jeudi 8 décembre 2022

Les performances en orthographe des élèves de CM2 (10/11 ans) continuent à baisser

Selon une enquête du ministère de l’Éducation nationale, le nombre moyen d’erreurs sur une même dictée a presque doublé en 34 ans.

Les performances en orthographe des élèves de fin d’école élémentaire sont toujours en baisse en 2021, mais de façon moins marquée qu’en 2015, selon une étude publiée mardi par le ministère de l’Éducation.

Selon cette enquête sur l’orthographe, menée à quatre reprises depuis 1987 avec la même dictée pour des élèves de CM2 (élèves de 10 ou 11 ans en moyenne), le nombre moyen d’erreurs a augmenté régulièrement, passant en 34 ans de 10,7 erreurs à 19,4, indique l’agence des statistiques du ministère de l’Éducation (Depp).

Le soir tombait. Papa et maman, inquiets, se demandaient pourquoi leurs quatre garçons n’étaient pas rentrés. — Les gamins se sont certainement perdus, dit maman. S’ils n’ont pas encore retrouvé leur chemin, nous les verrons arriver très fatigués à la maison. — Pourquoi ne pas téléphoner à Martine ? Elle les a peut-être vus ! Aussitôt dit, aussitôt fait ! À ce moment, le chien se mit à aboyer.

(dictée utilisée lors de cette étude)

Entre 1987 et 2007, le nombre de fautes était passé de 10,7 à 14,7 (+4). Puis il s’est établi à 18 en 2015 (+3,3). La baisse constatée des résultats pour chaque période se poursuit donc en 2021, mais de façon moins marquée que sur la période précédente (+1,4).


Baisse pour l’ensemble des élèves, quels que soient le sexe et l’âge

C’est l’orthographe grammaticale (règles d’accord entre le sujet et le verbe, accords dans le groupe nominal, accords du participe passé) qui concentre l’essentiel des difficultés. Sur ce point cependant, la baisse observée entre 1987 et 2015 ne se poursuit pas en 2021.

Par exemple, l’accord de l’adjectif « inquiets » de la dictée passe de 46,2 % de réussite en 1987 à 25,3 % en 2021. Mais après une forte baisse jusqu’en 2015, une stabilité est observée en 2021. Les erreurs lexicales, elles, restent les moins fréquentes. Cette baisse des résultats continue par ailleurs de concerner l’ensemble des élèves, quels que soient leur sexe et leur âge. [Quid des enfants de la campagne, des écoles privées, etc. ?]

Les filles sont cependant plus performantes que les garçons : elles font en moyenne 17,7 erreurs contre 21,1 pour les garçons. Mais la différence du nombre d’erreurs entre filles et garçons, qui avait été stable entre 1987 et 2007, puis en hausse entre 2007 et 2015, tend à nouveau à se stabiliser en 2021.

Environnement « social »

Les différences de performances à la dictée continuent en outre d’être liées à l’environnement « social » des élèves selon l’AFP. [On ne sait pas trop ce que « social » recouvre ici, issus de l’immigration, et de laquelle (asiatique, nord-africaine, européenne) si c’est le cas ?] Ainsi le groupe composé des élèves d’écoles les moins favorisées fait en moyenne 21,9 erreurs, contre 15,5 dans le quart composé des écoles accueillant les élèves les plus favorisés.

Les deux groupes médians ont, eux, des performances assez proches (environ 19 erreurs), montrant que c’est dans les écoles les plus favorisées et les moins favorisées que le poids de l’origine sociale des élèves est le plus important. 

Raisons de cette chute

Françoise Picot, ancienne institutrice et inspectrice honoraire de l’Éducation nationale, explique au Figaro les raisons de cette baisse.

Mme Picot pense qu’il y a trois raisons principales qui permettent d’expliquer ce résultat. Elles sont intimement liées au comportement des élèves et à l’enseignement de l’orthographe.

  1. Premièrement, il y a un vrai défaut d’attention : les élèves sont beaucoup moins concentrés qu’avant. Tous les enseignants le remarquent et le disent. Cela est sans doute dû à la vie actuelle qu’on mène où tout se fait dans l’urgence ainsi qu’au temps passé sur les écrans. Les spécialistes des neurosciences l’analysent mieux que moi. 
  2. Ensuite, il y a la réduction du temps scolaire. Autrefois, à l’époque où les élèves connaissaient mieux l’orthographe, ils allaient à l’école 30 heures par semaine. On est passé à 26 heures, puis 24 heures. Sur ces 24 heures passées à l’école, ils ont beaucoup plus de matières qu’avant : histoire de l’art, informatique, apprentissage des langues étrangères [mot code pour dire l’anglais], etc. [Au Québec, ajoutons le cours d’endoctrinement multiculturaliste comme ECR dès la première année du primaire.] Par conséquent, on consacre beaucoup moins de temps [au français et] à l’orthographe. Des collègues me disent qu’ils courent désormais après le temps, il y a un vrai déficit du temps scolaire. 
  3. Dernier point, il n’existe pas vraiment de réflexion sur l’enseignement de l’orthographe au niveau de l’Éducation nationale. Des linguistes comme Danièle Cogis ou Jean-Pierre Jaffré ont réfléchi sur ce sujet. Mais cela ne passe pas au niveau de l’enseignement, ni dans les programmes ni auprès des enseignants qui d’ailleurs n’ont plus vraiment de formation.

 Ajoutons à cela la chute dans les habitudes de lecture (les jeunes lisent nettement moins qu'avant) et la moindre importance accordée dans la société française en mutation au bien parler et au bien écrire le français.

Quelles sont les principales difficultés rencontrées lors de cette dictée utilisée pour l’enquête ?

Ce n’est pas la première fois qu’on parle de cette dictée, puisqu’on a des comparaisons sur ce même texte pendant plusieurs années. Dans cette dictée, les mots ne sont pas trop difficiles lexicalement. Il n’y a pas de mots que les élèves ne connaissent pas : « Maman », « Papa », « chien ». Ce qui pose problème actuellement, c’est que lorsque les élèves écrivent, ils savent que le verbe s’accorde avec son sujet pourtant ils ne marquent pas l’accord. Ils ne marquent pas les relations entre les mots parce que ce n’est pas automatisé chez eux.

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