mercredi 4 décembre 2019

Le syndicalisme CPE : «un des pouvoirs les plus forts au Québec»

L'État québécois a créé un nouveau pouvoir ces dernières années. Un énorme monopole qui empêche toute remise en question du réseau de garderies extrêmement coûteux et donc toute remise en question de la politique familiale québécoise qui n'a, notamment, aucun impact sur la natalité ni même sur les résultats scolaires (les résultats du Québec dans les tests internationaux n'ont pas augmenté depuis leur mise en place).

Devant ce qui semble être une réelle volonté du gouvernement Legault de mettre de l’avant les classes de maternelle quatre ans, Mario Dumont dévoile une des réelles forces derrière l’opposition «démesurée» au projet.


S’avouant d’entrée de jeu peu enthousiaste devant cette proposition de la CAQ, l’animateur se dit toutefois encore surpris des violentes critiques qu’elle suscite. «Tu as l’impression que le gouvernement veut fermer des hôpitaux», image-t-il pour décrire la réaction de partis d’opposition comme le Parti québécois (PQ) et Québec Solidaire (QS).

«Ils ne diront jamais la vérité parce qu’ils ont les mains attachées par le syndicalisme CPE. C’est un des pouvoirs les plus forts au Québec», juge Mario Dumont.


«C’est devenu une idéologie [...] On dit que la science est derrière les CPE, mais ce sont des universitaires qui ont tout misé là-dessus. Toute leur pensée et leur carrière sont basées dessus», ajoute-t-il.

«S’il y en a un qui peut parler de ça au Québec, c’est moi. J’ai voulu m’attaquer au monopole des CPE et c’est probablement une des raisons politiques pour lesquelles j’ai fini comme un gruyère plein de trous», conclut l’ex-politicien.

Entretemps, le ministre de l'Éducation est plus déterminé — diront les âmes charitables — que jamais au sujet du projet des classes de maternelle 4 ans. Il va annoncer plus de 300 nouvelles classes, dès l'an prochain. Les critiques savent que l'ancien instituteur devenu ministre ne brille pas par sa modération ou sa capacité à mettre en doute ses projets préférés. C'est pourtant le dossier le plus impopulaire de la CAQ selon un sondage Léger souligne Mario Dumont.

Actuellement, ce sont 18 000 enfants de 4 ans qui n'ont accès à aucun service éducatif. Voilà pourquoi il n’est pas question de ralentir la cadence. L'an prochain, 350 classes s'ajouteront aux 660 déjà existantes.

«En septembre 2020, 1000 classes de maternelle 4 ans. Et chacune de ces classes-là a été validée par les commissions scolaires, parce qu'il y a de la place», assure le ministre Jean-François Roberge.

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Le numérique à l’école: consommation ou outil de co-création?



Les écrans sont partout, et de plus en plus dans les mains des enfants. Mais sont-ils utiles ? Oui, sous certaines conditions... Margarida a l’accent chantant d’un pays ensoleillé, et est une chercheuse chevronnée, œuvrant entre Nice et Laval au Québec. Ses travaux portent sur la cocréation numérique, visant le développement des compétences du XXIe siècle…

Après deux décennies de tests PISA pourquoi les résultats n'augmentent-ils pas plus ?

Tous les trois ans, dans l’attente des résultats du PISA, les ministres de l’Éducation découvrent la tension qu’ils infligent aux enfants. Le Programme international pour le suivi des acquis des élèves est un test des compétences en lecture, en mathématiques et en sciences des jeunes prodigués dans 79 pays.

Le septième et dernier lot de résultats a été publié le 3 décembre, soit près de deux décennies après le premier en 2000. Quelque 600 000 élèves âgés de 15 à 16 ans et en formation depuis au moins six ans ont passé les tests. Les pays participants comprennent les membres (en majorité riches) de l’OCDE, qui gère le programme PISA, ainsi que 42 autres pays allant de l’Albanie au Vietnam. L’OCDE ajuste chaque échantillon pour qu’il soit représentatif de la population de jeunes du pays en question afin de produire des résultats sur une échelle normalisée.

L’espoir au tournant du millénaire était que la richesse de nouvelles informations permettrait d’identifier ce qui produit un bon système scolaire, incitant les autres à suivre leur exemple et à le généraliser. Ce n’est pas tout à fait comme ça que les choses se sont passées. Bien que les dépenses par élève aient augmenté de 15 % dans les pays de l’OCDE, les résultats moyens en lecture, en mathématiques et en sciences restent sensiblement les mêmes que lors des premiers tests en l’an 2000. Choisissez un pays au hasard et il est tout aussi probable que ses résultats se soient améliorés ou détériorés aux tests PISA.

Comme toujours, les résultats de cette année incluent de nombreux points positifs. Les excellents résultats de Singapour se sont encore améliorés. Même si Singapour n’est plus le pays le plus performant. C’est la Chine ou plus précisément les municipalités de Pékin et de Shanghaï (Chang-haï) ainsi que les provinces du Jiangsu (Kiang-sou) et du Zhejiang (Tché-Kiang) ; l’OCDE refusant de considérant les résultats des régions chinoises plus éloignées, car elle ne peut en garantir la véracité. Dans les régions de Chine retenues, le résultat moyen des élèves en mathématiques est de 591, contre 489 en moyenne dans les pays de l’OCDE, ce qui donne à penser que les adolescents de la région ont environ trois ans d’avance sur la moyenne de l’OCDE. Les pays de rang intermédiaire, notamment la Jordanie, la Pologne et la Turquie se sont aussi améliorés.

Mais pour chaque Singapour, il y a une Finlande, considérée autrefois comme un exemple à suivre par tous. Une partie de l’absence de progrès global est que les écoles ont moins d’influence sur les résultats que ce qu’on suppose généralement alors que la culture et la société d’un pays en ont plus, ce qui signifie que même les décideurs bien informés ont relativement peu d’influence. Comme le fait remarquer John Jerrim de l’University College de Londres : « Les pays d’Asie de l’Est continueront d’arriver en tête. »

Si une solution miracle pour améliorer l’éducation existait, elle aurait déjà été découverte. Pourtant, cela ne veut pas dire qu’on ne peut rien apprendre de PISA. Beaucoup de pays ont vu leurs résultats augmenter ou chuter sans changement culturel spectaculaire. Et, comme le suggèrent les données, une partie de l’absence d’amélioration globale, malgré l’augmentation des dépenses, est qu’au-delà d’un certain niveau (environ 60 000 $ américains par élève, cumulativement entre l’âge de six et 15 ans), il n’y a pas beaucoup de relation entre les dépenses et les résultats des tests.

Un gros problème est que beaucoup de ministres de l’éducation accordent encore trop peu d’attention aux preuves. Un autre est qu’ils doivent écouter le point de vue des enseignants, des syndicats et des parents et qu’ils ne s’y connaissent pas nécessairement. Andreas Schleicher, responsable de l’éducation à l’OCDE, déplore le fait que de nombreux pays ont, par exemple, priorisé la réduction des classes plutôt que l’embauche et la formation d’excellents enseignants, bien que les preuves suggèrent que cela soit une mauvaise idée. Comme il le souligne, Shanghaï (Chang-haï) a privilégié la qualité de l’enseignant plutôt que la réduction de la taille de la classe. Singapour a fait de même. Et ils en récoltent les fruits.

Source : The Economist

Greta Thunberg : le colonialisme, le racisme et patriarcat ont causé la crise climatique

Greta Thunberg a cosigné une tribune. Dans ce texte, les signataires — dont Greta Thunberg est la première — reviennent sur le réchauffement climatique : « la crise climatique ne concerne pas que l’environnement. C’est une crise des droits de l’homme, de la justice et de la volonté politique. Ce texte publié dans Project Syndicate identifie trois causes qui peuvent être à l’origine du réchauffement climatique, dont le racisme et le système patriarcal entre autres.


