lundi 4 mai 2009

« Le gouvernement devrait se prévaloir de la loi sur les consultations populaires »

Lettre intéressante de Nestor Turcotte dans l'Écho de la Baie du 2 mai 2009. Nestor Turcotte est un professeur de philosophie à la retraite.
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Selon les sondages les plus fiables, les parents, en très grande majorité, sont en faveur de l’enseignement religieux et moral dans les écoles publiques et privées du Québec. Ceux-ci fréquentent rarement les lieux de culte mais tiennent à ce que leurs enfants soient élevés dans la tradition religieuse où leurs parents les ont élevés. Il y a là un grand paradoxe. Les Québécois n’en sont pas à leur premier.

Il y a quelques jours, Jean Charest, Premier ministre du Québec, déclarait tout à fait le contraire, suite à la marche tenue par des milliers de parents à Drummondville et qui dénonçaient l’imposition du cours Éthique et culture religieuse. Pour justifier l’imposition de ce nouveau cours, le Premier ministre affirmait, le plus sérieux au monde, que cette démarche reflétait un large consensus au Québec et était parfaitement légal.

En effet, il y a un consensus au Québec, mais il n’est pas autour du nouveau cours étatique d’Éthique et culture religieuse imposé par les Parlementaires à Québec. Il l’est au sujet de l’enseignement religieux catholique et protestant et de l’enseignement d’une morale naturelle. Les Québécois veulent ce type d’enseignement dans leurs écoles, et ils le veulent à plus de 80 %. Ils ne veulent pas autre chose. Les autorités politiques, toute partisannerie confondue, imposent, depuis quelques mois, exactement le contraire. Si la démocratie c’est la volonté du peuple, par le peuple et pour le peuple (Abraham Lincoln), le Québec est anti-démocratique et bafoue la volonté du plus grand nombre. Comment comprendre ce non respect des citoyens et ce chambardement imposé, contre la volonté d’une claire majorité? L’histoire politique récente du Québec fournit la réponse.

La Charte des droits et libertés de la personne régit, depuis plus de 25 ans, le fonctionnement de la société civile québécoise. L’énoncé original de cette Charte (1982), à l’article 41, était pourtant bien clair. «Les parents ou les personnes qui en tiennent lieu ont le droit d’exiger que, dans les établissements d’enseignement publics, leurs enfants reçoivent un enseignement religieux ou moral conforme à leurs convictions, dans le cadre des programmes prévus par la loi.» Une telle formulation reconnaissait l’autorité primordiale des parents dans la transmission des valeurs religieuses et morales.

En juin 2005, l’Assemblée nationale adoptait majoritairement et à toute vapeur, la loi 95 qui modifiait l’article 41 de la Charte des droits et libertés de la personne. L’article se lit maintenant ainsi : «Les parents ou les personnes qui en tiennent lieu ont le droit d’assurer l’éducation religieuse et morale de leurs enfants conformément à leurs convictions, dans le respect des droits de leurs enfants et de l’intérêt de ceux-ci.»

Le libellé de la première version (1982) et celui de la deuxième version (1995) semblent à tous points semblables, pour qui ne fait pas attention. Dans la première version, les parents ont le droit d’exiger. Ils sont donc les premiers responsables. Dans la deuxième version, les parents deviennent les mandataires (ils n’exigent plus…ils s’assurent) d’une autre personne qui peut juger de ce qui est dans l’intérêt de l’enfant en matière religieuse et morale. Aucune personne n’étant nommée explicitement dans l’article modifié de la Charte, il va de soi que c’est l’État qui doit faire respecter cette règle et, forcément, celui-ci devient le détenteur d’un droit qui, il n’y a pas si longtemps, revenait exclusivement aux parents.

Jean Charest a raison. La démarche actuelle gouvernementale est parfaitement légale. Puisque son gouvernement, - avec la complicité de l’Opposition péquiste de l’époque - a changé la loi afin de faire légalement ce que les parents n’ont jamais voulu que leur gouvernement fasse dans les faits : leur enlever le droit fondamental d’élever leurs enfants selon leurs convictions religieuses et morales.

