenter la tolérance parmi les étudiants. »

(page 29, Maclean's du 29 juin 2009)

Passons sur le caractère insultant de ce genre de propos : faut-il comprendre que l'école formait des enfants intolérants auparavant, particulièrement l'école confessionnelle catholique ? Et puis, tolérant à quoi ? La tolérance est au mieux une valeur négative, il s'agit de se supporter, pas de construire, pas de fournir du sens. C'est précisément la présentation d'un sens déterminé que le cours d'éthique et de culture religieuse interdit puisqu'il se prétend « neutre » comme l'a rappelé Me Boucher. Et s'il n'est pas neutre, il est donc chargé d'une certaine idéologie qui ne dit son nom.
« Une partie du mandat de ce cours est de présenter la religion d'une manière impartiale » de déclarer Daniel Weinstock, un professeur qui a été consulté lors de la rédaction de ce nouveau programme.
« Si une école a comme principe directeur d'inculquer aux enfants la foi catholique, cela signifie de manière évidente qu'une partie de leur mandat n'est pas de présenter toutes les religions d'une manière impartiale. »
Il nous semble donc que la conclusion logique serait que le cours ECR ne peut être donné dans une école qui respecte sa mission catholique ou, si le cours ECR doit être donné, que l'école en question ne peut pas respecter sa mission catholique, même si elle est privée.
« Le procès de Loyola vient de prendre fin et il faudra peut-être des mois avant que le juge ne se prononce. Mais Weinstock dit que les tribunaux québécois répugnent à infirmer une loi provinciale — il est donc probable qu'à l'automne le collège Loyola enseigne que toutes les religions sont égales, que cela lui plaise ou non. »
À nouveau on a affaire à un zélote pro-ECR qui joue au juriste sans connaître le dossier, car le collège ne demande pas qu'une loi soit annulée, mais simplement qu'un règlement soit appliqué en considérant la personnalité catholique de l'école et qu'on considère donc comme équivalent son cours de morale et de religions du monde comme équivalent au cours ECR.

Rappelons que la requête de Loyola se fonde en droit sur l’article 22 du règlement d’application de la Loi sur l’enseignement privé, R.Q. c. E-9.1, r.1 :
« 22. Tout établissement est exempté de l'application du premier alinéa de l'article 32 pourvu que l'établissement offre des programmes jugés équivalents par le ministre de l'Éducation. »
Aucune volonté d'infirmer une loi, M. Weinstock.

Nous lui conseillons de potasser le dossier ici.

vendredi 19 juin 2009

Ministre des Finances de l'Alberta : importance de la présence d'un parent à la maison

Des paroles sensées de la part du ministre des Finances de l'Alberta, Mme Iris Evans, deviennent des « propos controversés » pour Radio-Canada qui se fait la caisse de résonance du Parti libéral de l'Alberta (très minoritaire) et du correctivisme politique.

Rappelons les faits.

Le ministre des Finances de l'Alberta, Iris Evans, membre du Parti progressiste conservateur de l'Alberta a déclaré mercredi matin devant l'Economic Club du Canada à Toronto que la présence d'un parent à la maison est important pour assurer que les enfants soient bien éduqués.

Parlant de ses propres enfants, Mme Evans a déclaré : « Ils ont parfaitement compris que lorsqu'on éduque des enfants, on ne peut aller travailler et laisser leur éducation à d'autres. »

« Il ne s'agit pas d'une déclaration au sujet des garderies, a-elle ajouté. Il s'agit de préciser ce qui est important pour élever correctement ses enfants. »

« [On] doit valoriser l'extrême importance des [mères au foyer], a affirmé Gwen Landolt de REAL Women Canada dans un entretien avec LifeSiteNews.com, et notre société n'a pas assez fait cela. Elle dit qu'une femme, plus particulièrement une femme éduquée, gaspille son temps. Et, pourtant, cette mère rend un formidable service à la société... Il est temps que la société reconnaisse cette valeur et cette contribution. »

Landolt a concédé, toutefois, qu'étant donné notre contexte économique en récession et l'État qui défavorise fiscalement les parents au foyer alors qu'il subventionne le retour des femmes au bureau, il existe des raisons pratiques pour lesquelles une mère ne peut arrêter de travailler.

Ce que le ministre a déclaré « est tout à fait exact dans un monde parfait », a-t-elle ajouté, mais « les difficultés économiques nous forcent à travailler, pas uniquement pour se payer du luxe, mais simplement pour mettre du pain sur la table. »

À la suite des remarques de l'opposition libérale et de la controverse attisée par les médias, le ministre Evans a clarifié ses remarques hier, sans revenir sur le fond, ce que Radio-Canada ne dit pas dans sa dépêche. Il suffisait à la société d’État pour conclure sa dépêche édifiante que la ministre paraisse venir à résipiscence, seule issue possible pour la pécheresse en ces temps de correctivisme idéologique. La dépêche de la SRC se conclut donc par « Mme Evans s'est dite désolée. Elle a expliqué qu'elle ne voulait pas suggérer que deux parents qui travaillent accordent moins d'importance à l'éducation de leurs enfants. »

Complétons encore une fois pour donner plus de contexte et mieux comprendre ces paroles.

« Je comprends que certains aient pu être offensés par mes paroles, a déclaré Mme Evans, je ne voulais pas dire qu'il n'y avait qu'une manière d'éduquer ses enfants. »

« Comme j'ai travaillé la majorité de ma vie adulte alors que j'élevais mes enfants, je comprends qu'il est difficile de comparer les situations et que les parents doivent faire des choix difficiles dans l'intérêt de leurs enfants et je les félicite de faire ces choix. »

Félicitations donc aux parents qui font le sacrifice d'un salaire et veillent à l'éducation de leurs enfants à la maison.

Brian Rushfeldt, directeur général de la Canada Family Action Coalition, a déclaré qu'il existe de nombreuses études qui soutiennent le point de vue de la ministre Evans. « Il existe des preuves étayées par des recherches sérieuses qui démontrent que, lorsqu'un parent reste à la maison pour éduquer un enfant, cet enfant a plus de chances d'être plus équilibré et ne pas être mêlé à des difficultés liées au crime, aux drogues et à la sexualité... »

M. Rushfeldt s'est dit inquiet des remarques du chef du parti libéral Swann qui avait demandé des excuses ou la démission de Mme Evans. Demande répercutée et amplifiée par les médias. « J'ai été très troublé par les libéraux qui subitement demandaient des excuses immédiates. Mme Evans, même en tant que ministre du gouvernement, a encore... le droit au Canada d'exprimer son opinion. »

La demande d'excuse par les libéraux a amusé Dave Quist, directeur de l'Institut du mariage et de la famille Canada : « Il existe des millions de pères et de mères au Canada qui sont prêts à la féliciter et qui ne lui demandent certainement pas de s'excuser. Notre recherche nous montre que 82 % des familles au Canada, qu'il s'agisse des pères ou des mères, qu'elles habitent en ville ou à la campagne, peu importe la province, préfèreraient rester à la maison pour élever leurs enfants en bas âge. »





Étude « Les Canadiens font des choix en ce qui concerne la garde d’enfants » par l'Institut du mariage et de la famille Canada.

Les garderies ruineuses et non universelles (elles avantagent les femmes qui retournent travailler, pas les autres) du Québec augmentent-elles la natalité, font-elles des enfants mieux préparés ?

Prochainement, tous les cours du CNED en accès gratuit

À compter du 15 septembre, les cours d’été du site Académie en ligne feront place aux cours de l’année avec, en premier lieu, les classes du CP au CM2 en français, histoire-géographie, mathématiques, sciences et technologie, allemand, anglais, chinois et espagnol.

À compter du 30 octobre, les cours du collège et du lycée seront également en accès sur ce site, dans les disciplines d’enseignement général.



Xavier Darcos ministre de l'Éducation nationale française.

Aperçu de l’éducation du futur au Québec ?

Tiré du carnet de Carl Bergeron :
« Aujourd’hui dans Le Devoir, Josée Blanchette donne un aperçu de l’éducation primaire de type “arc-en-ciel onusien” qui a présentement cours dans le quartier Côte-des-Neiges (lequel risque fort bien d’être le prochain à flamber, après Montréal-Nord et la Petite-Bourgogne). Vous avez dans ce texte un exemple concret du laboratoire pédagogiste sur lequel débouche la révolution multiculturaliste. Ateliers sur le racisme, l’intimidation, la diversité culturelle : tout est en place pour intégrer ces immigrés non pas au Québec et à la culture occidentale, mais au multiculturalisme d’État. La majorité de ces jeunes ne deviendront jamais des Québécois.

Un professeur cité dans l’article s’étonne que les immigrés puissent penser s’en sortir à Montréal sans apprendre le français. “Le message n’est pas encore passé“, dit-il. Et on pourrait enchaîner en disant qu’il ne passera pas plus demain, ni après-demain. Les immigrés ont parfaitement raison. Ils peuvent très bien vivre à Montréal en anglais, la société québécoise ne leur fera jamais obstacle. En régime multiculturaliste, rien n’est plus illégitime — on l’a vu récemment avec la controverse sur la Fête nationale — que d’imposer une langue de référence.

Extraits :

L’école de mon quartier, celle où j’ai inscrit mon B en septembre, c’est un peu une succursale de l’ONU: 98 drapeaux représentés, 595 élèves dont huit «de souche», c’est-à-dire nés de parents québécois.

[...]

