dimanche 19 janvier 2020

Les propos complètement inconscients de la psychanalyste Françoise Dolto

C'ÉTAIT il y a à peine trois semaines, avant l'affaire Matzneff : France 2 diffusait une remarquable émission consacrée à Françoise Dolto, la célèbre pédiatre et psychanalyste. Titré « Au nom de l'enfant », ce documentaire soulignait le rôle qu'avait joué cette disciple de Jacques Lacan dans l'évolution du regard porté par les psychothérapeutes sur l'enfant, son éducation et ses éventuels traumatismes.Mais « Au nom de l'enfant » a ignoré les propos, pour le moins stupéfiants, que la même Françoise Dolto, dans un long entretien et dans un livre, a tenu sur les femmes battues, la pédophilie et l'inceste. En outre, la réalisatrice a oublié d'évoquer la pétition que Dolto avait signée le 23 mai 1977, réclamant, en compagnie de Gabriel Matzneff, Jean-Paul Sartre, Michel Foucault, Main Robbe-Grillet et autres, un assouplissement du Code pénal sur les détournements de mineurs. À l'époque, Françoise Dolto jouait les mamies gâteaux au micro de France Inter ou d'Europe 1...


Lorsque, en 2010, des journaux sont revenus sur cette pétition et sur cette prise de position, la fille de Françoise Dolto, Catherine Dolto, l'a défendue avec cet argument : « Tout cela se passait dans les suites à l'époque du suicide de Gabrielle Russier, professeure qui avait entretenu une relation avec un de ses élèves. » Point final. Quant aux écrits de sa mère, tels qu'ils sont reproduits ci-dessous, Catherine Dolto a affirmé qu'il s'agissait de « citations tirées de leur contexte, dans lesquelles Françoise Dolto parlait] de l'inconscient et non du registre conscient. Cela dénature totalement ses propos, bien évidemment. » A les lire dans « leur contexte », l'inconscient a vraiment bon dos.

LE FLORILÈGE qui suit est extrait d'une interview parue en novembre 1979 dans le numéro 44 du journal féministe de Gisèle Halimi « Choisir la cause des femmes ». Pour une bonne part, les « thèses » développées dans cet entretien ont été reprises dans l'ouvrage « L'Enfant, le Juge et la Psychanalyste », publié chez Gallimard en 1999, accompagnées de cet exergue : « Ce livre est le dialogue intense, exemplaire, d'un juge d'enfants et d'une psychanalyste... »

Les femmes battues

Question : Pour l'enfant et les femmes battues, le problème est le même.
Dolto [En] attendant que les mentalités changent, les maisons pour femmes battues sont utiles. Mais à mon avis, cela ne résout rien. (...) J'ai vu une de ces femmes, absolument perdue, incapable de trouver à s'occuper, même de ses enfants qui sont avec elle, complètement soumise à une assistante sociale du lieu [une maison pour femmes que Françoise Dolto a visitée]. On comprend qu'un homme marié à une telle femme qui attendait d'elle qu'elle fasse ce qu'elle avait à faire en vienne à lui taper dessus, en espérant la faire changer. Or, elle est incapable de changer, c'est une infirme. Et il y en a d'autres dans son cas.

Q.: [Vous] semblez justifier le fait que l'enfant et la femme soient battus par quelqu'un de plus fort.
R. : Je ne justifie rien ! Mais je dis que c'est le mari qui doit être aidé et non la femme battue. Il faut dire au mari « Vous ne pouvez pas vivre avec cette femme. » Elles sont incapables d'entreprendre quoi que ce soit. Elles « poissent » leur mari mais ne font rien pour eux.

Q. : Vous ne pensez pas qu'il y a des enfants battus qui souhaitent ne pas l'être, de même qu'il y a des femmes battues qui aimeraient d'autres relations ?
R. : La preuve que non c'est que lorsque l'on sépare un enfant de ses parents maltraitants, celui-ci se meurt de chagrin. De même, la femme battue, réfugiée dans ces maisons d'accueil, veut revoir son mari. Encore une fois, les coups ne veulent pas dire absence d'amour [...].
 

Q. : Alors concrètement, si un enfant nous dit « je suis battu », que faut-il faire ?
R. : Il faut lui dire : « Ne le cherches-tu pas ? Ne veux-tu pas faire des histoires avec tes parents ? » C'est l'enfant qui trouve la solution [...].

