lundi 19 juin 2017

Natalité baisse au Québec depuis 7 ans, mais CS de Montréal devrait accueillir 5000 élèves de plus d’ici cinq ans

Depuis sept ans d’affilée, la natalité baisse constamment au Québec (le premier trimestre 2017 est lui-même en baisse par rapport à l’année passée) et cependant les journaux annoncent que La Commission scolaire de Montréal (CSDM) prévoit des problèmes d’infrastructures en 2021-2022. Les écoles primaires de Montréal dépasseront jusqu’à deux fois leur capacité d’accueil en élèves dans cinq ans si rien ne change, met en garde un rapport de la Commission scolaire de Montréal.


En 2021-2022, il y aura 5000 élèves de plus dans les écoles montréalaises, soit 1000 élèves de plus par année, selon les calculs de la CSDM dont Le Journal de Montréal a obtenu copie. Ces chiffres s’appuient sur le nombre d’élèves et d’enfants de 0 à 4 ans qui vivent déjà dans le quartier. Au Québec, le nombre d’enfants nés pendant les cinq dernières années a baissé. Selon les données provisoires de l’Institut de la statistique du Québec, 86 400 bébés sont nés au Québec en 2016 soit 2 600 de moins qu’en 2012. À Montréal, le nombre des naissances à également baissé de 500 bébés depuis 2012, passant de 23 571 en 2012 à 23 026 en 2016.

Ni la construction de nouveaux ensembles résidentiels ni l’arrivée de NOUVEAUX immigrants ne sont prises en compte dans ces calculs de manque de place.

Les articles des gros médias n’abordent pas la question, mais il semble que ces élèves supplémentaires s’expliqueraient par une immigration récente concentrée à Montréal.

Catherine Renaud
Notons qu’à ces difficultés d’infrastructures s’ajoutent celles du recrutement dans un milieu montréalais qui attire peu. Catherine Renaud, présidente du syndicat qui représente les enseignants des écoles publiques de la Commission scolaire de Montréal, l’Alliance des professeures et professeurs de Montréal, souligne qu’« il y a une pénurie de suppléants. Il faut mettre en place des conditions de recrutement intéressantes et aussi des conditions de rétention. Un enseignant sur quatre, en début de carrière, choisit de quitter »
.
Selon le syndicat, les conditions particulières à la CSDM, comme le fait qu’un élève sur cinq est en difficulté, qu’un sur deux n’a pas le français comme langue maternelle, ainsi que la vétusté des immeubles, ne créent pas un contexte particulièrement attrayant pour attirer du personnel. D’autant que les suppléants peuvent figurer aussi sur d’autres listes de rappel dans d’autres commissions scolaires.

La CSDM tient à préciser qu’elle n’est pas la seule commission scolaire à connaître des problèmes de recrutement. Cela dit, il y a quelques mois, elle indiquait faire face au pire épisode de manque de suppléants des cinq dernières années. Des chiffres que nous avons obtenus en témoignent. Le nombre de remplacements d’urgence a plus que doublé entre l’année dernière et l’année en cours.

Remplacements d’urgence très coûteux

Les coûts pour le remplacement d’urgence, qui sont assumés par les écoles (en réalité en fin de compte par les contribuables québécois...), sont passés de près de 444 000 $ en 2015-2016 à près de 860 000 $ pour l’année en cours qui n’est pas encore terminée. Leurs coûts sont plus élevés que les coûts de suppléance.

Coûts de remplacement — suppléance comparativement au remplacement d’urgence

Enseignants de la banque de suppléants : 214 $ par jour
Enseignant régulier qui agit à titre de remplaçant : 339 $ par jour

Parmi les causes expliquant de manque de suppléants :
  • un ajout de 1000 nouveaux élèves par année ; (mais il naît moins d’enfants à Montréal depuis 7 ans...)
  • l’augmentation du nombre de classes de maternelle 4 ans (et leur nombre augmentera encore, malgré leur efficacité très relative) ;
  • un nombre plus important de congés parentaux chez les enseignants ;
  • les sommes additionnelles de Québec pour l’embauche d’orthopédagogues, ce qui a aussi contribué à drainer la banque de suppléants.

Dans une entrevue accordée en février dernier, le directeur général adjoint de la CSDM, Jean Ouimet, évoquait aussi les problèmes de congestion routière, bien présents en raison des grands chantiers, pour expliquer la situation. « Le facteur le plus important, c’est qu’actuellement on a de la difficulté à être compétitif avec l’ensemble des commissions scolaires environnantes. Le problème de circulation, c’est souvent mentionné de la part des nouveaux », précise Jean Ouimet. Les enseignants n’habiteraient donc pas assez Montréal, ville si riche de sa diversité multiculturelle, pardon interculturelle.

