lundi 11 novembre 2013

Comment la science se trompe....


Dans The Economist du 26 octobre, un dossier sur l’évolution du système mondial de recherche scientifique : « How science goes wrong ».

On y apprend:

— qu’un nombre important et croissant de publications souffrent de biais statistiques ou défauts méthodologiques qui devraient inciter à la prudence sur les conclusions, quand il ne s’agit pas d’erreurs pures et simples. Voir ainsi la controverse récente sur les calculs de Reinhart et Rogoff sur le poids de la dette et leur oubli de 5 lignes dans un tableau Excel qui a mené à un contresens, produisant un article brandi comme justification pour des politiques d'austérité par plusieurs gouvernements européens.

— que le système d'« examen critique de confrères » ou de « contrôle par les pairs » est loin d’être infaillible : un journal ayant testé des chercheurs en insérant volontairement des erreurs dans les articles à relire, a découvert que la plupart d’entre eux ont raté les erreurs en question, alors même qu’ils étaient prévenus qu’on éprouvait leur aptitude à relire.

— que la pression à publier (« publiez ou périssez ») incite à trouver à tout prix une conclusion positive aux travaux, même lorsque la raison inciterait à conclure « qu’on ne peut rien conclure des résultats ». Ainsi les publications de « résultats négatifs » ne totalisent plus que 14 % du total aujourd’hui alors qu'ils étaient encore de 30 % en 1990.

— que les travaux réalisés ne sont pas toujours reproductibles, tant s’en faut. Ainsi Amgen a découvert l’année dernière que parmi 53 études de référence sur le cancer, seulement 6 étaient reproductibles. De même, Bayer n’a réussi à reproduire les résultats que d’un quart des 67 études de références dans son domaine.

Parmi les causes :

— la compétitivité en science. Dans les années 1950, quand la recherche universitaire moderne a pris forme après ses succès durant la Seconde Guerre mondiale, elle n'était encore qu'un rare passe-temps. L'ensemble des savants, comme on disait à l'époque, ne s'élevait guère à plus de quelques centaines de milliers. Au fur et à mesure que leurs rangs ont grossi — le nombre de chercheurs actifs se situe aujourd'hui entre 6 et 7 millions —, les scientifiques auraient perdu leur goût pour l'autosurveillance et le contrôle de qualité. La concurrence pour les emplois a transformé l'université en coupe-gorge. Les professeurs titulaires en Amérique gagnaient en moyenne 135.000 dollars en 2012, plus que les juges. Chaque année, les universités américaines produisent six docteurs pour un poste universitaire disponible. Aujourd'hui, la vérification (la reproduction des résultats des autres) ne compte guère dans l'avancement d'un chercheur universitaire.

— le carriérisme encourage également l'exagération et la sélectivité dans les résultats. Pour conserver leur caractère élitiste, les principales revues savantes rejettent plus de 90 % des manuscrits soumis. Les résultats les plus frappants ont donc plus de chances d'être publiés. Il n'est donc pas étonnant qu'un chercheur sur trois dise connaître un collègue qui a « amélioré » une étude, en éliminant par exemple des données inopportunes « sur une intuition ».





Soutenons les familles dans leurs combats juridiques (reçu fiscal pour tout don supérieur à 50 $)

Aucun commentaire: