jeudi 28 février 2013

Embrigadement dès la maternelle en faveur des « carrés rouges » ?







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L'école québécoise déculturée

Extraits d'un article de Mathieu Bock-Côté sur le manque de culture et respect pour la langue française de qualité à l'école québécoise : 

« À trop se perdre dans les structures, le financement et la technocratie, le Québec oublie l’essentiel de l’éducation : la culture que l’école devrait transmettre. Ce n’est pas une question de milliards, mais de philosophie. Ou d’erreur philosophique.


Nulle part cette erreur philosophique n’est plus visible que dans notre rapport à la langue française. Toute personne qui prétend s’occuper d’éducation, mais qui ne prend pas au sérieux le massacre de notre langue est un fraudeur intellectuel.

Pourquoi? Parce que la langue française est la plus grande richesse culturelle que possèdent les Québécois. C’est à partir d’elle que les Québécois nomment leur réalité et qu’ils s’ouvrent au monde. Pourtant, cette langue, nous la massacrons fièrement.

Ne pas trop bien parler

Combien de fois, à celui qui parle bien, on hurle : maudit Français! Fendant! Péteux de broue! La logique? Moins bien on parle le français, plus on serait Québécois. Il y a même des zozos pour croire que le Québécois serait une langue à part entière.

Le problème vient de loin. C’est une vieille tare culturelle. Le français au Québec est historiquement une langue de conquis. C’était celle des vaincus de l’histoire. Souvent, pour gagner sa vie, il fallait s’en exiler.

Avec elle, on ne parvenait pas à nommer l’avenir, la technologie, l’économie. Le meilleur exemple de cette déchéance? Notre rapport à l’automobile. Spontanément, chaque pièce se nomme en anglais. On connaît le glossaire : windshield, steering, bumper.

Mais la pédagogie débile que nous inflige le ministère de l’Éducation n’aide pas. De peur d’avoir l’air autoritaire, l’école a renoncé à la discipline, aux dictées, à la littérature. Comment un jeune peut-il sortir de l’université et écrire comme un analphabète? Cela arrive encore souvent.

[...]

Pourtant, nous pouvons faire quelque chose. L’éducation devrait jouer un rôle majeur. Ce devrait être une mission fondamentale de l’école : réparer notre langue. Cela passerait par une revalorisation de la littérature et de ses classiques. Mais elle ne le veut pas.

Pourtant, elle l’a déjà souhaité. C’était au temps du cours classique. Évidemment, il avait d’immenses défauts. [vraiment pires que l'école actuelle?] Mais, au moins, il savait une chose : le français québécois ne s’améliorera qu’en se réconciliant avec la littérature française. Il n’avait pas peur de l’excellence.

[...]

L’école québécoise le voudrait-elle qu’elle pourrait enseigner dans le texte Balzac, Stendhal, Bernanos et tant d’autres écrivains qui ont révélé toute la richesse du français.

Ces livres ne coûtent à peu près rien. Comparés aux ordinateurs, ils sont donnés.

Si l’école se lançait dans une grande corvée de lecture, elle pourrait familiariser les Québécois avec des œuvres qui féconderont leur culture et les accompagneront toute leur vie.

En se reconnectant avec la littérature française, le Québec redécouvrirait une part oubliée de son identité.

Il se reconnecterait avec une grande puissance culturelle de la civilisation occidentale. Il retrouverait aussi la dignité d’une langue qui mérite mieux que notre manière de la parler.






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mercredi 27 février 2013

Feu vert théorique au gaz de schiste en Allemagne ...ou moratoire en pratique ?

Le gouvernement d’Angela Merkel va déposer un projet de loi pour autoriser l’exploitation des gisements de gaz non conventionnel.

Le Québec aime se comparer au chef de file de l'écologie politique.Mais voilà l’Allemagne, après sa décision en 2011 d’abandonner le nucléaire cherche de nouvelles sources d'énergie à bon marché et moins polluantes que le charbon.

C'est pourquoi le gouvernement d’Angela Merkel a ainsi annoncé, mardi 26 février, le dépôt d’un projet de loi autorisant l’exploitation de gaz de schiste.

Pour rassurer une partie de l'opinion publique qui s’inquiète des conséquences environnementales potentielles, notamment sur les nappes phréatiques, la technique de la fracturation hydraulique de la roche pour récupérer le gaz sera encadrée. Le texte prévoit de l’interdire dans les zones d’eaux protégées et de sources minérales. Au total, 14 % du territoire allemand serait ainsi « sanctuarisé ». Ailleurs, des études d’impact sur l’environnement devront en outre être effectuées avant chaque projet d’extraction.

Réserves importantes de gaz 

La gauche allemande (les Verts et les sociaux-démocrates), réclament un moratoire, en attendant que l’on découvre de nouvelles techniques d’extraction. De leur côté, les milieux industriels font pression sur les pouvoirs publics pour que l’on exploite au plus vite ce gaz non conventionnel.

Contrairement au ministre de l'économie, le ministre de l'environnement allemand, Peter Altmaier, ci-dessous, considère qu'il s'agit dans les faits d'un moratoires car, selon lui, rien n'empêchait la fracturation hydraulique auparavant.

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Entrevue en allemand avec le ministre Altmaier (autre lien)

Le sous-sol allemand compterait jusqu’à 2 300 milliards de mètres cubes de gaz de schiste, selon l’Office fédéral de géophysique, qui qualifie ces ressources de « très importantes ». Les réserves du gisement Utica au  Québec étaient estimées à 3 500 milliards de mètres cubes de gaz en 2009 par l'Office national de l'énergie du Canada (actuellement environ seuls 20 % des réserves peuvent être exploitées).

L’Allemagne consomme actuellement 86 milliards de mètres cubes de gaz naturel par an, dont la moitié environ provient de Russie. « Les réserves nationales d’hydrocarbures vont nettement contribuer à la sécurité d’approvisionnement et à la stabilité des prix énergétiques en Allemagne », affirme le projet de loi.

Selon le quotidien Handelsblatt, ces gisements de gaz non-conventionnels se situeraient principalement en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, en Basse-Saxe, en Hesse et dans la partie haute du Rhin. Il s'agit des régions les plus peuplées de l'Allemagne.

Poussé par l'abandon du nucléaire

En pleine campagne électorale, cette transition énergétique suscite de nombreux débats en Allemagne, en particulier sur le financement des énergies renouvelables. D’ici à 2050, le pays compte tirer 80 % de son électricité des énergies renouvelables et la dernière centrale nucléaire doit fermer en 2022. La construction de nouvelles lignes à très haute tension pour relier les éoliennes de la mer du Nord aux bassins industriels du centre et du sud du pays, suscite aussi de nombreuses réactions négatives de la part des riverains concernés. Les travaux prennent beaucoup de retard et les recours juridiques se multiplient.

En attendant, le prix à payer pour les particuliers va singulièrement grimper, alors que les industriels sont pour l’heure relativement épargnés, au nom du maintien de la compétitivité. Rien que cette année, le coût de la garantie de rachat de l’énergie éolienne et solaire, à un prix supérieur au marché, est évalué à une vingtaine de milliards d’euros.

La facture moyenne d’électricité des ménages allemands, qui est déjà deux fois supérieure à celle des ménages français, devrait ainsi augmenter de 13 % en 2013.

Les centrales au charbon tournent à plein régime 

En attendant, les producteurs d'électricité allemands, comme E.ON et RWE, font tourner à plein régime leurs vieilles centrales à charbon, déjà largement amorties. Un moyen pour eux de compenser financièrement une partie des investissements colossaux qu’ils s’apprêtent à faire dans le renouvelable, et de récupérer un peu du manque à gagner lié à l’arrêt prématuré de leurs réacteurs nucléaires.

Le charbon demeure en effet une énergie très bon marché, comparé aux autres énergies fossiles. L’an dernier, son prix a même chuté de 35 %, en raison notamment de l’afflux en Europe de charbon américain qui a de plus en plus de mal à trouver preneur aux États-Unis, avec la concurrence du gaz de schiste. Le charbon allemand est souvent de la lignite, un charbon très polluant.

Excavateur à godets géant à Garzweiler (Allemagne occidentale, proche de la Belgique)

Émissions des gaz à effet de serre augmentent en Allemagne

Une mauvaise nouvelle pour l’environnement. Les émissions de gaz à effet de serre de l’Allemagne ont ainsi augmenté de 1,6 % en 2012, pour atteindre l’équivalent de 931 millions de tonnes de dioxyde de carbone, soit 14 millions de plus qu’en 2011. Dans un communiqué publié lundi 25 février, l’agence fédérale de l’environnement (UBA) justifie cette tendance par le fait que « plus de charbon et de houille ont été brûlés pour produire de l’électricité et que le gaz a été davantage utilisé pour le chauffage des habitations ».


Excavateur à godets géant à Nochten (Allemagne orientale, proche de la Pologne)

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Les énergies vertes : un tonneau des Danaïdes

Énergies alternatives : scandales, mythes et perspectives

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Contrôle pollution des voitures au Québec, à quel prix ?

The Guardian : nous avions tort au sujet du pic pétrolier

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Grande-Bretagne — bientôt le rationnement

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lundi 25 février 2013

L’État a-t-il vraiment fait progresser l’éducation au Québec?

Vincent Geloso est détenteur d’une maîtrise en histoire économique de la London School of Economics, il y poursuit des études de doctorat. Il publie ces jours-ci un livre qui devrait déboulonner quelques mythes complaisamment répandus sur la prétendue Révolution tranquille.

Il a également publié récemment un article portant sur le rôle de l'État au Québec à la fin du XXe siècle.


« Alors qu’approche la tenue d’un autre sommet pour discuter de l’avenir de l’enseignement supérieur, nombreuses sont les mentions des progrès réalisés pendant la Révolution tranquille. Le fameux rapport Parent, qui recommanda la gratuité scolaire jusqu’aux études universitaires en 1964, reste un document de référence régulièrement cité.

Cette rhétorique décrit la Révolution tranquille comme le début d’un âge d’or qui aurait permis au Québec de cesser d’être le cancre du Canada. Récemment, un chercheur [Simon Tremblay-Pepin] de l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) illustrait bien cette croyance en affirmant qu’à la fin des années 1950, « le Québec était sous-éduqué, avec des taux incomparables avec les autres provinces canadiennes », et que depuis les années 1960, l’accessibilité à l’école postsecondaire n’a cessé d’augmenter au Québec.

Selon cette perspective, les vastes progrès de la Révolution tranquille contrastent avec la période l’ayant précédée, qu’on a qualifiée de Grande Noirceur (1945-1960). Par opposition avec l’obscurantisme et le laisser-faire de la Grande Noirceur, l’État interventionniste mis en place pendant la Révolution tranquille aurait permis au Québec de rattraper son retard et d’entrer dans la modernité.

Est-il vrai, toutefois, que le Québec était si en retard sur le plan éducationnel par rapport au reste du pays, avant 1960, et qu’il n’a rattrapé ce retard que grâce aux nombreuses interventions de l’État pendant la Révolution tranquille ?



L'école de la Grande Noirceur et d'aujourd'hui selon un cahier d'ECR...
Page 56 — cahier-manuel d'éthique et de culture religieuse Entretiens II pour la 1re secondaire des éditions La Pensée


Grand rattrapage

S’il est vrai que le Québec accusait un certain retard face au reste du Canada à l’aube de la Révolution tranquille, cela n’avait pas toujours été le cas. En 1901, le Québec avait en fait une légère avance sur les autres provinces canadiennes en matière d’éducation. Même si les taux d’inscription y étaient plus bas qu’ailleurs, les élèves québécois qui s’inscrivaient à l’école la fréquentaient dans une proportion plus élevée qu’ailleurs au Canada.

Ainsi, le taux effectif de fréquentation scolaire des jeunes de 5 à 19 ans à cette époque était de 41 % au Québec, contre 40 % en Ontario et 38 % dans l’ensemble du Canada.

Le Québec a toutefois commencé à perdre du terrain par la suite. Même si le taux effectif de fréquentation avait atteint 52 % au Québec en 1931, l’Ontario et le Canada dans son ensemble avaient dépassé le Québec avec des taux de 62 % et 55 %.

Ce retard grandissant du Québec se renverse complètement après 1945. À cette date, la proportion des enfants inscrits et présents à l’école au Québec était équivalente à 80 % de celle de l’Ontario et à 84 % de celle du reste du Canada. Douze ans plus tard, on voit un progrès considérable de la fréquentation scolaire au Québec : elle atteint 89 % du niveau de l’Ontario et 94 % de celui du reste du Canada. Il s’agit d’un rattrapage important entamé avant la Révolution tranquille.

Plus important encore, après 1945, lorsque les jeunes Québécois décident d’aller à l’école, ils y restent plus longtemps. C’est-à-dire que le décrochage scolaire diminuait. Pour l’année scolaire 1945-1946, seulement 28 % des jeunes qui auraient normalement dû être à l’école secondaire y étaient, contre 69 % en Ontario - un écart de 41 points de pourcentage. Pour l’année scolaire 1959-1960, cette proportion se situait à 68 %, contre 88 % en Ontario, un écart de seulement 20 points. Il s’agit d’un rattrapage remarquable.

