lundi 25 octobre 2010

Grosses difficultés en orthographe, la faute aux méthodes de lecture ?

« Nous avons lancé la ba­taille de l’orthographe ». Dans la bouche du ministre française de l’En­seignement supérieur, Valérie Pécres­se, les mots sont forts et le constat inquiétant : « Les niveaux d’orthographe et d’expression écrite ont singulièrement baissé depuis une dizaine d’années. » La situation est telle que « plusieurs universités [19 sur 84, NDLR] ont décidé de proposer des cours de remise à niveau et de maîtrise de la langue française ». Certaines, comme l’université de Bretagne Sud, font passer à leurs étudiants « une petite dictée de dix minutes », d’autres se fondent sur les résultats du baccalauréat pour proposer aux plus faibles des ateliers d’expression écrite et orale. « Si encore ce n’était qu’un problème d’orthographe ! Mais cela va bien au-delà : les mots sont employés de travers et les phrases construites sans queue ni tête ! », précisait récemment, dans le Parisien, Patrick Porcheron, vice-pré­sident de l’université Pierre-et-Marie-Curie.

Pourquoi ces faiblesses ? C’est évidemment en amont qu’il faut en chercher les raisons. Dans un rapport remis le 1er oc­tobre au président de la Ré­publique, le Haut Conseil de l’édu­cation écrit que « le collège est au­jour­d’hui en panne » et que « les per­formances [des élèves] sont médiocres et en baisse ». Ce qui appelle une réforme non seulement du collège mais aussi de l’école primaire.

Car que disait, en 2007, ce même Haut Conseil dans son rapport sur l’école  ? « Chaque année, quatre écoliers sur dix, soit environ 300 000 élèves, sortent du CM2 [5e année du primaire] avec de graves lacunes  : près de 200 000 d’entre eux ont des acquis fragiles et insuffisants en lecture, écriture et calcul ; plus de 100 000 n’ont pas la maîtrise des compétences de base dans ces domaines. » Xavier Darcos, quand il était ministre de l’Éducation nationale, avait recentré les programmes sur l’apprentissage du français. Sans doute faudra-t-il, à l’heure du bilan, mettre sa réforme au rang des plus impor­tantes de ce quinquennat. Il reste que beaucoup d’instituteurs, souvent sous la pression des inspecteurs de l’Éducation nationale, continuent d’employer des méthodes d’apprentissage de la lecture inspirées de la désastreuse méthode globale, comme le montre le reportage de Valeurs actuelles. Et si l’on devait suggérer à Luc Chatel une audacieuse ré­forme, ce n’est pas de mettre en place un “accompagnement personnalisé” des collégiens en difficulté, mais de prescrire la méthode syllabique à tous les enfants apprenant à lire.

Témoignages

Amaury vient d’avoir 22 ans. Di­plômé d’une école d’ingénieurs parisienne, il débute sa vie active dans une entreprise de télécommunications. Un parcours a priori sans embûches et pourtant ! Chaque fois qu’il doit répondre à un mail d’un supérieur, l’inquiétude le ronge : « J’ai beaucoup de difficultés avec l’orthographe. C’est comme si, à chaque son, corres­pondait une seule écriture. » Parmi les fautes les plus fréquentes, la confusion entre le participe passé et l’infinitif ou l’orthographe du son “e” quand le pluriel (“s” ou “ent”) ne se prononce pas. Exemples : “je viens te cherché” ou “ils chante bien”. Les plus élémentaires règles d’orthographe ne sont pas acquises.

Comme beaucoup d’enfants de sa génération, Amaury a appris à lire avec un manuel édité par Hatier, Ratus et Ses amis. Une méthode “mixte”, comme Gafi le fantôme, Abracadalire, Voca­ligram et d’autres, qui se veut à la fois globale et syllabique. Mais, sur le ter­rain, les professeurs des écoles en font ce qu’ils veulent : « Sur dix instituteurs qui utilisent un même manuel, vous n’en trouverez pas deux qui fassent la même chose, dit Pascale Buchon, adjointe de direction à l’Institut supérieur de for­mation de l’enseignement catholique (Isfec) Emmanuel-Mounier, à Paris. Certains insistent beaucoup sur le syllabique, d’autres au contraire sur l’aspect global. » Selon leur pratique, les résultats peuvent s’avérer désastreux.

Près de vingt ans plus tard, les élèves témoignent. Charlotte, 24 ans, se sou­vient encore de son année de cours préparatoire [1re année du primaire] : « J’ai appris à lire avec une méthode mixte, Vocaligram, je crois, mais mon institutrice était très “global”. Je ne comprenais rien, j’ai fait un blocage. La maîtresse m’a alors prescrit vingt séances d’orthophoniste. Cette gentille dame m’a simplement expliqué que B+A faisait BA et que P+A faisait PA. Au bout de la troisième séance, j’avais compris, mais j’ai quand même dû continuer l’orthophoniste… » Pour Guillemette, les choses ont été simples : « Maman avait acheté la méthode Bos­cher (syllabique) et me l’apprenait le soir après l’école. »

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