dimanche 11 décembre 2011

Fesser ou ne pas fesser l'enfant capricieux ou rebelle ?




Fesser ou ne pas fesser ? En lançant une grande campagne de sensibilisation sur ce thème il y a deux ans, le Conseil de l'Europe ne laissait aucun doute sur son objectif : faire voter à tous ses pays membres une loi interdisant la fessée. Derrière ce débat éducatif, c'est toute la question de la nature humaine qui est posée. Est-ce la violence de la société qui pervertit l'enfant ? L'État a-t-il pour mission de légiférer sur les méthodes éducatives des parents ? Ces questions, les Suédois y ont répondu en 1979, en votant l'interdiction de toute forme de punition corporelle sur les enfants. Aucune distinction ne pouvait plus être faite entre la vraie maltraitance et la bonne fessée des familles. Pour l'Europe entière, la Suède est alors devenue le pays pionnier en ce qui concerne les droits de l'enfant. Mais en quoi consiste ce fameux « modèle suédois » qui bannit la fessée de la sphère publique et privée ? Quelles politiques l'accompagnent ? Y a-t-il des dérives ? La Suède est-elle devenue le pays du bambin tout puissant ? Les Suédois sont-ils les parents parfaits que nous rêverions d'être ? La réalisatrice scrute la société suédoise avec un regard étonné.



« L'éducation est un dressage, l'enfant est un sauvage. »
« La violence c'est mal, parce que c'est mâle. »





Lors de la campagne des présidentielles 2002, le candidat centriste François Bayrou donne une gifle à un enfant qui lui fait les poches.






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Enfants gâtés pourris, les dégâts du sentimentalisme

L'enseignante belge Mia Vossen parle de son expérience et du livre du psychiatre britannique Theodore Dalrymple : Spoilt Rotten: The Toxic Cult of Sentimentality, paru en 2010 en broché et en poche depuis mi-2011.

Depuis longtemps, je m’étonne de ce que les observations de ceux qui enseignent ne rencontrent que très peu d’échos. J’ai trouvé la réponse dans un livre anglais :

Th. DALRYMPLE, Gâté pourri. Le culte toxique de la sentimentalité, 2010

Notre société est fragile et ne supporte plus qu’une approche sentimentale de la réalité

Ce livre n’a malheureusement pas (encore ?) été traduit en français. Il devrait l’être car quand Dalrymple dit : « Le peuple anglais craint ses propres enfants », je pense à tous ces parents, à tous ces enseignants qui ont peur… de gosses de 15 ans, ici en Belgique et en France !

Les enfants dont parle Dalrymple peuvent « tout » se permettre, ils ont tous les droits. Il est impossible de leur donner une instruction et « Dans la région où j’ai travaillé (comme psychiatre), une région pauvre, j’ai découvert que la plupart de mes patients qui avaient suivi 11 ans d’enseignement obligatoire – ou du moins de présence obligatoire à l’école – étaient incapables de lire un texte simple. Ils ne pouvaient déchiffrer des mots de trois syllabes […]. Quand on leur demandait de raconter en leurs mots le passage qu’ils venaient de lire, ils répondaient : « Je ne sais pas, j’ai seulement lu ce texte. » Quand on leur demandait s’ils étaient bons en calcul, 50 % répondaient : « C’est quoi, le calcul ? » Je fais remarquer que ces enfants n’étaient pas sous-doués, que des enfants sous-doués de parents qui avaient pris la peine de donner un enseignement aussi complet que possible à leurs enfants, savaient souvent mieux lire et mieux calculer que leurs contemporains nettement plus doués mais d’origine plus modeste. […] Il est prouvé que 100 % des enfants des milieux les plus modestes peuvent apprendre à lire et à écrire si on se sert des bonnes méthodes didactiques. » (pp. 14 – 15)

Dalrymple observe que « les bons sentiments » ont pris la place du bon enseignement et cite avec rage une idée qui vient de Maria Montessori:

« Il ne faudrait jamais dire à un enfant qui apprend à écrire qu’il a mal écrit une lettre… Chaque enfant, chaque adulte stupide est le fruit du découragement… Donne la liberté à la Nature et plus personne ne sera bête. »

Dalrymple : les parents occidentaux savent de moins en moins comment éduquer leurs enfants
(en anglais, titre de l'audio ci-dessus n'est pas exact comme Dalrymple le dira dans son allocution)


Avec ce genre d’attitude, il est interdit de sanctionner… interdit de former des enfants. Et je me souviens d’un directeur dans une école bien notée d’Arlon. À mon observation que traiter un prof de « pouffiasse, putain » méritait une punition, il a répondu : « Tu n’as jamais été jeune, toi ? » J’avoue avoir été bien incapable, ensuite, de faire travailler ce « jeune »-là! Mon directeur avait sûrement lu Pestalozzi, cité par Dalrymple: « Les facultés humaines se développent d’elles-mêmes » et Dewey : « N’imposez rien à l’enfant, laissez-le libre, laissez-le se diriger d’un objet intéressant vers l’autre… nous devons attendre le désir de l’enfant, son besoin. » Caldwell Cook a même écrit : « Le meilleur moyen d’instruire la jeunesse est le jeu » et Froebel estimait que l’enfant sait parfaitement ce qui est bon pour lui. Françoise Dolto, que Dalrymple ne connaît pas, disait exactement la même chose…

