vendredi 2 septembre 2022

Rentrée scolaire à Marioupol, lent retour à la normalité

Mise à jour du 12 septembre



 Billet originel du 2 septembre

Le 1er septembre 2022, des milliers d’enfants de Marioupol de la République Populaire de Donetsk (RPD), république autonomiste du Donbass, sont retournés sur les bancs de l’école. Une rentrée scolaire qui symbolise, autant que la reconstruction de la ville, un retour progressif à la normale pour les habitants de Marioupol.

L’école n° 4, où Christelle Néant s’est rendue pour assister à la rentrée des classes, se trouve dans le nord de Marioupol. À son arrivée, elle a constaté que l’école était protégée par des soldats armés et de sévères mesures de sécurité avaient été prises pour empêcher tout attentat terroriste de la part de l’Ukraine contre les enfants. C’est pourquoi il n’y a pas eu de cérémonie de la première sonnerie devant l’école, car cela aurait été trop risqué.

Voir le reportage filmé sur place :

L’école a subi des bombardements lors de la bataille de Marioupol, mais les dégâts n’étaient heureusement pas trop importants, et elle a donc pu être réparée durant l’été. L’obus qui a frappé le toit de l’école n’a pas explosé, ce qui a évité une destruction importante du dernier étage, et les fenêtres soufflées par les bombardements ont été remplacées. Irina, la directrice adjointe a expliqué que les habitants du quartier qui s’étaient réfugiés dans le sous-sol de l’école ont empêché toute intrusion dans l’établissement scolaire, ce qui a évité au bâtiment d’être saccagé.

Beaucoup d’autres écoles aux alentours n’ont pas eu cette chance, et sont toujours en réparation. Aussi les centaines enfants qui se sont présentées à l’école n° 4 de Marioupol pour cette nouvelle rentrée scolaire viennent de plusieurs écoles différentes. Malgré cela l’école n’était qu’à un tiers de son taux d’occupation antérieur à l’opération spéciale.

La plupart des élèves étaient à Marioupol pendant les combats, et Irina nous explique avoir vu une nette différence entre leur retour en cours au mois de mai, où ils étaient marqués par ce qu’ils avaient vécu, et cette rentrée-ci. Après des discussions avec la psychologue de l’école et des vacances en Russie, beaucoup d’élèves se sentent mieux et peuvent de nouveau étudier sans que la bataille de Marioupol ne hante leurs journées.


Réparations en cours à l'école n° 65 de Marioupol (mi-août 2022)


Saint-Pétersbourg a aidé à la rénovation d'écoles, à l'équipement et à la fourniture de matériel scolaire aligné sur le programme scolaire russe. Les écoles sont modernes et lumineuses selon les personnes interrogées. Reportages du 1er septembre aux écoles n° 65, n° 38 et n° 7. Contents de pouvoir à nouveau étudier en russe. La fin de la vidéo rapporte l'inauguration d'un hyper-marché qui va contribuer à mieux desservir la population marioupolitaine et à abaisser les prix pratiqués dans la ville.
 
 
D’ailleurs, le fait qu’ils soient revenus de ces vacances en Russie est en soi une démystification totale de la propagande ukrainienne qui prétend que les habitants (dont les enfants) de Marioupol ont été « déportés » de force dans le pays voisin. Les enfants de la ville sont tout simplement partis en vacances et ils en sont revenus heureux de ce qu’ils y ont vu et vécu.

Irina a également raconté comment les soldats ukrainiens (les forces armées ukrainiennes, les FAU) ont tiré sur les voitures qui tentaient de fuir la ville, et comment ils ont tué les habitants qui refusaient de leur donner de leur nourriture.

Les élèves interrogés semblent heureux que les cours soient désormais en russe, leur langue maternelle. Plusieurs songent à poursuivre leurs études dans des universités en Russie, ce qui serait prestigieux.


Nouveaux blocs d'appartements construits à Marioupol depuis la prise de la ville à la fin mars 2022


Vue aérienne de ce même quartier bâti en quelque quatre mois

 

Pour autant comme l’ont souligné Irina et Alexandra, une élève de 11e année qui aide la direction de l’école à organiser la rentrée scolaire, les élèves de Marioupol continueront d’apprendre la langue et la culture ukrainiennes, qui font partie de leur patrimoine.

Les enfants de Marioupol ont pu faire leur rentrée scolaire comme tous les enfants de Russie et du Donbass, avec leurs uniformes, les bouquets de fleurs pour la maîtresse, et quelques cadeaux (cartables et livres de contes de Pouchkine) offerts par différentes organisations russes. 
 

