jeudi 4 août 2011

Anders Breivik, fruit de l'éducation multiculturaliste, par lui-même

Marc du foisonnant site Enquête et Débat se penche sur Anders Behring Breivik, le tueur d'Oslo. Il analyse son manifeste de 1500 pages pour voir si ses écrits et revendications sont conformes à ce que les médias progressistes ont voulu retenir de celui-ci.


Rappelons que, selon son avocat Me Lippestad, cité dans le New York Times du 26 juillet 2011, Anders Breivik affirme avoir ciblé le Parti travailliste au pouvoir et non les immigrants musulmans en Norvège.



Il est difficile de faire la part des choses lorsque l’on parle du drame norvégien. La plupart des médias distribuent à tour de bras des dénominations censées définir sa personnalité et, par là, ses motivations. Tantôt taxé de fondamentaliste chrétien , de terroriste solitaire, de néo-nazi, d’individu lié à l’extrême droite, d’islamophobe, ou encore simplement de tueur fou, des récupérations politiques s’en suivent et vont bon train (voir par exemple les déclarations du MRAP dans cet article). Mais que dit-il lui-même sur ses points de vues idéologiques et sur les raisons qui l’ont poussé à agir? Prendre sa parole pour argent comptant n’est certes pas un gage d’objectivité, mais offre néanmoins un contrepoint intéressant aux opinions dominantes.

Les citations utilisées dans cet article proviennent des deux interviews contenues dans le manifeste 2083 : Une déclaration d’indépendance européenne, dont l’une est partiellement retranscrite en anglais dans le World Time. Les pages de références sont données pour ceux qui voudraient les consulter directement.

Anders Breivik se dit-il fondamentaliste chrétien ?

Bien que le serment des Chevaliers du Temple (ordre auquel il appartient depuis 2002) tel qu’il est reproduit dans 2083 contienne une stance ayant trait à la foi chrétienne (p. 973), il décrit son parcours religieux (résumé dans son CV p. 1228) comme suit : « Je suis passé de religieux modéré à agnostique modéré ». Qui plus est, Breivik affirme que la foi chrétienne n’est pas un pré-requis pour faire partie de son ordre : « vous devez être chrétien pratiquant, chrétien agnostique ou chrétien athée (culturellement chrétien). Le facteur culturel est plus important que votre relation à Dieu, Jésus ou le Saint-Esprit ». Ou encore : « Moi-même et bien d’autres n’ont pas forcément de relation directe avec Jésus Christ ou Dieu. Nous croyons néanmoins que le christianisme est une plateforme culturelle, sociale, identitaire et morale. C’est cela qui fait de nous des chrétiens » (pp. 1143-4). Il semble donc que son geste n’ait pas de motifs religieux au sens strict, mais par contre un motif culturel fort. Être chrétien, selon lui, c’est surtout « vouloir protéger l’héritage culturel européen » (p. 1191).



Ezra Levant sur l'insistance de la CBC à rapidement cataloguer Anders Breivik comme un « fondamentaliste chrétien » (à partir de 4 minutes 40)


Se considère-t-il comme terroriste ?

S’il est raisonnable de dire que Breivik est effectivement un terroriste, puisqu’il en utilise les méthodes, il est assez frappant de constater qu’il ne se considère pas comme tel. Un paragraphe de sa propre interview pose la question : « N’êtes-vous pas inquiet du fait que 95 % des Européens vont vous détester ouvertement et vous appeler un terroriste ? » Sa réponse consiste à mettre en avant la portée ‘éducative’ de son geste : « Nous sommes prêts à sacrifier nos vies pour nos frères et sœurs [européens], bien que cela les conduise à nous détester. C’est un peu comme un parent donnant une fessée à son enfant ignorant » (p. 1211). Le vendredi 22 juillet, alors qu’il est sur le point d’aller déposer une bombe de plusieurs centaines de kilos au centre d’Oslo et faire presque une centaine de morts, il écrit dans son journal : « Imaginez que les représentants de l’autorité me rendent visite dans les prochains jours. Ils se feraient sans doute de fausses idées et penseraient que je suis un terroriste, mdr :o ) ».

Se considère-t-il comme un néo-nazi ou affilié à des groupes nationaux-socialistes ?

Clairement pas. À plusieurs reprises il fustige les néo-nazis, les traitants « d’individus égarés » (pp. 1185-6), ou de tenants d’une idéologie morte n’ayant aucun rapport avec le contexte politique actuel (p. 1196). Il exclut une potentielle coopération avec eux dans le futur: « Il sera extrêmement compliqué de coopérer avec un groupe de gens qui perçoivent notre allié le plus proche (les juifs/Israël) comme leurs ennemis jurés. Leur obsession des juifs et leur soutien aux régimes islamiques restreindront sévèrement toute coopération directe. Ils sont aveuglés par leur haine des juifs à tel point qu’ils ne parviennent pas à voir la menace imminente que représente l’islam pour l’Europe ». Il se dit également partisan du sionisme (qui est, selon lui, respectable en tant que «  nationalisme israélien ») (p. 1195) et est en désaccord complet avec les vues négationnistes.