Le ministère de l’enseignement anglais a été jusqu’à préciser que « l’enseignement à l’école primaire doit se focaliser sur des activités et des expériences plus que sur des faits à connaître. » En ajoutant que « Ce principe est valable pour tous les niveaux de l’enseignement. »

On croirait entendre nos inspecteurs ! Ces idées datent des années 1930… Elles sont répandues depuis par les « pédagogues » officiels et toutes les critiques émises par des enseignants de terrain, par des parents, des chefs d’entreprise, des journalistes, des historiens, des philosophes… sont lettre morte. Ah, la « Soumission à l’autorité » que dénonce Stanley Milgram…

Dalrymple connaît aussi le « constructivisme » cher à nos « pédagogues » et signale cette opinion répandue:  « Un garçon écrit peut-être mieux l’anglais s’il a découvert lui-même les bases des exercices d’écriture que s’il les a apprises grâce à un enseignement ou un livre. » (p. 22)

Comme ce « constructivisme »[1] reste à la mode, je me permettrai mon grain de sel de vieille prof adorant enseigner et obtenant de bons résultats :
  1. le savoir se construit d’abord par un réel apprentissage et grâce à la mémoire. On ne construit pas sur du sable ! (Seuls les bébés apprennent en jouant et ils sont plus sérieux qu’on imagine).
  2. L’enfant, le jeune, complète son savoir grâce à des travaux personnels qui font suite à des explications point trop longues – les bases existent/sont à consolider – et ces travaux doivent être très nombreux et faits en classe ! (Grâce à internet, je fais beaucoup de « travaux personnels » pour d’anciens élèves…) Je sais pourquoi on fait peu de travaux et pourquoi ces travaux sont souvent stéréotypés : leurs résultats ne peuvent créer de problèmes avec parents, inspection, avocat…
  3. La contrainte est indispensable à la construction du savoir, la satisfaction vient ensuite. Attendre, comme le préconise Froebel, que l’enfant ait envie de savoir, c’est lui faire perdre son temps, c’est hypothéquer son avenir!

Mais créer et maintenir la discipline nécessaire n’est pas bien vu dans notre société sentimentale.

Société sentimentale où celui qui est gentil a nécessairement raison. La vérité, c’est ce que disent les gentils… et tout le monde est gentil. Même l’enseignement de l’histoire est perverti par ce besoin de « gentillesse » : le prof présente par exemple la traite des esclaves noirs par les colonisateurs en la sortant de son contexte. Les élèves ignorent les dates, les réalités humaines de cette époque, l’esclavage en général. La traite est isolée, gonflée, diabolisée et le tour est joué : l’élève ne voit plus que les « bons » et les « mauvais », il voudra être « on » et n’apprend ni sens de l’histoire, ni sens des proportions, ni réalités humaines… il n’apprend rien en définitive.

À ces élèves « bons » – nécessairement bons ! – on apprend à participer aux malheurs des autres en achetant l’une ou l’autre babiole, en faisant des marches ou des marchés « pour les affamés du Soudan ». L’élève croit participer à une bonté générale, croit jouer un rôle utile. Il ne fait rien, mais notre société sentimentale peut continuer à se cacher les vrais problèmes du monde, à ne surtout pas former des citoyens critiques, libres, individualistes.

Des gens libres et individualistes, à l’esprit critique ont construit l’Occident, mais l’Occident est mauvais et si nous battons notre coulpe, nous sommes gentils, pleins de bons sentiments et tout va bien…

Oui, Dalrymple est très agressif envers notre société sentimentale qui pourrit ses enfants, qui oublie que l’Occident inspiré par les stoïciens a inventé les « Droits de l’Homme », que l’Occident a mis fin à l’esclavage (allez voir, maintenant, en Afrique les nombreux esclaves qui y survivent péniblement!), que l’Occident nourrit et soigne le reste de la planète… L’Occident n’est pas arrivé à ces résultats en étant gentil, en jouant avec ses enfants !





[1] Les idées de Montessori, Froebel, Dewey e.a. ne sont pas à mettre entièrement de côté. Elles peuvent convenir exceptionnellement dans des cas particuliers et le constructivisme convient à certains pédagogues : ex cathedra ils informent les élèves de tous les éléments nécessaires à la solution d’un problème et posent alors la question qui oblige d’exploiter ces connaissances. L’enfant doué (!) trouvera la dernière pierre à ajouter à l’édifice pour résoudre le problème… Le constructivisme permet d’exercer son imagination, pas de reconstruire toutes les étapes de la connaissance et il serait même « génial » dans des écoles pour surdoués.

Aussi de Dalrymple :

Le multiculturalisme et sa haine de toute identité nationale détruit la Grande-Bretagne