lundi 21 décembre 2020

« Joyeux Noël ! », un geste de bienvenue et d'intégration

Chronique de Nathalie Elgrably-Lévi :

Il fut une époque où souhaiter « Joyeux Noël » était naturel et bien accueilli de tous, indépendamment des croyances de chacun. Mais les temps ont changé.

Aujourd’hui, partout en Occident, Noël est un mot tabou qu’il faut rayer de son vocabulaire, sans quoi l’insoumis s’expose aux foudres des intégristes de la laïcité et du multiculturalisme.

Aberration

Pourquoi ? Parce que souhaiter « Joyeuses Fêtes » à un non-chrétien serait plus « inclusif » que le traditionnel « Joyeux Noël ». Quelle aberration !

D’abord, dans une société judéo-chrétienne où la vaste majorité des citoyens fêtent Noël, certains par tradition, d’autres par conviction, et d’autres encore simplement par plaisir, c’est justement le fait de souhaiter « Joyeux Noël » qui symbolise l’inclusion. Par ces paroles, la majorité indique à la minorité qu’elle n’est pas mise à l’écart, mais au contraire qu’elle est incluse dans ce qui a toujours été l’événement le plus important de l’année. C’est une invitation à s’unir pour partager l’héritage culturel du pays d’accueil. On peut difficilement imaginer plus inclusif que ça !

Négationnisme

Ensuite, que ça plaise ou non, Noël commémore la naissance de Jésus. Quel mal y a-t-il donc à appeler chaque fête par son nom et lui reconnaître sa signification ? Pourquoi diluer Noël dans des expressions aseptisées et génériques ? Dénaturer une fête, ce n’est pas de l’inclusion, c’est du négationnisme.

Certes, l’État doit être laïc. Mais la société, elle, n’y est pas tenue. Ce n’est donc pas parce qu’une société est accueillante et tolérante qu’elle doit gommer ses traditions et renier son patrimoine culturel. Et ce n’est pas rejeter l’autre que d’affirmer sa propre identité et célébrer son héritage et ses valeurs. Au contraire ! La nature a horreur du vide. Si l’Occident renonce à son identité judéo-chrétienne, une autre s’imposera et dominera. « Joyeux Noël » est donc bien plus qu’un simple souhait. C’est un acte de résistance contre une disparition tranquille.

Quelles sont les origines des Québécois canadiens français ?

Les Canadiens français sont les descendants des pionniers venus s’établir en Nouvelle-France aux XVIIe et XVIIIe siècles. Tout au cours de cette période et des siècles qui ont suivi, des immigrants d’origines autres que françaises se sont aussi établis sur le territoire de ce qui est aujourd’hui la province de Québec et se sont intégrés à des degrés divers à la population canadienne-française.

Les mesures réalisées sur divers groupes de fondateurs font ressortir la prédominance de la contribution française, mais elles montrent aussi que celle des autres immigrants, quoique bien inférieure, n’est pas négligeable.

Au cours des siècles, des Amérindiens ont épousé des Canadiens français et se sont ainsi intégrés à la population d’origine européenne. La mesure de ce métissage et de la contribution des Amérindiens au bassin génétique canadien-français a depuis plusieurs années suscité l’intérêt des chercheurs et soulevé bien des controverses. Les avis étaient partagés, certains estimant sur la base généalogie que cette contribution se situait à moins de 1 % du pool génique [1], alors que d’autres considèrent qu’elle est certainement sous-estimée, car il aurait existé des préjugés défavorables à consigner sur un registre paroissial un ancêtre amérindien (Denys Delâge dans [2]) et qu’elle pourrait même être de l’ordre de 5 à 10 % (Jacques Beaugrand dans [2]). Dans leur étude, Bherer et ses collègues (2011) ont trouvé que 47 % des 2221 généalogies analysées comportaient au moins un fondateur (souvent très éloigné) amérindien. Sur la base de ces généalogies, les fondateurs amérindiens représentaient 1,2 % de l’ensemble des fondateurs, mais leur contribution génétique n’était que de 0,2 % (ils ont eu moins d’enfants que d’autres ancêtres).