Voir aussi 

Pologne — Des classes pour élèves ukrainiens en russe 

Marioupol, les élèves retournent en classe [en mai] (vidéos), heureux de pouvoir étudier en russe

Moldavie — 88 % des réfugiés ukrainiens choisissent le russe comme langue d’enseignement, 6 % l’ukrainien

Lettonie — Vers l’élimination de l’enseignement en russe en 2025 

Ukraine — Sites internet, réseaux sociaux, interfaces de logiciel devront être traduits en ukrainien et cette version doit être présentée en premier

Budapest bloque adhésion de l’Ukraine à l’OTAN en raison des lois linguistiques de l’Ukraine (2017)  

Des élèves réfugiés ukrainiens étudieraient en anglais au Québec malgré la loi 101 (et la loi 96)

« J’ai vu des crimes abominables » commis par les soldats ukrainiens

Adaptation fulgurante des élèves russophones [d’Ukraine] en France, ils y apprennent vite le français 

Ukraine [Marioupol en fin mars] — vidéos en français ou sous-titrées en français 

Montréal fait fuir les professeurs : démissions sur l'île ont augmenté de 53 % en trois ans

Montréal fait fuir les professeurs : c’est du moins ce que laisse penser un article de La Presse, qui rapporte que les démissions sur l'île ont augmenté de 53% en trois ans.

Photo du site Une école montréalaise pour tous

 
En fait, 1000 d’entre eux ont quitté l'école où ils enseignaient au cours de ces trois dernières années.

Ils étaient 259 à avoir démissionné en 2019-2020, puis 397 en l’année suivante.

Au seul Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM), 103 enseignants (les postes permanents, à temps partiel et les suppléants) ont remis leur démission depuis le 1er juillet, de souligner la journaliste Marie-Ève Morasse.

En raison de la pénurie d’enseignants un peu partout au Québec, les professeurs ont le luxe de choisir leur lieu de travail. Ainsi, plusieurs ont récemment opté pour une autre ville.

Lors d'un entretien avec l'animateur Paul Arcand, Catherine Beauvais explique pourquoi tant de professeurs sont dorénavant sous d'autres cieux.

Certains délaissent la profession, mais plusieurs partent simplement de Montréal pour diverses raisons. D’autres quittent uniquement le Centre de services scolaire de Montréal. Il y a quelques années, une pénurie existait à Montréal, mais pas ailleurs. Les enseignements étaient en quelque sorte pris au CSSDM. Désormais, le marché a changé. Il y a beaucoup de défis associés à l’école montréalaise. Des établissements tombent en ruines. En plus, on n’a pas nécessairement les outils pour relever ces défis, tout comme on n’a pas personnel nécessaire. Plus les profs s’en vont, plus la pression est grande sur ceux qui restent à Montréal.

— Catherine Beauvais


En finir avec le masochisme occidental

Un texte d’Eugénie Bastié dans le Figaro. Abattre l’Occident , le dernier essai du Britannique Douglas Murray, est traduit en français. Salutaire et décapant.

Stanford, 1987. Le révérend Jesse Jackson accompagné de 500 étudiants protestent contre l’introduction de cours de « culture occidentale » à l’université. Ils manifestent en criant : « Hey hey, ho ho, West Civ has got to go » (« la civilisation occidentale doit partir »). Trente-cinq ans plus tard, ce cri de guerre est entonné au cœur même de nos institutions : des multinationales aux campus, en passant par les administrations, les écoles, les cinémas et les livres d’histoire. Les fondements de notre civilisation, jugée intrinsèquement raciste, sont expurgés, remplacés, annulés. La honte d’être blanc a fait tache d’huile. Celle-ci a pris feu en juin 2020, quand le monde occidental, rendu névrotique par des mois de pandémie a entamé une transe antiraciste à la suite de la mort de George Floyd. L’effroyable asphyxie de ce Noir américain par un policier blanc devenant l’image même de nos mœurs. C’est ce cancer idéologique qu’ausculte avec minutie l’essayiste britannique Douglas Murray dans son livre Abattre l’occident traduit pour la première fois aux Éditions de l’artilleur.

Déjà quelques lecteurs haussent les épaules : depuis quelques mois, on ne compte plus les livres écrits sur le phénomène woke et ses avatars tant et si bien qu’on pourrait se dire que les conservateurs montent en épingle ce qui ne serait qu’un mouvement minoritaire sans conséquences. Tous ceux qui jugent ces craintes exagérées doivent lire ce livre fouillé, moins idéologique que journalistique — dans la veine de l’essai anglo-saxon. C’est bien une menace majeure qui pèse sur l’occident d’autant plus dangereuse qu’elle n’est pas exogène, comme la guerre où l’épidémie, mais intérieure, minant les fondements même de nos sociétés en y semant la haine et la division.