École réelle pendant la prétendue Grande Noirceur. Région de Lanaudière, années 1950.

Les Québécois francophones étaient aussi de plus en plus nombreux à accéder aux études universitaires. À partir de 1955, la population étudiante totale à temps plein au Québec en pourcentage du groupe d’âge des 15 à 24 ans dépasse même le niveau observé en Ontario. Et on ne peut pas attribuer cette performance uniquement aux anglophones, puis que les universités francophones ont vu leurs inscriptions augmenter plus rapidement que les universités anglophones.

La propension des Québécois à aller plus longtemps à l’école a permis au Québec de combler une partie importante du retard éducationnel qu’il avait avec l’Ontario. En 1951, la proportion des Québécois de 15 ans et plus qui détenaient un diplôme universitaire était équivalente à 70 % du niveau observé en Ontario.

Seulement dix ans plus tard, cette proportion avait bondi à 85 %, et ce sont principalement les femmes qui ont contribué à ce rattrapage.

La plupart des historiens prétendent que le Québec est devenu une société de plus en plus arriérée sur le plan de l’éducation durant les années d’après-guerre. Les statistiques officielles démontrent le contraire.

Somme toute, cet impressionnant rattrapage a permis à la scolarité moyenne des Québécois (mesurée en années d’éducation accomplies) de passer de 87 % à 92 % du niveau observé en Ontario, entre 1951 et 1961. Un écart existait toujours entre le niveau d’éducation des jeunes Québécois et celui des autres jeunes Canadiens, mais cet écart allait rapidement en s’amenuisant.

Ces simples faits retirent une partie importante de la crédibilité accordée à la rhétorique populaire. Comment peut-on expliquer qu’une partie considérable du rattrapage du Québec se soit produite alors que l’État intervenait moins en éducation ?

Progrès décevants

Ce rattrapage s’est-il poursuivi pendant la Révolution tranquille ? Plus précisément, est-ce que le rattrapage du Québec s’est accéléré ou a-t-il décéléré ? Soyons clairs, les progrès en termes absolus qui ont été réalisés depuis 1960 sont gigantesques. Toutefois, lorsqu’on compare ces progrès avec ceux accomplis durant la même période dans le reste du Canada, ils sont moins impressionnants - voire décevants.

Au-delà de la rhétorique de la « démocratisation » de l’éducation avancée par des sociologues comme Guy Breton, les faits ne concordent pas. Les données illustrant la participation scolaire au Québec démontrent que plus de la moitié du terrain que le Québec a gagné sur l’Ontario et le reste du Canada a pris place entre 1945 et 1960.

D’une part, cela signifie que le rattrapage scolaire du Québec face au reste du Canada s’est effectué en grande partie avant que l’État ne décide de s’impliquer davantage dans le domaine de l’éducation. D’autre part, cela indique que pendant la Révolution tranquille, le Québec n’a pas fait meilleure figure relativement au reste du Canada que dans les années qu’on qualifie — à tort — de Grande Noirceur.

En fait, on observe même des signes indiquant que le rattrapage du Québec a ralenti pendant et après la Révolution tranquille. Alors qu’il affichait un taux de participation aux études universitaires des 15 à 24 ans supérieur à celui de l’Ontario à partir de 1955, ce n’est plus le cas après 1964, alors que la participation commence à tirer de l’arrière, tant par rapport à l’Ontario qu’aux autres provinces.

Entre 1951 et 1961, la proportion des Québécois de 15 ans et plus qui détenaient un diplôme universitaire avait augmenté plus vite qu’ailleurs au Canada. En fait, cette proportion atteignait 98 % du niveau observé dans le reste du Canada en 1961 — c’est-à-dire que le Québec était virtuellement à parité avec le reste du pays.

Après 1961, les Canadiens des autres provinces sont plus nombreux que les Québécois à s’inscrire à l’université. En 1981, la proportion des Québécois de 15 ans et plus qui détenaient un diplôme universitaire équivalait à 78 % du niveau en Ontario et à 84 % du niveau dans le reste du Canada.

Selon les données les plus récentes provenant des recensements, la situation n’a guère changé, et ce fossé demeure. Il s’agit là d’un fait important puisque le Québec était en meilleure posture relativement au reste du Canada en 1961 qu’il ne l’est aujourd’hui.

À tout cela, ajoutons qu’aujourd’hui le Québec a un taux de décrochage scolaire dans les écoles secondaires dépassant celui de toutes les autres provinces canadiennes. La situation relative du Québec sur ce plan s’est dégradée depuis les années 1990.

En bref, l’héritage de la Révolution tranquille a été beaucoup moins glorieux qu’on le prétend.

Paramètres de discussion

De nombreuses études ont été réalisées ces dernières années par des économistes qui documentent le lien entre la performance scolaire et l’autonomie des écoles — indépendamment du niveau d’enseignement ou de leur nature religieuse.

Toutes choses étant égales par ailleurs, plus les écoles sont autonomes et que les parents ont un mot à dire dans les activités de celles-ci, plus la performance scolaire et la qualité de l’éducation augmentent.

En contrepartie, les régimes où l’État centralise davantage, contrôle le programme scolaire et bureaucratise le domaine de l’éducation sont marqués par des résultats décevants au titre de la performance et de la qualité.

Entre 1945 et 1960, l’État québécois intervenait très peu dans le domaine de l’éducation. Les écoles étaient largement autonomes et les parents avaient une influence importante sur le parcours scolaire de leurs enfants.

Après 1960, c’est l’inverse qui se produit : l’État intervient lourdement à tous les niveaux — des portes de la garderie jusqu’à la sortie de l’université. Et les résultats sont conformes à la théorie : lors que l’État intervenait peu, un rattrapage s’observait, et quand il s’est mis à intervenir, il y a eu ralentissement.

Il convient de se demander si les progrès en éducation auraient continué au même rythme sans la bureaucratisation de l’éducation. Certes [?], il fallait circonscrire le rôle de l’Église en la matière, mais la littérature économique et les développements observés laissent croire que les progrès auraient réalistement pu être plus importants sans l’intervention accrue de l’État.
»



Voir aussi

Du Grand Rattrapage au Déclin tranquille : déboulonner la prétendue Révolution tranquille

Baisse relative du nombre de diplômés par rapport à l'Ontario après la Grande Noirceur

Grande Noirceur — Non, l'Église n'était pas de connivence avec le gouvernement et les élites

La Grande Nouérrceurrr : portrait de famille monochrome, rictus, pénurie francocentrique et ânonnements (5 pages)

La Grande Noirceur, revue et corrigée

Le « mythe » de la Révolution tranquille

Héritage de la Révolution tranquille : lent déclin démographique du Québec ?

Révolution tranquille : Entre imaginaire et réalité économique et sociale





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Du Grand Rattrapage au Déclin tranquille : déboulonner la prétendue Révolution tranquille

Présentation de l'éditeur

Dans ce livre iconoclaste et richement documenté qui bouleverse plus- ieurs lieux communs et idées reçues qui se sont imposés dans la perception de la plupart des Québécois quant à leur histoire au cours du XXe siècle, l’historien économique Vincent Geloso procède à une solide démonstration prouvant que ce qui a été largement présenté comme une « Révolution Tranquille » (1960-1976) n’était pas une véritable révolution, ni ne fut réellement synonyme de progrès général pour les Québécois.

Vincent Geloso propose la thèse, inédite et audacieuse, que c’est la période allant de 1945 à 1960, à laquelle on a accolé l’étiquette infamante de « Grande Noirceur », qui devrait plutôt être vue comme le début de ce qui aura été pour la société québécoise un authentique « Grand Rattrapage ». Comme le montre l’auteur avec une indéniable rigueur intellectuelle, de fortes tendances modernisatrices étaient observables au Québec bien avant 1960, et non seulement la soi-disant Révolution Tranquille n’aurait pas innové autant que le prétend la version historique officielle, mais elle aurait même contribué à ralentir certains progrès pourtant bien nécessaires.

Voici en somme un ouvrage qui fait exploser certains mythes jusqu’à présent bien ancrés, tout en permettant d’aborder l’histoire du XXe  iècle québécois à partir des faits tels qu’ils étaient. Ce faisant, l’auteur rend aux Québécois le visage de la société ouverte et audacieuse qu’ils ont bâtie durant une époque injustement dénigrée et dont en réalité ils auraient toutes les raisons d’être fiers.

Du Grand Rattrapage au Déclin tranquille

par Vincent Geloso
chez Accent grave
à Montréal
250 pages
Date de parution  fin février 2013

ISBN: 978-2-924151-12-9
24,95 $





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samedi 23 février 2013

Québec — Doutes sur l'utilité de la maternelle dès 4 ans et les dépenses consenties

Extraits d'un article intéressant du Devoir qui remet en cause une autre « action » du gouvernement péquiste :

Vendredi midi, la ministre de l’Éducation du Québec, Marie Malavoy, a profité d’une tribune à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain pour confirmer son intention de mettre en place, dès septembre prochain, des maternelles pour les enfants de quatre ans dans les milieux défavorisés.

Au même moment, l’Association québécoise des centres de la petite enfance (AQCPE) tenait une conférence de presse pour dénoncer « la précipitation » du gouvernement et « les risques liés à l’implantation des maternelles quatre ans ».

La passion de la ministre

Après avoir rappelé sa « passion de l’éducation », ainsi que les progrès accomplis en matière de persévérance scolaire, Mme Malavoy s’est attachée à vendre son programme de maternelle quatre ans dans les quartiers défavorisés. À l’heure actuelle, 27 % des enfants de quatre ans n’ont accès ni à un service de garde ni à une prématernelle, a constaté la ministre. Pour cette dernière, le passage du douillet cocon familial à l’école représente un « choc » trop important pour ces enfants. « C’est pour eux qu’il faut faire quelque chose. C’est eux, le commencement. Ce sont ces petits enfants de quatre ans qui, si on ne fait rien, risquent de commencer leur parcours scolaire avec déjà l’impression qu’ils sont moins bons que les autres et qu’ils ne réussiront pas. […] On pense que dans ces 27 %, il y en a un bon nombre qui vient de ces quartiers défavorisés. »

Aucune étude qui démontre l'impact positif, stress indu

Hélène Gosselin, vice-présidente de l’AQCPE, tempère ce point de vue. « Il n’existe aucune recherche qui montre que la scolarisation précoce favorise la réussite scolaire. » Elle en veut pour preuve une étude publiée par Statistique Canada, qui classe les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en fonction de la réussite des élèves de 15 ans au Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA). Le Québec s’y classe très honorablement septième en lecture et cinquième en mathématiques, loin devant la France, la Belgique ou l’Italie, où les enfants sont scolarisés dès l’âge de trois ans. Il est cependant à noter que la Corée du Sud, Hong-Kong ou Singapour, pays plutôt connus pour la rigidité de leurs systèmes scolaires dès le plus jeune âge, occupent systématiquement les premières places de ce classement.

[Note du carnet : il existe des études qui prouvent au contraire que la maternelle n'a aucun impact bénéfique sur les résultats scolaires ultérieurs des jeunes enfants.

Voir

Une étude de Cambridge conclut que les enfants de cinq ans sont trop jeunes pour commencer l’école

Maternelle publique et gratuite : sans effet sur les résultats au primaire


D'ailleurs, l'AQCPE mentionne aussi ce genre d'études dans son communiqué. « Des études internationales ont aussi démontré que la scolarisation précoce risque de créer un stress indu et de tuer le plaisir d’apprendre », mais le Devoir qui recopie la phrase suivante sur les résultats PISA n'a pas jugé opportun de parler de ces aspects négatifs. Notons enfin que l'AQCPE prêche pour sa paroisse, mais des études montrent que le programme de CPE a aussi des effets indésirables sur l'anxiété des enfants et que les bénéfices pédagogiques de ce programme sont globalement nuls. ]

[...]

Très peu d'enfants de quatre ans restent à domicile

L’AQCPE cite pour sa part les résultats d’une étude de l’Institut de la statistique du Québec, qui révèle que seuls 3 % des enfants des familles vivant dans des « conditions matériellement et socialement plus défavorables » restent à domicile. « À l’évidence, les énergies investies dans la mise en place des maternelles pour les enfants de quatre ans issus de milieux défavorisés ne visent pas beaucoup d’enfants », conclut le document de l’AQCPE.

Des cobayes

Mme Gosselin demande plutôt au gouvernement de prendre le temps de mettre en place une véritable étude sur les moyens et les besoins. « On ne peut pas se servir d’enfants de quatre ans, et venant de milieux défavorisés, comme des cobayes pour un projet pilote, puis analyser les résultats ensuite ! »

Voir aussi

Les CPE, un échec ?