On entend régulièrement des affirmations douteuses par rapport à ce groupe ethnique, visant à conforter des dogmes idéologiques ou des modes (il est chic auprès de certains de déclarer avoir un ancêtre indien ou de se dire métissé). Parfois, on entend dire que le Québécois de souche n’existerait plus, que le sang français aurait été fortement dilué sous les vagues successives d’immigrants ou encore par métissage avec les Amérindiens. Selon les excellents travaux publiés en 2005 par la chercheuse Hélène Vézina, les Canadiens français nés entre 1945 et 1965 ont un bagage héréditaire qui provient à 95 % de la France et le reste de la Grande-Bretagne (1,5 %), des Amérindiens (1,4 %), des autres pays européens (2 %). Les 0,6 % restants sont inconnus. Les principaux résultats des travaux de la chercheuse sont résumés dans le tableau ci-dessous [3].

 Origine génétique des individus nés entre 1945 et 1965

Contribution génétique
des ancêtres (%)
  Hommes    Femmes
France 90,8 88,7
Grande-Bretagne 1,9 1,0
Allemagne 0,5 0,2
Irlande 0,6 0,5
Autre pays européen 1,4 0,6
Acadie 3,6 6,4
Amérindiens 0,8 1,9
Inconnue 0,5 0,8

Dans des travaux plus récents [4], Hélène Vézina a mesuré la contribution des ancêtres amérindiens aux généalogies de 794 participants résidant sur l’île de Montréal, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, en Gaspésie et sur la Côte-Nord. Les ancêtres amérindiens ont été identifiés à partir de sources généalogiques et des données génétiques provenant de l’analyse de l’ADN mitochondrial des participants. Les résultats indiquent que, dans chacune des régions, plus de la moitié des participants ont au moins un ancêtre amérindien dans leur généalogie, et cette proportion atteint même 85 % sur l’île de Montréal. Bien que la majorité des participants soient porteurs de gènes reçus de fondateurs lointains amérindiens, la contribution génétique totale de ces ancêtres aux quatre groupes régionaux demeure cependant assez faible. En effet, elle est de moins de 1 % au Saguenay–Lac-Saint-Jean et sur l’île de Montréal et dépasse à peine cette valeur sur la Côte-Nord et en Gaspésie. (Un ancêtre, il y a 10 générations, soit il y a environ 250 ans, ne contribue habituellement qu’à 1/1024e du patrimoine génétique, ce chiffre peut augmenter si le même fondateur apparaît à plusieurs endroits de l’arbre généalogique.)

Les travaux d’analyse génétique d’Hélène Vézina se poursuivent, mais comme elle concluait son étude de 2012 « si l’on considère l’ensemble des fondateurs qui ont participé à la constitution du pool génique des Québécois d’origine canadienne-française, l’impact de la contribution amérindienne est faible et le chiffre précédemment avancé de 1 % pourrait s’avérer assez juste. »


La population européenne éclipsa assez tôt la population autochtone. Les interactions entre les groupes raciaux étaient assez différentes en Amérique du Nord à ce qui se passa en Amérique centrale et du Sud. Les tribus ont maintenu leurs propres communautés insulaires et la plupart des scénarios de mariages interraciaux ont eu lieu dans ce contexte tribal et non dans la vallée du Saint-Laurent.

Sources :

[1] Beauregard, Y., 1993. « Mythe ou réalité. Les origines amérindiennes des Québécois : entrevue avec Hubert Charbonneau », Cap-aux-diamants, 34, pp. 38-42.

[2] Dubé, C., 2008. « Un génome bien accommodant », Québec Sciences, été 2008 : pp. 41-43.

[3] Les Canadiens français deviendraient minoritaires au Québec en 2042

[4] Vézina, H., 2012, « L’apport des données génétiques à la mesure généalogique des origines amérindiennes des Canadiens français », Cahiers québécois de démographie, Volume 41, Printemps 2012, pp. 87–105.