C’est sans doute le meilleur essai sur la question du masochisme occidental depuis Le Sanglot de l’homme blanc de Pascal Bruckner.
Parce qu’il appartient au monde anglo-saxon où elle se déploie avec le plus de furie, Murray passe en revue les manifestations les plus extraordinaires de cette étrange maladie : du projet 1619 lancé par le New York Times visant à réécrire l’histoire des États-Unis en la faisant débuter au début de l’esclavage, au restaurant Whistler de Londres menacé de fermeture en raison d’une fresque jugée raciste, en passant par les innombrables statues déboulonnées dans les capitales occidentales, ses exemples sont légion. On comprend au fil des pages que c’est désormais la méfiance envers les Blancs qui est institutionnalisée et systémique, enseignée dans les écoles, appliquée dans les administrations (des ateliers d’intersectionnalité sont même dispensés au FBI !), promue par la publicité et dans les dessins animés.

Douglas Murray excelle dans la mise en exergue des paradoxes de cet antiracisme devenu hystérique alors même qu’il n’a plus de raison d’être. « Au moment même où le racisme n’a jamais été davantage frappé d’opprobre et où il est devenu parfaitement inacceptable tant sur le plan social que sur le plan politique, il est présenté comme omnipotent et on insiste sur la nécessité absolue de le repousser. » La traite occidentale est enseignée à tous les Blancs dès le primaire, mais la traite orientale, au moins aussi violente est soigneusement occultée. Il est impossible de dire la moindre généralité sur un peuple non occidental sans se voir accusé d’odieuse essentialisation, mais on peut à loisir se moquer de la « fragilité blanche » ou de la « rage blanche ». À Londres on tague « raciste » sur la statue de Churchill, le plus grand antifasciste du XXe siècle, mais on continue de se recueillir sur la tombe de Karl Marx, dont les écrits ont inspiré le totalitarisme et a tenu des propos très peu woke sur les Noirs et les Juifs. Tout ce qui a grandi la civilisation occidentale doit être abîmé, tout ce qui l’a fustigé doit être encensé.

On pourrait rire de ces calembredaines et les juger inoffensives. Pourtant, argumente Murray, cette haine de soi typiquement occidentale est dangereuse, non seulement parce qu’elle mine nos sociétés, mais parce qu’elle est utilisée comme une arme par nos ennemis. Ainsi la Chine, superpuissance qui ne connaît pas la repentance mémorielle, ne se prive pas de fustiger régulièrement les États-Unis pour leur non-respect des droits de l’homme en mettant en avant la question des « violences policières » pour dénier aux institutions internationales tout droit de regard sur son propre fonctionnement dictatorial.

Reste une question. Pourquoi des théories aussi masochistes, mensongères, puériles et destructrices se sont répandues avec tant de rapidité ? Douglas Murray nous éclaire sur les raisons de ce succès. D’abord, elles prennent la place d’un vide. « Alors que l’ensemble des autres grands récits se sont effondrés, la religion de l’antiracisme fournit un but et un sens à la vie. » Ensuite, parce que ce masochisme plonge ses racines dans une tradition occidentale. Le goût de l’ailleurs, l’exotisme, la tendance à mal s’aimer, à se mépriser, à préférer le barbare au péquin a la faveur de nos intellectuels de Montaigne à Rousseau. Même Voltaire trouvait des qualités à la religion musulmane tandis qu’il vomissait celle de ses pères. L’antiracisme religieux ne fait que radicaliser cette veine. Enfin, ces théories de la déconstruction séduisent par leur facilité. Il est en effet infiniment plus facile de détruire que de créer, de déboulonner que de forger, de critiquer que de fonder, de pointer les défauts du passé que fabriquer quelque chose à transmettre. On touche là au point nodal de ce grand mouvement qui affecte notre héritage ; l’oubli d’une qualité fondatrice de toute civilisation : la gratitude. Et Murray de citer les derniers mots du philosophe conservateur Roger Scruton, dont il est un des disciples : « S’approcher de la mort vous permet de savoir ce que la vie et la gratitude signifient. »

Il nous faudrait renouer avec ce sentiment de reconnaissance, qui n’est pas une rustre fierté, mais l’humilité de reconnaître que nous sommes les héritiers d’une civilisation qui n’a pas seulement créé des chefs-d’œuvre que nous sommes incapables d’égaler, mais aussi inventé des progrès scientifiques stupéfiants, mis en œuvre un confort et un système politique fondé sur la liberté et le droit que le monde entier nous envie. D’ailleurs, comme le rappelle Murray, les bateaux de migrants ne vont que dans une seule direction : l’occident.

Abattre l’Occident,
Comment l’antiracisme est devenu une arme de destruction massive
par Douglas Murray,
paru chez L’Artilleur,
à Paris,
le 24 août 2022,
432 pp,
ISBN-10 : 2810011214
ISBN-13 : 978-2810011216