Des jeunes filles en colère

Cette action doit être puissante et de grande envergure. Après la crise climatique, il n’y a pas que l’environnement. C’est une crise des droits de l’homme, de la justice et de la volonté politique. Les systèmes d’oppression coloniaux, racistes et patriarcaux l’ont créée et alimentée. Nous devons tous les démanteler. Nos dirigeants politiques ne peuvent plus se dérober à leurs responsabilités.

Certains disent que la conférence de Madrid n’est pas très importante ; les grandes décisions seront prises à la COP26 à Glasgow l’année prochaine. Nous ne sommes pas d’accord. Comme le prouve la science, nous n’avons pas un seul jour à perdre.


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Photo dans la famille Thunberg, notez le prix du mobilier :


Enquête PISA : des résultats qu’il faut savoir nuancer

Extraits d’un texte de Pedro De Bruyckere est pédagogue et chercheur postdoctoral à la Arteveldehogeschool, à Gand, et à l’université de Leiden, aux Pays-Bas, paru dans De Morgen en Belgique.

Fin du suspense : l’OCDE a publié les résultats de l’enquête PISA, mardi à 9 h. Durant l’année précédente, des jeunes de quinze ans issus des pays et régions partenaires ont rempli une batterie de tests et de questionnaires et, après des mois de traitement des données recueillies, nous avons enfin la première partie du verdict. Vient à présent le temps des conclusions [...] Qui succède à la Finlande, la Pologne et l’Estonie en tant que premier de classe ?

Toujours est-il qu’il est utile de garder certains éléments à l’esprit à la vue des résultats du PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves). Pour vous, mesdames et messieurs, j’en ai dressé le résumé.

Tout d’abord, le PISA ne mesure ni les objectifs finaux ni les programmes d’étude d’un pays donné. Tous les pays ont leur propre cursus, raison pour laquelle le PISA s’attèle plutôt à évaluer l’aptitude des étudiants à résoudre des problèmes. Concrètement : les élèves sont aux prises avec des problèmes qui peuvent être résolus de diverses manières, par exemple avec ou sans règle de trois, sans que cela ne soit précisé. En d’autres termes, il ne s’agit pas d’un test de connaissances.

Ce programme d’évaluation se penche non seulement sur les performances des élèves en mathématiques, en compréhension à la lecture, en sciences, en économie ou en compétences numériques, mais prend également en compte des facteurs tels que le nombre de cours particuliers dispensés au sein d’un pays ou d’une région, la propension des élèves à collaborer entre eux et l’enthousiasme avec lequel ils se rendent à l’école. Autant d’éléments de comparaison souvent négligés.

Le PISA établit en outre et avant tout des corrélations, et non pas des liens de causalité irréfutables. Voilà une idée fausse qui tend à se répandre et Andreas Schleicher en personne, homme fort du PISA, s’est lui-même fourvoyé alors qu’il dévoilait récemment les nouvelles grilles du programme. Dans une interview accordée au quotidien britannique The Times, il a déclaré que le fossé existant entre filles et garçons en matière de lecture aurait diminué, faisant un lien avec l’utilisation des réseaux sociaux. Or si le PISA permet de constater que les garçons utilisent plus ou moins les réseaux sociaux que les filles et de dresser le tableau des performances des deux sexes dans ce domaine précis, peut-il établir un lien de causalité entre les deux données pour autant ? Rien n’est moins sûr. De nombreux autres facteurs non pris en compte par l’étude PISA peuvent avoir joué un rôle sur les aptitudes en lecture des uns et des autres. Démontrer de réels liens de causalité à l’aide de chiffres issus du PISA est une mission pour le moins délicate.

La principale conclusion causale souvent tirée au moyen des données de l’étude PISA consiste à déterminer les politiques qui sont à l’origine de l’amélioration ou de la baisse des résultats. Indépendamment du fait que les performances scolaires peuvent avoir d’autres influences que la seule politique menée par une autorité — citons notamment les crises économiques et une immigration en hausse — nous avons tendance à nous focaliser à tort sur la politique actuelle d’un pays ou d’une région.