[Notons qu'Anders Breivik a comme personnages historiques favoris Winston Churchill et Max Manus, un célèbre résistant antinazi norvégien. On peut faire mieux pour un nazi. Anders Breivik ne semble pas non plus un nationaliste norvégien étroit : plutôt que de parler en norvégien, il voulait s'adresser à huis clos en anglais — la langue de la globalization — à ses juges norvégiens.]

Est-il lié à l’extrême droite ?

Quoi que l’on entende par le terme « extrême droite », il semble qu’il ait agi seul, et qu’aucun groupuscule ou parti extrémiste n’ait commandité cet attentat; on peut donc dire qu’il n’est ‘lié’ à aucun parti, en tout cas en ce qui concerne cette tuerie. Il déclare à plusieurs reprises dans ses entrevues avoir agi seul (mentionnant notamment les ‘sacrifices’ qu’il a dû faire au niveau social, le poids de la solitude et de sa ‘double vie’). Politiquement, il se déclare « culturellement conservateur, révolutionnaire conservateur, école de pensée de Vienne, économiquement libéral ». Son geste ignoble semble donc bien être le fruit de sa propre initiative. L’organisation à laquelle il dit appartenir, les Chevaliers de l’ordre du Temple, n’a pas prémédité ni organisé l’attaque. Lors de la formation qu’il a suivie avec eux, il dit: « On ne nous a pas demandé d’attaquer des cibles spécifiques, au contraire. On nous a plutôt encouragés à utiliser l’information distribuée pour contribuer à la construction et à l’expansion du ‘mouvement culturel conservateur anti-jihad’ » (p. 1207). Cette information correspond à ce qu’il a déclaré plus tard à la police norvégienne.

Est-il islamophobe ?

En dépit de la malhonnêteté intrinsèque de ce terme et de son implication politique visant à supprimer toute critique de l’islam en Occident (en assimilant cette critique à une forme de racisme [Note du carnet : ou même de maladie, une phobie]), il est clair que Breivik ne porte pas l’islam en grande estime, du moins en tant qu’idéologie politique. Il l’assimile à une forme de fascisme : « Le monde islamique … devrait être complètement isolé et l’islam re-classifié et banni en tant qu’idéologie politique fasciste/impérialiste et génocidaire » (p. 1212). Dans 2083, il explique de manière laborieuse comment l’islam politique peut potentiellement « détruire l’Europe de l’intérieur » ; il définit à ce propos trois phases, basées sur des statistiques démographiques, qui décrivent les trois stades de la guerre civile européenne qui découlera de la prolifération des musulmans en Europe (p. 1182). Il tient donc l’islam pour indirectement responsable de la désintégration de la culture européenne. ‘Indirectement’, car selon lui cette invasion serait la conséquence de la destruction de l’Europe culturelle et intellectuelle voulue et activement poursuivie par les ‘marxistes de la culture’, dont les armes sont entre autres le féminisme et l’immigration de masse. L’islam ne serait en fin de compte qu’une « infection secondaire » (p. 1183) causée par la destruction de la culture européenne. Mais comme il s’agit d’une idéologie « violente et agressive » cherchant la « domination », elle doit être combattue — non pas pour ses vues religieuses, mais à cause de son projet politique. Il encourage ainsi d’autres « minorités non-musulmanes », comme les hindous, les juifs ou les bouddhistes à rejoindre le combat (p. 1213). Breivik n’est donc « islamophobe » que dans la mesure où ce terme fait référence à un projet politique, et non à un dogme religieux ou à une culture en soi.

On peut d’ailleurs mentionner cette citation : « Je ne hais pas les musulmans du tout. Je vois bien qu’il y a des personnes musulmanes fantastiques aujourd’hui en Europe. En fait, j’ai eu plusieurs amis musulmans au cours des années, dont certains que je respecte toujours. Mais cela ne veut pas dire que je vais accepter une présence islamique en Europe. Les individus musulmans qui ne se seront pas assimilés à 100 % d’ici à 2020 [date marquant la fin de la ''phase 1'' de la guerre civile européenne, NdT.] seront déportés aussitôt que nous aurons le pouvoir » (pp. 1210-11).

Se dit-il raciste ?

