Dans un débat enlevé sur l’art (voir la vidéo ci-dessous), le philosophe et critique d’art Yves Michaud déclare que « Versailles n’est pas beau, mais symétrique »...
Si l’art ne se résume pas à la beauté (l’émotion et l’inventivité en font aussi partie), il nous semble que M. Michaud évacue un peu vite la beauté de l’art. Plus grave, selon nous, ce philosophe oppose symétrie et beauté alors qu’il semble que ces deux notions soient fortement liées, peut-être même programmées, câblées au plus profond de nous.
Grâce à de nombreuses expériences astucieuses, les chercheurs ont confirmé plus un visage est symétrique plus il nous est attrayant. C’est une constante à travers toutes les cultures et les époques historiques.
Comme tous les vertébrés, l’homme se développe selon une symétrie bilatérale. Pour la plupart, notre côté droit se développe comme une image miroir de notre côté gauche. Depuis le stade embryonnaire et pendant toute notre croissance et maturité, les mêmes gènes de développement doivent être activés dans les mêmes cellules au même moment et avec la même dose. Dans la situation idéale, tout cela se déroule à l’identique des côtés gauche et droit de nos visages; ce qui aboutit à une parfaite symétrie entre les deux moitiés.
Bien sûr, dans le monde réel, la moindre fluctuation de l’expression des gènes et de l’activité cellulaire conduit à de petites différences entre les deux moitiés de notre visage. Regardez attentivement votre visage dans le miroir (ou le visage d’un ami...). En général, un œil est légèrement plus grand que l’autre. L’œil plus grand est également généralement un peu plus haut que l’autre. Les narines présentent généralement également une asymétrie dans leur taille et leur forme. La hauteur et la taille des oreilles peuvent également être étonnamment asymétriques. Toutes ces microasymétries se traduisent par une note de symétrie générale pour chaque visage humain. Et ces notes de symétrie influencent fortement la façon dont nous évaluons l’attrait d’un visage. En utilisant l’informatique, les chercheurs peuvent transformer un visage que la plupart des gens jugent très attrayant en une image très mal notée, simplement en en modifiant la symétrie. Voir les deux visages ci-dessous.
Mais pourquoi trouvons-nous les visages symétriques plus attrayants ? L’explication scientifique dominante veut que la symétrie indique un développement harmonieux et l’absence de mutations, de faiblesses ou de maladies délétères chez le sujet observé. En effet, si la grande chorégraphie de l’expression des gènes de développement est parfaitement exécutée, le résultat est une symétrie parfaite. En conséquence, la moindre imperfection, la moindre asymétrie indique une sorte de dysfonctionnement, même minime. Si, d’un côté du visage, un gène s’exprime trop ou trop peu, au mauvais endroit, ou un peu tôt ou tard, le tissu prendra une forme légèrement différente de celle de l’autre côté du visage. La plupart de ces petites fluctuations entraînent ce qu’on appelle des microasymétries que nous ne pouvons pas détecter à l’œil nu, mais dont nous pouvons parfois saisir l’effet dans son ensemble.
De plus grandes asymétries peuvent indiquer des problèmes qui se sont produits (ou sont en cours) dans la croissance et le développement de la personne en question. Certains facteurs connus pour affecter la symétrie faciale sont les infections, les inflammations, les réactions allergiques, les blessures, les mutations, le stress chronique, la malnutrition, les dégâts subis par l’ADN, les parasites et les maladies génétiques ou métaboliques. Chacun de ces facteurs peut représenter un désavantage pour la personne et sa progéniture.
L'idée admise en science veut donc que l'homme a appris à valoriser les visages symétriques, car la symétrie serait gage d'une bonne santé du propriétaire. Nous aurions donc une répugnance instinctive pour la laideur, pour les difformités qui trahiraient des défauts de développement, un patrimoine génétique affaibli ou une santé moindre. Valorisation de la symétrie qui s'étend à l'ensemble du corps (qui est bilatéral) chez l'homme et même au-delà en architecture où la symétrique est également gage d'équilibre et de solidité.
Source : Facial attractiveness, Philosophical Transactions of the Royal Society
Notons que par ailleurs, Yves Michaud, vient de faire publier un court essai (Ceci n’est pas une fleur) intéressant sur la commercialisation de l’art et la touristification de Paris. En voici une recension de Charles Jaigu.
