mardi 13 septembre 2011

Entrevue avec M. Richard Décarie, porte-parole de la Coalition pour la Liberté en Éducation (CLÉ) dans le Prince Arthur

L'important journal étudiant The Prince Arthur Herald publie une entrevue avec Richard Décarie, porte-parole de la CLÉ.

La CLÉ milite afin que le choix revienne aux parents
plutôt qu'au seul gouvernement. 
« En 2008, le cours d'Éthique et culture religieuse est devenu obligatoire au Québec. Deux sondages, menés et publiés en 2008 et 2009 par Léger marketing, déterminaient que les Québécois s'opposent à plus de 75 % à l'imposition de ce cours à tous les élèves et toutes les écoles. Un mouvement citoyen est né pour s'opposer à cette mesure et le sujet demeure d'actualité puisque le jugement de la Cour suprême du Canada visant le droit d'imposer ce cours devrait être rendu cet automne. À la demande populaire, voici une entrevue avec le porte-parole de cette coalition, M. Richard Décarie.


Prince Arthur — Certains disent que vous êtes un des vrais et rares mouvements spontanés de citoyens au Québec. Comment est née la Coalition pour la Liberté en Éducation? Parlez-nous un peu de l'histoire du mouvement.

Richard Décarie — La Coalition est née en 2007 d’un petit groupe de gens qui s'est aperçu qu'il y avait atteinte à l'autorité parentale. À l'origine, il était surtout religieux et majoritairement catholique. Bon, ces gens se sont fait mettre en boîte par les médias très rapidement comme la plupart des mouvements citoyens et c'est alors qu'ils ont opté pour la mise en place d'un moyen direct de communication avec le grand public, soit un site web.

C'est lorsque la CLÉ s'est rendu compte du fait qu'il s'agissait d'un combat politique contre l'État que l'organisation formelle a été perçue comme nécessaire. Il ne s'agit même pas d'un OSBL, c'est plutôt une association de parents, tous bénévoles. Plus de 200 000 $ ont été investis par la famille à la base de la requête en justice pour embaucher deux avocats, et ce n'est que lorsque la CLÉ est allée en appel qu'il y a eu du financement de la part de la population afin de rembourser des frais d'environ 150  000 $.

Il s'agit donc d'un rassemblement citoyen pour une cause commune qui a réussi à se rendre jusqu'à la Cour suprême du Canada, de là sans doute l'idée du caractère grassroots de ce mouvement.

—  Quelle est votre mission?

Il s'agit de la liberté en général dans le domaine de l'éducation. Il y a plusieurs enjeux, par exemple, la liberté d'ouvrir une école privée. Toutefois, la CLÉ s’est concentrée sur le cours d'ÉCR obligatoire tant pour les écoles privées et que l'école à la maison. Il s'agit pour nous d'informer et défendre les parents quant aux droits qu’ils ont perdus à leur insu et sur l’imposition obligatoire de ce cours, de les fédérer et de les défendre au mieux avec nos modestes moyens financiers.

— Le MELS dit du cours que «Le nouveau programme permet d'offrir une seule et même formation à l'ensemble des élèves du Québec tout en respectant la liberté de conscience et de religion des parents, des élèves et du personnel enseignant». Pourquoi n'êtes-vous pas d'accord? En quoi les libertés de ces groupes sont brimées?

Depuis 2008, les professeurs sont obligés de l'enseigner, l’article 20 de la Loi sur l’instruction publique ayant été abrogé pour éviter toute demande d’exemption d’enseigner ce cours. Des enseignants sont venus nous dire que cela n'avait aucun sens. Ils doivent présenter en parallèle un ensemble de religions et de croyances mythologiques. Souvent les élèves leur demandent : « C'est quoi le mieux ? … Est-ce que c'est bon ou ce n'est pas bon ? ». Questions auxquelles l'enseignant n'a nullement le droit de répondre. En théorie, le professeur ne doit jamais mettre son opinion sur la table et doit demeurer parfaitement objectif à l'égard des valeurs religieuses de chacun. Pris de panique, ils nous ont appelés pour nous dire qu'il y avait eu très peu de formation, habituellement une demi-journée qui tournait autour du fait qu'il leur était interdit de prendre une position personnelle. Notons de surcroît que plusieurs pédagogues affirment que cette neutralité en matière de formation morale est véritablement contre-productive.