L'inceste, le viol

Dolto : Dans l'inceste père-fille, la fille adore son père et est très contente de pouvoir narguer sa mère !

Q.: Et la responsabilité du père ?
R. : C'est sa fille, elle est à lui. Il ne fait aucune différence entre sa femme et sa fille, ou même entre être l'enfant de sa femme ou bien le père de sa femme. La plupart des hommes sont de petits enfants. Il y a tellement d'hommes qui recherchent dans leur femme une «nounou ». Et des femmes qui les confortent dans cette idée-là ! Alors la responsabilité du père à ce niveau (...) 

Q. Donc, la petite tille est toujours consentante ?
R.: Tout à fait.

Q.: Mais enfin, il y a bien des cas de viol ?
R. n'y a pas de mal du tout. Elles sont consentantes.

Q. : Quand une fille vient vous voir et qu'elle vous raconte que dans son enfance, son père a coïté avec elle, et qu'elle l'a ressenti comme un viol, que lui répondez-vous ?
R.: Elle ne l'a pas ressenti comme un viol. Elle a simplement compris que son père l'aimait et qu'il se consolait avec elle, parce que sa femme ne voulait pas faire l'amour avec lui.

Q. : Comment expliquez-vous alors le traumatisme de la fille si elle est consentante ?
R.: Je vous l'ai dit, ce traumatisme vient du fait que sa sexualité ne peut pas se développer normalement, puisque la sexualité se développe à partir de l'interdit de l'inceste. C'est l'interdit de l'inceste qui valorise la sexualité. Cet interdit intervient quand l'enfant désire l'inceste, c'est-à-dire à partir de 3 ans jusqu'à 13 ans environ. Quand tout se passe bien, la sexualité se déplace et ne se fixe plus sur le père ou sur la mère. Le fait qu'un enfant doit faire plaisir à ses parents est déjà une forme d'inceste. Or, toute notre éducation est basée justement sur cette notion de plaisir. « Fais-moi plaisir, mange ta soupe ». C'est pervers. C'est vicieux ! Bien des filles en arrivent à coucher avec leur père pour faire plaisir à leur mère. « Va dans le lit de ton père, il aime les caresses, et toi aussi, moi j'en ai assez ! » 

Q. : D'après vous, il n'y a pas de père vicieux et pervers ?
R. Il suffit que la fille refuse de coucher avec lui, en disant que cela ne se fait pas, pour qu'il la laisse tranquille. 

Q. : Nous insistons peut-être beaucoup, mais enfin nous savons qu'il y a des petites filles violées par leur père et qui ne sont pas du tout consentantes.
R. : Dans ce cas-là, elles tombent malades. La somatisation dérobe l'enfant au père. C'est une manière inconsciente de se soustraire à l'acte incestueux... 

Ce dialogue est d'autant plus incroyable que, deux ans auparavant, Dolto avait clairement condamné la pédophilie. Ainsi, dans une lettre ouverte, en 1977, elle écrit que » l'initiation sexuelle des adolescents et des enfants par un adulte ( ...), en admettant que ce partenaire ne soit pas incestueux, encore plus si cet adulte est confirmé en âge ou en prestance, est toujours un traumatisme psychologique profond ». C'est sûrement à cette « autre Dolto » que pensaient tant de maires et d'élus locaux qui ont donné son nom à des rues ou à plus de 150 établissements scolaires...

Enfants battus

DANS son interview à « Choisir », Françoise Dolto applique aux enfants la célèbre théorie infligée par certains aux femmes abusées : « Elles l'ont bien cherché... »
« Il conviendrait d'expliquer à l'enfant que, très souvent, e est lui qui s'arrange pour être battu. C'est sa manière de capter l'attention parentale. II faudrait donc lui apprendre à ne pas se laisser battre, mais aussi à ne pas se laisser tripoter par sa mère. Certaines sont écœurantes, dégoûtantes avec leurs enfants. Leur soi-disant amour est de l'inceste. Il y a des mères qui laissent leur enfant suçoter leurs nichons toute la journée ! Des enfants de vingt-deux mois ! »

Source : Le Canard enchaîné, janvier 2020

Aucun commentaire: