lundi 9 février 2015

France : encore trop de discriminations envers les écoles indépendantes


Les écoles indépendantes (« hors contrat » avec l’État français) se développent de manière exponentielle [en France]. La demande explose, mais les pouvoirs publics tardent à accorder aux élèves de ces établissements le même traitement que celui accordé à leurs congénères du public. Comment expliquer ce phénomène ?


Le succès des écoles indépendantes se confirme d’année en année. En 2014, 51 nouvelles écoles se sont ouvertes, contre 37 en 2013, 35 en 2012, 31 en 2011 et 19 en 2010. Un phénomène qui s’explique par la demande croissante de parents qui cherchent un « autre » enseignement, une pédagogie réellement adaptée aux besoins de leurs enfants. Cependant, force est de constater que les élèves de ces établissements dits « hors contrat » ne bénéficient pas toujours des mêmes droits que les élèves issus du public ou du privé « sous contrat ». Est-il acceptable, en France, que des enfants soient discriminés parce que leurs parents ont fait le choix de la liberté scolaire ?

Accès au concours général

Le concours général des lycées et des métiers a pour fonction de distinguer les meilleurs élèves ou apprentis et de valoriser leurs travaux. Institué en 1744 par l’Université de Paris, à l’initiative de l’abbé Legendre, ce concours évalue les candidats sur des sujets conformes aux programmes officiels, dans le cadre d’épreuves plus exigeantes et plus longues que celles du baccalauréat. Or les élèves issus des écoles indépendantes n’ont pas accès à ce concours. En effet, l’arrêté du 3 novembre 1986 oublie littéralement les élèves des établissements privés dits « hors contrat » qui ne bénéficie donc pas de la possibilité de se présenter au concours général.

Comment l’expliquer ? Selon le ministère de l’Éducation nationale, que nous avons contacté, les élèves sont interrogés sur des points précis du programme, les écoles indépendantes choisissant d’enseigner un programme qui n’est pas forcément le même que celui de l’Éducation nationale, les élèves ne seraient pas bien préparés pour ce concours. Mais cette explication ne tient pas. Les écoles indépendantes doivent respecter le socle commun des connaissances et sont inspectées en moyenne tous les deux ans – le public est quant à lui inspecté en moyenne tous les 7 ans. Par ailleurs, le concours général se passe en fin de scolarité, là où tous – dans le public comme le privé sous ou hors contrat — préparent les mêmes diplômes, à savoir le bac. Les écoles indépendantes peuvent en revanche ajouter des éléments au programme et choisir la pédagogie.

Par ailleurs pour passer le concours, l’élève doit être présenté par un enseignant, or pour l’Éducation nationale, n’est véritablement enseignant que celui qui a passé les concours d’État pour enseigner, ce qui n’est par définition généralement pas le cas des professeurs dans les écoles indépendantes. Cette disposition conduirait donc à exclure de facto les élèves de la possibilité de se présenter.

Face à ce qu’elle tient comme une injustice et une rupture d’égalité, l’association Créer son école, partenaire de la Fondation pour l’école, a introduit un recours en justice devant le Conseil d’État. Ce dernier n’ayant pas fait droit à sa demande, elle a déposé un recours devant la Cour européenne des droits de l’Homme, laquelle a jugé irrecevable sa requête. Les élèves du hors-contrat désireux de se confronter aux autres à l’occasion du Concours général ne peuvent donc toujours pas le faire. Alors que le baccalauréat est largement dévalorisé, ces élèves ne disposent d’aucun moyen évident de prouver leur niveau et leur originalité, ce qui ne peut que les desservir dans le cadre des procédures d’admission post-bac sur dossier, surtout lorsqu’ils proviennent d’établissements indépendants peu connus.

Ce bon niveau des écoles indépendantes qu’on ne veut pas voir

Il semblerait en fait que l’Éducation nationale n’accepte pas l’idée que ces écoles dites « hors contrat » puissent avoir de meilleurs résultats que les établissements publics. En effet, il y a fort à parier que les écoles de dominicaines qui mettent tant l’accent sur le grec et le latin aient de potentiels lauréats en langues anciennes, que les écoles juives hors contrat soient capables de se distinguer en hébreux… Bref, l’Éducation nationale refuse une émulation par les écoles privées qui serait pourtant saine et l’aiderait à se perfectionner.

C’est ce qui explique aussi qu’aucun palmarès des meilleurs lycées au niveau national ne prenne en compte les résultats des établissements indépendants. Chaque année, l’Éducation nationale publie les indicateurs de résultats des lycées qui reposent non pas uniquement sur les taux de réussite aux diplômes d’Etat mais sur un ensemble de critères complexes, intégrant des indicateurs sociaux, qui brouillent la lecture et l’interprétation de ces classements. S’il lui apparaît déjà trop discriminant de mettre en avant tel ou tel lycée public qui aurait d’excellents résultats, on comprend mieux les raisons qui la pousse à ignorer totalement ceux qui en plus d’avoir de bon résultats, remettent en cause par leur succès même un système à bout de souffle.

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