mercredi 25 août 2010

La contagion de la facilité

Joseph Facal s'inquiète d'une contagion possible, d'une mécanique implacable de la facilité qui mènera à rabaisser les exigences au niveau du cégep afin de « mieux accueillir » les enfants de la réforme pédagogique commencée sous l'égide du PQ et poursuivie sous la houlette du PLQ.

Dans le domaine de l’éducation, on vit très longtemps avec les conséquences de nos décisions.

La réforme pédagogique commença à être implantée en l’an 2000. Vous en connaissez évidemment les grandes lignes : priorité aux compétences transversales, moins d’emphase sur les connaissances, travaux de recherche en équipe, bulletins sans chiffres, etc.

L’idée de départ n’était pas celle-là : il s’agissait de se concentrer davantage sur les matières de base et de hausser les exigences. Il n’était pas question de chambarder les méthodes d’apprentissage, qui devraient être laissées à la discrétion de l’enseignant.

Je l’ai écrit mille fois : j’étais et je demeure contre ce détournement des intentions originales, tout en reconnaissant que tout n’est pas totalement mauvais là-dedans et que cette réforme ne fut pas appliquée partout de la même manière.

Les enfants de cette réforme entrent au cégep cette semaine. Ils ne sont ni plus ni moins doués que leurs prédécesseurs, mais ils auront reçu une formation différente. Le hic est que les cours de cégep sont basés sur les acquis que les étudiants du secondaire d’AVANT la réforme étaient supposés avoir.

Sans sauter trop tôt aux conclusions, le milieu est inquiet. « Le choc de la réalité s’en vient », prévient le plus important représentant syndical des enseignants. Il dit qu’il aimerait être optimiste. C’est donc qu’il ne l’est pas.

Le représentant des étudiants collégiaux dit que ces jeunes seront plus autonomes [Note du carnet : un rapport précédent concluait « Les enfants de la réforme pédagogique : peu autonomes, médiocres en français, dissipés, mais ciyoyens du monde ! »] que ceux d’avant, mais admet qu’ils auront des lacunes dans les connaissances de base. Les connaissances de base à cet âge, c’est par exemple de savoir additionner deux fractions et accorder un participe passé. Il demande des ajustements aux cours de cégep pour en tenir compte.

Interviewée par le journal La Presse, une jeune fille de 17 ans confiait n’avoir JAMAIS eu un cours magistral. En langage clair, elle n’a jamais passé une heure à écouter le professeur et à prendre des notes, ce qui exige une capacité à fixer son attention. Au cégep et encore plus à l’université, le cours magistral reste pourtant, moins qu’avant mais tout de même encore, la forme d’enseignement dominante.

Mettez-vous maintenant à la place du prof de cégep qui reçoit ces jeunes. Supposons qu’il réalise que 20 % du groupe devrait normalement échouer. Il fait quoi ? Le système d’éducation fonctionne un peu comme une chaîne de production. Ça entre par un bout et il faut que ça sorte à l’autre bout avec le moins de complications possibles.

Trop d’échecs indisposeront tout le monde : ses propres collègues, les étudiants et leurs parents qui chialeront, les directions d’établissement qui n’aiment pas les imprévus et lui feront les gros yeux, le ministère qui est obsédé par les taux de réussite, et le cabinet de la ministre qui devra réagir à des articles de journaux et aux attaques de l’opposition.

Devinez ce que fera le pauvre prof : la tentation sera immense de donner des passe-droits. Vous feriez quoi vous ? Après deux ans de ce régime, le jeune arrivera à l’université où le même manège recommencera : on constatera qu’il ne sait pas ce qu’on a pris pour acquis qu’il saurait. Et on fera quoi ? Appelons cela un effet de cascade.




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2 commentaires:

Perpétue a dit…

Je constate qu'il y a dans les programmes du cegep de mon patelin des cours qui récapitulent les maths ou les sciences de secondaire 4 ou 5.

Je me pose la question: à qui sont destinés ces cours? À des élèves qui n'ont pas bien réussi ces matières au secondaire? Mais alors, cela veut-il dire que l'on admet au cegep des élèves qui n'ont pas obtenu leur diplôme de secondaire 5? Si c'est le cas, comment obtiendront-ils leur diplôme de cegep puisque le diplôme de secondaire 5 est un prérequis?

Mehdi a dit…

Je connais mal le système, mais ne serait-il pas possible que ce soit des cours de rattrapage pour les élèves qui auraient pris une spécialisation "sciences humaines" ?