Lettre ouverte du Dr Marc Beauchamp, chirurgien orthopédiste.
Rappel sur le « consensus » : L'association Vivre dans la dignité a mené une analyse indépendante exhaustive des quelque 427 mémoires et présentations orales à la Commission sur mourir dans la dignité. « Les chiffres sont clairs. Parmi les mémoires et présentations faites devant la CSQMD, 99 % considèrent que les soins palliatifs constituent le choix digne pour les Québécois en fin de vie. De plus, 60 % sont totalement opposés à l’euthanasie et au suicide assisté. « Seulement un tiers (34 %) des personnes qui ont participé aux auditions étaient favorables à l’euthanasie. »
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Après avoir regardé la conférence de presse sur les moyens légaux d'appliquer les recommandations de la commission «Mourir dans la dignité», plusieurs constats surprennent sur ce qui a été dit, mais bien plus encore plus sur ce qui n'a pas été dit. À commencer par certains mots tabous qui ont été judicieusement maintenus sous silence.
Étrangement, ce dont il était question était bien l'euthanasie. Or ce mot n'a pas été prononcé une seule fois pour définir leur projet. Politiciens et avocats connaissent très bien la valeur des mots. On dira «aide médicale à mourir» plutôt qu'euthanasie ou suicide. Ou encore mieux «aide médicale à la fin de vie». C'est plus vendeur. On ne dira pas homicide non plus, même si c'en est un techniquement. Ce n'est pas vendeur. Un médecin tient une seringue dans ses mains, il appuie sur le piston, le cœur cesse de battre, le patient est mort.
La ministre Véronique Hivon et l'avocat Jean-Pierre Ménard considèrent qu'il s'agit de « médecine ». Or, ce n'est pas vrai, ça n'en est pas. Techniquement, c'est un homicide. Justifié ? Peut-être. Acceptable ? Charitable ? Humanitaire ? On peut débattre. On peut avoir son opinion. Mais on ne peut pas mentir.
Faisons une analogie. Ceux qui ont dit à l'époque des référendums que les questions volontairement ambiguës dans des consultations populaires sont des fraudes avaient raison. On ne peut pas fonder un nouveau pays sur une fraude, tout le monde en convient. Ceux qui évitaient de prononcer le mot indépendance (les protagonistes du Parti québécois) alors que c'était ce qu'ils voulaient faire, évitant ainsi le terme qui faisait peur, ont été accusés de chercher de façon trompeuse une adhésion à leur projet.
[...]
Mme Hivon et Me Ménard n'ont pas dit «euthanasie», ils ont dit « aide médicale à la fin de vie », et « aide médicale à mourir ». Ne soyons pas dupes, leur but est de forcer l'adhésion à leur projet et de mettre la table pour un geste unilatéral face au gouvernement fédéral, qui a autorité sur le droit criminel, et donc sur la légalité de l'homicide ou l'euthanasie. Homicide, c'est criminel, mais « aide médicale à la fin de vie », c'est médical, n'est-ce pas ?
Il faut mesurer les impacts d'un tel raccourci de politicien, et ils sont beaucoup plus profonds qu'il n'y paraît. Le plus important, pour moi qui suis médecin, est que ces deux avocats, avec leurs jeux de mots subtils, sont en train de placer une jolie bombe sur la médecine elle-même. Leur redéfinition de ce qu'est la médecine, de ce qu'on peut appeler médecine, serait dictée par l'opinion générale, l'évolution des mentalités. Or, ce n'est pas vrai. Vrai que les connaissances médicales évoluent, tout comme le droit. Mais d'aucune façon, la définition même de la médecine ne peut être définie par le pouvoir, leur pouvoir.
Aussi, Mme Hivon, outre son utilisation de termes trompeurs, a décrété dans son allocution aujourd'hui que le débat sur « l'euthanasie » (excusez le terme, il est de moi) était terminé au Québec et qu'il y avait consensus depuis le dépôt de son rapport de la commission « Mourir dans la dignité » [Note du carnet: toujours les mêmes ficelles, consensus auprès de qui ?]. Et elle affirme qu'elle veut aller vite. Pour elle et son parti, fini les discussions, fini le débat, pas question de négociation (surtout pas avec le fédéral).
Une attitude finalement déplorable et, disons-le, idéologique sur un enjeu sensible et complexe qui mérite beaucoup mieux qu'un tel traitement « bulldozer ».
Tout le monde veut le bien, l'absence de souffrance, la justice, la liberté. Le cœur humain tend vers ça, et nous, médecins, donnons tout ce que nous pouvons pour traiter et soulager nos semblables. Mais nous ne pouvons accepter l'usage des mensonges pour progresser, et encore moins l'abus des gens de bonne volonté qui forment encore la grande majorité de notre peuple.