« Le système de garderie universel en Suède forme des enfants moins instruits »

Épidémie de détresse chez les enfants en CPE et chez les enfants nantis

Le système de garderies, les syndicats sont-ils tombés sur la tête ?




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mercredi 20 février 2013

Joseph Facal : « L’essentiel est invisible »

Texte intéressant de Joseph Facal publié aujourd'hui.

Voyez les mots qui encombrent nos débats en matière d’éducation : taux de diplomation, compétences transversales, financement, endettement. L’essentiel est pourtant ailleurs.

Mon grand-père paternel est né dans le nord-ouest de l’Espagne, dans une famille de cultivateurs pauvre et nombreuse. Comme il n’était pas l’aîné, il n’héritait pas de la terre ancestrale.

Responsabilité

Au début du siècle dernier, il fait donc son baluchon et traverse l’Atlantique en bateau. Il avait 16 ans. Destination: Montevideo, capitale de l’Uruguay.

Débarqué le matin, il faisait de la pâte dans une pizzeria l’après-midi même. Plus tard, il a ouvert un restaurant, puis un autre.

Il ne lui serait jamais venu à l’idée que quelqu’un d’autre que lui-même était responsable de sa vie. Rien n’était plus important pour lui que ce qu’il n’avait jamais eu: une éducation.

Ses lourds silences suffisaient pour imposer son autorité. Ses deux fils avaient intérêt à marcher droit à l’école. Mon père est devenu médecin et son frère, banquier.

En 1970, c’est le chaos en Amérique latine. En Uruguay, la police et l’armée arrêtent et torturent sans retenue. On voit venir le coup d’État militaire.

Mon père décide qu’on recommencera tout au Québec. On arrive ici en juin 1970.

Puis, quand j’étais enfant, j’ai le souvenir de plusieurs de mes anniversaires. Mon père et moi allions à la librairie et il choisissait pour moi : Alexandre Dumas, Jules Verne, Dickens, Poe.

Je lisais jusqu’à ce que les yeux m’en tombent. Je fouillais aussi dans la bibliothèque de mon père et tombais sur des livres dont je ne comprenais pas la première phrase. J’allais au Collège Stanislas.

Puis, c’est à mon tour d’avoir des enfants. Mon garçon est maintenant en 3e secondaire, et la plus petite termine le primaire. Il fréquente une de ces écoles privées qui sont dans le haut de ce sulfureux classement que L’Actualité ne publie plus. Sa sœur y entre l’an prochain.

Ils savent parfaitement que rien n’est plus important à mes yeux que les bulletins qu’ils me ramèneront. J’examine les travaux de près.

Sacrifices

Comme j’essaie d’être un père moderne, je suis un chauffeur à temps plein. Quand je m’installe à la sortie des élèves pour attendre mon garçon, je suis toujours frappé par la proportion très élevée d’enfants d’origines maghrébine et asiatique.

Je parle beaucoup à leurs parents pendant que nous attendons. Plusieurs d’entre eux ont des petits dépanneurs, conduisent un taxi ou sont préposés aux bénéficiaires à l’hôpital.

Ils ne disent jamais: «Mon fils apprendra à se débrouiller comme moi.» Ils font d’immenses sacrifices pour que leurs enfants aient une vie meilleure que la leur. Je repense alors à mon grand-père.

Aucun gouvernement, aucun Sommet, aucun plan de réussite conçu par un «lologue» ne remplacera cela. L’essentiel est invisible.






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La bonne éducation – Autrefois, l’homme avait des devoirs envers le monde

Mathieu Bock-Coté dans les colonnes du Journal de Montréal revient sur ce que l'école contemporaine ne fait plus selon lui.

Pourquoi sentons-nous que l’école québécoise a fait faillite ? Je ne parle pas d’une faillite financière, mais d’une faillite morale et culturelle. La réponse est simple : c’est parce qu’elle ne comprend plus sa propre mission. Elle ne sait plus ce que veut dire éduquer. Éduquer, c’est-à-dire transmettre un savoir, des connaissances, introduire le jeune dans la société des adultes. Éduquer, c’est-à-dire inculquer des valeurs. Mais nous ne voulons plus éduquer, car nous ne voulons plus transmettre une culture. C’est notre vision de l’être humain qui a changé. Autrefois, l’homme était un héritier. Il savait qu’il entrait dans un monde qui le précédait. Il savait que le monde lui survivrait. Il avait des devoirs envers le monde. Pour le lui faire comprendre, on lui apprenait l’histoire. L’homme savait qu’il ne vivait pas dans un présent perpétuel, mais qu’il était situé dans le temps. Il développait un sentiment d’appartenance à sa collectivité.

Apprendre à admirer

À travers l’histoire, l’homme apprenait aussi à admirer. Il admirait les grands hommes, les grandes œuvres. Les actions héroïques aussi. L’histoire permettait de comprendre qu’on ne s’élève qu’en regardant plus haut que soi. Pour l’aider à s’inscrire dans le monde, on lui apprenait la littérature. Il savait qu’on ne maîtrise bien la langue qu’en lisant ceux qui l’ont pleinement déployée. Il comprenait qu’on ne parle pas comme on grogne. Surtout, on comprenait que l’homme ne saura jamais exprimer ses émotions s’il n’a pas les mots pour le dire. Un homme au vocabulaire trop limité est enfermé dans une terrible prison. Il n’aura pas accès à toutes les nuances de sa propre humanité. Cette vision a changé. Pire, elle s’est effondrée. Il y a une quarantaine d’années, on a voulu « libérer » l’être humain. On s’est dit que l’homme ne devait plus sentir sur lui la pression de la société. Des devoirs ? Non, merci. Que des droits, qui se résument en un seul : le droit de jouir. Surtout, on s’est dit qu’on devait libérer l’homme de la société. L’histoire ne devait plus l’obliger. La littérature ne devait plus le former. La morale ne devait plus le structurer. L’histoire devenait alors passéiste. La littérature, prétentieuse. L’enfant devait même espérer s’éduquer lui-même. Sans contrainte. Il fallait valoriser son authenticité. Sa créativité absolue. C’était l’heure de la pédagogie ouverte. De l’éducation exagérément permissive.

L’école contemporaine

À cette lumière, on comprend l’école contemporaine. Elle a renoncé aux connaissances parce qu’elle les croyait autoritaires. Imposer des connaissances, c’est transmettre une culture. C’est supposer que le passé doit alimenter le présent et inspirer l’avenir. On comprend alors d’où viennent les fameuses « compétences ». Avec les compétences, on mise sur l’autonomie absolue de l’élève. Il doit construire lui-même son savoir à partir de sa propre personnalité. Le professeur aussi change de mission. Il devait transmettre autrefois une matière. Désormais, il doit accompagner le jeune dans la construction de son savoir. Ne soyons pas surpris que certains veulent les remplacer par des ordinateurs. Cette révolution délirante a mené au désastre. L’homme n’est pas « libéré », il est déculturé, déraciné. L’essentiel n’est pas de pomper des milliards $ en éducation, mais d’imposer un changement de philosophie. Il faudra en revenir à une conception classique de l’éducation.




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Chttt ! Le mot d'ordre de « la droite » aux conservateurs sociaux

Pour les partis de « droite », il ne faudrait parler que d'économie, les conservateurs sociaux doivent se taire et laisser la discussion sociale à la seule gauche, aux seuls « progressistes », « féministes », « écologistes » et « homosexualistes » dans les écoles, au parlement, dans les associations. Progressistes qui, par leur lutte métapolitique à l'école, dans les médias et les universités, rendent normal l'étatisme, l'État-Nounou qui est là pour assurer l'égalité et la justice sociale.

Brian Lilley en a assez de voter pour ces gens qui se disent de droite qui lui demandent de se taire et qui, de toute façon, ne respectent même pas leurs promesses budgétaires et fiscales !

En deuxième partie, un entretien avec le chef du Parti libertarien de l'Ontario, Allan Small sur le programme de son parti en matières d'éducation : un vrai choix des programmes et des écoles.

 Le site du Parti libertarien de l'Ontario (en anglais uniquement).





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mardi 19 février 2013

Mario Dumont et « Le droit de grève » des étudiants


Pourquoi les associations étudiantes sont plutôt tièdes à l'idée d'une loi qui inscrirait le « droit de grève » des étudiants.





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Des médécins refusent d'être complices d'euthanasie, ils demandent plus de soins palliatifs



C’est dans le cadre historique du Musée des Hospitalières de l'Hôtel-Dieu de Montréal que le Collectif de médecins du Refus médical de l'euthanasie a lancé aujourd’hui un appel à leurs collègues et à la population pour les sensibiliser clairement aux dangers de l’euthanasie et à la fragilité du consensus entourant le futur projet de loi québécoise créant le geste de « l’aide médicale à mourir ».

Leur offensive passe par la publication de leur manifeste dans les médias (La Presse, Le Soleil) ainsi que sur les réseaux sociaux (Facebook et Twitter avec le mot-clic/croisillon #tuernestpasunsoin).

Publicité parue dans les journaux

Selon le Dr Patrick Vinay, chef d’une unité de soins palliatifs et porte-parole du Collectif, « l’euthanasie par injection létale n’est pas un soin, mais la fin définitive de tous les soins. Les malades ne devraient jamais être obligés de renoncer à leur droit d’être soignés. » Les Drs Catherine Ferrier et Marc Beauchamp ont aussi pris la parole, rejettant « un processus où les médecins perdraient tout jugement professionnel et deviendraient légalement tenus de tuer leurs patients sur demande et non de les soulager de leur mieux. » Le Collectif tient à ce que les hôpitaux demeurent des lieux entièrement sécuritaires, où personne ne puisse craindre qu’un proche soit supprimé. Les enjeux de ce projet de loi sont mal compris, mal définis et véhiculent une perte  importante de droits tant pour les malades que pour les soignants.

Le Collectif de médecins invite leurs collègues à signer le manifeste et la population à l’appuyer en visitant le site internet www.soignertoujours.com.


Le Collectif de médecins du Refus médical de l'euthanasie regroupe à ce jour 317 membres (dont 238 du Québec)  qui considèrent que toute loi permettant aux  médecins de mettre fin à la vie de leurs patients intentionnellement est contraire aux buts de la médecine et à l'intérêt des patients. Une telle législation met en péril des patients, surtout les personnes faibles, démunies ou qui ne peuvent pas élever la voix pour se défendre.

Disponibles sur la Toile www.refusmedical.blogspot.ca: le message du Collectif publié dans les quotidiens du jour, ainsi que sur Facebook, ainsi que la conférence de presse dans son intégralité.





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Ôtez ce col romain, monsieur l’abbé !

Résumé d’un article paru dans Convivium écrit par Douglas Farrow, professeur de théologie à McGill, sur la décision de la Cour d’appel du Québec à l’encontre du collège Loyola. Douglas Farrow a été un des témoins experts du collège Loyola dans l’affaire qui l’oppose au Monopole de l’Éducation.

Pour Farrow, les jugements contradictoires de la Cour supérieure du Québec et de la Cour d’appel du Québec soulèvent des questions juridiques qui devraient intéresser la Cour suprême du Canada auquel le collège montréalais a fait appel. Parmi celles-ci, on retrouve la question cruciale de savoir si un établissement comme Loyola peut prétendre à la liberté de religion. Cette seule question a d’énormes répercussions pour le vaste réseau d’établissements et institutions religieuses qui contribuent à former le tissu social du Canada. Mais il existe au moins deux questions essentielles pour tous ceux qui se soucient des libertés fondamentales inscrites dans la Chartre canadienne des droits et libertés.

Tout d’abord, est-il vrai – comme le prétend le ministère et désormais la Cour d’appel – que la décision de Loyola d’enseigner le programme d’éthique et de culture religieuse (ECR), comme toutes les autres matières, d’un point de vue catholique rend cette école incapable d’atteindre les deux objectifs d’ECR, à savoir « la reconnaissance de l’autre » et la « poursuite du bien commun » ?

Car, si c’était le cas, on pourrait alors soutenir que l’enseignement catholique en tant que tel ne doit plus être considéré comme une forme légitime d’instruction (c'est-à-dire agréée et subventionnée par l’État). Cette question, en passant, se pose également en Ontario, mais dans des circonstances quelque peu différentes.

Une réponse affirmative à cette question ne pose pas seulement problème eu égard à la place qu'occupe l’enseignement catholique dans la Constitution, mais elle est absurde en soi. Car ces objectifs étaient des objectifs catholiques avant qu’ils ne deviennent ceux de l’État…tout comme l’éducation publique était l’œuvre de l’Église avant que l’État ne se l’approprie. La seule manière de rendre rationnelle une réponse affirmative est d’avancer que le « bien commun » a désormais un nouveau sens qui exclut le sens que lui donne l’Église catholique et d’accorder à ce nouveau sens un monopole dans la sphère publique.

