dimanche 4 janvier 2015

Chine — l'école au cœur de la réussite sociale


Rémy Jost, nspecteur général honoraire de l’Éducation nationale, a étudié de près le système scolaire chinois. Nous reproduisons ici les éléments phares qu’il a exposés à PLOT, revue destinée aux professeurs de mathématiques de l’enseignement public.

Si le système chinois est perfectible, il dispose néanmoins de sérieux atouts qui pourraient inspirer le modèle français. Il y a par exemple une réelle volonté de réussite qui guide tout le système éducatif. L’organisation des établissements scolaires repose véritablement sur cette exigence, avec les mathématiques en point central.

L’école, facteur de cohésion sociale

Les Chinois ont une « haute idée de l’école » qui les encourage à avoir de grandes ambitions pour leurs enfants, en particulier dans les milieux les plus populaires et ruraux. Si la scolarité est normalement obligatoire jusqu’à 16 ans, elle n’est souvent pas respectée dans les campagnes profondes, signe de la disparité de cet immense pays en matière d’éducation.

Les valeurs de l’école portent sur le patriotisme, le civisme, la réussite par le travail, la persévérance et le respect. Ces valeurs sont d’ailleurs présentes dans toute la société chinoise, de même que la solidarité familiale qui prime l’individu. La réussite personnelle d’un élève a aussi pour but de faire réussir sa classe ou même de valoriser son école, ce qui vaut aussi chez les professeurs. Mais cette pression a des répercussions sur le bien-être des élèves chinois.

À travers l’exigence personnelle que requiert le système scolaire, les jeunes sont fortement responsabilisés. Rémy Jost explique par exemple que « tous les élèves sont responsables de la propreté de leur salle de classe » et chacun leur tour « la nettoient avec un balai et une serpillère ».

Une pédagogie de la réussite pour tous

Trois matières sont au cœur du système scolaire : le chinois, les mathématiques et l’anglais. Au lycée, elles sont enseignées tous les jours de la semaine.

Rémy Jost explique par exemple que « les élèves savent calculer mentalement avec une grande rapidité d’exécution ». Les Chinois apprennent à compter plus tôt qu’en France puisque « les tables de multiplication des multiples des nombres jusqu’à 25 sont maîtrisées dès la fin de l’école primaire ».

Pendant les cours, le professeur laisse un temps de réflexion personnelle et un temps de débat avec les élèves proches.

Le rythme est très différent par rapport à notre pays puisque les élèves ont chaque jour, du lundi au vendredi « 6 ou 7 séquences de cours de 40 à 45 minutes selon les provinces ». À la fin de chacune de ces séquences, il y a une pause de 10 minutes environ. En outre, deux fois par jour, « une séance de relaxation par massage des acupoints autour des yeux » est proposée.

Les examens sont aussi très présents dans le système éducatif chinois, de manière continue tout au long de l’année comme à la fin de chaque cycle. L’examen final s’appelle le gaokao. Il est préparé dès la première année de lycée qui dure trois ans en tout. Deux filières sont proposées aux élèves : l’une scientifique, l’autre littéraire. À l’approche du gaokao, le travail demandé aux élèves est très important. Le sport a également une place de choix dans les écoles chinoises. Une séance rapide de gymnastique a aussi lieu au moins une fois par jour. Le sport commence à être très pratiqué à l’école.

Les établissements n’ont pas peur d’investir de gros moyens financiers pour la réussite de leurs élèves. Par exemple, il n’est pas rare de voir le dernier matériel informatique au sein des écoles chinoises. L’usage du vidéoprojecteur se généralise également.

Le fameux slogan scandé aux États-Unis pour promouvoir les écoles à charte résume bien l’esprit pédagogique chinois : « Aucun enfant laissé de côté ». Le soutien scolaire est ainsi monnaie courante, aussi bien les soirs de la semaine que le samedi ou le dimanche. Rémy Jost explique que « les maîtres sont très engagés pour faire réussir leurs élèves ». Les professeurs ont une obligation de présence « d’au moins 40 à 45 heures par semaine » et restent souvent « plus de 60 heures dans les écoles primaires et les collèges » ! L’échec scolaire est donc presque inexistant, car les élèves les moins bons sont pris en charge pour qu’ils puissent compenser leurs insuffisances en temps voulu. Ce soutien personnalisé permet de compenser le nombre très élevé d’élèves par classe qui peut aller au-delà de 50. Ce sont les professeurs eux-mêmes qui donnent les cours particuliers à titre privé, ce qui permet à certains d’entre eux de « doubler leur salaire mensuel ».

Des professeurs très impliqués

Pour les professeurs, la formation est plutôt exigeante même si une vraie disparité existe entre les établissements en ville et à la campagne. En ville, la quasi-totalité des professeurs fait cinq ans d’études avant de passer un certificat de qualification puis « présentent leurs candidatures aux collectivités locales et à plusieurs chefs d’établissement ». La titularisation peut être longue (jusqu’à 10 ans). Tout au long de sa carrière, le professeur continue de bénéficier de formations. Il n’est pas rare non plus d’avoir des professeurs de lycée docteurs dans la discipline qu’ils enseignent, voire parfois au collège et au primaire. [Note du carnet : nous doutons que cela soit d’une grande utilité au primaire... Un docteur en littérature française n’enseigne pas nécessairemment mieux le français au primaire...]

Tous les jours, des devoirs sont effectués par les élèves, puis ramassés et corrigés le lendemain par leurs professeurs. Outre l’enseignement, un professeur est responsable du comportement des élèves. Il doit recevoir les parents qui le souhaitent et participe très régulièrement à des réunions avec les équipes de professeurs (les tests sont préparés de cette manière), avec le professeur principal d’une classe et le chef d’établissement.

La solidarité au sein d’une école est très forte. Les professeurs sont impliqués et prennent part à la renommée de leur établissement. Des concours de pédagogie sont organisés à tous les échelons (district, province, national). Si un professeur est jugé capable, « il est encouragé par ses collègues à se présenter à un concours ». Ainsi, il peut accroître la notoriété de son école.

Rémy Jost conclut sa présentation du système chinois par cette phrase : « la Chine investit de manière remarquable dans l’éducation de ses jeunes ». Et d’ajouter qu’il est « impressionné par ce dynamisme et cette confiance en la jeunesse ». Ce fort investissement de toute la société civile envers l’école s’est d’ailleurs traduit récemment par d’excellents résultats aux tests PISA.




Soutenons les familles dans leurs combats juridiques (reçu fiscal pour tout don supérieur à 50 $)