Or si la Finlande a obtenu d’excellentes notes au PISA au début du siècle, ce n’est pas grâce à la politique d’enseignement menée durant cette période. En réalité, ces résultats sont probablement le fruit des mesures prises par Helsinki au cours des deux dernières décennies du siècle passé. [Ou même avant voir « Les traits du système finlandais que copie l’étranger n’expliquent pas le succès finlandais, ils sont au contraire source de problèmes » et La Finlande a perdu des places dans le classement PISA, elle essaie de se réformer (mise à jour). Les pédagogues occidentaux voulaient copier la Finlande « moderniste » mais se refusent à copier Singapour ou les pays asiatiques trop traditionalistes avec des enseignants qui ont un rôle de maître et non d'animateur de classe, une importance accordée aux connaissances transmises et non aux seules compétences et de grosses classes. Voir Singapour — Il est permis de copier.]

Transposer le système éducatif finlandais des années 2000 tel quel, comme d’aucuns se plaisent à le suggérer, n’est dès lors pas nécessairement indiqué. De fait, lors de la dernière édition de l’enquête PISA, la Flandre a obtenu de meilleurs résultats que la Finlande en mathématiques.

Les changements dans le domaine de l’enseignement sont longs à mettre en œuvre, et leurs effets tardent des années à se manifester. La Suède, il est vrai, a récemment montré comment dégrader un système éducatif en un court laps de temps, mais cet exemple est l’exception plutôt que la règle. [...]

Pour terminer, il convient de souligner que les discussions indispensables autour de l’enquête PISA ont eu lieu au cours de ces dernières années. Lors de l’étude précédente, des dizaines de scientifiques ont corédigé une lettre ouverte, s’interrogeant sur l’influence considérable [et parfois néfaste] de ce classement international sur les politiques d’enseignement à travers le monde.

[
Extraits de cette lettre ouverte  :
Bien que les tests standardisés soient utilisés dans de nombreux pays depuis des décennies (malgré de sérieuses réserves quant à leur validité et à leur fiabilité), PISA a contribué à une escalade de ces tests et à une dépendance considérablement accrue à l’égard des mesures quantitatives. Par exemple, aux États-Unis, PISA a été invoquée pour justifier le récent programme « Race to the Top », qui a augmenté l’utilisation de tests standardisés dans l’évaluation des élèves, des enseignants et des administrateurs. Tests qui classent et étiquettent les élèves, ainsi que les enseignants et administrateurs selon les résultats de tests largement connus pour leur imperfection (voir, par exemple, le déclin inexpliqué de la Finlande du sommet du classement PISA).

Dans le cadre de la politique de l’éducation, PISA, avec son cycle d’évaluation de trois ans, a provoqué une focalisation vers des solutions à court terme conçues pour aider un pays à grimper rapidement dans les classements, malgré les recherches montrant que les changements durables dans la pratique de l’éducation prennent des décennies, et non quelques années avant de de porter des fruits. Par exemple, nous savons que le prestige de l’enseignement en tant que profession a une forte influence sur [ou plutôt est fortement corrélé, sans nécessaire causalité, avec] la qualité de l’enseignement, mais ce statut varie fortement d’une culture à l’autre et n’est pas facilement influencé par les politiques à court terme.

En mettant l’accent sur un éventail restreint d’aspects mesurables de l’éducation, PISA détourne l’attention des objectifs éducatifs moins mesurables ou incommensurables comme le développement physique, moral, civique et artistique, réduisant ainsi dangereusement notre l’imagination quant à ce que l’éducation est et devrait être.
]

L’étude représente certes une source d’influence importante, mais il en existe d’autres. Citons par exemple le PIRLS (Programme international de recherche en lecture scolaire) pour la lecture, le TIMMS (étude internationale consacrée aux mathématiques et aux sciences), ou encore l’ICCS pour la citoyenneté [nous sommes plutôt inquiets qu’on essaie d’évaluer une matière idéologique comme la citoyenneté au niveau mondial...]. Ces indicateurs, auxquels s’ajoutent les études menées par nos propres autorités, nous permettent de prendre la température de notre enseignement. Il ne nous reste plus qu’à déterminer le degré de fièvre de celui-ci. Et les éditions précédentes du PISA ainsi que le PIRLS n’incitent pas forcément à l’optimisme.