jeudi 14 mai 2015

Suède : des résultats scolaires en baisse depuis dix ans

Il ressort d’un nouveau rapport de l’OCDE que la Suède ne parvient pas à améliorer son système scolaire malgré plusieurs réformes récentes.

Le rapport Améliorer les écoles en Suède indique que les résultats de la Suède à l’enquête PISA de l’OCDE, qui étaient dans la moyenne il y a dix ans, se situent désormais nettement en dessous. Aucun autre pays participant à l’enquête PISA n’enregistre un tel recul. Dans l’enquête la plus récente (2012), la Suède se classe 28e en mathématiques parmi les 34 pays membres de l’OCDE, 27e en compréhension de l’écrit et 27e en sciences.


La discipline à l’école s’est dégradée : les élèves suédois sont plus susceptibles d’arriver en retard en classe que dans n’importe quel autre pays membre, d’après le rapport. Et malgré un niveau de satisfaction professionnelle élevé, seuls 5 % des enseignants du premier cycle du secondaire estiment que le professorat jouit d’une bonne image auprès de la population, soit l’un des pourcentages les plus faibles de l’ensemble des pays ayant participé à l’enquête 2013 de l’OCDE sur l’enseignement et l’apprentissage (TALIS).

L’OCDE estime que la hausse de l’immigration n’a qu’une incidence limitée sur la baisse des résultats d’ensemble, mais l’écart entre les élèves issus de l’immigration et les autochtones reste problématique : près d’un élève issu de l’immigration sur deux (48 %) obtient des résultats inférieurs au niveau de référence en mathématiques, contre 22 % des élèves suédois de souche.

La Suède a augmenté de façon importante les dépenses en matière d'éducation au cours des dernières décennies, mais l'argent seul ne peut augmenter les résultats scolaires que jusqu'à un certain point. Parmi les pays de l'OCDE, il n'y a plus de relation entre les dépenses par étudiant et la qualité des résultats d'apprentissage. En d'autres termes, deux pays ayant des niveaux de dépenses égaux peuvent obtenir des résultats très différents. Pour la Suède, il ne s'agit donc plus de savoir combien il faut dépenser dans l'instruction de ses jeunes citoyens, mais comment dépenser cet argent.

Selon une étude de deux économistes suédois Anders Böhlmark et Mikael Lindahl à paraître dans la revue érudite Economica de la London School of Economics : « l'augmentation de la part des élèves issus des écoles indépendantes améliore les performances moyennes de scolarité à la fois à la fin de l'école obligatoire et, dans le long terme, en termes de notes au secondaire, de fréquentation universitaire et du nombre d'années de scolarité. Nous montrons, en outre, que ces effets sont très robustes par rapport à un certain nombre de problèmes potentiels, tels que l'inflation des notes et des tendances observées avant la réforme. Selon nos constatations, nos résultats ne sont pas dus aux effets d'autres réformes telles que l'introduction du choix parmi les écoles publiques ou la décentralisation de l'administration de l'école pour passer de l'État aux collectivités locales. Fait intéressant, il semble que ces effets positifs sont principalement dus aux retombées ou aux effets liés à la concurrence et non pas parce que les étudiants des écoles indépendantes s'améliorent [“gain”] nettement plus que les élèves des écoles publiques. [...] Nos résultats positifs peuvent apparaître surprenants, étant donné le déclin relatif de la Suède dans les classements internationaux tels que PISA et TIMSS depuis le milieu des années 1990. Toutefois, en effectuant une analyse séparée en utilisant des données centrées sur les élèves dans les tests TIMSS pour 1995, 2003 et 2007 ventilées au niveau des municipalités, nous pouvons concilier ces conclusions. Nous constatons que les résultats moyens aux tests se sont en effet détériorés entre 1995 et 2007 pour les étudiants suédois, mais qu'ils l'ont fait dans une moindre mesure dans les municipalités avec une part plus élevée d'élèves dans des écoles indépendantes. Par conséquent, nous ne trouvons aucun indice étayant l'idée selon laquelle l'augmentation du nombre d'élèves dans les écoles indépendantes explique le déclin relatif de la Suède. »

En 2014, les autorités suédoises ont demandé à l’OCDE d’examiner le système scolaire national. Pour préparer ce rapport, l’équipe d’examinateurs a eu des réunions et des échanges avec de multiples parties prenantes (responsables de l’action publique, communes, établissements scolaires, parents, élèves, enseignants, syndicats, organisations patronales et acteurs institutionnels clés du secteur éducatif).

Des enfants rois ?

Alors que le pays était considéré comme étant l’un des meilleurs modèles d’éducation au monde, il a toujours misé sur les enfants en politique. Déjà en 1974, le pays était le premier à instaurer un congé parental. Il est d’ailleurs aujourd’hui l’un des plus avantageux tant en ce qui concerne le temps accordé que la rémunération.

Pourtant, cette politique centrée sur les bambins et le manque de sévérité des parents a, selon le psychiatre David Eberhard, fait d’eux des enfants-rois instables, prétentieux, aux tendances dépressives. Dans son essai « Comment les enfants ont pris le pouvoir » publié en 2012, il explique comment les enfants suédois ont pris le contrôle sur la vie de leur famille : heure du coucher, menu des repas, lieu de vacances... C’est également le point de vue de Judith Woods, journaliste au Telegraph, qui pense que la Suède est en train de former « une génération de petits cons ».

Les louanges accordées au système éducatif suédois n’ont rien arrangé, selon l’hebdomadaire belge Le Vif. Les écoles du pays ont commencé à entrer en compétition entre elles. Il ne s’agit pas d’une concurrence au bénéfice de l’éducation, mais plutôt une bataille livrée entre institutions afin de déterminer laquelle fournira les bâtiments les plus clinquants, munis de la technologie la plus développée.


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