dimanche 25 février 2018

France — La Fondation pour l'école salue certains amendements sénatoriaux de la Loi sur les écoles hors contrat

Communiqué du 23 février 2018 sur la proposition de loi Gatel sur l'encadrement des écoles privées sans contrat adoptée au sénat

Ce mercredi 21 février 2018, la proposition de loi Gatel, numéro 589, qui vise à « encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat » a été adoptée au Sénat par 240 voix pour et 94 voix contre.

Suite aux différentes consultations, la Sénatrice Gatel a proposé elle-même des amendements à sa propre proposition de loi, qui ont été adoptés en séance publique. Ainsi amendée, cette proposition de loi est plus respectueuse de la liberté d'enseignement. Telle qu'adoptée au Sénat, la proposition de loi Gatel présente un équilibre assez acceptable, si l'objectif est bien de clarifier et simplifier le cadre juridique relatif à ce type d'école [et non de lutter contre des pédagogies non musulmanes que certains législateurs n'aiment pas, voir l'article de Causeur et l'affirmation confondante du sénateur socialiste David Assouline qui visait les écoles catholiques ou l'orientation idéologique (féministe laïcarde) de l'intervenante qui a déclaré au ministre Blanquer qu'ouvrir une école hors contrat était aussi facile que d'ouvrir un kébab, lequel Ministre approuva cette description caricaturale.]


1- Un régime qui serait plutôt clarifié, si la loi est adoptée dans les mêmes termes par l'Assemblée [ce qui reste encore à faire après son adoption par le Sénat], avec :

— la création d’un « guichet unique » au niveau du Rectorat, qui centraliserait la déclaration et la transmettrait « au maire de la commune dans laquelle l’établissement est situé, au représentant de l’État dans le département et au procureur de la République ». Cela limiterait à un seul interlocuteur l’ensemble des démarches.
— La limitation des pièces du dossier à fournir, lesquelles seraient inscrites dans la loi et non plus déterminées par décret, comme cela était prévu dans la première mouture du texte.
—  La clarification des délais d’opposition, certes allongés à trois mois, mais dont le déclenchement est clarifié.
—  La réaffirmation de la liberté pédagogique, alors que le projet initial comportait de forts risques d'entraves administratives dans ce domaine qui est au cœur de la capacité d'innovation des classes privées sans contrat.

2- Ce texte comporte néanmoins des dispositions au sens peu défini, source d'insécurité juridique, et dont le juge donnera l'interprétation. Ainsi, l'administration doit vérifier si une école est bien "un établissement scolaire", sans que la définition en soit donnée. Il y a là une source d'arbitraire.

3- La proposition de loi adoptée le 22 février comporte aussi des archaïsmes regrettables dans le régime d’ouverture et de contrôle prévu par la proposition de loi.

Ainsi, un Américain ou demain un Britannique, par exemple, ne pourraient toujours pas enseigner ou diriger un établissement sans contrat en France (sauf à obtenir une dérogation administrative, qui est loin d'être accordée automatiquement) : en effet, seuls les ressortissants d’un pays de l’Union européenne ou de l'AELE le pourraient. À l'heure où les écoles internationales se multiplient et où l'on recrute les talents au niveau mondial, cette restriction ne peut que laisser perplexe.

De plus, la proposition de loi impose aux écoles sans contrat un recrutement endogène puisque seule une personne issue du monde de l'enseignement a le droit de créer un établissement scolaire. En effet, la loi exige 5 ans comme enseignant ou surveillant dans un établissement d'enseignement pour pouvoir fonder une école.

C'est condamner des profils issus de la société civile. Un Xavier Niel [richissime entrepreneur français dans le monde de l'Internet], créateur d'école 42 dans le supérieur, n'aurait donc pas le droit d'ouvrir un lycée ! Ces dispositions sont en décalage avec les besoins de l'innovation.

De même, la proposition de loi exige des enseignants, même en primaire, une licence. C'est sans doute une manière de reconnaître que la licence aujourd'hui équivaut à peine au baccalauréat d'antan, mais c'est là encore une rigidité sans utilité : ce n'est pas parce qu'un enseignant est titulaire d'une licence qu'il saura bien apprendre à lire, écrire et compter à des enfants de CP.  

[Cette exigence existe aussi au Québec, le Québec est encore plus restrictif : les enseignants doivent normalement avoir des diplômes en enseignement (ceux dont les candidats réussissent si bien en français...)]

Les amendements adoptés sont consultables sur le site du Sénat : http://www.senat.fr/enseance/2016-2017/589/liste_discussion.html
Le texte définitif du Sénat est consultable sur le site du Sénat : http://www.senat.fr/leg/tas17-068.html

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