Selon le metteur en ligne de la vidéo : « Les journalistes dans la salle de presse de la COP 21 se soulèvent et applaudissent dans une liesse généralisée à la signature de l’accord. Ces reporters sont les garants d’une information scientifique, sobre, neutre et impartiale... »
On peut, en effet, se demander si c’est là le comportement de reporters qui doivent savoir rester impartiaux quand ils rapportent des événements. Vidéo prise par la journaliste spécialisée en environnement de l’hebdomadaire The Economist de Londres, Miranda Johnson.
L’accord de la COP21 devait-il même susciter une telle liesse parmi les journalistes ?
À voir, la liesse qui s’est emparée de l’assemblée de diplomates, de juristes et de journalistes au moment où Laurent Fabius a validé le texte de l’accord de Paris, on aurait presque regretté d’avoir titré, par anticipation, dans ces colonnes : « La Cop21 accouche d’une souris ». Un tel débordement de joie devait signifier que quelque chose d’historique s’était bien produit. « Je suis beaucoup plus optimiste pour l’humanité que je ne l’étais encore samedi matin », confiait d’ailleurs au Figaro le Dr Jim Yong Kim, président de la Banque mondiale.
Que trouve-t-on, pourtant, dans cet accord de Paris tellement acclamé dans les médias ? Le souhait d’un réchauffement climatique contenu « bien en deçà de 2 °C » par rapport à l’ère préindustrielle. Pour s’en tenir à cette limite de température, des réductions massives de gaz à effet de serre (GES) devront être décidées. Des scientifiques ont trois ans pour affiner l’équivalence entre le volume de GES et la hausse des températures — un exercice très délicat (hasardeux même) mais sur lequel repose pourtant l’essentiel des calculs et extrapolations du GIEC (Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat). Disposant de cette limite théorique, les pays seraient alors amenés à revoir leur baisser chaque année leur émission de GES — mais seulement à partir de 2023.
Au-delà de ces objectifs, la question de la répartition de l’effort entre les différents pays est restée volontairement floue, celle des 100 milliards de dollars annuels promis aux pays en voie de développement (à partir de 2020) a été placée en annexe pour éviter que, considérée alors comme contraignante, elle soit rejetée par le Sénat américain.
Enfin, comme l’ont relevé nombre de spécialistes, le texte final fait sciemment l’impasse sur des sujets aussi cruciaux que le rôle des océans dans la régulation du climat et de la température, les transports aérien et maritime, les fleuves…
Pourquoi, alors, un tel enthousiasme ?
« Tout l’édifice de la gestion onusienne du climat était fragilisé, explique Philippe Verdier, l’ancien chef du service météorologique de France Télévisions renvoyé pour manque d’enthousiasme dans la foi réchauffiste et désormais employé par la chaîne russe RT France. Il fallait un accord pour éviter qu’il ne s’écroule. Personne n’a quitté la table, l’accord a été obtenu. De ce point de vue là, c’est donc un succès, mais ce n’est pas une surprise. »
Plutôt une condition sine qua non à la survie du système lui-même, dont la feuille de route est désormais tracée. Le texte doit être présenté par Ban Ki-moon au siège de l’ONU, à New York, le 22 avril 2016. Il pourra être ratifié durant un an et entrera en vigueur dès lors que 55 pays comptant pour au moins 55 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre l’auront ratifié — ce qui peut, là aussi, augurer quelques surprises.
Le texte n’en est-il pas moins valable ?
« La plupart des termes présentés comme des progrès n’en sont pas vraiment, constate Philippe Verdier. C’est le cas de l’objectif des 2 °C, qui était déjà avancé à Copenhague, ou celui du fonds vert de 100 milliards par an qui date de Cancún en 2010. » Une somme jamais réunie depuis, même si la France, pour montrer l’exemple et conforter sa diplomatie, s’est d’ores et déjà engagée pour 5 milliards d’euros. Autre chose : c’est pour obtenir les voix de certains petits pays du Sud — notamment des îles du Pacifique ou de l’océan Indien — que l’objectif de 1,5 °C a été inscrit, provoquant le scepticisme de tous les spécialistes. « C’est totalement illusoire, reprend ainsi Philippe Verdier. Avec les projections de rejets de gaz à effet de serre actuellement disponibles, on est sur une trajectoire bien plus proche des 3 °C » si l’on doit croire les modèles informatiques.
Faut-il cependant regretter que les contraintes restent encore de réputation et ne soient pas nécessairement pourvues de sanctions ? Faut-il regretter que les mots « énergie fossile », ces réalités matérielles qui portent les croissances de la Chine, de l’Inde, du Venezuela ou de l’Arabie Saoudite, aient été soigneusement évités, pour ne fâcher personne ? Qu’aucune date n’ait été avancée pour l’arrêt de l’utilisation du pétrole ? « Parler de neutralité carbone — autant de carbone stocké ou absorbé que de carbone produit — à l’horizon 2050, c’est de toute façon irréalisable », souligne enfin Philippe Verdier.
Dans un autre registre, faut-il regretter les déceptions qui accompagnent ce texte quand elles sont ainsi exprimées : l’accord de Paris « refuse de s’attaquer à la machine à réchauffer la planète que constitue la globalisation économique et financière » (Geneviève Azam, de l’ONG Attac, citée par Libération) ; ou encore : « Le moteur fondamental de la crise climatique, c’est le capitalisme, et la nature même de l’économie extractive » (une ONG américaine) ? Faut-il réellement regretter que la COP21 ne parvienne pas « à sauver la planète », quand on se souvient qu’il paraît hasardeux de lui en laisser les clés ?
2 commentaires:
Cet esprit grégaire, cet enthousiasme juvénile similaire au partisan d'une équipe de football, cette explosion de joie alors que l'affaire était dans le sac sont vraiment inquiétants.
Quelle belle ferveur religieuse dans la nouvelle religion, la nouvelle foi. Gaïa aime ses propagandistes.
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