Au contraire : « De par le fait que j’ai été exposé à des décennies d’endoctrinement multiculturel, je ressens le besoin d’insister sur le fait que je ne suis pas raciste et ne l’ai jamais été », ce qu’il justifie en disant qu’il a eu « plusieurs amis non-norvégiens et musulmans » (p. 1215). En ce qui concerne la ‘diversité’, il dit : « Je suis mû par mon amour de l’Europe, de la culture européenne et de tous les Européens. Cela ne veut pas dire que je m’oppose à la diversité. Mais apprécier la diversité ne signifie pas participer au génocide de sa propre culture et de son peuple en acceptant par exemple la guerre démographique islamique » (p. 1211). Il dit ailleurs : « je me considère comme anti-raciste, anti-fasciste et anti-nazi. C’est pourquoi je m’oppose au communisme culturel et au multiculturalisme européen. Ce sont eux les nazis, les fascistes et les racistes ! J’ai vu beaucoup de racisme en mon temps, mais il était à 90 % dirigé contre les Européens » (p. 1188).

Est-il homophobe ?

« Je n’ai pas de réserves à l’égard [des homosexuels]. Pourquoi me sentirais-je concerné par ce qu’il font dans leur vie privée ? Cependant, je m’oppose à « l’hystérie médiatique gay »… Dans bien des cas, des « groupes victimisés » sont sujets à de la discrimination positive en politique, dans les médias ou dans d’autres secteurs … La glorification de « groupes favorisés » dans la « hiérarchie victimaire » de l’EUSSR a été trop loin » (p. 1188). Encore une fois, il semble que Breivik se sente plus concerné par l’impact de l’homosexualité sur sa culture (via les médias et les politiques de discrimination positive) que par la dimension morale de l’homosexualité. La différence est de taille, puisque du coup l’objet de sa critique n’est pas l’homosexualité comme pratique (comme cela aurait pu être le cas pour un religieux fondamentaliste), mais comme enjeu politique.

Est-il franc-maçon ?

Selon ses interviews, les francs-maçons sont « un groupe d’individus décadents qui n’ont pas la volonté de faire de sacrifice substantiel pour rien ni personne ». Néanmoins, ils sont décrits plus loin comme de « distingués représentants et curateurs (gardiens de notre héritage culturel), et remplissent de ce fait un rôle essentiel… Nous les saluons pour leurs efforts quotidiens, mais nous n’accepterons aucune critique de leur part ni d’aucune autre organisation soi-disant ‘chevaleresque’ » (p. 1193). S’il a apparemment fait partie de cette organisation pendant un temps, il est difficile de croire que cela ait un lien quelconque avec son geste.

Pourquoi cette explosion de violence insensée de la part d’un homme qui ne se dit ni nazi, ni raciste, ni fondamentaliste ? Dans ses entrevues, il parle de l’échec du pacifisme : « Le pacifisme de Gandhi a fonctionné contre les Britanniques en Inde parce que les chrétiens européens ne sont pas des barbares primitifs… Mais le pacifisme ne marche pas du tout contre une entité islamique. Dès que les musulmans sont en majorité (ce qui arrivera à moins de commencer des campagnes de déportation à temps) ils frappent et finissent par massacrer [les non-musulmans], comme l’histoire l’a montré à bien des reprises » (p. 1204). Pour lui, le pacifisme est même une cause des problèmes d’immigration que connaît l’Europe : « Durant les dernières 55 années de dialogue pacifiste, les multiculturalistes ont été autorisés à ouvrir les portes de nos terres ancestrales et de les inonder de 30 millions de musulmans, et ils continuent encore aujourd’hui. Devons-nous continuer le dialogue pendant 40 ans et voir où ça nous mène…? Seul un individu suicidaire accepterait cela ».

Il parle aussi de l’échec des moyens démocratiques pour contrecarrer ce problème : « La lutte démocratique pour sauver l’Europe a été perdue » (p. 1190), ce qui le conduit à affirmer qu’il faut trouver d’autres moyens de résister à l’establishment. De fait, il considère la violence comme inévitable : « Nous utilisons des moyens brutaux parce que nous avons essayé absolument tout le reste. À l’intérieur des frontières du système totalitaire de l’EUSSR, nous n’avons plus le choix » (p. 1211). Il est persuadé qu’une « opération spectaculaire les accablera [les marxistes culturels] et forcera le débat public ».

De ces quelques citations, il apparaît que le choix de la violence est la conséquence d’une succession de facteurs plus ou moins liés : 1) l’échec du pacifisme et de la politique d’apaisement avec la minorité islamique, 2) la faillite de moyens démocratiques pour cesser la stratégie pacifiste et réguler l’immigration et 3) le sentiment d’être face à une entité politique totalitaire et oppressante (l’« EUSSR »), qui n’est sensible qu’à la violence. Cela expliquera en partie (sans bien sûr le justifier) ce choix d’attaquer un bâtiment administratif et une jeunesse socialiste (‘marxiste’), et non pas, par exemple, une mosquée et ses occupants.

Ce triste événement marque plus que jamais l’importance centrale de la liberté d’expression et de pensée, car il semble bien que c’est leur absence (ou le sentiment de leur absence) qui a conduit Breivik vers l’isolement et la conviction qu’il n’y a d’autre choix que de tuer des innocents pour leurs vues politiques.




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