jeudi 15 février 2024

Les écoles doivent privilégier le papier et le crayon


La lecture à l’écran est nuisible alors que la prise de notes au clavier n’apporte aucun avantage, selon un rapport de l’INSPQ.

Les écoles doivent mettre la pédale douce sur l’utilisation du numérique en classe : la lecture à l’écran est nuisible alors que la prise de notes au clavier n’apporte aucun avantage, conclut un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) dévoilé jeudi.

« C’est clair qu’il faut favoriser et encourager la lecture papier et la prise de notes manuscrites » à l’école, affirme Tania Tremblay, conseillère scientifique à l’INSPQ.

Elle est l’auteure de la toute première synthèse québécoise qui permet de documenter les effets des écrans sur l’apprentissage des jeunes à l’école, réalisée à partir d’une vaste revue de littérature qui tient compte des résultats de plus de 170 recherches publiées entre 2017 et 2022.

Il s’agit d’enjeux abordés dans une perspective de santé publique puisque la réussite scolaire est associée à la santé et au bien-être à l’âge adulte, explique Mme Tremblay.

Lecture : le papier loin devant l’écran

Les constats relatifs à la lecture à l’écran sont sans appel : la majorité des études révèlent que « la lecture numérique entraîne une diminution de la compréhension de texte par rapport à la lecture papier », peut-on lire.

Plusieurs raisons peuvent expliquer ce phénomène, selon Mme Tremblay. À l’écran, les lecteurs ont souvent tendance à lire « en diagonale », c’est-à-dire de façon plus superficielle.

La lecture virtuelle exige « beaucoup plus d’efforts cognitifs » pour se repérer dans un texte comparativement au papier, où les pages servent de repères visuels fixes.

Finalement, toucher les pages du bout des doigts aide aussi à l’apprentissage. « Le fait de tourner les pages, d’avoir des sensations tactiles aide à la mémorisation et à l’encodage de l’information », explique la conseillère scientifique.

Aucun avantage à la prise de note au clavier

Les données scientifiques indiquent par ailleurs que « la prise de notes numériques n’apporte pas de valeur ajoutée à l’apprentissage ».

Au contraire, la rédaction de notes à la main permettrait de mieux retenir l’information grâce aux mouvements de la main effectués pour former les lettres.

Les élèves qui prennent des notes à la main ont plus tendance à faire une synthèse du contenu, plutôt qu’un verbatim, ce qui aide à l’apprentissage.

À la lumière de ces deux constats, le milieu scolaire est invité à « reconsidérer l’usage d’appareils numériques pour lire et prendre des notes », afin d’améliorer les compétences des élèves en littératie, qui sont à la base de la réussite scolaire, peut-on lire.

Ce constat ne concerne toutefois pas les élèves qui ont recours à des logiciels d’aide à la lecture et à l’écriture en raison de troubles d’apprentissage, tient à préciser Mme Tremblay.

Multitâche : attention, danger !


Cette revue de littérature permet aussi de s’attaquer à une vision « très véhiculée » dans le milieu de l’éducation, qui porte à croire que plus les jeunes sont habitués à travailler avec des appareils numériques, plus ils développent leurs habiletés à travailler en mode multitâche, ajoute Mme Tremblay.

Or sa recension démontre plutôt que le mode multitâche en classe « nuit à l’apprentissage », puisqu’il affecte la mémorisation et la compréhension. D’autres études ont aussi montré que plus le mode multitâche est présent en classe, moins les résultats scolaires sont élevés.

Cette synthèse permet aussi de conclure, sans surprise, que les cellulaires sont une réelle source de distraction en classe, même lorsque l’appareil est posé à l’envers sur le bureau. Sa simple présence perturbe le cerveau des élèves.

Le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, a d’ailleurs banni officiellement les cellulaires en classe depuis le 1er janvier.

Les signaux d’avertissements concernant l’utilisation des écrans en classe se multiplient depuis quelques mois.

Dans un rapport publié cet été, l’UNESCO a affirmé qu’il y a « peu de données solides sur la valeur ajoutée que les technologies numériques apportent à l’éducation », tout en mettant en garde contre les « effets néfastes » des écrans en classe, comme les problèmes de concentration et les sources de distraction.