Nous sommes dans le quartier Côte-des-Neiges, l’un des plus multi-ethniques au Québec. Sur le babillard, à l’entrée de ce magnifique bâtiment de briques de facture très banlieue british, une carte du monde indique tous les pays d’origine des enfants et des enseignants. Burundi: 1. Botswana: 1. Brésil: 3. Cameroun: 5 . Chine: 88. Sri Lanka: 23. Philippines: 80. Maroc: 26. Haïti: 15.

[...]

Si l’ethno-pédiatrie a le vent dans les voiles, l’ethno-éducation, elle, consiste à éduquer les parents, si j’ai bien saisi — mais je suis un peu cancre, surtout vers la fin juin. En principe, le français est la seule langue acceptable à l’école, même si les enfants s’interpellent en anglais entre eux dès que les adultes ont le dos tourné. «Beaucoup de parents pensent qu’ils peuvent s’en sortir sans apprendre le français. Le message n’est pas passé avec les immigrants. Le seul endroit où ces enfants parlent et entendent du français, c’est à l’école. Ils n’écoutent pas Star Ac, ils sont branchés sur American Idol!» me glisse Roger, un des profs de gym.

Sans oublier que beaucoup d’enfants fréquentent également l’école du samedi, celle de leur langue maternelle, russe, arabe, chinoise ou roumaine. «Parfois, les enfants n’ont pas eu le temps de faire leurs devoirs parce qu’ils en ont trop à l’école du samedi», me confie Luc, un des profs de 5e année.

[...]

Dans la classe de madame Alexandra

Aujourd’hui, dans la classe de 3e année, les élèves ont droit à une heure de cours sur l’intimidation. Ils doivent essayer de déceler ce qu’est un comportement intimidant, une mise en scène très amusante de madame Alexandra à l’appui. Dans la bibliothèque, une intervenante en littérature jeunesse tente de sensibiliser les 6e année aux différences et termine l’avant-midi avec des acrostiches autour du thème du racisme. Ils ont beau venir des quatre coins du monde, chacun nourrit sa définition de la «normalité».
 »


Pour finir la journaliste du Devoir se demande si elle ne devrait pas inscrire son fils (unique) à des cours d'identité québécoise le samedi :
« Songé: à inscrire mon B à l'école du samedi. Sans blague, faudrait peut-être s'y mettre et leur donner des cours de «québécois», leur patois, leur culture, leurs ancêtres, leur cuisine, leur religion, leur faune et leur flore. Des fois qu'ils l'oublieraient en chemin...
Et voilà, le petit Québécois de souche, représentant d'une petite minorité parmi d'autres. Quand le peuple québécois a-t-il approuvé ce chamboulement démographique ?

Prions en Église au service de l'État

Le texte affligeant de Prions en Église mis en pièces par Jean Renaud :
Dans son édition du 7 juin dernier, le Prions en Église, qui a fait montre une nouvelle fois de son manque de jugement, a cru bon de se mettre au service de l’État en publiant un texte d’une rare médiocrité. J’ose offrir à nos courageux lecteurs quelques-unes des perles relevées dans le maladroit plaidoyer du professeur Yves Roy en faveur du cours obligatoire d’éthique et de culture religieuse :
« En tant qu’enseignant au secondaire, j’ai dû expliquer la visée principale du nouveau cours d’éthique et de culture religieuse aux parents, dès septembre dernier. En quelques mots, je présentais cette visée comme suit: permettre au jeune de se comprendre lui-même et de comprendre le monde qui l’entoure. »
L’auteur de cette candide bluette croit-il que les parents hostiles au cours ÉCR ne veulent pas que leurs enfants se comprennent eux-mêmes et comprennent le monde qui les entoure ? Aucune discussion n’est possible à partir de tels poncifs. Tout le monde sait que le ministère de l’Éducation est, comme l’enfer, pavé de bonnes intentions : il n’en produit pas moins des analphabètes fonctionnels en quantité industrielle ! En réalité, le nouvel âne de Balaam à l’origine de ce texte prophétise par antiphrases : il annonce sans le savoir une génération de jeunes manipulables à loisir. Car, si le passé est garant de l’avenir, une chose est certaine : non seulement l’État et ses experts n’atteindront pas leurs objectifs, mais ils échoueront lamentablement.

« Dans la majorité des cas, je n’avais pas à m’expliquer davantage, cela coulait de source. » Cela coulait de source pour qui ? Pour ceux qui se contentent d’affirmations aussi générales que creuses !
La suite ici.

Loyola High School trial against the government imposed Ethics and Religious Culture curriculum

Interwiew at the end of Loyola trial with one of the High School's lawyers, maître Jacques Darche, and McGill professor John Zucchi, a plaintiff whose son is scheduled to have to follow the government imposed Ethics and Religious Culture curriculum next year.

Me Jacques Darche summarizes the court case, prof. John Zucchi explains why he is part of this court challenge: government should not interfere in the transmission of values and religious faith between a parent and his children.



See also: Loyola High School wins in Court (in French)

Loyola, entretiens avec Me Jacques Darche et le professeur John Zucchi

Entretiens alors que le procès du collège Loyola vient de se terminer avec un des avocats du collège, Me Jacques Darche, et un des plaignants, le prof. John Zucchi de Mc Gill qui s'insurge contre le fait que l'État s'immisce dans la transmission de valeurs religieuses dans un collège privé et s'interpose de la sorte entre son fils et lui-même en tant qu'éducateur et parent.



Extrait de l'émission Zoom de Sel + Lumière

France — Où va l'école catholique ?

jeudi 18 juin 2009

Le « dialogue » assure-t-il un meilleur « vivre ensemble » ?

Christopher Caldwell commente dans le magazine Slate le livre Going to Extremes de Cass Sunstein, professeur de droit constitutionnel à l'université Harvard. Caldwell, journaliste dont les chroniques sont publiées dans le Financial Times et le New York Times, est l’auteur de Reflections on the Revolution in Europe: Immigration, Islam and the West.

Dans son commentaire, Caldwell observe que la théorie de Sustein n'apporte aucune contribution à la lutte contre l'extrémisme malfaisant. Il souligne les points suivants :
  1. Sustein confirme que les campagnes publiques bien-pensantes et le « dialogue » sont une perte de temps. Les gens ont une préférence naturelle pour ceux qui leur ressemblent et qui partagent leurs valeurs. Les personnes dont les valeurs sont sincères et profondément ancrées éviteront l’entourage de celles qui ne les partagent pas.
  2. Le « dialogue » entre groupes renforce souvent les camps qui se braquent sur leurs positions. [Il peut, bien sûr, en aller différemment pour des individus très minoritaires dans un groupe.]
  3. L’extrémisme, que Sustein voudrait contrer, n’est pas en soi une mauvaise chose. Les arguments de Sustein pourraient tout aussi bien servir à contrer l’extrémisme désirable, par exemple celui d’une Mère Thérésa, d’un Martin Luther King ou, pour citer des exemples non mentionnés par Caldwell, d’un Gandhi ou d'un dalaï lama.




Voici une traduction d’extraits de la chronique de Caldwell : How on Earth Do You Tame Extremists ? Cass Sustein tackles an impossible task, Slate, 15 juin 2009 :

Lors des primaires démocrates de 2008 qui virent Barack Obama l’emporter sur Hillary Clinton, en grande partie grâce au soutien des États qui utilisaient le système de caucus, les partisans de Mme Clinton se sont plaints que le système délibératif des caucus n’a pas uniquement permis d’exprimer le sentiment des électeurs, mais il l’a également déformé [en le radicalisant : le groupe relativement uniforme adopte une position plus radicale que l'opinion moyenne de ses membres].

[…]

Si vous réunissez les deux côtés opposés à une question, ils ne trouvent pas un terrain d’entente. Chaque camp se braque. Sunstein nous apprend que si on demande de lire « un ensemble d’articles mesurés et réfléchis » à des groupes qui s’opposent sur les questions de l’avortement ou de la discrimination dite positive, chaque côté filtre simplement l’information pour y trouver ce qui confirme son point de vue. Il s’avère que l’idéologie n’est pas simplement une question d’opinion ou de point de vue, c’est aussi une prédisposition à accepter un certain type d’arguments et à en refuser d’autres. Complication supplémentaire : certains types d’arguments extrémistes bénéficient d’un « avantage rhétorique automatique » dans un débat; il est plus difficile de se rallier à « Moi, aussi, mais moins » qu’à « Quand le vin est tiré il faut le boire. » Ces dernières années, on n’a vu aucun argument efficace contrer l’augmentation constante des peines de prison contre les trafiquants de drogue ou les demandes constantes de diminution des impôts.

[…]

Si Sunstein est à la recherche de principes neutres qui entraveraient les extrémistes de mauvais aloi mais qui favorisent les bons – et pour une bonne partie de son livre, il semble le faire – sa quête est vaine. Il cherche une solution dans les travaux du juriste philosophe Heather Gerken, qui semble, selon la description de Sunstein, avoir effectué une analyse plus étoffée et subtile des groupes qui s’affrontent que tout ce que Sustein a décrit dans son propre livre.

Gerken opère une distinction entre la diversité de premier ordre (diversité au sein d’organismes) et la diversité de second ordre (la diversité entre les organismes). Pour faire simple, la première consiste à s’assurer que la rédaction du Los Angeles Times ait un certain nombre de Latinos, alors que la seconde signifie que le public puisse choisir entre, disons, le Los Angeles Times, la New Republic et le Final Call. Ce n’est alors pas grave si certains organismes ne sont pas divers pour autant que la société bénéficie une diversité d’organismes.