Le nouvelle article 41 de la Charte québécoise viole la liberté de conscience et va en contradiction avec les Chartes internationales de droits et libertés. Elle permet à l’État québécois d’imposer le contenu d’un cours d’éthique et culture religieuse, sans que les parents aient le droit de s’y opposer, sans que les parents aient le droit d’en soustraire leurs propres enfants, sans que les parents aient un droit de regard sur le contenu religieux et moral enseigné à leurs enfants.

L’État du Québec, par le biais du Ministère de l’Éducation, peut, dorénavant imposer, modifier, ajouter un contenu idéologique particulier dans les cours offerts, tant au niveau primaire que secondaire, sans que les parents puissent dire un seul mot. C’est, en d’autres termes, l’imposition d’une religion d’État, sans droit de regard venant de ceux qui sont les premiers concernés. L’État, unilatéralement peut décider ce qui doit être transmis comme valeurs religieuses et morales à tous les étudiants fréquentant les écoles du territoire québécois. Subrepticement, le Québec est tombé, sans le savoir et sans le vouloir clairement, en régime totalitaire. Contenu étatique; assistance obligatoire aux cours, aucune dérogation. Il y a des régimes politiques qui ont procédé ainsi dans l’histoire du XXe siècle. A chacun d’en dresser la nomenclature.

J'ai lu le contenu intégral du devis du cours Éthique et culture religieuse imposé par le Ministère de l’Éducation, tant au niveau primaire et secondaire. A mon sens, ce cours sème la confusion dans les esprits des jeunes, enlève aux parents un droit fondamental qui est la transmission des croyances familiales, met sur le même pied d'égalité «religion révélée» (surnaturelle) et ««religions dites naturelles», et surtout, permet au gouvernement d’imposer des philosophies et des contenus religieux qui ne relèvent pas de sa compétence et qui peuvent aller à l’encontre de la volonté des parents.

De toute façon, ce nouveau programme est voué à l’échec. Les professeurs sont mal préparés pour l’enseigner. Ceux qui essaient de le faire, en grande majorité, le font à contre cœur, souvent pour compléter une tâche régulière incomplète. On voit ici le sérieux du Ministère de l’Éducation qui accepte, que des incompétents livrent un contenu ténébreux, mal ficelé, souvent incohérent. Dans quelques années, le Ministère sera autorisé à dire que les jeunes ne veulent plus rien savoir de la religion et procèdera à l'abolition pure et simple de ce cours inadapté, allant à l’encontre des droits fondamentaux des parents.

Le Premier ministre peut bien dire que l’action de son gouvernement est légale et rejoint un consensus dans la population. Il a, avec la complicité de Pauline Marois qui se tient coi, l’habileté du politicien qui joue avec les mots. Les parents, d’une part, souhaitaient, à plus de 80 %, conserver le droit de choisir entre l’enseignement religieux catholique et protestant et le cours de morale naturelle. D’autre part, le consensus autour du cours Éthique et culture religieuse n’existe tout simplement pas. Et pour rendre légale l’action de son gouvernement, il a profité de la canicule de l’été 1995, en accord (pour une fois…) avec le Parti québécois, pour modifier la Charte québécoise, article 41, qui permet à l’État d’assurer la transmission d’une culture religieuse de son choix, enlevant ainsi aux parents le droit d’exiger qu’un enseignement soit fait, conformément à leurs droits fondamentaux.

Sur une question aussi fondamentale, le gouvernement devrait se prévaloir de la loi sur les consultations populaires. Et faire, dans les plus brefs délais, un référendum sur la question. De toute évidence, il pourrait avoir des surprises. La question référendaire pourrait être la suivante : Acceptez-vous que le gouvernement du Québec abolisse la loi 95 qui modifiait l’article 41 de la Chartre des droits et liberté de la personne et redonne aux parents le droit fondamental de choisir le type d’enseignement qu’ils leur convient dans le domaine religieux et moral ?

Les Québécois, pour une fois, pourraient bien être tentés de voter Oui !

Nestor Turcotte – MATANE
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