En second lieu, et c’est encore plus vital, un gouvernement ou un tribunal peut-il obliger un établissement confessionnel à mettre de côté – peu importe l’objectif et la durée – sa propre identité et ses croyances pour plutôt adopter la posture imposée par l’État. Et si l’État peut le faire – ou plutôt légitimement tenter de le faire en appliquant des sanctions pénales – quel sens a encore la garantie constitutionnelle accordée à la liberté religieuse ?

Bien sûr, il est parfois nécessaire de demander à une communauté religieuse, comme à toute autre communauté, de procéder à des ajustements pour le bien commun. Ou de renoncer sur un point mineur pour conserver l’essentiel. C’est ainsi que la Cour suprême a déclaré aux Frères huttérites (ou huttériens), bien que d'une manière peu généreuse selon d’aucun, si vous avez des raisons religieuses pour ne pas admettre de vous faire photographier pour votre permis de conduire, c'est parfait, mais vous ne pouvez rouler sur la voie publique pour des raisons de sécurité. [La juge Abella, dans un avis minoritaire, affirma qu'on n'avait pas prouver que la sécurité était réellement en jeu et qu’il fallait admettre le point de vue des huttériens. Pour elle, le gouvernement albertain ne s’est pas acquitté de son fardeau de démontrer que l’atteinte à la liberté de religion des huttérites est justifiée au sens de l’article premier de la Charte.]

Mais le dossier Loyola est complètement différent. La Cour d’appel fait exécuter la demande du ministère selon lequel une communauté religieuse doit se soumettre à quelque chose que — en son âme et conscience — elle réprouve : enseigner comme si elle n’était pas catholique et comme si son interprétation de son devoir de catholique était erronée ou de peu d’importance.

Le programme ECR n’impose pas seulement aux professeurs de présenter le volet « culture religieuse » et les concepts éthiques (moraux) de manière objective et juste – une exigence parfaitement raisonnable même si elle est difficilement réalisable –, mais aussi d’adopter, professionnellement, une posture complètement neutre envers tout ce qui est exprimé en classe, qu’il s’agisse du matériel pédagogique ou des propos des élèves eux-mêmes.

Si Loyola devait accéder à cette imposition, elle ne violerait pas seulement sa conscience, mais elle permettrait au tribunal de la sorte de dominer sa conscience. Dans les faits, cela reviendrait à reconnaître au ministère un magistère qui dépasse celui de l’Église catholique. Elle ne peut accepter cela et demeurer véritablement catholique.

Pour le professeur Douglas Farrow, nous n’avons donc pas affaire à une imposition sans conséquences d’une tâche en quelque sorte obligatoire, comme le prétend le juge Fournier de la Cour d’appel. [Comment-il peut-il le savoir ? Est-il vraiment catholique et enseignant ?] Il s’agit plutôt d’une abrogation pure et simple de la liberté de conscience et de religion en refusant à Loyola le droit d’accomplir la tâche (le contenu du programme) sur lequel tout le monde s'accorde conformément à son optique catholique plutôt que manière non catholique. Douglas Farrow ne peut voir de meilleure manière de dénuer de tout sens la clause de la Charte qui protège la liberté religieuse, et pas uniquement pour les catholiques. Est-ce vraiment ce que l’on veut faire ? Est-ce vraiment ce que les tribunaux supérieurs de ce pays veulent faire, de se demander le professeur montréalais ?

À nos yeux, Farrow compte beaucoup sur la communauté des visées de l’État et de Loyola : tous les deux veulent promouvoir la reconnaissance de l'autre et la poursuite du bien commun et pour insister sur la seule différence : l'optique laïque demandée par l'État qui s'oppose à la vision catholique de l'école. Il n’est pas sûr que Québec remette en doute la similitude des objectifs : il s’en servira même pour montrer que ce qu’on demande à Loyola ne porte pas à conséquence au niveau moral. À notre avis, Québec insistera sur les documents fournis par Loyola dans sa demande d’équivalence afin de montrer que le refus du ministère était raisonnable : la description fournie par Loyola était trop schématique selon le ministère, Loyola n’enseignait pas le volet « dialogue » selon la documentation fournie. Voir notre compte rendu de l’audience à la Cour d’appel pour plus de détails à ce sujet.

Voir aussi

Notre dossier Loyola

À qui sont ces enfants au juste ?





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Malgré les prédictions des Cassandre occidentaux, la démographie russe se stabilise

Texte d'Alexandre Latsa, journaliste français établi en Russie, sur la situation démographique en Russie.

Alors que les enfants et les droits d’adoption sont au cœur de l’actualité, la situation démographique russe est curieusement comme passée de mode dans le monde des médias.

Pourtant les derniers dévelop­pements démo­graphiques russes sont extrê­mement intéres­sants.

[...]

Beaucoup d’analystes ont en effet pris le train de l’information en marche, train qui affirmait à tort que la Russie ne se relèverait sans doute pas du terrible choc démographique qu’elle a connu au lendemain de l’effondrement de l’URSS. Un peu d’histoire s’impose donc.

De 1991 à 1999, à la suite de l’effondrement de l’économie russe, l’état sanitaire de la population s’est considérablement détérioré et l’espérance de vie s’est écroulée ainsi que la natalité. En 1989, la Russie a enregistré 2.160.559 naissances et 1.583.743 décès et la population a augmenté de 576.816 habitants. La dernière année qui a vu une hausse naturelle de population (naissances − décès) avec 1.794.626 naissances et 1.690.657 décès soit une hausse de population de 103.969 habitants fut 1991. À partir de cette année, la Russie est entrée dans le cycle démographique infernal de la croix russe, c’est-à-dire une faible natalité et une forte mortalité. Le nombre de naissances est tombé à 1.214.689 en 1999 contre 2.144.316 décès, soit une perte nette de population de 929.627 habitants. Le nombre de naissances remontera ensuite, n’atteignant de nouveau le niveau de 1991 (plus de 1,7 million de naissances) qu’à partir de 2011. Quant au nombre de décès, il restera très élevé et supérieur à deux millions également jusqu’à cette année 2011, qui verra 1.925.036 décès.

Cette évolution se traduira par une diminution de population continue, mais à une vitesse qui se réduira fortement à partir de 2005, la baisse naturelle de population étant de respectivement 687.066 habitants en 2006, 470.300 habitants en 2007, 363.500 habitants en 2008, 246.500 habitants en 2009, 241.400 en 2010 et finalement 131.208 en 2011. [...]

La Russie a bénéficié en 2012 de 1.896.263 naissances, contre 1.793.828 l’année dernière, soit une hausse de 5,7 % c’est-à-dire 102.435 naissances en plus. La mortalité, elle, continue à diminuer, puisque l’année a vu 1.898.836 décès, contre 1.925.036 décès l’année passée, soit une baisse de 1,4 %, c’est-à-dire 26.200 décès en moins. Avec 1.896.263 naissances et 1.898.836 décès, la Russie frôle donc cette année l’équilibre naissances − décès, avec un solde négatif de 2.573 habitants. Les grands froids historiques que le pays a connus fin décembre ont cependant accru la mortalité, décembre 2012 ayant vu 2.698 décès de plus que décembre 2011.


Affiche dans le métro de Moscou
« Le pays a besoin de vos records.
Chaque minute trois personnes naissent en Russie. »

[...]

Il y a donc des raisons d’être plutôt optimistes. Tout d’abord le nombre de naissances est dans une dynamique continue de croissance pendant que la mortalité est elle au contraire en décroissance. On imagine donc mal ces tendances soudainement s’interrompre et donc comment les prévisions démographiques d’une Russie de 130 millions d’habitants en 2015 pourraient arriver, scénario pourtant envisagé par les sources d’analyses les plus sérieuses (voir New York Times en 2000, Foreign Affairs en 2011 ou CIA Director of Central Intelligence en 2005) jusqu’à il y a quelques années. La population russe devrait se situer aux alentours de 143,6 millions d’habitants en ce premier mois de l’année 2013, soit la prévision statistique démographique la plus optimiste  parmi les scénarios démographiques de l’État russe, qui aurait dû n'être atteinte qu'en... janvier 2015!

Pour beaucoup d’analystes, ces résultats sont déjà exceptionnels et supérieurs aux prévisions des démographes russophiles les plus optimistes. Bien sûr le pire est devant nous puisque depuis 2004 on observe une baisse du nombre de femmes en âge de procréer (15-49 ans) et que depuis 2008 cette baisse concerne également les 15-29 ans, soit la tranche d’âge où se concentrent actuellement 75 % des naissances.

Cette baisse devrait se prolonger jusqu’a 2025, année quand les jeunes femmes russes de 25 ans seront vraisemblablement 35 % moins nombreuses qu’aujourd’hui. Pour faire face à cette situation, il faudrait donc que le nombre d’enfants par femmes double littéralement, soit plus que les trois enfants que le président russe a dans son discours de fin d’année estimé comme le nombre d’enfants que devait avoir chaque famille russe normale. Ou alors il faudrait que les femmes fassent des enfants plus tôt, plus tard ou les deux. Le changement des mentalités fait que les femmes russes ont des enfants de plus en plus tard. En outre, le nombre d’avortements est en forte baisse, passant de 1,8 million en 2004 à moins de 850.000 cette année. [...]

Mais le facteur migratoire pourrait jouer un rôle important dans le futur puisque la chambre basse du parlement devrait élargir la liste des personnes pouvant prétendre à la citoyenneté russe via une procédure simplifiée. Le régime s’appliquerait aux « porteurs de la langue russe et de la culture russes, les descendants directs des ressortissants de l’Empire russe ». Cette loi fait suite à une initiative du chef de l’État Vladimir Poutine qui en juillet 2012 avait soulevé la question de rapatriement des descendants de citoyens de l’URSS et de l’Empire russe en déclarant que « Les compatriotes expatriés voudraient être utiles pour leur patrie historique » et que « Les ressortissants de l’Empire russe font partie d’une même nation et civilisation ». Ainsi, grâce à  cette loi, les habitants de Finlande et de Pologne, ainsi que les Tcherkesses qui ont quitté le Caucase après la défaite dans la guerre du Caucase, pourraient obtenir la citoyenneté russe.

On imagine donc de plus en plus difficilement comment à l’avenir la population russe devrait s’effondrer comme cela a souvent été répété.


Source 



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lundi 18 février 2013

Toujours plus d'État : Québec songe à freiner les garderies non subventionnées

Le gouvernement du Québec veut freiner la croissance des garderies privées non subventionnées. Il considère d'imposer un moratoire.

« Je l'étudie, a confirmé la ministre de la Famille, Nicole Léger, lors d'un entretien avec La Presse. Est-ce que ce sera par règlement, est-ce que ce sera par une loi, est-ce que c'est faisable et comment ? Je regarde tout ça. »

Elle se dit préoccupée — pourquoi ? — par l'explosion du nombre de garderies privées non subventionnées, dont les tarifs tournent autour de 35$ par jour. Quelque 25 000 places ont été créées dans ces garderies depuis 2010. En janvier seulement, Québec a autorisé l'ouverture de 1000 nouvelles places. Il existe environ 700 garderies privées non subventionnées, qui comptent au total environ 30 000 places.

Toute personne qui souhaite ouvrir une garderie non subventionnée doit obtenir un permis du Ministère et respecter un certain nombre de critères. Québec doit accorder le permis dès que les exigences sont respectées, sans égard à l'emplacement de la garderie.

Voir aussi

Mario Dumont : pour Pauline Marois, l'État comme parent du berceau à l’université ?

Pauline Marois embobine Guy A. Lepage sur le dossier des CPE

Maternelle publique et gratuite : sans effet sur les résultats au primaire

Épidémie de détresse chez les enfants en CPE et chez les enfants nantis

Des garderies poursuivent l'État pour concurrence déloyale

Des garderies juives s'arment pour une bataille juridique contre le gouvernement (liberté religieuse)

Québec — Natalité pour six premiers mois de 2012 en léger déclin

Taux de natalité du Québec à nouveau légèrement en baisse en 2011

Étude sur les garderies qui se paieraient d'elles-mêmes : la multiplication des pains (l'économiste  Martin Coiteux)

Les CPE ont échoué sur le plan pédagogique... comportemental et démographique

Défendre l’indéfendable… sans succès! (Nathalie Elgrably-Lévy de l'IEDM)

« Le système de garderies à 7 $ est-il payant pour le Québec ? Non. »

« Le Québec, leader en matière de petite enfance »

Pourquoi le patriarcat a de l’avenir

« Éducation préscolaire: le Québec en avance, selon la TD »





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Ne pas trop parler des dysfonctionnement de la DPJ afin de garder la foi dans le système

Lise Ravary dans un article récent aborde le problème des dysfonctionnements de la DPJ (« protection de la jeunesse ») :

Comme bien des gens ce matin, j’ai été révoltée par l’affaire Malenfant, ce monstre qui a maltraité des petits garçons placés chez lui par la DPJ, et ce, pendant des années.

Depuis le documentaire de Paul Arcand, Les voleurs d’enfance, sorti en 2005, les choses ont-elles évolué au sein de la DPJ ? Qui sait. À l’époque, le directeur de la DPJ au Saguenay avait dit, grosso modo, qu’il valait mieux ne pas trop parler de ces choses-là car les gens pourraient perdre confiance dans le système et faire moins de signalements. Il invitait les gens à ‘faire confiance au système’, rapportait Le Devoir.

Voleurs d'enfants (1 sur 4)
Les sévices sexuels en famille


Pendant ce temps, la DPJ fait confiance à des types comme Malenfant qui a dėclaré ce matin que c’était lui la vraie victime…

Difficile d’accorder une confiance aveugle à un organisme aussi fermé, aussi hermétique que la DPJ. Qui bénéficie de l’immunité et ne peut être poursuivie !

Aucune enquête sur la DPJ

Faites une recherche sur Google avec les mots ‘enquête sur la DPJ’. En fait, ne perdez pas votre temps, je l’ai fait. Ça ne donne rien. Y’en a pas d’enquêtes sur la DPJ. La Direction de la protection de la jeunesse du Québec, c’est un État dans l’État. Un État quasi-stalinien, bureaucratique, idéologique, dans un État mou. Enveloppé dans une culture de l’impunité. Vous en connaissez des employés de la DPJ qui ont été inculpés au criminel pour malversations ? Pas moi.

Le Québec n’est pas fou de ses enfants, le Québec se fout de ses enfants.

C’est comme si le fait d’avoir le mandat de protéger les enfants accordait à la DPJ une aura de sainteté qui la mettait à l’abri de toutes questions sur la place publique. Des enfants qui meurent (Lauréalie, Anaïs et Loic à Drummondville, Rébecca Lévesque dans un centre jeunesse), des appels à l’aide non entendus (les filles Shafia, les enfants confiés à Langis Malenfant, un bourreau qui porte bien son nom), des décisions insensées pour le commun des mortels mais pas pour les lologues instruits de la DPJ (imposer à une fillette de vivre une semaine sur deux avec son agresseur sexuel, forcer une autre fillette à voir son père qui l’a violée une fin de semaine sur deux). La liste est longue et probablement encore plus longue qu’on ne le croit car une enquête journalistique sur la DPJ, c’est à toutes fins pratiques impossible. À moins de l’infiltrer.

L’omerta est cimentée par la loi sur la confidentialité. Nécessaire pour protéger les mineurs dit-on. Je comprends cette notion, plus que valable, mais il faudrait peut-être se demander si le silence aide les victimes au final.

On est condamnés à vivre avec des allégations qui fusent de tous bords, tous côtés.


Voleurs d'enfants (2 sur 4) 
[Pour les francophones hors Québec, CSLC = dispensaire]
DPJ et sa taille à partir de la 10e minute

« Signalements » bidons ?

Dans la foulée du meurtre des trois enfants de Sonia Blanchette à Drummondville, la plupart des journalistes ont reçu des appels et des courriels de parents frustrés qui voulaient raconter leur petite histoire d’horreur au sujet de la DPJ. J’en ai écouté quelques unes. La majorité venaient de mères démolies parce qu’elles avaient perdu la garde de leurs petits. Qui n’avaient rien fait du tout pour mériter cela, que la voisine cherchait à se venger en faisant des signalements bidons. [Note du carnet : Nous connaissons personnellement des cas similaires avec, par exemple, des grands-parents peu reluisants qui signalent leur beau-fils dont ils n'approuvent pas le conservatisme religieux et qui instruisaient ses enfants à la maison.]

Peut-être. Et je compatis. Dans une fonction publique gangrainée par la bien-pensance, il y a de quoi s’inquiéter des motifs de retrait des enfants de leur famille. La DPJ, par exemple, garde à l’oeil de dangereuses familles chrétiennes qui font la classe à leurs enfants à la maison. Ce qui n’est pas illégal.

Il doit certes y avoir des erreurs, de la négligence, du travail mal fait, mais je veux croire que la DPJ ne retire pas des enfants à leur famille sans raison valable. Le commérage de quartier ne suffit pas. Mais comment savoir où se situe la vérité ? Le parent lésé raconte son histoire mais il n’y a personne pour la confirmer, à moins qu’on ne se retrouve avec une cause au criminel.

Mais ce qui m’inquiète encore plus que les abus dans les cas de retraits, ce sont les cas d’enfants qu’on laisse dans des environnements à risque.

Un bourreau ordinaire responsable d’une maison d’accueil

Prenons le cas du bourreau de Sainte-Françoise, Langis Malenfant, responsable d’une maison d’accueil. Il a été trouvé coupable de sévices graves sur deux enfants qui lui avait été confiés par la DPJ, de 2001 à 2005. Ils dormaient dehors au froid, ils recevaient régulièrement la strappe [frapper avec une courroie, une ceinture], portaient des sous-vêtements souillés. On les a même forcés à décaper une porte avec leurs ongles.

Voleurs d'enfants (3 sur 4)
La discipline dans les centres de la DPJ, les salles d'isolement, les tranquillisants, le risque suicidaire des « clients » de la DPJ, les changements fréquents et brusques de famille d'accueil

[...]

J'ai fait un signalement

J’ai fait un signalement dans ma vie. La petite fille de six ans d’une voisine portait des marques de brûlures sur les mains. Je lui ai demandé ce que c’était. Sa mère la brûlait avec des cuillers qu’elle faisait chauffer sur la cuisinière, m’a-t-elle dit, en toute candeur, comme si c’était normal.

J’ai appelé la DPJ sur-le-champ. Que s’est-il passé ? Rien du tout. J’ai fini par savoir que l’enseignante de la fillette, et de ma fille, avait aussi signalé le cas et s’était fait dire que c’était culturel, qu’on ne s’en mêlait pas. Et que le père, un mafieux iranien, caïd de l’importation de l’héroïne à Montréal, avait menacé tout le monde dans le dossier. ‘Mêlez-vous de vos affaires, ou il pourrait vous arriver des malheurs.’

Le père a fini par être expulsé du Canada mais la mère est restée ici avec ses enfants. La famille est disparue dans la nature. [...]

Voleurs d'enfants (4 sur 4)
La ministre demande à ses fonctionnaires de la rassurer,
 le désir des enfants de la DPJ, briser le cycle, une enfance saine pour leurs enfants, 

Voir aussi

Canada — La pédophilie : une orientation sexuelle comme l'hétérosexualité pour des experts

Tribunal reconnaît deux intervenantes de la DPJ coupables, mais la DPJ échappe à toute condamnation car une clause d'immunité la protège

Un enfant de la DPJ créé par procréation assistée au frais du gouvernement

La DPJ intervient, dans le meilleur intérêt de l'enfant, vraiment ?

Droits parentaux amoindris — Des parents en furie contre le DPJ

La DPJ, une menace inapplicable contre les parents qui retirent leurs enfants du cours d'ECR

Menacée par l'école qui faire appel à la DPJ, la mère renvoie sa fille à l'école où elle vit le martyre, la fille se suicide

Cour suprême : Enfant envoyé par un juge en garderie pour le « socialiser » après que seuls les experts de la DPJ ont pu témoigner




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Vers une domination des enfants instruits à la maison aux États-Unis ?

Depuis les années 1970, les résultats du réseau d'enseignement public aux États-Unis ne cessent de décliner. Qu'il s'agisse d'un taux de diplomation en déclin et une baisse dans les résultats au test ACT, les élèves américains glissent de plus en plus vers le bas dans les classements internationaux. Simultanément, depuis les années 1970, l'instruction à la maison devient de plus en plus populaire aux États-Unis. Confrontés à système d'enseignement public en déshérence, les parents semblent plus en plus se tourner vers l'instruction en famille comme une solution. Le plus surprenant ? Les résultats des enfants instruits à la maison : des résultats au-dessus de la moyenne aux tests SAT et dans leurs résultats à l'université. Les enfants instruits à la maison ont également de meilleurs résultats en termes de maturité, leurs compétences en communication et plus généralisation en termes de socialisation.

Évidemment, Québec rend la vie difficile aux enfants qui instruisent leurs enfants à la maison. Les jeunes enfants instruits à la maison connaissent des difficultés d'inscription dans les cégeps ou les universités, alors que ce n'est pas le cas aux États-Unis.

Homeschool Domination


Source des graphiques, via Monarchomaque

Voir aussi

Géorgie — Fraude systématique aux résultats scolaires depuis dix ans dans les écoles publiques d’Atlanta

A+ pour l’enseignement à la maison selon une étude des universités Concordia et Mount Allison

L'instruction à la maison serait « antidémocratique » selon un éditorialiste du Devoir

Les enfants instruits à la maison aux États-Unis réussissent mieux que ceux des écoles publiques

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Bock-Coté : « L’école est une question politique »

Long texte de Mathieu Bock-Côté sur l’école et la politique. Extraits. Quelques brefs commentaires du carnet entre crochets.
Et mon sentiment est simple : si on veut vraiment œuvrer pour l’éducation au Québec, ce n’est pas d’abord de l’Université dont il faut s’inquiéter. Non pas qu’elle aille bien. Mais elle se trouve en fin de parcours. S’il faut réparer l’école, s’il faut la reconstruire, c’est d’abord en se tournant vers l’école secondaire, et en sortant du questionnement habituel sur le décrochage scolaire ou sur la conversion technologique des écoles, comme on l’a vu il y a quelques années. Car la question demeure enfouie : de quoi les jeunes décrochent-ils ? Et que veut-on transmettre avec les nouveaux outils technologiques ? Il faut aussi cesser de croire qu’il suffirait d’ajouter des milliard $ dans le système pour d’un coup le relancer. C’est en examinant en profondeur son rapport à l’école secondaire que notre société comprendra mieux comment certains de ses ressorts les plus intimes se sont brisés depuis un demi-siècle – ce qui ne veut évidemment pas dire que nous vivions dans une société idéale auparavant. Pourquoi l’école québécoise nous est-elle devenue si étrangère ? Pourquoi les Québécois cherchent de plus en plus à la fuir vers l’école privée, même si l’école privée est pourtant victime de problèmes semblables à ceux de l’école publique [Note du carnet : son programme est contrôlé par le Monopole de l'Éducation, sa liberté est sévèrement surveillée  par les mêmes technocrates], d’ailleurs. En fait, le débat sur l’école secondaire existe dans l’espace public, principalement à travers le procès de la « réforme scolaire ». Mais de la réforme, on parle sans cesse sans trop savoir de quoi on parle. On y voit une innovation de technocrates obnubilés par des théories pédagogiques bizarres, qui voient les enfants comme des cobayes sur lesquels tester des idées comme s’y amuseraient tout autant d’apprentis sorciers. On ne se trompe pas en disant cela, bien qu’on passe probablement à côté de l’essentiel – c’est-à-dire qu’on ne voit pas à quel point la question de l’école est devenue hautement politique. Lorsque le débat sur la réforme scolaire se pointe le nez, chaque fois, il met en scène les deux mêmes camps : d’un côté, une intelligentsia supposément éclairée provenant généralement des autoproclamées « sciences de l’éducation » qui veut éclairer un peuple ignare ne comprenant apparemment rien aux innovations de la pédagogie démocratique et postmoderne, de l’autre, une population sentant bien que l’école est brisée, qu’elle ne relaie plus efficacement l’impératif de transmission culturelle, et qui sent qu’une presque secte idéologique forte de l’arrogance des apprentis sorciers a mis la main sur l’école.

[...]

 Au Québec, le ministère de l’Éducation est un État dans l’État. L’incapacité du politique à mater la bureaucratie scolaire et à imposer de nouvelles orientations conformes aux exigences de l’humanisme classique est un révélateur parmi d’autres de l’impuissance du politique causée par l’extension indéfinie de l’État bureaucratique, qui devient, sur l’essentiel, et à travers ses divers bureaux, le véritable centre de commande de l’État. Mais ce vocabulaire un peu technocratique, celui des connaissances contre celui des compétences, même s’il effleure correctement la question de l’école, révèle une crise plus profonde. En fait, on pourrait dire qu’il s’agit de la traduction technocratique de la question de la transmission culturelle au Québec. Ou plus simplement, de notre rapport à la notion d’« héritage ». Qu’est-ce que l’école doit transmettre comme savoir et comme idée de l’homme ? Le sentiment est partagé par plusieurs, et le sujet est bien documenté : depuis quelques décennies, nous avons progressivement renoncé à transmettre un certain patrimoine de civilisation, ainsi que les œuvres qui l’exemplifient. L’école ne transmet plus. Elle n’élève plus (élever suppose ici d’amener l’élève à un niveau supérieur, ce qui suppose au moins qu’on reconnaisse une certaine verticalité dans le rapport pédagogique). Ou du moins, on travaille très fort à ce qu’elle ne le fasse plus. Partout, on sent que la tension entre l’émancipation individuelle et l’héritage culturel, tension pourtant constitutive de la modernité, s’est liquidée au profit exclusif du premier terme. Plus encore, la sympathie pour la vision classique de l’école, centrée sur les humanités occidentales, l’apprentissage des classiques, la maîtrise de la langue et la connaissance de l’histoire, est désormais [note du carnet: sottement] considérée comme l’expression d’un préjugé traditionaliste fermé à l’innovation sociale et hostile à la créativité de l’enfant. C’est même contre elle que le ministère et ses idéologues ont tendance à se battre. Évidemment, on se demandera d’où vient cette étrange mutation des mentalités. Qu’est-ce qui l’explique ? Pourquoi ne voulons-nous plus transmettre la culture à la manière d’un patrimoine que chaque génération doit assumer en plus de le retravailler, de le rénover, de l’enrichir ? D’où vient ce mépris affiché par l’école pour la culture ? D’où viennent les préférences idéologiques du ministère de l’Éducation ? Ce sont de telles questions qu’il faudrait ouvrir pour apercevoir toutes les variables de la crise de l’éducation, pour bien voir aussi de quelle manière elle est indissociable d’une crise plus large des fondements de la cité et de l’idée de l’homme qui se trouve à son fondement – on pourrait dire aussi, dans les circonstances, de l’idée de l’homme occidental.

La société du vide

La réforme scolaire incarne en fait la normalisation gestionnaire et technicienne d’un projet politique assez radical qui s’est déployé au cours des dernières décennies. Ce projet, on pourrait l’assimiler à une radicalisation de la modernité – d’autres parlent de l’avènement d’une société postmoderne, fracturée, éclatée, délivrée du passé comme de l’avenir, et lévitant dans un présent perpétuel, où une liberté flottante devient vite insignifiante tant elle ne sait plus à partir de quels fondements construire la cité et s’instituer. C’est-à-dire à la volonté de mener encore plus loin une société s’arrachant à son histoire et cherchant à vivre exclusivement dans le registre de l’émancipation, comme si l’humain devait toujours se créer lui-même à partir de sa propre volonté, à partir d’une page blanche, sans jamais hériter d’un monde commun qui viendrait au moins l’inscrire dans un donné. Dans cette société où des individus déliés se rencontrent sans jamais vraiment s’unir, l’éducation se laisse aisément définir comme un simple apprentissage de l’adaptabilité sociale. Elle doit permettre à chacun de devenir un caméléon, adaptable à tous les milieux, sans lui inculquer aucune vertu, sinon celle de l’« ouverture », disposition existentielle privilégie par les hypermodernes. Ouverture à quoi ? On prend rarement la peine de nous l’expliquer. Et il est vrai que la société occidentale de la deuxième moitié du vingtième siècle est marquée par une déstructuration culturelle profonde, qui transformera inévitablement notre rapport aux institutions et à l’idée de transmission culturelle. La société de consommation créait les conditions d’un remplacement de la culture par le divertissement. Et la fin des grands projets politiques (ou du moins, leur disqualification et leur refoulement dans les marges de la cité, comme s’ils étaient l’expression d’une condamnable nostalgie traversée par une tentation autoritaire) disqualifie peut-être aussi les « savoirs » autrefois jugés indispensable à une bonne éducation civique, comme la connaissance de l’histoire, celle de la géographie ou celle de la littérature. La société contemporaine ne se voyant plus comme une cité où se poseraient d’une manière ou de l’autre les questions « éternelles » du politique, mais bien comme une addition d’individus personnalisant la question du sens et ne voulant rien d’autre de la collectivité que des droits à faire valoir contre les uns et les autres, elle croit désormais pouvoir se passer des œuvres à travers lesquelles s’exemplifiait la permanence des problèmes humains.

Il est pourtant probable que ces problèmes ne disparaissent pas : l’homme cesse tout simplement de les apercevoir et conséquemment, d’avoir la moindre emprise sur eux, ce qui correspond à une dépolitisation en profondeur de la société, qui entraîne un sentiment d’impuissance démocratique. Allan Bloom, avec raison, parlait des âmes modernes comme autant d’âmes désarmées. Alain Finkielkraut le rejoignait évidemment en disant de l’ingratitude des modernes se retourne contre eux. On pourrait aussi penser à Marcel Gauchet, qui évoque le retournement de la démocratie contre elle-même. Ces grandes figures de la philosophie politique désignent le même problème : la société contemporaine, en évacuant l’héritage, et en évacuant la permanence humaine avec laquelle il permettait d’entrer en contact, devient presque pathologique. La démocratie n’a de sens que si elle s’inscrit dans la longue histoire d’une civilisation, dont elle est la forme politique privilégiée. Les grands idéaux émancipatoires de la modernité ne sortent pas d’un vide métaphysique mais s’inscrivent dans l’histoire longue de la civilisation occidentale. Ils ne sont compréhensibles qu’à partir du moment où ils s’accompagnent d’une véritable conscience historique. L’homme déculturé, jeté dans le vide d’un monde qu’il ne veut plus habiter mais qu’il cherche à consommer, n’est pas libre. II est nu. Il aura froid. Il grelottera. L’homme naît dans un monde qui le précède et lui survivra : s’il s’en détache, il s’appauvrira, et risque de tomber dans l’étrange manie de la « construction de soi » dans une quête éperdue d’originalité qui revêtira souvent les habits de la plus banale insignifiance. Tocqueville disait du mouvement de la modernité, de sa tendance à l’égalisation des conditions sociales et de l’évidement de la conscience historique qu’il échappait en dernière instance à la liberté humaine. Celle-ci pouvait au mieux civiliser l’égalitarisme niveler pour éviter qu’elle ne ravage tout sur son passage. S’il se refusait de faire le portrait d’une humanité en déchéance dans la modernité (avec raison, d’ailleurs, car il serait bien présomptueux et finalement stupide de décréter que les milles expérimentations possibles de l’émancipation humaine ne valent rien devant la majesté de l’homme éternel), il n’en reconnaissait pas moins que la modernité s’accompagnait d’une perte : celle du monde commun, et conséquemment, celle du politique. Si on peut se montrer un peu sévère envers cette forme de fatalisme historique, il nous permet au moins de ne pas succomber à la nostalgie réactionnaire qui voudrait nous voir restaurer de manière fantasmatique la société d’hier. Nous ne pouvons donc pas renverser la modernité. Mais nous pouvons la contenir et la ralentir, et ainsi, l’humaniser en lui rappelant que l’homme n’est un homme qu’à travers la médiation d’une culture, de limites, qui balisent justement l’exercice de sa liberté. Mais c’est justement la capacité de poser de telles balises qui s’est trouvée politiquement compromise depuis quelques décennies. De ce point de vue, il se pourrait que la « radicalisation » de la modernité à laquelle on nous invite souvent à consentir par fatalisme, masque en fait un projet politique idéologiquement chargé. Autrement dit, cette réflexion en hauteur sur le destin de notre civilisation serait incomplète si elle oubliait de quelle manière la transformation de l’école s’est imposée comme un projet politique à partir des années 1970, quand une partie de la gauche radicale s’est investie dans l’école et l’a considéré comme un lieu privilégié des nouvelles luttes idéologiques à partir desquelles elle entendait transformer son projet politique.

Aux origines du pédagogisme

Nous parlons donc d’une lutte politique. Et nous devons d’un coup rejoindre l’histoire de la gauche radicale, qui fut un acteur idéologique majeur de 1960 à 1980, et qui transforma considérablement, à travers les nombreuses luttes qu’elle menait, la culture politique des sociétés occidentales. On a un peu perdu le souvenir de ces luttes et on les traite à la manière d’un moment de folklore politique auquel la génération 68 se rapporte dans ses moments nostalgiques, mais on se refuse normalement à en faire le point d’origine de plusieurs des changements sociaux qui caractérisent la société contemporaine. À moins qu’on ne présente ces années à la manière du point de départ d’une grande révolution des droits ayant accouché d’une société joyeusement inclusive, et alors il est interdit de remettre en question des évolutions sans se faire immédiatement refouler dans le camp des réactionnaires, qui regroupe en fait tous les conservateurs, de gauche comme de droite, inquiets des dérives de plus en plus nombreuses d’un égalitarisme devenu pathologique. Mais le fait est qu’on peine à penser que sur certaines questions importantes, la gauche radicale de l’époque a gagné sa lutte en entraînant la société à se convertir, du moins en partie, à sa vision du monde (elle a d’autant plus gagné que ses conquêtes ne semblent plus radicales : on se les imagine comme tout autant de progrès d’une démocratie inclusive. Nous ne sommes plus capables de suivre ses traces et de reconnaître l’empreinte qu’elle a laissée sur nos institutions, et sur la philosophie qui les anime. C’est ainsi qu’on comprend mal, en général, les origines du multiculturalisme, du féminisme radical ou de l’écologisme dur, parce qu’on ne s’attarde pas à leur genèse. C’est aussi pour cela qu’on ne comprend pas le pédagogisme, qui est le nom, me semble-t-il, qu’il faut donner à la philosophie de l’éducation et de l’école héritée du progressisme des années 1960.

[...]


Cette critique de la civilisation occidentale portera aussi sur l’école. La critique de la civilisation occidentale portait à conséquence : il ne fallait plus se poser en héritier de celle-ci, mais désormais prendre conscience des horreurs historiques dont elle se serait rendue coupable. Il faut relire les textes de l’époque pour comprendre à quel point une étrange haine de soi s’emparait des consciences. La civilisation occidentale serait génocidaire, impérialiste, raciste, sexiste, homophobe. Elle aurait refoulé l’aspiration de l’homme à l’émancipation à travers des institutions étouffantes. Le progressisme se réinventait : l’homme occidental s’affranchirait en se libérant de ses appartenances. C’est justement parce qu’il cessera peu à peu d’être Occidental qu’il approfondira son expérience d’une humanité plus authentique, plus créatrice, plus libre. Celui qui serait le plus sévère envers la civilisation occidentale serait l’homme le plus évolué, le plus ouvert. La civilisation occidentale commençait l’apprentissage de la haine de soi. On voyait poindre là le phénomène aujourd’hui assimilé à la « mauvaise conscience occidentale ». La seule manière d’être véritablement progressiste consisterait à dynamiter la tradition – ou plus exactement, l’idée même de tradition. Ce ne serait évidemment pas sans conséquence sur la vision de l’éducation dans la mesure où cette civilisation n’était plus à transmettre et perpétuer par l’école. On voyait surtout émerger une nouvelle idée de l’homme, qui devait s’affranchir de la figure de l’héritier – l’héritier serait un homme se laissant définir par d’autres que lui-même, comme s’il inhibait sa propre créativité. Pire : l’héritier serait coupable par association du passé occidental. La répudiation de ce passé et des œuvres l’exemplifiant devenait urgent. Pour le dire à la manière d’une grande figure du progressisme de cette époque, Michel Foucault, il faudrait faire de sa vie une « œuvre d’art », en bricolant soi-même ses appartenances, sans jamais se croire véritablement redevable envers ses prédécesseurs. L’ordre social ne serait pas héritage et création, mais création perpétuelle. Une nouvelle idée de l’enfant accompagnait cette mutation. C’était l’époque de la « libération du désir ». On considérait à cette époque que les différents mécanismes de régulation et de répression du désir étaient coupables de mutiler l’aspiration créatrice de l’être humain [carnet : et d'une certaine mode chic de la pédophilie, voir Daniel Cohn-Bendit]. Le désir devait se libérer des tabous, des inhibitions, des contraintes sociales qui l’amenaient à trouver son contrepoids dans l’idéal du devoir, l’individu ne pouvant vraiment s’accomplir qu’en gardant en tête l’idée qu’il appartient à une collectivité et que cette appartenance n’est pas seulement génératrice de droits mais de devoirs.

De là, la nouvelle pédagogie progressiste misait sur la créativité de l’enfant, vierge de l’empreinte d’une société à la culture toxique. La créativité ne devait pas être contaminée par la société adulte. À terme, laissés à eux-mêmes, les enfants développeraient une société libre, égalitaire, fraternelle, sexuellement émancipée, sans aliénation et malheurs. On se souvient des expériences pédagogiques absolument débiles qui ont été élaborées à partir de cette prémisse. Celle des libres enfants de Summerhill est la plus connue. On voulait libérer les enfants des adultes, comme s’ils représentaient un peuple opprimé appelé à s’émanciper en s’autonomisant. Ils auraient un privilège immense : celui de naître à l’extérieur d’un monde faisandé. Il faudrait les en tenir éloigné. Finalement, nous aurions beaucoup à apprendre d’eux. Leur pureté virginale devrait nous inspirer, nous éduquer. L’enfant désaliéné et libéré de l’aliénation occidentale était la plus belle promesse faite à la gauche radicale. Surtout, le « peuple-enfant » devait désormais s’élever lui-même – avec le soutien minimal de la société adulte qui devait seulement l’accompagner dans sa découverte de lui-même –, ce en quoi on voit les origines de la nouvelle pédagogie où l’enseignant ne transmet plus une matière qui le traverse et qui l’anime, mais doit simplement instrumentaliser certaines connaissances relatives pour favoriser l’autodéveloppement de l’enfant. [Note du carnet: l'enfant n'est plus un élève élevé par les adultes plus haut, mais un apprenant, voire parfois un s'auto-apprenant.] Quoi qu’il en soit, l’école devint rapidement un nouveau théâtre pour les luttes idéologiques en Occident. Il fallait transposer dans ses murs les nouvelles luttes idéologiques et chercher à déconstruire à partir d’elle les mécanismes de reproduction des inégalités sociales et culturelles, en inculquant aux nouvelles générations une nouvelle conscience collective, libérée des assignations identitaires contenues dans la tradition et surtout, affranchies des traditions justifiant l’ordre social. L’école ne devait plus transmettre la société. On lui assignait un nouveau rôle : celui de la déconstruire, dans une pédagogie qui s’ouvrirait aux luttes des « opprimés » en s’appropriant leur vision du monde. Chose certaine, l’école n’était plus l’institution assurant un rapport toujours créateur entre le passé, le présent et l’avenir, et fondée sur le principe de l’héritage : elle devenait le levier par lequel la société pourrait enfin s’extraire de son histoire et se projeter dans l’utopie d’une société page blanche que l’on pourrait reprogrammer dans une matrice exclusivement égalitariste. Autrement dit, la lutte des classes retravaillée à travers le discours de la « lutte à l’exclusion » devait se poursuivre à l’école. Il fallait renverser le rapport pédagogique pour renverser le rapport de classes. La société ne devait plus miser sur l’école pour transmettre un patrimoine de culture et de civilisation. Que non. Parce qu’à travers ce patrimoine de culture, à travers ce savoir officialisé sous le signe des humanités, c’est la domination des forts sur les faibles qui se reproduirait, c’est le monde bourgeois, sexiste et raciste du capitalisme patriarcal qui se reproduirait. Transmettre la culture, c’était finalement reproduire une hégémonie culturelle masquant et justifiant tout à la fois les rapports de domination dont se serait historiquement rendue coupable la civilisation occidentale. Le renversement de mission était complet : l’école, en quelque sorte, devait déculturer les jeunes générations, les étanchéiser par rapport à la société adulte, pour éviter d’être contaminée – voire infectée – par ses préjugés. [Voir Gérard Bouchard au procès de Drummondville et le rôle de l’école d’État pour façonner les enfants loin des préjugés des parents, voir George Leroux au congrès de l'ACFAS : L’État doit viser à déstabiliser les systèmes absolutistes de croyance des parents.]

La querelle du cours classique

Cette grande offensive idéologique contre la conception classique de l’école et de l’éducation a eu lieu dans toutes les sociétés occidentales. Il faut dire qu’au Québec, cette philosophie a trouvé un environnement idéologique d’autant plus favorable que notre société a confondu la modernisation de l’éducation (et la modernisation par l’éducation) avec le saccage de sa propre tradition scolaire, elle aussi exécutée parce qu’entachée, apparemment, par la toxique Grande Noirceur. Et cette querelle est souvent exemplifiée dans la mémoire que nous entretenons du Cour classique, devenu le symbole d’une pédagogie réactionnaire et élitiste dont le Québec se serait heureusement libéré. La querelle du cours classique sert normalement à distinguer entre les modernes et les réactionnaires coupables de nostalgie pour l’ancien régime scolaire québécois. Elle masque pourtant une question plus fondamentale : celle de notre rapport fondamental à l’excellence occidentale, celle de notre appropriation singulière des œuvres fondatrices de notre civilisation. Le collège classique marquait une forme d’excellence à la québécoise, qui nous connectait directement au cœur du patrimoine de civilisation de l’Occident, même s’il s’agissait davantage de sa branche chrétienne que de sa branche moderne. On y lisait les auteurs antiques, bien évidemment, mais on y lisait aussi les grandes figures de la littérature française comme Léon Bloy ou Bernanos, ce qui contribuait heureusement à connecter le français québécois avec les sources les plus vivantes du français tel qu’il se réinvente toujours par la littérature. Évidemment, le cour classique était insuffisamment ouvert aux sciences, à l’économie, aux auteurs modernes, mais il n’en demeurait pas moins porteur d’un idéal : un homme bien formé le serait parce qu’il aurait fréquenté les grandes œuvres capitalisées dans la tradition occidentale. Le collège classique affirmait aussi autre chose : nos élites doivent partager une même culture pour communier dans une même civilisation, quitte à se diviser ensuite sur l’organisation de la cité. Il fallait que l’ingénieur comme l’avocat comme le professeur parlent le même langage lorsqu’ils parlent des choses de la cité – c’était avant l’émergence de l’État gestionnaire qui renonce au politique et confie la gestion des différents segments de la cité à autant d’administration spécialisées à prétention scientifique. Il s’agissait donc de l’institution d’une société qui avec ses mille et un défauts, et surtout, son traditionalisme encalminé, reconnaissait au moins la nécessité que ses élites partagent une même culture générale, qui permette d’affranchir la réflexion sur le bien commun des seules nécessités de la rationalité économique, et qui empêchait la complète technicisation des affaires publiques. Mais dans les années 1960, il n’y avait plus personne [Note du carnet: ils étaient plutôt bâillonnés ou ignorés!] pour défendre cet héritage vite disqualifié, et sauvagement déconstruit. Les innovations pédagogiques « progressistes » avaient donc un boulevard devant elles pour se déployer en trouvant même un relais dans le système d’éducation public qui se construisait et s’installait. Alors qu’ailleurs en Occident, on s’est porté à la défense d’un certain conservatisme scolaire, qui cherchait surtout à conserver l’humanisme pédagogique et un rapport vivant avec la tradition occidentale, au Québec, il n’y avait plus personne, mis à part quelques braves, pour rappeler qu’une société qui se vide de sa propre substance historique ne sera bientôt plus une société mais un rassemblement dispersé d’individus et de clientèles sociales regroupés par un État bureaucratique travaillant à l’indifférenciation de la société qu’il prétend pourtant gouverner. C’est peut-être pour cela que nous sommes allés si loin dans le délire pédagogiste.

Le pédagogisme : nouvelle norme

Je reviens à mon propos plus général. Le pédagogisme transformera l’école en profondeur. Il installera un nouvel idéal pédagogique, où le maître ne serait plus un maître mais seulement l’accompagnateur dévoué d’un enfant se construisant peu à peu, par lui-même, son propre savoir. Mais souvent, paradoxalement, cette pédagogie soi-disant libertaire s’accompagnait d’un système d’endoctrinement assez poussé. Puisqu’on était convaincu que la société des adultes était pourrie par le capitalisme, il fallait endoctriner les enfants aux vertus du marxisme et adapter la pédagogie à la culture spécifique des ouvriers. Il fallait désormais partir du savoir refoulé des dominés. Dans les années 1970, la CEQ s’en était rendue spécialiste. C’était l’époque où on considérait que 2 plus 2 relevait d’une mathématique bourgeoise, abstraite, désincarnée. Il fallait plutôt additionner deux vieux pneus, plus deux vieux pneus. On le voit, la pédagogie du vécu était déjà présente à travers cette guerre ouverte à une bourgeoisie fantasmée. Il fallait partir de l’enfant et ne pas brusquer sa subjectivité en lui imposant de manière autoritaire un savoir extérieur. On voit aussi que les [women, black, sexual] studies universitaires qui prétendent justement institutionnaliser le savoir refoulé des dominés remonte à cette période. Par exemple, on ne voulait plus lire les classiques, parce qu’on se les imaginait seulement comme autant de textes de propagande écrits par des «  hommes blancs morts ». En l’espace de trente ans, cette philosophie de l’éducation (devrait-on dire, de la contre-éducation, ou de la déséducation ?) est parvenue à coloniser mentalement l’éducation québécoise (je note qu’elle est particulièrement présente, même dans sa forme la plus caricaturale, dans les facultés de science de l’éducation). La vision de l’homme qu’elle portait s’est peu à peu imposée dans le système de l’éducation, et dans le système de formation des maîtres, d’autant plus qu’elle semblait conforme à la fois aux exigences de l’État managérial misant sur l’existence d’un homme remplaçable, déraciné, déculturé, disponible pour les innovations sociales radicales portées par l’État thérapeutique, qui veut reconstruire intégralement le lien social au nom de la « lutte contre les discriminations ». Mais il devient aussi, ainsi, parfaitement disponible pour les exigences du capitalisme mondialisé, qui ne connait ni la patrie, ni la famille, ni la communauté, mais qui ne veut voir que des travailleurs parfaitement mobiles, malléables à souhait, selon les exigences de l’entreprise mondialisée[3]. C’est à travers le marché, bien évidemment, que les individus délivrés du lien social peuvent se bricoler une identité labile, sur mesure, qui relève moins des exigences de l’héritage culturel que de celles de l’hybridation obligatoire des cultures. La figure idéalisée du nomade, citoyen du monde, vient recouvrir cette déculturation d’un vernis cosmopolite. Morceau par morceau, puis globalement, cette philosophie de l’éducation s’est imposée au ministère de l’Éducation, d’autant plus qu’elle était légitimée par les nouvelles « sciences de l’éducation », qui ont à mon sens la validité scientifique de la sorcellerie ou du chamanisme. Le pédagogisme devenait peu à peu l’idéologie officielle de l’éducation québécoise. Les mots ne sont plus les mêmes. Mais les structures de pensée sont étonnamment apparentées. Le discours des compétences s’éclaire à cette lumière. On veut certainement outiller l’élève. Mais on ne veut pas préjuger du savoir qu’il doit acquérir – ce serait autoritaire en plus d’être conforme à une vision statique et non dynamique du savoir. D’ailleurs, on répète souvent que l’enfant doit « individualiser » son savoir, le construire personnellement et se méfier d’une vision encyclopédiste de la culture générale. Autrement dit, encore une fois, on refuse de transmettre la culture et on s’imagine que l’élève doit moins hériter d’un monde qu’être capable d’une adaptation absolue au monde dans lequel il vit. Et on présente de telles sottises à la manière de théories pédagogiques scientifiquement validées.

De même, l’école s’est relancée dans la production idéologique de la société. Par exemple, on mise sur l’école pour convertir la société dans son ensemble au catéchisme écologiste. [Note du carnet : féministe, multiculturaliste, homosexualiste, internationaliste, anti-identitaire…] On y accorde désormais plus d’importance au Jour de la terre qu’à la fête nationale. [Voir par exemple Cérémonie, prière, danse sacrées dans une école laïque publique] L’écologisme s’impose de plus en plus comme une religion de substitution au sein de l’école, comme la matrice intégratrice à partir de laquelle on veut programmer certains comportements sociaux et culturels. [voir Spiritualité autochtone, écologie et norme universelle moderne] Il faut dire qu’un certain écologisme mondialisé participe à sa manière à la « mondialisation » du politique, qui entraîne souvent sa dénationalisation. De la même manière, à travers un cours comme Éthique et culture religieuse, on se livre à un véritable endoctrinement multiculturaliste – bien qu’on le maquille sous les traits de l’éducation à la diversité. Le cours ECR est d’ailleurs le représentant exemplaire et caricatural de cette nouvelle pédagogie et de toutes les dérives dont elle s’est rendue coupable, la pire étant évidemment de dénaturer l’école québécoise[4]. Tout cela porte à conséquence dans la manière dont l’école conçoit son rôle. L’école n’est plus en décalage avec l’époque alors qu’elle trouvait traditionnellement dans ce décalage la condition première de sa liberté. Au contraire : elle veut s’investir pleinement dans l’époque et intérioriser toutes ses exigences. Et dans une époque qui croit devoir rompre toutes ses attaches au passé au nom de la vision fantasmée d’une modernité radicalisée, l’école participe pleinement à la mythologie présentiste. L’école ne croit plus que le passé mérite d’être récapitulé à travers un certain patrimoine qu’il faudrait transmettre d’une génération à une autre. Non. Elle croit à l’instant présent. À la création spontanée de soi, à partir de ses propres désirs, à partir de ses préférences. Et elle ne veut plus structurer culturellement ces désirs (elle voudra bien les structurer idéologiquement, mais j’y reviens dans un instant) elle laisse finalement au marché et à l’industrie du divertissement le privilège de fournir ses seuls modèles aux jeunes. Ici encore, la gauche radicale, en déconstruisant toutes les traditions et les cultures, ouvrait un boulevard au capitalisme mondialisé et à la société publicitaire. Faut-il se surprendre alors que les pédagogistes les plus convaincus soient les premiers à s’enthousiasmer pour la robotisation annoncée de la pédagogie, avec l’introduction massive des nouvelles technologies à l’école ? Ce devrait pourtant être une évidence : c’est justement parce que le jeune évolue dans une société qui lui proposera Lady Gaga ou un analphabète à gros biceps de téléréalité comme modèles que l’école doit lui proposer la lecture de Milan Kundera, de Stendhal, de Balzac, qu’elle doit lui raconter l’histoire de la Révolution américaine ou qu’elle doit lui faire voir les grands films de l’histoire du cinéma. C’est justement parce que l’homme ne doit pas se laisser attraper comme un lapin par la publicité ou la technocratie qu’il doit avoir rencontré à l’école une autre image de l’humanité, qui lui fait découvrir la grandeur de l’existence humaine à travers les œuvres qui en témoignant. L’école ne doit pas se coller à notre société et chercher à reproduire dans ses murs ses références, mais se présenter comme un autre monde, comme le lieu où découvrir non pas les « merveilles » de la société actuelle mais justement, les œuvres du passé, celles qui permettent l’éducation authentique de l’esprit, du sentiment et du caractère[5].

L’ensauvagement relatif des enfants

Ce qu’il faut restaurer, c’est notre idée même de l’école. Il fut un temps où elle survivait à travers la présence de vieux professeurs de l’ancien monde. Mais elle ne faisait rien d’autre que survivre. Cette restauration devra aller même au-delà de la seule école, évidemment. Ce sont les fondements de notre culture que l’inversion généralisée des valeurs depuis un demi-siècle a abimés. Et ce sont aussi les assises de la cité qui sont compromises. À la suite d’Alain Finkielkraut, il nous faudra renverser la formule : il ne faut plus seulement se demander quel monde nous laisserons à nos enfants, mais à quels enfants nous laisserons notre monde. Il suffit d’ouvrir les yeux sur ce qui arrive à l’école primaire pour s’inquiéter. Il faudra pourtant remonter jusqu’au primaire. Les enseignants du primaire sont les premiers à constater à quel point les jeunes qui entrent à l’école sont culturellement et socialement abîmés avant même d’avoir écouté leur première leçon. Ce sont eux qui constatent les premiers les conséquences d’une société où la structure parentale est brisée et où la déliquescence des codes culturels les plus fondamentaux brouille les repères moraux élémentaires de l’enfant. On voit ici où mène une société qui a généralisé dans tous les domaines de l’existence et qui a brisé les mécanismes formateurs de la civilisation des enfants, à travers une valorisation immodérée de leur créativité, de leur inventivité, de leur génie, sans comprendre qu’une enfance laissée à elle-même était parfaitement capable de s’ensauvager. Trop souvent, les enfants arrivent en classe incapables de la moindre discipline. Turbulents. Souvent même violents. On a cru mettre un mot sur la chose en parlant de l’intimidation croissante. Mais le phénomène est plus large. L’attention de l’élève est de plus en plus dispersée, comme si la société technologique dans laquelle il baigne dès la naissance l’empêchait de se concentrer dans un cours magistral (ce qui en amène plusieurs à espérer remplacer le professeur par la technologie et les ordinateurs, pour regagner l’attention de l’enfant). Et souvent, ses comportements ne sont plus régulés par une discipline dont il aurait intériorisé les codes. Non. Notre société mise sur la régulation pharmaceutique des émotions. Nous ne savons plus trop comment élever les enfants et nous misons sur le génie des pharmaceutiques pour ne pas en payer les conséquences.

Les témoignages sont nombreux de la part d’enseignants qui font l’expérience de cette jeunesse nouvelle aux émotions régulées de manière pharmaceutique. Témoignages la plupart du temps clandestins, comme s’il y avait ici une vérité officielle qu’il n’était pas permis de transgresser, sans risquer sa carrière, ou son avancement social. Un enfant turbulent peut empêcher une classe de fonctionner. Et c’est ainsi qu’un enseignant enseigne de moins en moins et se laisse avaler par ce que les technocrates appellent la « gestion de classe ». Ne soyons pas surpris qu’autant d’enseignants quittent la profession. Car les enseignants qui voudraient ramener un peu d’ordre dans leur classe ne trouvent pas l’appui nécessaire ni chez les parents, ni chez la direction. Les premiers ne tolèrent pas l’idée qu’on réprimande leur marmaille d’autant plus que séparés, ils sont souvent en concurrence pour gagner son affection. Ils brisent alors la solidarité du monde adulte en contestant ouvertement l’autorité du professeur. L’enfant n’est pas fou. Il comprend dès lors qu’il peut jouer une source d’autorité contre une autre. Les seconds, quant à eux, ont intériorisé les prescriptions pédagogistes en plus de consentir à une vision strictement technocratique de leur rôle, comme s’ils n’étaient plus les gardiens de la personnalité morale de leur établissement. Finalement, ce sont les psychologues et autres intervenants qui prennent le relais dans l’école. Ils vont chercher à comprendre l’enfant. À expliquer ses colères. À théoriser sa turbulence. On oublie simplement que l’autorité dans sa forme la plus classique (et non, l’autorité n’est pas la même chose que la tyrannie ou la dictature, pour ceux qui ne sauraient pas distinguer entre les mots) est indispensable à la formation de la personnalité de l’enfant. Qu’il ne faut pas accueillir un enfant turbulent avec une théorie ouatée mais avec une punition qui lui apprendra à contenir ses pulsions, à les discipliner, et peut-être même, à les canaliser positivement. Autrement dit, on oublie que l’autorité sert aussi, ou devrait servir, à tout le moins, à inculquer des vertus. Il ne faut pas se surprendre que les parents fuient vers l’école privée. [Note du carnet : pour une liberté sous haute surveillance, on perd si facilement son agrément et ses subsides du Monopole] Elle n’est pas exempte des problèmes dont je parle ici. Mais au moins, les parents ont l’impression que l’école n’est pas qu’une entité administrative anonyme et sans âme. Ils ont l’impression qu’il s’agit d’une petite communauté. D’une petite institution. N’est-ce pas une vertu oubliée ? Qu’une institution doit avoir une personnalité, une âme, et que l’homogénéisation bureaucratique de l’école québécoise était une manière de la dévitaliser ? Oui. Une école doit avoir une personnalité.

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Refaire l’école

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Mais j’ai une certitude absolue : il faut cesser de croire que la réparation de l’école sera menée par le ministère qui l’a sabotée. Je ne dis évidemment pas qu’il faut l’abolir. [Note du carnet: dommage !] Mais je dis qu’il faut le soumettre à une critique politique vive et soutenue pour transformer en profondeur la philosophie qui l’anime. De là j’en tire quelques conseils. Il faut d’abord abolir le monopole qu’ont les facultés de science de l’éducation qui ont instauré l’idée que le savoir disciplinaire et la maîtrise d’une matière ne sont pas importants dans l’enseignement, dans la mesure où il faudrait seulement maîtriser une technique pédagogique appropriée pour communiquer n’importe quoi. On le sait, nous ne formons plus des professeurs de français, ou des professeurs d’histoire, mais des « spécialistes » en pédagogie, censés pouvoir transmettre n’importe quel savoir, parce qu’ils maîtrisent, dit-on, les rouages de l’enseignement. Cette robotisation absurde de la pédagogie laisse croire qu’elle est moins un art qu’une science. Surtout, elle laisse croire que bien équipé, un homme peut enseigner n’importe quoi, comme s’il ne devait pas être allumé ou animé par la passion de sa matière. Il faut aussi revaloriser le maître en classe. Et se rappeler que le rapport maître-élève est formateur dans n’importe quelle civilisation qui se tient. Un professeur n’est pas seulement un guichet distributeur de faits et connaissances. C’est un exemple moral. C’est quelqu’un qui transmet à travers son enseignement une certaine idée de l’humanité, ce qu’ont bien compris, d’ailleurs, tous les films qui mettent justement en scène ce rapport créateur de sens. De ce point de vue, il faut libérer le professeur de la tutelle des psychopédagogues et autres spécialistes autoproclamés de la pédagogie qui veulent l’encadrer et toujours lui apprendre, à partir de recherches souvent bidons, les nouvelles techniques d’apprentissage. Il faut, je le disais, revaloriser la langue française et les humanités. Dans le premier cas, parce qu’un homme qui ne maîtrise pas vraiment sa langue n’est pas libre. Il ne peut livrer les nuances de sa pensée, il ne peut verbaliser les émotions qu’il ressent, il se sent souvent prisonnier d’une manière trop limitée de dire le monde. Dans le deuxième cas, il faut rappeler que les humanités portent bien leur nom : elles nous éduquent à l’humanité. À travers la littérature et l’histoire, l’homme fait une expérience profonde de l’humanité : il s’y dépayse et gagne en liberté, en profondeur existentielle. Les humanités fournissent la véritable manière d’une éducation civique authentique, qui sache inscrire l’homme dans un monde qui le précède et qui lui survivra, et dont il aura la responsabilité de prendre soin. [Note du carnet : Si les humanités sont enrichissantes, c'est vrai, suffisent-elles vraiment à fonder la morale ou — horresco referens — la spiritualité ?]

Dans le langage contemporain, cela veut dire que l’autonomisation des compétences par rapport aux connaissances représente une dénaturation quasi criminelle du rapport éducatif. Il faut redonner leur place aux matières fondamentales et les enseigner en les déprenant des tics idéologiques qui les dénaturent trop souvent. Nous devons délivrer les matières de leur biais politiquement correct et restaurer une conception classique du savoir, où la civilisation occidentale ne sera plus un grand méchant à abattre contre laquelle se serait développée la société des droits. J’ajoute que la quête de l’excellence devrait de nouveau s’accoupler à l’étude des classiques et non seulement au label « international », comme on le propose trop souvent dans l’école contemporaine, où on s’imagine que le moindre stage exotique à l’étranger a plus de valeur que l’étude patiente des œuvres. Il faudrait aussi, bien pratiquement, donner plus d’autonomie aux écoles.

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[3] De ce point de vue, un certain patronat passe ses commandes à l’école québécoise : il désire des employés parfaitement bilingues et absolument convertis aux nouvelles technologies. Il les veut délivrés aussi d’attaches culturelles et identitaires fortes qui limiteraient son désir de se recycler intégralement dans les catégories du capitalisme planétaire. Le travailleur idéal du capitalisme contemporain, pour devenir une «ressource humaine» au sens strict, doit rompre les liens humains premiers qui ne relèvent pas directement de la logique du marché. De là, pourrait-on dire, la nécessité de conserver une communauté politique forte et une culture historique structurante, pour éviter une hégémonie destructrice de l’économie sur toutes les sphères de l’existence. Le capitalisme est un excellent système à condition qu’on lui tienne la bride.

[4] Finalement, la gauche radicale est toujours convaincue d’une chose : à défaut de convaincre les parents des vertus de sa société idéale, elle misera sur les enfants. Tout comme hier, on misait sur l’école pour créer une société socialiste, désormais, on mise sur l’école pour créer une société verte et multiculturelle. On mise d’autant plus sur l’école pour le faire qu’on a constaté, depuis quelques décennies, que la société adulte est plus difficilement réformable et s’attache à ses traditions et à sa culture, qu’elle se refuse à voir seulement comme une collection arbitraire de «préjugés».

[5] C’est tout le rapport aux humanités qui s’éclaire autrement, ici. La culture québécoise est abîmée de naissance. On le voit avec notre rapport trouble à la langue française, que nous abâtardissons. Le grand projet de la Révolution tranquille, dans ce qu’elle avait de plus positif, n’était pas que de généraliser l’usage du français au Québec, mais aussi, d’universaliser la condition québécoise à partir de la langue française, ce qui en a amené plusieurs à faire le projet d’une littérature québécoise, d’une dramaturgie québécoise, d’un cinéma québécois, qui ne soient pas enfermés dans la seule reproduction d’une tradition bucolique canadienne-française, mais qui sache nommer le monde à partir d’une langue qu’il ne fallait plus voir comme un fardeau. Si ce projet a engendré de belles œuvres, il a globalement échoué et la langue à partir de laquelle nous devrions entrer dans le monde est trop souvent vécue comme une langue-terroir, inutile au moment de sortir des limites étroites de la tribu. De plus en plus, les Québécois en viennent à croire que l’ouverture au monde ne passera que par l’anglais. Le Québec ne comprend pas qu’il est pourtant porteur d’un trésor : il est directement connecté à la littérature française, certainement un des joyaux de la littérature mondiale et de l’esprit humain. Mais notre rapport trouble à la France nous empêche de réactiver cette part française de notre identité. Il nous reste à nous l’approprier. Mais qu’on ne compte pas sur les idéologues du ministère de l’Éducation pour y parvenir. La pédagogie contemporaine en est une de proximité. Elle ne comprend pas que ce n’est souvent qu’en s’éloignant de soi et de son intimité première qu’on peut ensuite y revenir de manière créatrice.

Voir aussi

Les insuffisances du «bock-cotéisme»

Le constructivisme radical ou comment bâtir une réforme de l'éducation sur du sable

Décentraliser et libéraliser l’école

Le conservatisme est l’essence même de l’éducation

L'école malade du pédagogisme et de l'ethnocentrisme du présent



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