La version de la diversité selon Gerken serait que mille fleurs fleurissent. Elle s’accorde mieux avec le concept de liberté que la diversité de premier ordre, en vogue actuellement, qui se fonde sur une suspension ciblée de la liberté d’association. Toutefois, cette version ne permet pas d’éviter les difficultés que Sunstein a décrites avec une admirable audace au début de son ouvrage. Car, cette variété de groupes, quelques soient leur ampleur et diversité au départ, se rangent à la longue en deux camps qui s’enguirlanderont avec un mépris insensé et mutuel. Est-ce que ce n’est pas précisément ce qui a empoisonné la culture politique américaine depuis l’essor d’Internet ?

Tant que le lecteur suppose que l'extrémisme est un problème en soi, on pourrait penser que la solution consiste à renforcer la diversité de façon à ce qu’elle ne se dissolve pas au contact d’esprits obstinés. À titre d’exemple, c’est ce que suggère Sunstein pour le terrorisme. « Si une nation tente d’éviter les activités terroristes », écrit-il, « une bonne stratégie est d’empêcher l’établissement d’enclaves formées de personnes partageant les mêmes idées. » Mais que se passe-t-il lorsqu’une enclave n’est pas constituée de terroristes ? Que faire s’il s’agit d'un syndicat ? D’un cercle privé masculin ? D’un département d'études féminines ? De militants des droits civiques ? De croyants ordinaires ? Aime ton prochain comme toi-même et We shall overcome (nous triompherons !) répondent aussi à la description de l’extrémisme. Il s’agit là aussi de visions partielles du monde qui ont tendance à s’autorenforcer.

Sunstein est déchiré. L'idée centrale de cet ouvrage est que la délibération, loin d’unir les gens, peut les mener à l’extrémisme. Les campagnes bien-pensantes d’information du public et le « dialogue » risquent donc de faire plus de mal que de bien. Les arguments de Sunstein minent les idéaux de la démocratie délibérante, mais il refuse de l'admettre. « Mon livre se borne à suggérer que nous devons simplement faire mention de l’idée de délibération, plutôt que d'en faire l’apologie » écrit-il, sur un ton défensif.

Que signifie « faire mention de l'idée de délibération » ? Cela ne peut signifier autre chose qu’un raisonnement à rebours. Pour des raisons éthiques, on ne serait plus à la recherche des résultats désirables, mais des balises désirables dans les débats. Pour Sunstein, les mauvais extrémistes ont une « épistémologie déficiente » : ils en connaissent moins qu’ils ne le pensent, et ce qu’ils connaissent est biaisé. Mais en réalité, on peut dire la même chose de Martin Luther King et de Mère Theresa. Ce n'est pas l'épistémologie qui les sépare, par exemple, des bouchers du Rwanda. C’est la morale. Au plan conceptuel, l’« extrémisme » n’explique pas grand-chose. C'est un ruisselet qui se déverse dans un vaste océan de bien et de mal. La seule façon de contrer le genre d'extrémisme que vous n'aimez pas, que vous soyez à la tête d'un conseil scolaire ou d'un État, consiste à dire : « Nous croyons en ceci et nous ne croyons pas en cela », en espérant que vous serez suffisamment nombreux pour prévaloir – probablement, hélas, au moyen de tactiques qui sont moins délibératives que vous ne l’auriez souhaité.




Une partie de la traduction et de l'introduction vient du Poste de veille.

Réponse de la communauté orthodoxe juive au cours ECR

Le 28 mai 2009, l'hebdomadaire juif Canadian Jewish News (CJN) a publié, dans son édition montréalaise, une publicité bilingue pleine page (page 17) qui annonçait la formation d'un mouvement populaire, le Conseil sur l’éducation juive au Québec (CEJQ) qui représente la « réponse du judaïsme orthodoxe vis-à-vis du programme d’éthique et de culture religieuse ». Le directeur général du CEJQ est le rabbin Chalom Spira.

Le CEJQ félicite, habilement, le gouvernement du Québec pour sa promotion de l'amitié universelle entre les peuples et, dans cette optique, décrit le gouvernement québécois comme honorable, juste et digne d'éloges. Toutefois, selon ce mouvement populaire, les juifs orthodoxes doivent limiter l'étude de la religion à la Torah tel que le rappellent des décisions ecclésiastiques comme celles de Chlomo Zalman Auerbach, Joseph Ber Soloveitchik, Avigdor Nebenzahl, Norman Lamm et Moché Feinstein et que la manière orthodoxe de mettre en œuvre le programme d'Éthique et de culture religieuse est d'utiliser le code noachide (ou de Noé) comme base, puisque le code noachide est la religion universelle que tous, juifs et non-juifs, doivent suivre.

Le code noachide représente, selon l'opinion rabbinique, les sept principes moraux auxquels toute l'humanité doit obéir. Il s'agit de lois qui ordonnent l'établissement de tribunaux, et interdisent l’idolâtrie, le blasphème, l’homicide, l’inceste, le vol, et la consommation d’un membre prélevé sur un animal vivant (cruauté envers les animaux). Elles constituent pour les rabbins la fondation de toute moralité. Celles-ci s’étendraient, par des lois dérivant d’elles, à tous les aspects du comportement moral humain.

Le CJN a publié une publicité identique le 4 juin (page 19). Le même jour l'hebdomadaire orthodoxe juif « Hade'ah Vihaddibour » rapportait des sentiments similaires de la part de l'arbitre rabbinique (halakhique) Yosef Chalom EliaChiv.

Pour ce qui est du dialogue autour de sujets éthiques ou religieux, le CEJQ le considère comme absurde :
« Il faut comprendre que le « dialogue » est plus qu'une conversation polie, plus encore qu'une discussion érudite. Elle implique le logos, un engagement plein et entier de la foi. Il s'agit d'une confrontation profonde dans laquelle tout est mis en jeu et dont le résultat est toujours imprévisible, et dont les deux parties sortent rarement indemnes. C'est à cause de la nature unique et intime du logos, de l'incommensurabilité d'une foi par rapport à une autre, que nous considérons que le dialogue théologique est une absurdité...

Non, en ce qui concerne la foi et l'engagement ultime, le seul dialogue authentique est celui entre D_u et l'homme. Débattre de telles matières entre des membres de communautés religieuses représente une distraction et non une contribution au grand dialogue. »

Rabbin Norman Lamm,
chancelier de l'Université Yeshiva


Dans sa constitution, le CEJQ s'insurge contre des passages comme ceux-ci tirés du programme officiel :
«- p. 45 : "Des doctrines: le monothéisme, [sic] le panthéisme, l'animisme, le polythéisme, le déisme, l'agnosticisme, etc. Des critiques et des dénonciations: l'athéisme, l'idée de l'aliénation religieuse du Marc, Freud et Sartre, l'idée de la mort de [sic] Dieu chez Nietzsche, etc."
Le programme requiert donc de l'enseignant qu'il sensibilise l'élève qu'il y a (d'une certaine façon) plusieurs manières de représenter le divin, ainsi que des créatures mythiques et surnaturelles.

Il s'agit d'une équation relativiste de toutes les doctrines religieuses. Il faut respecter (en quelque sorte) le monothéisme, le polythéisme, l'agnosticisme et l'athéisme tous à la fois. En outre, on doit introduire les élèves à l'idée que D_u peut (pour ainsi dire) mourir. »
Le 5 juin, le Devoir publie enfin un long article informant ses lecteurs que le programme ECR ne se donne pas dans les écoles juives orthodoxes.

Étude de trois manuels du primaire d'ECR

Nous avons obtenu un rapport qui étudie les trois premiers manuels d'éthique et de culture religieuse du primaire publiés par les éditions CEC (Québécor). Ces trois manuels ont été approuvés par le ministère de l'Éducation (plus particulièrement le BAMD). La critique est souvent de nature religieuse (et non de nature politique ou sociologique, ce qui serait pourtant intéressant).

RÉSUMÉ
  1. Les manuels sont fortement illustrés, de bonne facture, plaisants au niveau graphique, pleins de contes. Tout dans la forme est fait pour plaire aux jeunes enfants. On distribue même des mascottes (une abeille et une fourmi en peluche) en classe.

  2. Ces manuels sont moins caricaturaux que ceux de Modulo pour les mêmes années du primaire.

  3. Nombreuses références à des contes autochtones (pour respecter le programme sans doute), on retrouve comme pour les manuels Modulo environ 20 % de pages consacrées aux spiritualités autochtones dans les pages à contenu religieux.

  4. Traitement assez libre des récits bibliques sur le même mode du conte, parfois adapté librement, d’où la possibilité que l’enfant considère la Bible comme un ensemble de contes, similaires aux contes autochtones ou hindouistes que rien ne semble distinguer dans leur véracité (ou manque de véracité).

  5. Les trois manuels étudiés n’abordent pas jamais la notion de péché, ni pour parler de la création, ni des raisons du Déluge. Le mot péché n’apparaît pas; quand le texte du Nouveau Testament parle de pécheur (Zachée), le manuel parle de « malhonnête ». On ne parle nulle part non plus de salut ou d’âme.

  6. Ailleurs, en éthique, forte promotion de la liberté chez de jeunes enfants (6 ans) qui auraient plus besoin de repères clairs et de discipline.

  7. Renforcement d’idées « progressistes » et « multiculturelles » à la mode : indien écologiste avant l’heure, extrêmement forte natalité au Québec il y a 60-70 ans (treize enfants ?), la diversité permet de faire un tout harmonieux (plus que l’homogénéité ?), égalitarisme candide (en prenant exemple sur les autochtones, les bons sauvages) et un certain irénisme béat (le dialogue respectueux comme solution aux problèmes, même le mal ?).

