dimanche 27 juillet 2008

Ici l'intolérance ne sera pas tolérée !

Implantation du cours d'ECR : « Si on veut que ça parte tout croche, on est bien parti pour ça. »

Le Soleil a publié ce samedi deux articles où des partisans du programme d'éthique et de culture religieuse — et uniquement des partisans, mais c'est la presse professionnelle du Québec, hmmm — s'inquiètent des dérapages possibles dans la mise en œuvre du cours d'ECR.

La plus grosse difficulté, comme le soulignaient déjà la CLÉ, des pédagogues et certains universitaires, vient du gouffre béant qui sépare les ambitions et la formation dérisoire reçue par les enseignants commis d'office (ils n'ont plus le droit d'invoquer l'objection de conscience). Des institutrices du primaire vont devoir après deux jours de formation enseigner cette matière qui traitera de plusieurs religions, alors qu'elles ne connaissent souvent plus que superficiellement leur propre tradition religieuse.

Nous présentons quelques extraits de ces articles ci-dessous.

J.-P. Proulx : pratiquement impossible que les enseignants soient prêts
« Si les programmes seront prêts, les enseignantes et enseignants concernés ne le seront pas en septembre 2008. C’est pratiquement impossible. [...] » écrit [Jean-Pierre Proulx] dans l’ouvrage collectif Les défis de la formation à l’éthique et à la culture religieuse, publié récemment aux Presses de l’Université Laval.

[...]

M. Proulx rappelle que le ministère a agi rapidement pour des raisons stratégiques. À partir de 1984, le gouvernement a eu recours à des clauses dérogatoires pour éviter que l’enseignement de la religion catholique et protestante ne soit contesté sur le plan juridique, en vertu du droit à l’égalité et à la liberté de religion conféré par les chartes canadienne et québécoise. Au début des années 2000, le gouvernement s’est retrouvé coincé entre le mouvement laïc, qui s’opposait à la reconduction des clauses dérogatoires, et les groupes catholiques, qui demandaient leur maintien. Québec a fini par couper la poire en deux en reconduisant pour trois ans seulement (plutôt que cinq comme le permet la Charte canadienne des droits et libertés) ces dispositions dérogatoires.
Étrange manière de couper la poire en deux !

D'une part, le besoin d'utiliser les clauses dérogatoires est le fait même du pauvre gouvernement « coincé ». En effet ce besoin n'existait pas avant que Stéphane Dion, à titre de ministre des Affaires intergouvernementales, ne déposât en 1997 à la demande du Québec une résolution permettant d’amender la Constitution de telle façon que la loi provinciale abolissant le système scolaire confessionnel au Québec puisse devenir effective. Rappelons que l'Ontario finance toujours les écoles catholiques publiques sans qu'il n'ait besoin d'invoquer une quelconque clause dérogatoire. Ici, il semble bien que M. Proulx occulte la réalité historique pour faire croire en l'inéluctabilité de ce programme dont il est un des pères reconnus.

D'autre part, attendre trois ans avant de céder aux exigences d'une seule des parties (supprimer les cours de religions dans les écoles publiques) n'est pas un partage équitable ou un compromis, mais simplement être partial et pragmatique. Pragmatique, car il était tout simplement impossible de faire plus vite, puisque comme on le voit aujourd'hui la mise en œuvre du programme semble précipitée.

Deux jours de formation pour six religions...
Sur le terrain, les craintes sont aussi vives. Dominique Chabot, qui a longtemps enseigné les cours de religion et de morale au secondaire, fait partie de l’équipe des 400 formateurs envoyés dans les écoles du Québec pour initier les enseignants au cours d’ECR. La formule varie selon chaque région, mais les professeurs ont reçu en moyenne deux jours de formation, indique le ministère.

[...]

« [...] les enseignants sont formés dans des conditions épouvantables, affirme-t-elle. On a vraiment l’impression que le programme est garroché. Imaginez-vous les aberrations qui peuvent se dire si les profs sont mal formés. »
Demandes par les partisans de mesures tout au long de l'année
« On n’est pas équipé pour mettre en place ce cours et on trouve ça un peu affolant », affirme Claire Mercier, enseignante à l’école des Quatre-Vents à Beauport.

La Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE) est quant à elle davantage préoccupée par le suivi qui sera mis en place cet automne que par les deux jours de formation qui ont été donnés jusqu’à maintenant. « Il faut que des mesures soient mises en place tout au long de l’année pour voir comment on peut améliorer le cours », a indiqué Sylvie Lemieux, porte-parole de la FSE.
Ça promet ! Contrôle permanent, formation continue des enseignants ? Combien coûtera en fin de compte ce programme imposé pour des raisons idéologiques à tous les élèves ?

Inquiétude d'une association partisane du cours
De son côté, la présidente de l’Association québécoise en éthique et culture religieuse (anciennement l’Association des professeurs de morale et de religion) juge que la formation est jusqu’à maintenant trop mince. « On est inquiet, a lancé Lynda Berthiaume. Si on veut que ça parte tout croche, on est bien parti pour ça. »
Informations erronées ou carrément inventées
« On n’est pas des experts en la matière, affirme Isabelle Grimard, enseignante en troisième et quatrième année [d'une école-pilote ayant donné ce cours et où les enseignants ont bénéficié d'une formation cinq fois plus longue qu'ailleurs au Québec, soit dix jours]. Quand on n’a pas la réponse, il faut accepter de dire aux élèves qu’on va s’informer et qu’on va en reparler. Il faut vraiment être prudent, parce qu’on ne connaît pas tout. »

En classe, les élèves peuvent être prompts à rapporter des informations parfois erronées, parfois… carrément inventées ! Lorsque les élèves de Mme Grimard ont présenté leurs travaux de recherche sur les religions à leurs camarades d’une autre classe, certains en ont profité pour inventer des histoires sur la vie du prophète Mahomet ou pour affirmer que Bouddha était... une femme.
Bourde de l'école pilote : apportez des portraits de Mahomet
Pascale Guéricolas a par exemple été bien surprise lorsque sa fille Alice, en sixième année l’an dernier, est revenue à la maison en lui disant qu’elle avait besoin d’images de Mahomet pour une pièce de théâtre. Selon les préceptes de l’islam, le prophète ne peut être représenté. « L’intention de s’ouvrir sur le religieux est bonne, mais on ouvre aussi une boîte de Pandore. Il faut être capable de transmettre les bonnes informations et de les mettre en contexte », affirme Mme Guéricolas. La pièce de théâtre n’a finalement pas eu lieu.

Vision « judéo-chrétienne » dans la correction des copies, la faute comme écart par rapport à la norme orthographique « divine »

Petit rappel estival d'une perle du Monopole de l'Éducation du Québec.

Richard Berger, dans un rapport produit en 2007 pour le Ministère de l'Éducation, qualifiait d'« approche judéo-chrétienne » « punitive » la méthode de correction actuelle, en fonction de laquelle un élève qui commet plus de 30 erreurs échoue automatiquement en français. « On devrait mesurer ce qui est réussi et non ce qui est raté », affirmait-on dans le rapport.

Et c'est à ces gens, eux qui associent punition et christianisme pour les réprouver, qu'il faudrait faire confiance pour enseigner objectivement les religions juive et chrétienne dans le cours d'Éthique et de culture religieuse...

Dans le texte (p. 103) cela donne :
De toute manière, cette norme ne se manifeste jamais également d’une copie à l’autre et rien n’assure qu’une quantité de fautes ou de « non-fautes » témoigne bel et bien d’une maîtrise de la langue écrite131
131 Dire qu’il y a une erreur, c’est aussi dire qu’il y a commission d’un écart par rapport à une norme (« divine ») qu’il faut suivre. Faire le décompte des écarts, c’est aussi dire qu’on les tolère dans une certaine mesure. Or, cette mesure ne saurait être la même d’une personne à l’autre puisque ces écarts ne sont pas les mêmes d’une copie à l’autre. L’approche, judéochrétienne, est punitive, l’idéal à atteindre étant une sorte d’état angélique duquel il faut s’éloigner le moins possible.