jeudi 1 mars 2012

Cours d'histoire au Québec — Une enquête plaide pour un retour de la dimension politique et nationale

C'est un cours d'histoire aseptisé, dépouillé de ses références nationales, voire passé à l'eau de Javel que le Québec dispense à ses quelque 242 000 élèves du secondaire, conclut une vaste enquête menée par la Coalition pour l'histoire auprès des enseignants.

Véritable plaidoyer pour le retour de la dimension politique et nationale dans l'enseignement de l'histoire, cette enquête est aussi un sondage assorti de dix de recommandations à la ministre de l'Éducation, exigeant notamment de bonifier le nombre d'heures d'histoire enseignée, d'améliorer la formation des futurs enseignants au baccalauréat et d'abolir la fameuse compétence 3 du programme qui, trop subjective, subordonne le contenu historique à l'éducation à la citoyenneté. Toujours cette volonté utilitariste insufflée par le Parti libéral.

Intitulée « Une histoire javellisée au service du présent », l'enquête est un sondage mené auprès de 215 des 1070 enseignants d'histoire (excluant ceux qui enseignent Monde contemporain en 5e secondaire), et très étoffée en commentaires, visant à « prendre le pouls des enseignants à l'égard des contenus des programmes d'histoire de la 1re à la 4e secondaire et du cours Monde contemporain de la 5e secondaire », peut-on lire dans l'enquête réalisée par la cofondatrice de la Coalition pour l'histoire, Josiane Lavallée, qui est rendue publique ce matin.

Le jugeant trop frileux et trop axé sur le présent, près des deux tiers (63 %) des enseignants souhaitent que soit révisé le programme d'histoire de 3e et 4e secondaire pour rendre plus visibles les questions politiques et nationale. « Pour tout dire, avec cette nouvelle conception de l'enseignement de l'histoire qui prône exagérément le pluralisme culturel de la société québécoise, on a pratiquement fait disparaître [...] le concept de nation québécoise au profit du concept de société », lit-on dans le rapport d'enquête.

Dénonçant le caractère répétitif du programme d'histoire, 82 % enseignants sont d'accord pour qu'il ne soit plus enseigné de façon chronologique (3e secondaire) et thématique (4e secondaire), mais plutôt scindé en deux, soit « l'histoire du Québec et du Canada de 1500 à 1840 » et « l'histoire du Québec et du Canada de 1840 à nos jours », quitte à le rebaptiser.

De l'avis de la Coalition, cela éviterait les incohérences qui font qu'à l'heure actuelle, les enseignants de 3e secondaire enseignent l'histoire du régime français sans même parler du mode de fonctionnement du système seigneurial, qui a pourtant été au coeur du développement de la Nouvelle-France.

Dix recommandations
  1. Effectuer une modification au régime pédagogique afin que le nombre d’heures prévues pour chaque programme d’histoire au secondaire soit respecté et devienne du temps prescriptif et non plus uniquement indicatif, comme c’est le cas actuellement.
  2. Augmenter à 200 heures le nombre total d’heures consacrées au programme d’histoire en 1re et 2e secondaire dans le régime pédagogique au lieu des 150 heures actuellement prévues.
  3. Abolir la compétence 3 (« construire sa conscience citoyenne/consolider l’exercice de sa citoyenneté à l’aide de l’histoire ») du programme d’histoire de la 1re à la 4e secondaire et intégrer la compétence 1 (« interroger les réalités sociales dans une perspective historique ») à la compétence 2, qui pourrait se lire dorénavant comme suit : interroger et interpréter les réalités sociales dans une perspective historique à l’aide de la méthode historique.
  4. Prendre acte de la demande incessante des enseignants d’histoire et de modifier le plus rapidement possible le programme de 3e et 4e secondaire afin de scinder sur deux années la trame chronologique de l’histoire du Québec et du Canada, soit de 1500 à 1840 en 3e secondaire et de 1840 à nos jours en 4e secondaire.
  5. Revoir le programme d’histoire de 3e et 4e secondaire, afin de redonner à la question nationale et à l’histoire politique la place qui leur revient dans le contenu du programme.
  6. Renommer le titre du cours comme suit : Histoire du Québec et du Canada de 1500 à 1840 en 3e secondaire et Histoire du Québec et du Canada de 1840 à nos jours en 4e, afin de bien identifier de quelle histoire il est question.
  7. Voir à ce que les programmes d’Histoire du XXe siècle (facultatif) et de Monde contemporain (obligatoire) soient revus afin que les contenus des deux cours puissent se retrouver dans un seul programme incluant des connaissances historiques approfondies des événements du XXsiècle et des notions d’économie, de géographie et de politique du monde contemporain. Ce cours pourrait s’intituler : Histoire du XXe siècle et enjeux contemporains.
  8. Revoir le programme de formation des maîtres afin de revenir à un baccalauréat monodisciplinaire d’enseignement en histoire de quatre ans qui ne comporterait plus obligatoirement de cours en géographie. Nous croyons que le fait d’introduire une deuxième discipline dans la formation des maîtres en sciences humaines a considérablement nui à l’acquisition d’une solide formation disciplinaire pour les enseignants d’histoire ou de géographie au secondaire.
  9. Faire en sorte que ce baccalauréat monodisciplinaire d’enseignement en histoire comporte un minimum de 20 cours d’histoire obligatoires pouvant aller jusqu’à vingt-cinq cours d’histoire et répartis équitablement entre les divers champs d’histoire enseignés au secondaire (le Québec-Canada, les sociétés occidentales et non occidentales incluant l’histoire du XXe siècle et du monde contemporain).
  10. Permettre aux universités québécoises d’offrir à nouveau un programme de certificat d’un an en enseignement pour les diplômés en histoire détenant préalablement un baccalauréat et/ou une maîtrise et/ou un doctorat en histoire et qui souhaiteraient se réorienter en enseignement au secondaire.






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