  8. Les religions ne sont que des formes particulières essentiellement inutiles, quoique pittoresques et folkloriques que l’on retrouve par exemple dans un musée, seule l’éthique planétaire (Weltethos) semble compter. Elle est représentée dans ces manuels par la « spiritualité » amérindienne. Tout revient – et tout doit aboutir – à une sorte de panthéisme humaniste, assez pélagien, on ne croit pas au mal ou du moins on le prend tellement peu au sérieux qu’on croit suffisant de le combattre par le « dialogue » et l’établissement égalitaire de règles consensuelles sans aucune mention à une quelconque transcendance.

  9. En éthique, on introduit également un certain relativisme en soulignant que les sociétés ont des règles différentes, les religions aussi. De même, les différences entre les religions n’ont peut-être aucune importance (on donne simplement des noms différents à Dieu), alors qu’en définitive il existe pourtant – en dehors du cours ECR – des différences qui portent sur les définitions mêmes de Dieu, du bien, de l’homme, etc.


L'étude est ici (PDF).

Le lecteur averti aura remarqué que l'expertise de M. Guy Durand, théologien et éthicien, reprend un certain nombre de ces critiques (voir annexe 6).

Réal Gaudreault — ECR = multiculturalisme et finalités politiques

Capsule 37 - ÉCR = Le multiculturalisme canadien



Résumé de Réal Gaudreault :
« Qui aurait cru qu’un jour le P.Q. servirait les intérêts du multiculturalisme canadien de Pierre Elliot Trudeau ? En souscrivant à l’imposition du cours ÉCR dans les écoles québécoises, Pauline Marois contribue à l’affaiblissement de l’identité québécoise. Mme Marois, pourquoi voulez-vous l’indépendance ? Ou plutôt pour qui ? Dans 30 ou 40 ans, il n’y aura plus de petits Québécois au Québec, mais juste de petits «  multiculturalisés » dopés aux idéologies de l’État. »

L'État désormais entièrement responsable de la formation en matière de religion
« Le second défi est celui du relai institutionnel de la formation en matière de religion. Conçue et contrôlée jusqu’ici par les Églises, celle-ci passe cette fois totalement sous la responsabilité de l’État.  »

Georges Leroux,
résumé de son intervention au congrès de l'ACFAS
mardi 16 juin 2008
source (complaisante)
Texte complet reproduit dans
Les défis de la formation à l'éthique et à la culture religieuse,
Presses de l'université Laval, 2008




Capsule 38 - ÉCR = Finalités politiques de l’État



Résumé de Réal Gaudreault :
« Dans divers articles, Georges Leroux y va de déclarations très claires : le cours ÉCR veut assigner des finalités que l’État détermine pour lui-même, et qui sont d’abord sociales et politiques. Ce projet politique qu’est le cours ÉCR serait le « remède » pour contrer le fondamentalisme religieux au Québec. Eh oui, les croyants sont des gens qu’il faut dès maintenant « guérir » de leur fondamentalisme religieux. »

L'État, seul propriétaire de l'enseignement des religions et de l'éthique
« Cette situation a pour conséquence que, pour la première fois dans l’histoire du Québec, la société peut se reconnaître, par la voix de l’État, seule propriétaire de cet enseignement, elle peut l’assumer comme sa vocation propre, au même titre que la santé ou la justice. »

« Elle peut surtout lui assigner des finalités qu’elle détermine pour elle-même, et qui sont d’abord sociales et politiques : assurer un vivre ensemble harmonieux. »

Georges Leroux
Éthique, culture religieuse, dialogue, chez Fides, p. 21



M. Georges Leroux est un défenseur zélé du cours ECR ; il a témoigné en faveur de son imposition à tous les élèves sans exception lors des procès de Drummondville et Loyola. Il est assez fier qu'on considère son option comme jacobine.

mercredi 17 juin 2009

Le cercle carré

Article intéressant de Joseph Facal qui montre bien le dilemme devant lequel le Monopole de l'Éducation s'est placé. (Tiré de son carnet)

« 
Le cercle carré

17 juin 2009 par Joseph Facal

Croyez-moi, nous ne sommes pas à la veille d’en avoir fini avec la religion au Québec.

Plusieurs écoles privées juives orthodoxes vivent depuis longtemps dans l’illégalité. Par exemple, elles ne donnent pas le nombre minimal d’heures d’enseignement des matières de base exigé par la loi, parce que beaucoup d’heures sont consacrées à l’étude des textes sacrés du judaïsme. Le gouvernement, qui les subventionne, cherche une solution, paraît-il.

Un nouveau problème vient d’apparaître. Depuis septembre 2008, TOUTES les écoles au Québec doivent obligatoirement enseigner le nouveau cours Éthique et Culture religieuse (ECR) qui remplace l’ancien enseignement confessionnel. Ces écoles juives demandent aujourd’hui d’être exemptées de cette obligation, ou de pouvoir adapter le contenu du cours à leur convenance.

Le problème est que les parents catholiques qui ont demandé la même chose se sont heurtés à des refus nets des autorités. Ils sont présentement devant les tribunaux.

Il est parfaitement illusoire de penser que les Juifs hassidiques cèderont là-dessus. Cela peut sembler étrange, voire incompréhensible pour vous et moi, mais ces gens vivent dans un monde parallèle entièrement régi par leur religion jusque dans les moindres détails.

Ils refusent de s’intégrer au reste de la société, non par malveillance, mais par conviction que se mêler à nous les empêcherait de mener une vie en totale conformité avec leurs préceptes religieux. Le cours ECR est donc, de leur point de vue, une intolérable atteinte à leur liberté de conscience.

Admettons un instant qu’on leur consent une sorte de régime d’exception au nom de l’inviolabilité de leur liberté de conscience. Est-ce à dire que la liberté de conscience des catholiques orthodoxes est moins inviolable ? Ce serait parfaitement indéfendable.

Imaginons maintenant que le gouvernement s’adresse aux tribunaux. Les hassidim invoqueront sans doute l’article 3 de la Charte des droits et libertés qui affirme le caractère inaliénable de la liberté religieuse. Il n’est pas dit qu’ils ne gagneraient pas.

S’ils gagnent, cette victoire sera aussi celle de toutes les autres religions. S’ils perdent, ils ne se soumettront pas davantage : les lois divines l’emportent, pour eux, sur les lois humaines. Ils feront alors semblant de se conformer, ou choisiront de s’enfoncer davantage dans l’illégalité, voire la clandestinité.

Suspendons leur financement, me direz-vous. Le problème est que le cours ECR est obligatoire même si une école n’est pas subventionnée par les fonds publics.

Théoriquement, le gouvernement pourrait décider que, désormais, une école non subventionnée n’est plus tenue de suivre le régime pédagogique prévu par la loi actuelle. À coup sûr, d’autres sectes religieuses choisiraient alors cette voie, et c’est toute la laïcisation du système scolaire qui serait compromise. Bref, c’est la quadrature du cercle.

Le nœud du problème vient de ce que les zélotes de la laïcité, qui sont tout aussi religieux à leur manière, ont rendu obligatoire et sans possibilité d’exemption ce cours, mais sans s’assurer auparavant que l’État aurait les moyens de faire appliquer sa propre loi.

C’est tout à l’honneur de la ministre de l’Éducation d’avoir dit clairement qu’elle ne permettrait pas deux poids, deux mesures. Mais elle en viendra peut-être à regretter d’avoir été si transparente. Une affaire à suivre de près.
 »

mardi 16 juin 2009

Jean-Pierre Proulx se mêle de droit

Un des pères du cours gouvernemental obligatoire d'éthique et de culture religieuse imposé à tous les élèves québécois tout autant dans les écoles publiques que privées, Jean-Pierre Proulx, a décidé de « réfléchi[r] à la question sous l’angle juridique, à partir de la requête soumise par des parents à la Cour supérieure de Drummondville ».

D'abord sur son carnet, puis dans les colonnes complaisantes du Soleil.

Jean-Pierre Proulx y glose en amateur — il n'est pas juriste — des prétendus quatre objectifs des requérants (Mme Lavallée) :
« 
  1. d'accorder à leurs enfants l'exemption du cours ECR qui leur a été refusée par leur commission scolaire au début de l'année scolaire 2008 ;
  2. de rendre inopérante et de déclarer inconstitutionnelle la loi 95 de 2005 qui a supprimé le régime d'options entre l'enseignement catholique, l'enseignement protestant et la formation morale non-confessionnelle ;
  3. de déclarer inconstitutionnelle la suppression de la disposition de la Charte des droits et libertés de la personne qui accordait aux parents le droit d'exiger pour leurs enfants à l'école publique un enseignement religieux conforme à leurs convictions. Cette disposition a été remplacée par une autre qui garantit aux parents «le droit d'assurer l'éducation religieuse et morale de leurs enfants conformément à leurs convictions, dans le respect des droits de leurs enfants et de l'intérêt de ceux-ci»;
  4. de déclarer inconstitutionnel le cours d'éthique et de culture religieuse inscrit au régime pédagogique des écoles primaires et secondaires.
 »


Il y a un petit problème : il ne s'agit pas des griefs ou objectifs invoqués devant le Cour supérieure du Québec à Drummondville il y a quelques semaines ! Et M. Proulx serait un spécialiste de ce dossier !

Le seul grief réellement invoqué est le premier énuméré, à savoir « d'accorder à leurs enfants l'exemption du cours ECR qui leur a été refusée par leur commission scolaire au début de l'année scolaire 2008 ».

Et qu'en dit M. Proulx ?
« La joute juridique risque d'être plus dure sur le premier point, soit sur la demande d'exemption du cours. On sait d'abord que les tribunaux n'interviennent pas pour juger de la substance ou de la pertinence des décisions de l'administration publique, en particulier sur les questions pédagogiques. La jurisprudence est constante à cet égard depuis une décision de la Cour suprême du Canada dans les années 50.

[...]

Sans préjuger, une fois encore de la décision des tribunaux, on peut faire l'hypothèse raisonnable que le tout va se jouer autour, non pas de la constitutionnalité du cours ECR, mais plutôt à propos de l'interprétation qui sera faite de la «croyance sincère» touchant les effets potentiellement préjudiciables du cours ECR à l'égard de la liberté de conscience et de religion.

Si le tribunal donne raison aux requérants sur ce point, la légalité générale du cours ECR ne sera pas compromise [Note du carnet, d'autant plus qu'elle n'est pas pour l'instant attaquée], mais il faudra, évidemment, que l'État trouve pour les « croyants sincères » un accommodement qui pourrait bien passer par l'exemption de quelques milliers d'enfants.
 »
Une fois de plus, M. Proulx qui avait déjà mentionné ce sujet dans le Devoir le 30 mars, quand il célébrait par un long article les dix ans de son propre rapport, semble craindre l'issue de la doctrine de la croyance sincère, car elle «ouvr[e] ainsi la porte à des décisions imprévisibles.»

lundi 15 juin 2009

Taking away choice is the problem

Letter sent to the Gazette of Montreal:
Government witness Georges Leroux, a designer of Quebec's Ethics and Religious Culture program stated that "we (i.e., Quebec) did not want to produce robots," implying that this is what the old program did and therefore the need for change. Ironically, many free thinkers with sound moral and ethical values such as he ( I hope) are a product of that which he believes needs to be changed.

Parents had a choice between religious or ethics instruction for their children. Within each program there was room for learning the beliefs of other religions but without negating one's own. Taking away that choice is where the problem lies.

The new program has its merits, but when it's forced upon someone, it does the same thing that the old program is being falsely accused of having done: indoctrination. This time, though, it's the state doing it: indoctrinating students that all religions are the same and that the principles found in his/her religion on abstinence, fidelity, abortion, etc. are all up for discussion.

Nick Furfaro

Laval

Les deux révolutions françaises : 1789 et 1793

Supplément au cours d'histoire.

Philippe Némo est professeur au Groupe École supérieure de commerce de Paris, où il enseigne l'histoire des idées politiques et sociales. Dans son livre Les Deux Républiques françaises, Némo analyse de l'histoire de France depuis la révolution montrant que deux courants se sont constamment opposés et succédés: un courant libéral et démocratique s'inspirant des principes de liberté individuelle de 1789; un courant radical, socialiste voire révolutionnaire qui s'inspire des principes totalitaires de 1793.

Selon Philippe Némo, « La gauche jacobine n'a jamais été démocrate. Elle est à l'origine de tous les retards de la France. »

« La seule période de notre histoire où l'école publique ait été laïque, c'est les trente ans où elle a été dirigée par des chrétiens » (entre 1871 et 1902) à 47 min 40 sec.

Georges Leroux – le pluraliste messianique (2 sur 2)

Suite de Georges Leroux – le pluraliste jacobin (1 sur 2)

L’interrogatoire du professeur émérite Georges Leroux par le procureur du ministère de l’Éducation a commencé par un passage en revue des différents griefs formulés par la demanderesse, à savoir Mme Lavallée.

Premier grief – vision polythéiste

15 h 38

Le premier grief tient au fait que le programme « impose à l’élève une vision polythéiste du phénomène religieux ».

Le professeur avait manifestement prévu cette question avec « son » avocat. Il a donc procédé à un long exposé de 6 minutes sur la généalogie du polythéisme et le monothéisme, citant au passage le « remarquable » anthropologue et critique de l’histoire des religions Jan Assmann qui, à l'instar de Freud, ferait remonter le monothéisme judaïque au monothéisme égyptien du pharaon Akhénaton.

15 h 45

Puis s’en est suivi une longue discussion sur la « définition du phénomène religieux », à savoir, pour le professeur Leroux, l’analyse de la diversité des religions, de l’extériorité, de leur spécificité, de leur histoire. Une étude des religions vue de l’extérieur, pas leur dimension vécue.

M. Leroux a conclu en disant que le programme ECR ne peut pas être polythéiste, une religion peut l’être, mais par définition un programme ne peut pas l’être et donc la phrase « impose à l’élève une vision polythéiste du phénomène religieux » n’a pas de sens. M. Leroux termine cette longue introduction en affirmant que « le programme ne promeut pas une religion particulière, il ne promeut pas plus le polythéisme que le monothéisme, pas plus que l’athéisme, pas plus qu’autre chose. Il ne promeut aucune conviction religieuse. Le programme présente les religions sur le plan culturel ».

M. Leroux faisait-il semblant de ne pas comprendre le grief ? Il ne s’agit pas de se demander si les universitaires ne doivent pas se pencher sur la diversité des religions quand ils étudient « le phénomène religieux », mais de se demander si l’exposition à de multiples religions toutes considérées comme d’égales valeurs, toutes traitées au mieux de la même façon, ne peut pas être considérée comme une représentation polythéiste. Le cours ECR proposerait donc un type de panthéon où ces Dieux sont équivalents, chacun pouvant choisir le sien, plusieurs ou aucun. C'était là le sens du « impose à l’élève une vision polythéiste du phénomène religieux ».

Notons et nous le remarquerons tout au long du témoignage de M. Leroux qu’il discourt des religions de façon détachée, à la façon de l’universitaire qu’il est, d’un entomologiste qui dissèque celles-ci patiemment. C’est normal à l’université. Mais c’est précisément un des griefs que l’on peut faire au programme quand il s’adresse à de jeunes enfants du primaire que les parents veulent former dans une certaine conviction religieuse ou philosophique et qui voient dans ce détachement, cette mise sur un même pied d’égalité de toutes les croyances, un obstacle évident à la transmission de leurs convictions.

Notons enfin que jamais le professeur Leroux ne répondra précisément aux deux autres experts, David Mascré et Guy Durand, qui avaient témoigné auparavant pour affirmer que le premier grief était justifié.

Second grief adressé au programme – le relativisme

15 h 50 — Me Boucher amène Georges Leroux à critiquer la conception de sens commun proposée par Guy Durand pour décrire le relativisme : « tout se vaut ». «  Est-ce qu’il est suffisant d’un poids de vue philosophique de démontrer le relativisme en utilisant le sens commun [de ce mot] ? ». La réponse est téléphonée.

Bien évidemment que non. L’expertise écrite de Georges Leroux porte principalement sur ce sujet.

« Assez content de ce que j’ai écrit »

Georges Leroux, il le dira d’ailleurs à plusieurs est très content de son expertise. La modestie n’est pas le moindre défaut de ce grand philosophe chenu : « je suis assez content de ce que j’ai écrit, je ne le cache pas ».

Plutôt que de reproduire le verbatim de M. Leroux, nous reproduisons ici la longue expertise écrite de M. Leroux.

Relevons cependant ce passage de l’expertise de M. Leroux qui nous paraît une grossière généralisation digne d’un traité d’athéisme militant de bas étage :
« Alors que la période prémoderne se caractérisait par la recherche de l'hégémonie religieuse et par le prosélytisme qui conduisit l'Europe aux guerres les plus meurtrières de son histoire, la période moderne se caractérise par la sécularisation, la tolérance et le respect mutuel dans l'aire occidentale. » (p. 26)
M. Leroux feint-il d’ignorer que les guerres les plus meurtrières de l’histoire furent précisément celles de la « modernité » : massacres de Vendée, Terreur révolutionnaire, massacres communistes, staliniens, fascistes et nazis ? La modernité n’est pas seulement liée à la tolérance, on pourrait tout aussi bien dire que c’est le règne de l’affirmation de l’État, État plus centralisateur et qui ne tolère pas de remise en question de son monopole et tout d’abord de son monopole éducatif. Il le tolère d’autant moins que cet État se prend à croire qu’il représente des valeurs universelles bonnes pour tous les hommes. Comment alors tolérer que des personnes « rétrogrades » refusent ses lumières, empêchent ainsi le progrès et l’avènement du bonheur de tous les autres hommes ? On reconnaît là la logique qui permet de disposer brutalement des empêcheurs de progresser en rond.

Devant le conflit des morales, créer une science rationnelle des morales
16 h 02

Georges Leroux – Pour contrebalancer ce relativisme nietzschéen, il va se produire un phénomène dont [sic] nous vivons encore aujourd’hui, nous philosophes. C’est l’apparition de l’éthique. C’est-à-dire le grand œuvre de Kant c’est de nous dire que, devant le conflit des morales, Sittlichkeit [« bonnes mœurs »], eh bien nous devons absolument créer une science rationnelle de la morale.

Je n’apprendrai à personne ici dans cette cour et en particulier à des juristes, si je dis que cette période est aussi celle de la Déclaration universelle des droits. Et donc quand l’éthique kantienne surgit, pour faire très court, elle est dans un mouvement parallèle avec l’apparition de l’idéologie des droits de l’homme, la Déclaration universelle, de la promotion de l’égalité et de la liberté. Nous voyons donc apparaître une nouvelle science philosophique qu’aujourd’hui nous avons pris l’habitude, suite à Kant, mais aussi aux théoriciens et aux éthiciens modernes comme John Rawls et bien d’autres, de séparer de la morale.