Rappel sur le « consensus » : L'association Vivre dans la dignité a mené une analyse indépendante exhaustive des quelque 427 mémoires et présentations orales à la Commission sur mourir dans la dignité. « Les chiffres sont clairs. Parmi les mémoires et présentations faites devant la CSQMD, 99 % considèrent que les soins palliatifs constituent le choix digne pour les Québécois en fin de vie. De plus, 60 % sont totalement opposés à l’euthanasie et au suicide assisté. « Seulement un tiers (34 %) des personnes qui ont participé aux auditions étaient favorables à l’euthanasie. »
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2 commentaires:
Une lettre du Dr Patrick Vinay, médecin en soins palliatifs et vice-président du mouvement «Vivre dans la dignité», paru dans le Devoir du 18 janvier 2013:
(Le Dr Patrick Vinay donnant une conférence en 2010, devant l'auditoire de l'Ordre des infirmiers et infirmières du Québec)
C’est avec tristesse que les membres de Vivre dans la dignité apprennent que le gouvernement ira de l’avant avec l’étude d’un projet de loi qui renie le droit inviolable de chacun à la vie, et cela au nom de l’humanité et de la compassion ! La loi fédérale qui fait du meurtre sous toutes ses formes un crime exprime concrètement que tout meurtre atteint gravement nos valeurs communes. Le droit de vivre de l’autre, et donc la prohibition du meurtre, fonde le tissu même de notre égalité et de notre société.
Mais la fascination de faire partie des gens jeunes, beaux et autonomes ôte pour certains toute dignité aux malades dépendants. Il faut achever leur vie rapidement, plutôt que de soigner efficacement… Et pour cela, on veut introduire un contresoin, le meurtre, élevé au rang des gestes de compassion, et demander aux soignants de poser ce geste !
Mais avez-vous entendu les soignants qui se penchent sur la fin de vie réclamer le droit de tuer leurs malades ? Sont-ils à court de puissants médicaments pour restaurer le confort ? Non. Ils ont clairement dit à la Commission qu’ils n’avaient pas besoin de cela pour garder leurs malades confortables jusqu’à la fin. Alors si ce n’est pas eux qui sont impliqués, qui demande ce « droit » de tuer autrui ? Qui a inventé ce terme fallacieux « d’aide médicale à mourir » pour déguiser une injection létale terminale en un soin approprié ?
On propose maintenant de faire des règlements pour accorder à certains et dénier à d’autres le « privilège d’être tués » ! Il faudra donc des experts qui feront des pronostics incertains… Il faudra juger et quantifier la souffrance vécue par les uns et les autres : une tâche impossible. Cette porte ne tiendra jamais et on se retrouvera comme en Belgique avec des euthanasies accordées parce que la vue et l’ouïe faiblissent, causant « une perte irréparable » du jouir de la vie…
Et que dire des pressions de certaines familles trop occupées pour soutenir leurs malades et qui veulent en finir parce que le mourir est trop long ! Tout cela empêchera de découvrir l’entraide, la compassion, l’amitié ou l’amour. Tout cela dissoudra notre lien : le pays, est-ce seulement pour les gens autonomes ?
Pour beaucoup de bien portants, il n’y a rien à vivre en fin de vie. Pour d’autres qui vivent au contact de cette réalité, c’est un puissant terrain de transformation et de compréhension de notre nature humaine. Les soins palliatifs sont appréciés parce qu’ils soulagent efficacement ceux qui meurent tout en permettant des découvertes importantes pour ceux qui restent.
C’est la seule voie viable pour un avenir plus humain et pour des deuils plus sereins. Le gouvernement en place doit donc faire porter tous ses efforts sur l’amélioration des soins palliatifs et les rendre accessibles à tous les citoyens qui en ont besoin.
Accepterons-nous que nos lieux publics de santé deviennent maintenant des lieux dangereux où le malade peut être tué ? Des lieux où le malade ne peut plus changer d’idée ? Des lieux où le médecin tuerait plutôt que de soigner ? Des lieux où il deviendrait dangereux d’amener papa ou maman ? De telles inquiétudes ont été exprimées maintes fois durant les audiences de la Commission sur la question de mourir dans la dignité. Qui les a entendues ?
Reportage ce soir de Radio-Canada à 18h10 qui montrent des enfants en soins palliatifs et amalgame le tout avec le rapport de "Mourir dans la dignité".
Belle manière de faire accepter l'euthanasie en se cachant derrière les soins palliatifs pour les enfants (ce avec toi tout le monde est d'accord).
DÉ-GUEU-LASSE !
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