lundi 12 décembre 2022

Pierre Brochand : « Pourquoi l'immigration est l'enjeu central de notre vie publique »

Le 15 novembre, l’ancien patron des services secrets et ambassadeur a prononcé un discours sur l’immigration à l’Amicale gaulliste du Sénat. Un texte exceptionnel que Le Figaro s’est procuré. Pierre Brochand y résume tous les enjeux que fait peser une immigration incontrôlée et propose des solutions.

Pierre Brochand a été directeur général de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) de 2002 à 2008, ainsi qu’ambassadeur de France, notamment, en Hongrie et en Israël. Il est intervenu lors d’un colloque de la Fondation Res Publica sur le thème : « Pour une véritable politique de l’immigration ».

Immigrés qui ont pris un taxi pour arriver à la frontière du Québec en provenance des États-Unis et se disent « réfugiés ». Ils sont acceptés à grands frais par le Canada et le Québec.
 
 AMICALE GAULLISTE DU SÉNAT

Intervention de Monsieur Pierre Brochand, Ambassadeur de France
15 novembre 2022 — Salons de Boffrand de la Présidence du Sénat
Monsieur le Président du Sénat,
Monsieur le Président de l’Amicale gaulliste,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,

Je vous remercie de votre invitation. Elle est un grand honneur, pour quelqu’un qui a commencé à servir la France sous le Général de Gaulle et en garde, évidemment, une admiration inconditionnelle.

Vous m’avez demandé de parler d’immigration et j’ai suggéré qu’on ajoute « enjeu central ». J’aurais pu aussi bien proposer « enjeu principal ».

Pour deux raisons :

  •  D’un côté, j’estime que, de tous les défis qu’affronte notre pays, l’immigration est le seul qui menace la paix civile et, à ce titre, j’y vois un préalable à tous les autres.
  •  D’un autre côté, l’immigration exerce sur l’ensemble de notre vie collective un impact transversal, que je tiens pour globalement négatif.

Mais, faute de temps, je négligerai ce second aspect, qui se traduit concrètement par une tiers-mondisation rampante de la société française et sa régression continue dans des domaines clés, tels que l’éducation, la productivité, les services publics, la sécurité, la civilité, etc.

En d’autres termes, si tout ce qui va mal en France n’est pas la faute de l’immigration, tant s’en faut, elle y participe dans une mesure, à mon avis, très sous-estimée.

Disant cela, je précise aussitôt que mon sujet n’est pas l’immigration en général, laquelle n’est pas du tout un mal en soi, mais bien l’immigration très particulière que nous subissons depuis 50 ans.

Qui suis-je pour sonner le tocsin ?

A priori, je n’y étais pas destiné, puisque j’ai suivi un parcours exclusivement extérieur. Mais, avec le temps, je me suis aperçu, non sans angoisse, que les dures leçons, tirées de mes expériences au-dehors, s’avéraient de plus en plus pertinentes au-dedans, dès lors que, par le jeu de l’immigration, ce « dehors » était devenu notre « dedans ».

Quels sont ces enseignements ou ces vérités pas toujours bonnes à dire ?

D’abord, que le réel du monde n’est ni joli ni joyeux, et qu’il est suicidaire de l’insulter, car, tel un boomerang, il se venge au centuple. Ensuite, que, dans l’action, le pire des péchés est de prendre ses désirs pour des réalités. Que, si le pire n’est pas toujours sûr, il vaut mieux le prévoir pour le prévenir. Que les sociétés « multi » sont toutes vouées à se déchirer. Que nous ne sommes pas plus « malins » que les Libanais ou les Yougoslaves, pour faire « vivre ensemble » des gens qui ne le souhaitent pas.

Et, enfin surtout, que, dans les relations entre groupes humains, personne ne fait de cadeaux à personne, que les conseilleurs — fussent-ils le New York Times ou SOS Méditerranée — ne sont jamais les payeurs et que, si nous ne prenons pas en charge nos intérêts vitaux, nul ne le fera à notre place.

Deux indications complémentaires :

  • D’une part, je ne m’embourberai pas dans les chiffres. Car, avec près d’un demi-million d’entrées annuelles et un taux de 40 % d’enfants de 0 à 4 ans d’origine immigrée, la cause me paraît entendue sur ce plan.
  • D’autre part, il est clair qu’à ce niveau-là, nous ne sommes plus dans l’addition de cas individuels — tous singuliers —, mais bien dans la réactivation de puissantes forces collectives, ancrées dans l’Histoire. Si bien que procéder à des généralisations raisonnables — ce que l’on conspue en général sous le nom d’amalgames — n’a en fait, pour moi, rien de scandaleux.

Ceci posé, je diviserai mon intervention en trois parties :

  1.  D’où venons-nous ?
  2.  Où en sommes-nous ?
  3. Où allons-nous ?