Le relativiste absolu

Georges Leroux – Alors, le relativisme, s’il touche les morales, il les affecte dans leur promotion de la conception de la vie bonne. Mais quelqu’un qui serait un relativiste absolu, on se comprend, ce serait quelqu’un qui dirait que non seulement les morales sont condamnées à l’individualité et ne peuvent être universalisées, mais que l’éthique elle-même, c’est-à-dire la science des principes, ne peut pas être universalisée. Alors ça aujourd’hui, c’est une variété assez rare de relativistes. Je connais très très peu de philosophes qui soutiendraient que, actuellement l’humanité, grâce au travail des juristes et des cours, et en particulier ce que nous faisons ici est un exercice extraordinaire à mes yeux, parce que précisément nous travaillons dans ce mouvement général, où s’universalisent les normes. Eh bien, les philosophes sont plutôt d’accord pour dire que la science éthique contemporaine qui est une réflexion sur les principes en voie d’universalisation qui nous permet, pas actuellement, pas parfaitement, et non pas pour toujours non plus peut-être, d’universaliser les principes qui nous permettraient donc de régler les différends des morales.

Messianisme éthique

Georges Leroux – Eh, bien, c’est le processus dans lequel nous sommes engagés : les droits de l’homme progressent. Nous avons eu, il y a quelques semaines, le Congrès de Genève sur les droits de la personne, on voit que, de congrès en congrès à Genève, la formulation des droits est de plus en plus inclusive. L’éthique donc progresse et le relativisme en éthique est un relativisme très très limité par rapport à celui qui règne en morale.

Me Boucher – Il nous manque peut-être une petite donnée. Vous parlez beaucoup de morale, vous nous avez dit qu’il existe différents groupes, différentes morales, quelle est la différence entre la morale et l’éthique ?

La morale et l’éthique selon John Rawls et Georges Leroux

Georges Leroux – C’est simple. J’emprunte la distinction au philosophe qui fait autorité aujourd’hui, il s’appelle John Rawls, dans un livre qui s’appelle Théorie de la justice. Il a écrit quinze autres livres, mais c’est son maître livre et c’est celui que tous les penseurs aujourd’hui, ou bien pour le réfuter ou bien en tout cas pour penser avec lui, adoptent et donc suivent son lexique. Les morales – alors, je vais être très précis -- ce sont des prescriptions concernant la vie bonne, c’est-à-dire si vous vous dites, par exemple, que vous préférez la solidarité et la collaboration à la compétition et à l’excellence, alors ça c’est une façon qui, dans l’éducation des enfants puisque nous y sommes, peut représenter deux morales différentes. Si vous êtes chrétien en plus et que vous dites qu’il est très très important que les enfants soient éduqués dans la charité, ça, c’est une morale. C’est-à-dire, c’est une prescription de la vie juste et bonne.

L’éthique pour arbitrer les conflits moraux

Georges Leroux – Bon. Maintenant, certaines morales entrent en conflit, certaines morales sont entièrement hétérogènes à d’autres. Ah. Il y aurait tant d’exemples à donner. Mais il vient un point où, dans les sociétés qui comme les nôtres, des sociétés pluralistes, nous nous interrogeons sur la possibilité d’arbitrer nos conflits moraux. Vous allez me dire pourquoi est-ce qu’on s’occupe de cela ? Eh, bien il y a quelque chose de nouveau dans nos sociétés, c’est que nous sommes des démocraties. Et nos conceptions de la vie morale, c’est-à-dire de la vie juste et bonne, ont une influence directe sur le législateur. Si quelqu’un dit qu’il faut payer moins d’impôts…

Me Boucher – D’accord.

Principe « universel » maximin

Georges Leroux – Vous êtes d’accord avec cela !? (rires) Eh bien, il va devoir l’argumenter. Dans Théorie de la justice, on va se demander est-ce que le libéralisme qui nous règle les droits individuels et ainsi de suite sont [sic] soutenus par un principe universel en éthique. La réponse, c’est oui. Ils sont soutenus par le principe universel [selon Leroux] des démunis, c’est ce qu’on appelle le principe « maximin » en philosophie, c’est-à-dire il faut donner [le] plus à ce qui ont [le] moins. Si vous contestez maximin, si vous contestez un principe éthique universel, ou en tout cas en voie d’universalisation dans la théorie contemporaine, alors d’abord vous n’avez plus de disposition morale, vous ne pouvez plus prescrire la vie juste et bonne. [!!!] Vous pouvez toujours le contester, il y a très peu de gens qui contestent maximin, mais cela nous engage peut-être dans une discussion qui serait trop longue…
Présentation sur John Rawls et un de ses critiques, Michael Walzer

Voir aussi, pour une critique de Rawls, Philippe Nemo dans Histoire des idées politiques aux Temps modernes et contemporaines, PUF, Paris, 2002, pp. 1395 à 1397. Nemo considère Rawls comme plus proche de la tradition millénariste que de la tradition démocratique et libérale. Lire aussi Robert Nozick dans Anarchie, État et utopie qui critique la logique de redistribution constante réclamée par Rawls qui risque de conduire à terme à une intervention permanente de l'État.

Le principe maximim a été, entre autres, critiqué par Kenneth Arrow et John Harsanyi, Pour d’autres critiques, dont certaines communautariennes, par rapport à la Théorie de la justice de Rawls, voir Critics of A Theory of Justice.
Georges Leroux – Je reviens à votre question précise : qu’est-ce qu’une morale ? C’est une description de la vie juste et bonne que nous, dans notre langage, nous appelons substantielle, c'est-à-dire qu’il faut qu’il y ait du contenu. Faut dire à quelqu’un comment vivre. Ça c’est bien, puis ça c’est pas bien, et ainsi de suite. Et ça touche tout le domaine de l’agir humain.

L’éthique, science des principes en voie d’universalisation

18 h 09

Georges Leroux – Maintenant qu’est-ce que l’éthique ? C’est la science des principes qui gère les conceptions de la vie bonne. Et l’éthique est en voie d’universalisation, parce que les portions de la morale qui sont désormais universalisées nous n’allons pas les faire croupir dans le monde un peu difficile et conflictuel des morales en conflit.

Personne ne discute plus « Tu ne tueras point »

Georges Leroux – Personne aujourd’hui ne discute « Tu ne tueras point ».
[Hmm et l’avortement ? Et qui est ce « personne » ? Aucun Occidental progressiste ? La peine capitale existe dans de nombreux pays.]
Georges Leroux – Il y a un moment donné, on le faisait encore. Bon, Ah. Je ne sais pas si j’ai besoin de donner d’autres exemples. Il y a tellement de choses qui sont en voie d‘universalisation, que nous voyons que c’est dans le contenu de certaines morales qu’il y a des choses, là-dessus, c’est mon sujet personnel de réflexion, sur lequel j’ai beaucoup écrit, c’est la question de savoir si on peut dire – arrêtez-moi si je deviens ennuyeux – a priori, est-ce qu’il y a dans les morales certaines zones qui ne pourront jamais été universalisées ?

Les croyances — aucun arbitrage rationnel

Georges Leroux – Vous savez, à notre époque, on vit quand même des choses difficiles : nous avons des conflits pro-vie et pro-choix qui ne sont soumis à aucun arbitrage rationnel respecté par les parties. Nous sommes donc là dans la croyance, donc dans la morale. Donc dans « Moi je crois que, toi tu crois que ». Il paraît, en tout cas, à ce jour, impossible d’obtenir un principe éthique pour régler des questions aussi graves. Mais là, j’ai honte de parler de cela devant Guy Durand [témoin expert pour la partie adverse] qui connaît ces principes beaucoup mieux que moi.

[…]

Le pluralisme et distinction avec le relativisme
Suit une discussion sur la différence entre le pluralisme et le relativisme selon Georges Leroux que nous écourtons. Georges Leroux décrit le pluralisme d’abord comme une description, la simple constatation de l’existence de la pluralité.
Réduction du pluralisme de fait dans nos histoires

16 h 13

Georges Leroux – Donc, nous sommes en chemin vers une réduction du pluralisme dans nos histoires – je dirais – dans les sociétés occidentales. Les autres, je préfèrerais en parler de manière séparée. Parce que là où la démocratie n’existe pas, le débat sur ce qui est pluriel évidemment n’a pas le même sens que dans les sociétés où le débat est permis.

Habermas : nos sociétés «progressent»

Georges Leroux – Alors, dans le domaine moral, nous sommes tous [!!] d’accord et cela est enseignement qui nous a été donné par le deuxième plus grand philosophe de notre siècle, du siècle passé, en questions morales, l’Allemand Jürgen Habermas qui a beaucoup écrit sur les rapports entre morale et droit. Et cet enseignement est le suivant : nous n’avons pas besoin de réduire, dans le moment même où nous vivons, la différence entre nos conceptions de la vie bonne pour continuer de croire que nous allons parvenir à un consensus rationnel. Et la preuve en est, selon Habermas, que nos sociétés dialoguent beaucoup, discutent beaucoup et progressent en particulier à cause du droit. C’est le droit qui fait le processus, on pourrait dire, de condensation des conceptions morales.

Beaucoup de philosophes sont hostiles à cela, disent les juristes ne devraient pas s’en mêler. Bon, c’est une opinion. Habermas et l’opinion majoritaire sont plutôt d’avis que le savoir juridique nous permet de recapitaliser notre savoir moral. Il parle même de savoir moral.