La CLÉ milite afin que le choix revienne aux parents plutôt qu'au seul gouvernement. Liberté de choix et liberté d'éducation morale de son enfant. Maintenant, tout le monde est obligé d'apprendre que la religion des autres est égale à la leur. Un enfant de 6 ans a dit qu'il voulait devenir hindou pour avoir plusieurs vies, car son grand-père était mourant et cela lui faisait de la peine. Il ne s’agit pas d’une question d'intolérance, mais d’un relativisme religieux et moral imposé à tous au nom d’une formule unique où tout se vaut. Unicité de programme au nom du respect de la diversité et de la tolérance !

— Le Ministère soutient également que le cours d'éthique et culture religieuse est « pour vivre ensemble dans le Québec d'aujourd'hui ». Vous vous opposez au caractère obligatoire de ce cours. Vous opposez-vous à l'idée d'un Québec ouvert qui fait preuve de cohésion sociale ? Est-ce une vision intolérante?

Est-ce qu'avant l'imposition obligatoire du cours en 2008 le Québec était une société fermée et les préjugés faisaient en sorte que la société québécoise [était un endroit] où il faisait mal vivre ? Le Québec est une nation ouverte sur le monde depuis des siècles, le Canada une terre d'accueil. Même avant 1995, lorsque les écoles étaient confessionnelles, il y avait de l'ouverture et de l'accueil. À l'époque, le cours de religion chrétienne n'était pas imposé, c'était aux parents de décider des valeurs présentées à leurs enfants, il n'était jamais obligatoire.

Le mouvement est appuyé par des laïques, des catholiques, des juifs, des coptes, des athées, des musulmans et des hindous. Il y a de la cohésion sociale contre cette imposition puisqu'ils voient que l'on touche à l'enseignement moral de leurs enfants alors que l'Occident a toujours été tolérant sur la liberté de religion. La CLÉ milite en faveur du choix en matière d’éducation religieuse et morale, elle incarne donc la vraie tolérance.

— Plus tôt cette année, la Coalition est allée plaider sa cause auprès de la Cour suprême du Canada. Pouvez-vous nous parler des implications possibles de ce jugement sur l'avenir de l'éducation au Québec ?

Le simple fait de s'y être rendu montre qu'il y a un problème à ce niveau, ce qui est déjà un succès, peu importe pour qui le tribunal tranchera. En 1995, lorsque l'on a déconfessionnalisé les écoles au Québec, cela allait à l'encontre de la constitution canadienne de 1867 qui protégeait l'enseignement religieux au Québec. Pauline Marois, alors ministre de l'éducation sous le Parti Québécois, a négocié avec le gouvernement du Canada en invoquant la loi constitutionnelle de 1982 afin d'enlever la protection accordée par celle de 1867. Ceci alors que la loi constitutionnelle de 1982, produit du rapatriement de la constitution, n'avait pas été signée par le Québec et même refusée par le Parti Québécois qui était alors au pouvoir ! Finalement, en 2005, la Charte des droits et libertés de la personne du Québec a été modifiée pour faire place au futur cours d'ÉCR. Nous pensons que l’abolition unilatérale de la protection constitutionnelle de 1867 est illégitime.

Si le plus haut tribunal du pays décide en faveur des parents, une première action politique citoyenne spontanée « grassroots » aura fait reculer l’État du Québec dans sa quête d’affaiblir l’autorité morale des parents sur leurs propres enfants. Si le jugement tranche en faveur de l'État, l'erreur juridique sera validée et un combat politique citoyen devra s’organiser à l’échelle canadienne, les autres provinces devenant liées par une telle décision illégitime.

— Quelles sont les actions futures prévues par la Coalition et comment est-il possible de soutenir votre cause ?

La Coalition continue son financement par l'entremise de son site web et d’une campagne téléphonique qui a montré toute son efficacité. Il est certain que le mouvement contre l'imposition du cours d'ÉCR à l’école publique aura atteint son apogée avec le jugement de la Cour suprême du Canada. Toutefois, la CLÉ reste vigilante et prête à défendre la liberté des parents québécois face à un système éducatif qui manque de souplesse et de choix. En outre, les différentes composantes de la Coalition continueront d'agir en fonction des différents enjeux concernant la liberté en éducation au sens large.
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