Les élèves des écoles libres (hors contrat avec l'État, sans subventions) ne sont pas dispensés des épreuves de terminale, comme c’est le cas pour ceux des lycées sous contrat.
Ces élèves fréquentent quelque 700 structures hors contrat, réparties équitablement en trois grandes catégories : les établissements confessionnels — essentiellement catholiques —, les établissements laïcs et ceux qui proposent des pédagogies dites « alternatives ».
La « guerre scolaire » est-elle déclarée ? Derrière cette expression, le conflit historique entre l’école publique laïque et les écoles privées, reconnues par la loi Debré de 1959, qu’elles soient « sous contrat » (leur programme doit être conforme aux normes de l’Éducation nationale en échange d’une rémunération de leurs enseignants par l’État) ou « hors contrat » (libres du contenu de leurs enseignements). Pour les partisans de l’« école libre », ces dernières seraient clairement dans le collimateur du ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer.
« Nous avons le sentiment d’être traités comme des parias », résume Anne Coffinier, présidente de l’association Créer son école, qui soutient le développement d’écoles hors contrat. En cause, la décision du ministre de maintenir les épreuves terminales de spécialités du bac 2021 pour les élèves du hors contrat, là où ceux des lycées publics et privés sous contrat en sont dispensés. Crise sanitaire oblige, ces derniers seront évalués sur la base des notes obtenues au cours de l’année dans les deux spécialités qu’ils ont choisies. « Lorsque le ministre a annoncé, en janvier, l’annulation des épreuves, il a évoqué la nécessaire “sérénité” des lycéens. Pourquoi nos élèves ne font-ils pas l’objet de la même délicate attention ? Ils devraient donc être les seuls à passer ces épreuves dans de gros centres d’examen ? » interroge Anne Coffinier, qui dénonce « une rupture d’égalité ». « Il y aura donc deux bacs, un privé et un public », poursuit-elle, évoquant d’un côté des épreuves terminales, de l’autre des notes de contrôle continu, qui « seront sans doute remontées, dans les lycées qui notent sec, comme ce fut le cas en 2020 ». Elle prévoit d’ores et déjà de saisir la justice, via un référé suspension, quand la décision ministérielle sera officielle.
Du côté du ministère, on rappelle que dans les écoles hors contrat, les programmes sont « très libres » et que les professeurs ne sont pas inspectés. « Le ministère n’a donc aucun moyen de certifier du niveau effectif des élèves. C’est la raison pour laquelle, il faut une évaluation terminale. »Nous avons le sentiment d’être traités comme des parias
Anne Coffinier, présidente de l’association Créer son école
3000 à 4000 élèves
Qui sont ces élèves ? Ils fréquentent quelque 700 structures hors contrat, réparties équitablement en trois grandes catégories : les établissements confessionnels — essentiellement catholiques —, les établissements laïcs et ceux qui proposent des pédagogies dites « alternatives ». Du lycée Saint Pie X à Saint-Cloud, qui a vu sur ses bancs Marion Maréchal-Le Pen, à l’établissement juif Beth Myriam de Marseille, en passant par les cours Fides, à Paris, où se croisent enfants d’artistes et d’ambassadeurs, la galaxie du hors contrat est un monde disparate. Elle compte aussi des structures qui se sont fait une spécialité de l’accueil des précoces, sportifs de haut niveau et artistes, ces profils qui ne trouvent pas leur place dans l’Éducation nationale… À condition d’y mettre le prix, de 400 à 1 300 euros par mois.
Ces élèves seront 3 000 à 4 000 à passer le bac cette année, sur 550 000 candidats au total. Une goutte d’eau ? Pas certain. Car ces écoles peuvent activer de puissants réseaux. Et, en toile de fond, revient régulièrement l’ombre de la guerre scolaire. « Que ce soit le Covid ou le projet de loi confortant les principes républicains (qui permettra de fermer plus rapidement des structures déviantes, NDLR), tout est bon pour taper sur le hors contrat et faire entrer tout le monde le cadre », estime Anne Coffinier.
« Blanquer m’a clairement dit qu’il ne voulait pas avoir les syndicats sur le dos », raconte Philippe de Villiers, le créateur du Puy du Fou, qui a lancé en 2015 une école privée hors contrat. « Les lycées hors contrat dérangent, d’autant plus qu’ils sont en concurrence directe avec le public pour l’accès aux grandes écoles », ajoute-t-il. Représenté par l’avocat Gilles-William Goldnadel, le Vendéen annonce qu’il va attaquer le gouvernement devant la Cour de justice de la République, pour « mise en danger de la vie d’autrui ».
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