vendredi 11 mai 2012

« Demain, la Chine ne sera plus ! »

Affiche de propagande chinoise : la famille idéale,
deux parents et un enfant (garçon ?) 
C’est ce que clame la publicité des Éditions Fayard entourant l’essai d’Isabelle Attané, Au pays des enfants rares : la Chine vers une catastrophe démographique. C’est ce qui m’a incité à lire cet ouvrage qui décrit comment un tel scénario, contraire à toutes les prévisions, repose sur une seule et unique raison: une démographie trop lourde à porter, qui coupera les ailes du phénix chinois.

Après deux ans d’enquête, Isabelle Attané livre une radiographie décapante du «pays aux enfants rares».

Le titre réfère, bien entendu, à l’obsession des fils uniques, mais il y a aussi l’infanticide des filles, les ravages démographiques de la pauvreté, de la malnutrition et du sida. Autant de bombes à retardement.

En Chine, comme ailleurs, les parents souhaitent donner à leur enfant les meilleures qualités possibles; cela comprend des bons soins de santé et une bonne éducation.

« Mais la plus grande qualité que l’on souhaite à son enfant, c’est incontestablement d’être un garçon.  »

Les jeunes parents ne deviennent respectables que s’ils donnent un héritier à leurs ancêtres. « En donnant naissance à un fils, ils accomplissent le premier devoir du confucianisme: celui de piété filiale. »

Héritier d’une lignée familiale, ce fils unique est « investi d’une charge affective démesurée ».

En Chine, on trouve, à un extrême de l’échelle sociale, des enfants uniques formés à l’excellence dès le plus jeune âge et, à l’autre extrême, des millions d’enfants dépourvus de tout ou presque. « La santé, la possibilité de s’instruire, le droit à la parole, le respect de ses droits, le logement, le mariage… tout s’achète, tout se consomme; rien ne coule de source, rien ne revient de droit. »

Sinologue et démographe, Isabelle Attané note sans équivoque que l’avortement s’impose comme une solution largement acceptable quand le sexe n’est pas celui désiré.

« Chaque année, au bas mot, un demi-million de fillettes sont éliminées de la sorte. »

Il faut savoir que, dans la tradition chinoise, ce sont les fils qui sont tenus de prendre en charge leurs parents âgés. « Ce devoir d’assistance est d’ailleurs une obligation légale stipulée par loi sur le mariage de 1980 et par la Constitution de 1982. » On dit que l’enfant unique chinois a bien mauvaise réputation. Il serait égocentrique, capricieux et incapable d’accepter la moindre critique.

Mais il peut se permettre de se comporter en «petit empereur» car, depuis quelques années, « la Chine est devenue le pays du monde comptant la plus forte proportion d’hommes dans sa population, c’est-à-dire celui dans lequel, d’un point de vue strictement démographique, la situation des femmes est la plus mauvaise. »

En 2050, la main-d’œuvre de la Chine, celle qui fait aujourd’hui toute la force de son économie, aura été amputée de 160 millions d’actifs. Les fils uniques très/trop qualifiés auront de plus en plus de mal à s’intégrer sur le marché du travail.

Sans compter que les personnes âgées, auxquelles l’État n’est toujours pas en mesure d’accorder des conditions de vie décentes, deviendront un fardeau insoutenable pour les jeunes générations.

La Chine sera «vieille» avant d’être riche et, sur ses enfants devenus rares, pèseront des attentes démesurées.

Au pays des enfants rares : la Chine vers une catastrophe démographique,
par Isabelle Attané,
aux Éditions Fayard,
à Paris,
publié en 2011,
276 pages,
34,95 $.

Source



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