lundi 29 décembre 2008

Parents brésiliens éducateurs à la maison condamnés en justice

Savez-vous ce que Léonard de Vinci, Albert Einstein, George Washington, C.S. Lewis, Graham Bell, Jonathan Edwards et Thomas Edison, entre autres, ont en commun ? Aucun d’entre eux n’a fréquenté une école traditionnelle. Tous ont été instruits à la maison. Et pourtant, tous sont de grandes figures historiques.

Il est vrai que les temps ont changé. L'enseignement est passé par différentes évolutions. Mais l’enseignement à la maison est-il vraiment une chose du passé ? Plusieurs études démontrent que le nombre d’enfants éduqués à la maison tend à augmenter dans les pays industrialisés comme le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Royaume. Aux États-Unis, par exemple, il y avait en 1999 approximativement 850 000 enfants éduqués à domicile. Moins de 10 ans plus tard, en 2007, ce nombre avait doublé. Aujourd’hui, on estime qu’environ 2 millions d’enfants et d’adolescents sont instruits à la maison aux États-Unis. Une population scolaire composée par près de 75 % de familles chrétiennes.

Pour quelles raisons cette méthode d’enseignement gagne-t-elle de plus en plus en popularité parmi les familles américaines ? Selon le NHES, un programme national de recherche sur l’éducation des États-Unis, 31 % des parents se disent mécontents de l'environnement offert par l'école de leurs enfants ; 30 % répondirent qu’ils aimeraient donner une éducation morale et religieuse plus exigeante, pour 16 % l'enseignement scolaire ne correspondait pas à leurs valeurs.

Au Brésil, un couple membre de l'Assemblée des Saints, de la paisible ville de Timóteo au Minas Gerais, déçu de l'éducation que ses fils Davi et Jônatas – respectivement 13 et 14 ans – avaient reçue dans une école publique pendant près de 6 ans, a décidé de renoncer à la plus grande partie des activités professionnelles qu’ils exerçaient pour se consacrer intégralement à leur rôle d'éducateurs. Ces parents ont retiré leurs fils de l'école et ont commencé à les instruire à la maison.

Condamnation en première instance

Toutefois, comme au Brésil l'éducation à la maison n'est pas légale et que l'abandon scolaire est considéré comme un délit, le service de protection de la jeunesse a rapidement signalé ce cas au ministère public (au procureur de la Couronne).

Cleber Nunes, 44 ans, et Bernadeth Nunes, 40 ans, parents des deux garçons mentionnés ci-dessus– ont déjà été poursuivis par à trois reprises, deux fois au niveau civil et l’autre au niveau pénal pour « abandon intellectuel ». La justice brésilienne les a déjà condamnés en première instance à payer 12 salaires minimums et à inscrire immédiatement Davi et Jônatas à l’école sous peine de perdre la garde de leurs deux fils avec, à la clé, une menace d’emprisonnement.

Après cette première condamnation, le couple a fait appel. Pour prouver qu'il n'y avait pas abandon intellectuel, les parents ont inscrit leurs deux fils à l’examen d’entrée de la Faculté de droit d'Ipatinga dans le Minas Gerais. Les deux enfants ont été reçus et classés à une excellente position : Davi a été classé 7e et Jônatas à la 13e place. Comme ils n’avaient pas 18 ans, ils n’ont pu s’inscrire en faculté. Malgré ces résultats, le juge du District de Timóteo (Minas Gerais), Ronaldo Baptista d'Almeida a décidé de ne pas tenir compte de cet argument.



Reportage brésilien (en portugais non sous-titré) sur la famille Nunes


Deuxième condamnation

Le jeudi 4 décembre 2008, Cleber et Bernadeth Nunes ont été condamnés par un deuxième tribunal civil au Brésil (la 4e chambre civile du tribunal de justice du Minas Gerais) parce qu’ils éduquent leurs enfants à la maison, même s’ils ont réussi des examens imposés par l’État que des professeurs disaient ne pas pouvoir passer eux-mêmes.

Les trois juges du tribunal de seconde instance ont refusé de prendre en compte les bons résultats des deux garçons à une série d’épreuves rigoureuses dans une série de sujets parmi lesquels les mathématiques, la géographie, la science, l'histoire, le portugais, l'anglais, l’art et l'éducation physique.



Deuxième reportage brésilien (en portugais non sous-titré) sur la famille Nunes


« Nous ne pouvons considérer ici la qualité de l’éducation fournie à domicile, car la scolarisation en établissement ne peut jamais être remplacée par l’instruction à la maison » a déclaré Moreira Diniz, un des trois juges. Ces examens avaient été prescrits par un juge au criminel dont le tribunal poursuit également la famille Nunes.

Le tribunal civil a également refusé de verser au dossier les évaluations effectuées par des psychologues qui démontrent la bonne santé psychologique des deux adolescents, qu’ils ont un bon rapport avec leurs parents et ont des amis en dehors de leur foyer. Évaluations également ordonnées par le tribunal pénal qui continue de poursuivre les Nunes.

Malgré des études qui révèlent les résultats catastrophiques du réseau d’éducation public brésilien, un des trois juges n’a pas hésité à affirmer dans son jugement écrit que « la qualité de notre système d’enseignement public est indéniable. Si nous comparons, par exemple, le Brésilien moyen à un Américain moyen, la conclusion est implacable. Les États-Uniens ne connaissent pas grand-chose… comparés aux Brésiliens. Notre système d’éducation est, au contraire, très bon quand on la compare à celui d’autres pays. »

João Senna dos Reis, chroniqueur auprès du journal Diário do Aço a raillé cette déclaration en faisant remarquer qu’« une simple vérification des chiffres officiels fait ressortir que près de 70 % des Brésiliens ne savent pas lire et interpréter cinq lignes d’un texte banal, il s’agit là de l’aveu cinglant de l’état réel de notre système éducatif. »


Troisième reportage brésilien (en portugais non sous-titré) sur la famille Nunes


« À un moment donné, les magistrats ont dû agir de mauvaise foi en invoquant des absurdités qui consistent faire passer notre système éducatif comme celui d’un pays du monde développé » a-t-il ajouté. Puisque nous sommes en décembre, mois des rétrospectives et des palmarès, je ne serais pas surpris si ce tribunal était un des lauréats dans la catégorie de la meilleure blague de l’année.

Rappelons que le Brésil était arrivé en 52e place dans les tests PISA de 2006 sur les connaissances des jeunes de 15 ans en sciences naturelles.

Les parents Nunes feront appel

Cleber Nunes a indiqué qu’il comptait faire appel devant le Tribunal supérieur de Justice, une cour d’appel fédérale et que, au besoin, il porterait l’affaire jusqu’au Tribunal fédéral suprême, la plus haute cour du pays.






Plus de détails en portugais :

Article du Díario do Aço
Carnet sur l'école à la maison

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