Évolution absolument remarquable, le pluralisme « normatif »

Georges Leroux – Alors, donc, c’est sûr que nous sommes dans ce domaine-là dans une évolution absolument remarquable et le pluralisme apparaît donc – et c’est le deuxième sens du mot pluralisme – comme un pluralisme normatif. Alors ce mot-là est intervenu à plusieurs reprises dans notre débat, le pluralisme c’est pas seulement ce qui nous permet de décrire al diversité, cela peut être aussi quelque chose qui nous permet de décrire ce que nous devrions respecter.

La diversité, condition de l’évolution morale !

Georges Leroux – C’est-à-dire l’idée que la différence et la diversité doivent être respectées en tant que facteurs d’enrichissement de notre conception morale. Si nous étions tous de la même couleur [quel rapport avec la morale ?] et tous pareils et si nous avions tous la même conception de la vie juste et bonne, d’une part, il est vraisemblable qu’il y aurait une certaine morosité, mais la conséquence la plus importante c’est qu’il n’y aurait pas d’évolution. C’est-à-dire, il n’est pas certain dit Habermas, que, dans contexte de diversité réduite, l’égalité, la justice progresseraient autant que dans un contexte de diversité, on pourrait dire, accélérée ou même dire stimulée. Je n’aurais pas dire promue.
[Et donc il faut imposer un cours unique d’ECR à tous pour stimuler la diversité… Hm.]
Cela dit. La réalité est que ce pluralisme de fait et ce pluralisme normatif n’ont rien à voir avec le relativisme. Car le relativisme consiste précisément à postuler que la Vérité ne peut pas être atteinte. D’accord ? Et qu’en conséquence, il faut y renoncer. Nous sommes tous prisonniers de nos bulles personnelles, sociales, identitaires, nationales, nous sommes dans nos tribus, dans nos familles. Où que ce soit il y a de la prison. Ah, Oh. Où que ce soit, en d’autres mots, nous sommes captés dans un univers qui rétrécit nos possibilités de comprendre et donc le relativiste dit : « Voilà, c’est la situation de l’humanité, c’est comme cela. Faut s’y habituer et les conflits, bin, faut les gérer en tenant compte de cela. »

Eh bien, le pluraliste s’accorde pas du tout avec cela, le pluraliste pense que -- le pluraliste envisage même que – la diversité étant une richesse, le débat national, le débat social, le débat familial, tout où il y a de la diversité, doit se poursuivre. Pourquoi ? Parce que la Vérité demeure un idéal à atteindre. Elle est possible. Elle doit être pensée comme possible à atteindre. Et donc, je dirai très simplement pour terminer, je l’ai dit dans mon expertise, qu’il y a une incommensurabilité entre les perspectives pluralistes et les perspectives relativistes.
Ce n’est pas parce que le cours est défendu par un pluraliste normatif qu’il ne peut être relativiste dans les faits dans le domaine des religions – d'ailleurs, Leroux semble toutes les considérer comme de simples croyances, aucune meilleure que l’autre, aucune vraie, aucune vérifiable, puisqu’il continue de chercher des universaux et la Vérité.

Quant à l'enrichissement dû à la diversité ethnique et de valeurs, tous ne pensent pas que celui-ci soit dans les faits nécessairement bénéfique. C'est le cas par exemple de Robert Putnam. Dans un article retentissant publié en juin 2007, ce sociologue et politiste en arrive à formuler un certain nombre de conclusions inattendues de la part d'un « progressiste  », et qu'on peut réduire à quatre thèses :
  1. Plus la diversité ethnique grandit, plus la confiance entre les individus s'affaiblit  ;
  2. dans les communautés les plus diversifiées, les individus ont moins confiance en leurs voisins  ;
  3. dans ces mêmes communautés, non seulement la confiance inter-ethnique est plus faible qu'ailleurs, mais la confiance intra-ethnique l'est aussi ;
  4. la diversité ethnique conduit à l'anomie et à l'isolement social.
Il va de soi que de telles conclusions, établies à partir d'une enquête conduite d'une manière exemplairement scientifique sur un échantillon d'environ 30 000 individus, ne peuvent qu'affoler les adeptes du « politiquement correct » en matière d'immigration (célébrée comme une « richesse ») et les partisans du multiculturalisme. Pour être honnête, il faut dire que Putnam qui est un « liberal » américain pense que ces difficultés liées à la diversité sont passagères et que, sur le long terme, l'immigration est une bonne chose (ou plutôt l'immigration passée, c'est-à-dire très majoritairement européenne, aux États-Unis aurait été une bonne chose).

Écouter une débat radiophique avec Robert Putnam (en anglais)



[à suivre]

dimanche 14 juin 2009

Liberté intellectuelle : menaces, coercition et intimidation à l'Université du Missouri

Tiré du carnet Poste de veille.

Exprimer des opinions non politiquement correctes demande beaucoup de courage des étudiants et des professeurs « dissidents » sur bon nombre de campus en Amérique du Nord.

L’organisation américaine FIRE (Foundation for Individual Rights in Education) agit comme chien de garde de la liberté d’expression et de la liberté de l'enseignement sur les campus américains.

Ce court documentaire porte sur le cas d’Emily Brooker, une étudiante en service social à l’Université publique du Missouri dont les droits ont été gravement bafoués. Comme l’explique Greg Lukianoff, président de FIRE, la mission de l’université est d’apprendre aux étudiants à penser par eux-mêmes et non de leur montrer quoi penser.



(Nous dire si la vidéo devrait être sous-titrée)


Dès sa première année à l'université du Missouri, un des projets en service social imposait à Emily d'avoir une relation homosexuelle et de faire un rapport sur cette expérience.

Plus tard, Emily a été menacée d’expulsion par l’Université du Missouri après avoir refusé (en raison de ses opinions personnelles) d’envoyer une lettre sous sa signature à la législature de l’État du Missouri en faveur de l’adoption par les couples homosexuels. Pour FIRE, que vous soyez ou non d'accord avec les vues d’Emily sur l'homoparentalité n’a aucune importance. Ce qui compte, c’est la protection du droit fondamental des étudiants d’exprimer des opinions différentes de celles de leurs professeurs, et la promotion d’une culture de diversité intellectuelle sur les campus.

La violation des droits d’Emily a donné lieu à une poursuite judiciaire fédérale que l’Université a réglée hors cour. En outre, un rapport officiel mené par d'autres universitaires a conclu qu’une culture toxique sévissait à l’école de service social. De nombreux étudiants et professeurs ont déclaré avoir peur d'exprimer des opinions différentes de celles de l'instructeur ou d'un collègue. Des étudiants et des professeurs ont décrit le comportement de certains professeurs comme étant de l’intimidation. L'université a pris des mesures correctrices en réponse au rapport : quatre professeurs agrégés ont été mutés et quatre professeurs non agrégés ont été renvoyés.

samedi 13 juin 2009

Dernier jour du procès Loyola contre le Monopole de l'Éducation

Plaidoirie des avocats de Loyola

Les avocats de Loyola ont fait valoir que le collège qu'ils représentent respectait le contenu du programme d'éthique et de culture religieuse (ECR), tant au niveau des sujets étudiés que dans la poursuite des deux finalités déclarées du programme, à savoir « la poursuite du bien commun » et « la reconnaissance de l'autre ». En outre, la pratique du dialogue était inhérente à un tel programme et était au cœur même de toute la philosophie éducative de Loyola.

Enfin, toutes les compétences du programme étaient également respectées à savoir la compréhension du phénomène religieux et la réflexion sur des questions éthiques. Loyola va plus loin et étudie plusieurs systèmes de référence lors de son étude de l'éthique et approfondit l'étude des phénomènes religieux par rapport au programme officiel en abordant également les fondements de ceux-ci...

Mais là, catastrophe, Loyola n'est pas assez superficiel pour le ministère de l'Éducation, des Loisirs et du Sport (MELS) et le contenu du cours pourrait permettre à l'élève de développer une opinion informée et un véritable respect à l'égard de la religion... Et cela n'est pas permis par le ministère. On nie donc ce qui fait une éducation catholique de qualité.

Me Phillips a rappelé que l'expert Douglas Farrow recommandait que le programme de Loyola soit donné en lieu et place du programme ÉCR, afin de se conformer aux exigences de l'Église en matière d'éducation catholique et de pouvoir réaliser son propre projet éducatif catholique.

Me Phillips a également rappelé les conclusions de l'expert philosophe Gérard Lévesque où il affirmait que le programme ECR a choisi une approche réductrice des religions, abandonne le jeune à lui-même dans la réflexion éthique et morale et entrave la transmission de la foi.

Doit-on être identique pour être équivalent ?

Puis il a remis en cause la décision de la ministre Courchesne de ne pas reconnaitre l'équivalence du programme de Loyola, à la demande de l'école elle-même, dans des lettres datant de mai à octobre 2008. (Voir la correspondance ici.)

Au sujet du refus de la ministre d'accorder l'équivalence au programme de Loyola par rapport à celui d'ECR, le juge s'est demandé à haute voix quel sens donner au qualificatif « équivalent ». La loi permet qu'une école privée donne un programme ECR équivalent à celui enseigné dans les écoles publiques, peut-il être équivalent tout en étant différent ou doit-il être identique ?

L'équivalence avait été refusée pour deux motifs principaux : la perspective confessionnelle catholique adoptée par le collège et le volet dialogue, avec toutes les consignes d'ECR de simple réflexivité et de neutralité, que le MELS a jugé absent.

Le juge s'est alors demandé si les critères de M. Pettigrew pour juger de l'équivalence du programme de Loyola étaient corrects; le « test était-il erroné ? » s'est-il demandé. Puis, le juge s'est interrogé sur les raisons pour lesquelles la ministre n'a pas jugé bon de rencontrer l'école Loyola pour poursuivre le dialogue au sujet de cette équivalence afin d'« agir de manière équitable » (« The duty to act fairly »). À savoir, effectuer des rencontres comme dans le dossier des écoles juives orthodoxes, mais il n'a été fait aucune mention à celles-ci devant le tribunal.

Le juge Dugré a enfin demandé s'il était possible de juger de l'équivalence d'un programme sans tenir compte des droits fondamentaux protégés par les Chartes comme la liberté de religion.

Me Phillips a dit que le refus d'équivalence de la ministre constitue une entrave à la liberté de religion pour l'école Loyola comme pour les parents et les jeunes qui la fréquentent.

Où l'on parle de l'éducation à maison

Me Boucher n'a pas hésité à affirmer que les enfants instruits à la maison étaient aussi assujettis au programme ECR.

Or, rien n'est moins sûr, d'une part parce que l'article 15.4 de la Loi sur l'instruction publique ne parle que d'équivalence par rapport au régime pédagogique et celle-ci n'est nulle part définie, mais qu'elle est laissée à l'appréciation des commissions scolaires.
« 15. Est dispensé de l'obligation de fréquenter une école l'enfant qui :

[...]

4° reçoit à la maison un enseignement et y vit une expérience éducative qui, d'après une évaluation faite par la commission scolaire ou à sa demande, sont équivalents à ce qui est dispensé ou vécu à l'école. »
D'autre part, nous savons de source sûre qu'une association regroupant des parents qui instruisent leurs enfants à la maison a été reçue par le ministère de l'Éducation et qu'on a déclaré verbalement à ses représentants que le cours d'ECR ne s'appliquait pas aux parents éducateurs à la maison. Mais, comme cette association est très anti-ECR, il s'agissait peut-être simplement de diviser les opposants au programme ECR par une promesse orale qui n'engage guère le ministère.

Rappelons que les écoles évangéliques et mennonite bénéficient aussi d'une application très lâche du concept d'équivalence dans l'enseignement du programme d'ECR. Divide ut regnes.

Crainte de la diversité, la paille et la poutre

Me Phillips a dit que les opposants au programme ECR étaient souvent accusés dans les médias de « craindre la diversité » alors que de toute évidence c'était le gouvernement qui craignait la diversité au niveau de la mise en œuvre des programmes scolaires.

Puis il a cité la loi 95 et le programme ÉCR pour montrer que l'intention de déconfessionnaliser tout le système éducatif y transparaissait clairement, et que cette intention elle-même constituait une violation des droits fondamentaux parmi lesquels la liberté de religion et d'enseigner la religion dans une école privée catholique.

Plaidoirie des procureurs du Monopole de l'Éducation

C'est la jeune Lucie Jobin qui a plaidé pour défendre le ministère de l'Éducation. On ne l'avait guère entendue auparavant. Me Boucher se contentant d'appuyer à certains moments la plaidoirie de sa collègue.

C'est ainsi que Me Boucher a réitéré que, selon le MELS, si le juge venait à accepter la demande du collège privé catholique Loyola cela reviendrait à rendre obligatoire un programme confessionnel (à savoir le cours ECR donné dans une optique catholique) ce qui serait illégal.

Nous cherchons toujours à comprendre exactement en quoi rendre obligatoire un cours religieux dans une école religieuse privée pourrait être illégal. Après tout, personne n'est obligé d'envoyer ses enfants à une école privée.

Monopole impénitent

La ligne de force de la plaidoirie de Me Jobin était que la ministre jouit de larges pouvoirs et d'une entière discrétion pour approuver ou non des adaptations du régime pédagogique québécois même dans les écoles privées. Ce monopole en matière d'enseignement au Québec était clamé avec une bonne conscience désarmante.

Me Jobin a voulu convaincre le juge que la ministre avait tous les documents en mains pour prendre une décision juste quant à l'évaluation de l'équivalence entre le cours proposé par Loyola et le cours ECR. Me Jobin d'ajouter qu'une équivalence ne sera jamais possible, car le ministère requiert que la posture professionnelle de l'enseignant lors du cours ECR soit « neutre », de même l’enseignement de l'éthique doit se faire de manière « neutre » (ou plus précisément non religieuse, car la posture « pluraliste normative » elle est sous-jacente à tout le programme).

Pour sa part, Loyola a une vocation catholique et veut continuer à enseigner tous ses cours dans une perspective catholique. Loyola prétend à ce droit au nom de la liberté de religion défendue dans les Chartes de droits et libertés canadienne et québécoise.

Constitutionnalité du cours ECR

La plaidoirie de Me Lucie Jobin a relevé des aspects législatifs de la jurisprudence, et divers textes (dont celui de la Commission pour les droits de la personne et de la jeunesse du Québec) affirmant la constitutionnalité et la légitimité de l'imposition d'un programme culturel comme le cours ECR. Cet avis exclut toute possibilité d'en être exempté.

Il suffisait d'exempter les 630 élèves !

Ceci n'a pas empêché Me Boucher d'intervenir pour signaler que le tribunal devait refuser la requête de Loyola, car Loyola avait moyen de remédier au problème des 630 demandes d'exemption (sur 731 élèves) en faisant appel à l'article 30 de la Loi sur l'enseignement privé (le pendant pour les écoles privées de l'article 222 de la Loi sur l'instruction publique invoqué dans l'affaire de Drummondville) :
« 30. Pour des raisons humanitaires ou pour éviter un préjudice grave à un élève, l'établissement peut, sur demande motivée des parents d'un élève ou d'un élève majeur, l'exempter de l'application d'une disposition du régime pédagogique. Dans le cas d'une exemption aux règles de sanction des études visée à l'article 460 de la Loi sur l'instruction publique (chapitre I-13.3), l'établissement doit en faire la demande au ministre. »
En d'autres mots, Me Boucher a plaidé que le directeur de Loyola, Paul Donovan, aurait pu simplement régler le problème en exemptant les 630 élèves en question, car il en a l'autorité (mais après autorisation de la ministre !) tout en offrant le cours ECR aux quelque 101 autres élèves qui n'auraient ainsi pas été « lésés » par l'absence de cours ECR.

Il faut saluer ici le culot de Me Boucher quand on se rappelle ce que sa collègue avait affirmé sur l'impossibilité d'être exempté du cours et quand on sait que la ministre Courchesne a dit publiquement que toutes les demandes d'exemption seraient d'office refusées comme sont venues le témoigner cinq journalistes lors du procès de Drummondville ! Remarquons aussi que si les parents se sentent lésés parce qu'ils n'ont pas le cours ECR dans une école privée, ils peuvent choisir une autre école privée ou bénéficier encore mieux des largesses de l'État en envoyant leurs enfants à l'école publique.

Les avocats du collège Loyola s'opposèrent à cette vision : ils s'adressaient au tribunal pour défendre la liberté de religion de l'école qui était menacée par l'imposition du cours d'ECR et non la liberté de conscience et de religion des parents.

Le juge Gérard Dugré s'est alors demandé à haute voix si accorder l'exemption au cours ECR au collège Loyola n'était pas similaire à permettre à des étudiants sikhs de porter un kirpan, un petit poignard cérémonial, à l'école comme la Cour suprême l'a permis dans un arrêt de 2006 [l'affaire Multani évoquée dans l'affaire de Drummondville].

Pas de préjudice grave possible

Me Jobin a affirmé que les conséquences dommageables de ce cours, s'il y en avait, ne pourraient être importantes, car ce cours n'est donné que pendant 70 minutes tous les neuf (9) jours. Il ne peut donc y avoir de préjudice grave... (Pourquoi cet entêtement de la part de la ministre pour un cours sans importance ?)

Outré par ces déclarations, Me Phillips a déclaré que, si le MELS allait jusqu'à interdire à un établissement comme Loyola de poursuivre sa mission éducative particulière en lui imposant un cours qui va à l'encontre de celle-ci (et on ne peut pas faire abstraction de Dieu même une minute quand on tient une école jésuite), alors oui la liberté de religion et de conscience des gens qui choisissent Loyola est plus que lésée. Me Phillips s'est ensuite demandé jusqu'où irait le Ministère de l'Éducation du Québec dans son ingérence ?

Pas de décision avant plusieurs semaines, peut-être plusieurs mois

Le juge Dugré a six mois pour délibérer (sept mois si la ministre cherche à ralentir le processus pour une raison juridique trop complexe à expliquer ici), bien qu'il ait dit être conscient que l'affaire est urgente puisque la rentrée scolaire approche à grands pas.

Terminons par une appréciation personnelle sur le jeune juge chargé depuis peu de cette affaire. Ce jeune quinquagénaire semble bien maîtriser le dossier.

Il a animé le débat par des questions fréquentes. Donnons deux exemples de questions adressées aux procureurs représentant la ministre Courchesne : « En matière de religion est-ce que s'abstenir n'équivaut pas à choisir ? », est-ce que la neutralité imposée au professeur d'ECR ne s'apparente pas au comportement de Ponce Pilate qui s'en lavait les mains ?

Le juge a visiblement pris un grand intérêt à cette cause. Pendant les plaidoiries, le juge a exploré diligemment toutes les facettes des droits administratif et constitutionnels tant avec les demandeurs qu'avec les défenseurs. Il a examiné des pistes de solutions et de jugements avec les deux partis; il a même proposé aux procureurs de Loyola d'ajouter dans leur requête une disposition touchant le droit constitutionnel qui pourrait leur servir.