lundi 5 novembre 2012

France — Jugé sexiste, le site Dictionnaire des écoliers est suspendu

Une capture d'écran du site Le dictionnaire des écoliers après sa suspension décidée par le ministère de l'Education nationale, le 5 novembre 2012.

Le Dictionnaire des écoliers reprend « Des milliers de mots pour réussir à l’école », dont les définitions rédigées par des élèves de primaire s’avèrent parfois surprenantes voire choquantes pour certains journalistes et militants. Ainsi, une « femme » pour des enfants du  primaire, « c'est une maman, une mamie ou une jeune fille. Elle peut porter des bijoux, des jupes et des robes. Elle a de la poitrine». Par exemple, « Miss France est la plus belle femme de France ». Le terme « dame », lui, s’utilise plutôt ainsi : « Ce mercredi matin, au supermarché, j'ai croisé une dame très bien habillée. »

Un homme ? « C'est un humain qui a de la barbe ». Tout simplement. La mère ? « C'est une femme qui a des enfants. On l'appelle maman ou mamounette ». Aux yeux des enfants, c'est un mot qu'on utilise dans des phrases telles que « ma mère, c'est aussi la maman de mes frères et sœurs» ou, plus cliché, « ma mère repasse les affaires de toute la famille ». C’est donc sans surprise que l’on découvre l’exemple donné pour le terme « ménage » : « Tous les dimanches, ma maman fait le ménage: elle rend la maison propre. »

Père : « C'est le mari de la maman, sans lui la maman ne pourrait pas avoir d'enfants. C'est le chef de famille parce qu'il protège ses enfants et sa femme. On dit aussi papa ». Cette définition a été rédigée par des élèves d'écoles primaire et maternelle. Elle a été validée par l'Education nationale et figure sur le site internet Dictionnaire des écoliershébergé par le Centre national de la documentation pédagogique (CNDP).

Jusqu'à ce que des utilisateurs militants de Twitter tombent dessus et s'indignent de telles définitions sexistes. À tel point que le ministère de l'Education nationale français a décidé de suspendre le site, lundi 5 novembre.

Capture d'écran avant la fermeture voulue par des militants féministes et de gauche




Acte 1 : le projet est lancé

Le Dictionnaire numérique des écoliers a été lancé en septembre 2010 par la Direction générale de l'enseignement scolaire, dans le cadre du plan national de prévention de l'illettrisme. Il comprend 17  000 définitions écrites et illustrées par des élèves de la grande section [dernière année de la maternelle] au CM2 [5e année du primaire].
« Chaque définition a été validée par trois référents avant d’être publiée », souligne 20 minutes.fr. « Cet outil pédagogique était présenté comme 'le fruit de l'imagination et du travail de milliers d'élèves guidés par leurs maîtres' », ajoute le site d'information. Pourtant, ils ne semblent avoir procédé à aucune modération ni explication.
Acte 2 : des journalistes et militants s'indignent

Ce recueil est jugé scandaleux et inquiétant par un professeur d'histoire-géographie interrogé sur Le Plus, site de l'hebdomadaire de gauche Le Nouvel Obs. Ce « n'est que le reflet du sexisme ordinaire, quotidien, presque banal que l'on rencontre partout et que nos enfants n'ont pu qu'intégrer », souligne de son côté une blogueuse sur le site de gauche Le Plus.  
Surtout, sur les réseaux sociaux, le site a beaucoup fait parler de lui. Sur son compte Twitter, Caroline De Haas, fondatrice d'Osez le féminisme, et membre du cabinet de la ministre des Droits des femmes, a vivement réagi, tout comme d'autres mouvements féministes et d'autres utilisateurs.


Mais le site ne publie pas seulement des définitions jugées sexistes par les féministes et les journalistes de gauche. Dans la rubrique santé, un obèse y est par exemple décrit comme « une personne malade, qui est tellement grosse qu'elle peut à peine marcher ». 
Acte 3 : le site est suspendu jusqu'à nouvel ordre

Finalement, lundi en fin d'après-midi, le ministère de l'Education nationale du gouvernement socialiste a réagi. « Certaines définitions (...) ne sont pas admissibles en l'état » et « même si le problème concerne une minorité de définitions », le ministère « a décidé sans attendre de suspendre la mise en ligne » sur le site internet du CNDP. 
Le site « restera provisoirement fermé » dans l'attente d'une « révision » du processus de validation par le CNDP, et de « la relecture et réécriture » des définitions incriminées. En outre, le ministère a demandé à l'Inspection générale une « évaluation » de « l'ensemble du dispositif ». 




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