Si l’art ne se résume pas à la beauté (l’émotion et l’inventivité en font aussi partie), il nous semble que M. Michaud évacue un peu vite la beauté de l’art. Plus grave, selon nous, ce philosophe oppose symétrie et beauté alors qu’il semble que ces deux notions soient fortement liées, peut-être même programmées, câblées au plus profond de nous.
Grâce à de nombreuses expériences astucieuses, les chercheurs ont confirmé plus un visage est symétrique plus il nous est attrayant. C’est une constante à travers toutes les cultures et les époques historiques.
Comme tous les vertébrés, l’homme se développe selon une symétrie bilatérale. Pour la plupart, notre côté droit se développe comme une image miroir de notre côté gauche. Depuis le stade embryonnaire et pendant toute notre croissance et maturité, les mêmes gènes de développement doivent être activés dans les mêmes cellules au même moment et avec la même dose. Dans la situation idéale, tout cela se déroule à l’identique des côtés gauche et droit de nos visages; ce qui aboutit à une parfaite symétrie entre les deux moitiés.
Bien sûr, dans le monde réel, la moindre fluctuation de l’expression des gènes et de l’activité cellulaire conduit à de petites différences entre les deux moitiés de notre visage. Regardez attentivement votre visage dans le miroir (ou le visage d’un ami...). En général, un œil est légèrement plus grand que l’autre. L’œil plus grand est également généralement un peu plus haut que l’autre. Les narines présentent généralement également une asymétrie dans leur taille et leur forme. La hauteur et la taille des oreilles peuvent également être étonnamment asymétriques. Toutes ces microasymétries se traduisent par une note de symétrie générale pour chaque visage humain. Et ces notes de symétrie influencent fortement la façon dont nous évaluons l’attrait d’un visage. En utilisant l’informatique, les chercheurs peuvent transformer un visage que la plupart des gens jugent très attrayant en une image très mal notée, simplement en en modifiant la symétrie. Voir les deux visages ci-dessous.
Mais pourquoi trouvons-nous les visages symétriques plus attrayants ? L’explication scientifique dominante veut que la symétrie indique un développement harmonieux et l’absence de mutations, de faiblesses ou de maladies délétères chez le sujet observé. En effet, si la grande chorégraphie de l’expression des gènes de développement est parfaitement exécutée, le résultat est une symétrie parfaite. En conséquence, la moindre imperfection, la moindre asymétrie indique une sorte de dysfonctionnement, même minime. Si, d’un côté du visage, un gène s’exprime trop ou trop peu, au mauvais endroit, ou un peu tôt ou tard, le tissu prendra une forme légèrement différente de celle de l’autre côté du visage. La plupart de ces petites fluctuations entraînent ce qu’on appelle des microasymétries que nous ne pouvons pas détecter à l’œil nu, mais dont nous pouvons parfois saisir l’effet dans son ensemble.
De plus grandes asymétries peuvent indiquer des problèmes qui se sont produits (ou sont en cours) dans la croissance et le développement de la personne en question. Certains facteurs connus pour affecter la symétrie faciale sont les infections, les inflammations, les réactions allergiques, les blessures, les mutations, le stress chronique, la malnutrition, les dégâts subis par l’ADN, les parasites et les maladies génétiques ou métaboliques. Chacun de ces facteurs peut représenter un désavantage pour la personne et sa progéniture.
L'idée admise en science veut donc que l'homme a appris à valoriser les visages symétriques, car la symétrie serait gage d'une bonne santé du propriétaire. Nous aurions donc une répugnance instinctive pour la laideur, pour les difformités qui trahiraient des défauts de développement, un patrimoine génétique affaibli ou une santé moindre. Valorisation de la symétrie qui s'étend à l'ensemble du corps (qui est bilatéral) chez l'homme et même au-delà en architecture où la symétrique est également gage d'équilibre et de solidité.
Source : Facial attractiveness, Philosophical Transactions of the Royal Society
Notons que par ailleurs, Yves Michaud, vient de faire publier un court essai (Ceci n’est pas une fleur) intéressant sur la commercialisation de l’art et la touristification de Paris. En voici une recension de Charles Jaigu.