Campagne d’embauche

L’hiver dernier, la CSDM a lancé une campagne de recrutement. Elle ouvre maintenant davantage ses portes, par exemple, aux retraités, aux étudiants de première année du baccalauréat en enseignement de même qu’à ceux qui ne sont pas inscrits à un tel programme, comme en témoignent ces chiffres obtenus grâce à la Loi sur l’accès aux documents.

Au total, la CSDM dit avoir recruté quelque 780 nouveaux enseignants depuis le 1er juillet dernier.

La CSDM a aussi mis en place d’autres mesures comme :
  • concentrer des formations du personnel enseignant lors des périodes de l’année durant lesquelles les étudiants en enseignement sont disponibles ;
  • limiter les autorisations de congé sans solde ;
  • refuse d’accorder aux enseignants des absences non rémunérées.
Dépenses en suppléance

Les dépenses annuelles de suppléance à la CSDM oscillent autour de 20 millions de dollars par année depuis 2013, soit de 2 à 6 millions de dollars de moins que le financement reçu par Québec.

Bandeau du site de la Commission scolaire de Montréal


Coût par élève à Montréal comparé aux banlieues de Montréal ?

Il serait intéressant de connaître le coût de chaque élève dans la CSDM quand on considère les frais d’infrastructures, de recrutement permanent, de suppléance et de remplacement d’urgence, le nombre de classes de maternelle à 4 ans, l’aide aux devoirs, à l’achat de livres et à l’aide alimentaire liés à son contexte particulier. Ce coût est-il supérieur à ceux des élèves dans les commissions scolaires des banlieues ?

Sources : Institut de la statistique du Québec, Journal de Montréal, Radio-Canada

Les habitants de Montréal à l'arrivée des Français parlaient-ils agnier (mohawk) ?

Article d'Alain Dubuc sur une tradition politiquement correcte récente. Notons qu'en Nouvelle-France, les Mohawks (un terme algonquin signifiant « mangeurs d'hommes » ou « Gens de l'ours » repris par les Anglais) étaient appelés Agniers par les Français.

Au Canada anglais, surtout dans l’Ouest, il y a maintenant une tradition bien établie. Dans les événements publics, on commence les discours en saluant les Premières Nations qui occupaient les terres sur lesquelles on se trouve.

Je n’ai donc pas été étonné, la semaine dernière, lors d’un séjour à Saskatoon, d’entendre le jeune maire de la ville, Charlie Clark, commencer son allocution par une salutation aux Dakotas et aux nations signataires du traité no 6. Mais une question m’est venue à l’esprit. Qu’est-ce qu’on ferait, à Montréal, si l’on adoptait cette pratique ?

Marc Miller, le député fédéral de Ville-Marie–Le Sud-Ouest–Île-des-Sœurs a donné une réponse la semaine dernière lorsqu’il a fait une intervention en [agnier] (langue mohawk) à la Chambre des communes. Son discours a fait le tour du monde et lui a valu un moment de célébrité dans les médias sociaux.

« C’est la langue du territoire que je représente, le centre-ville de Montréal, la terre traditionnelle mohawk », a-t-il expliqué en entrevue à La Presse.

[...] Mais la réponse n’est pas vraiment exacte. Ce que nous dit l’histoire, c’est que lorsque Paul de Chomedey de Maisonneuve et Jeanne-Mance ont fondé la ville, personne n’habitait sur l’île. Et que, pour définir Montréal comme une terre traditionnelle mohawk, il faut pas mal étirer l’élastique.

Il y avait eu un peuplement autochtone sur l’île. Quand Jacques Cartier a remonté le Saint-Laurent, en 1535, il a visité un très gros village, composé de 50 maisons longues, comptant de 2000 à 3000 âmes, que ses habitants appelaient Hochelaga. Il était situé, selon le compte rendu de l’explorateur, Brief récit de la navigation faicte es ysles de Canada, au pied d’une montagne qu’il baptisa mont Royal, en l’honneur de François 1er. Il y a un débat sur le site exact d’Hochelaga. Si Cartier a accosté l’île en passant par le Saint-Laurent, ce serait près de l’Université McGill. S’il est plutôt passé par la rivière des Prairies, ce serait à Outremont.

Les Hochelaguiens, selon les historiens, faisaient partie d’un peuple que l’on a baptisé les Iroquoiens du Saint-Laurent, appartenant au même groupe linguistique et culturel que les Hurons-Wendats, ou les diverses nations iroquoises, comme les Mohawks. Comme ceux-ci, ils étaient semi-sédentaires, cultivaient la terre, habitaient dans des maisons longues. Les habitants de Stadaconé, sur le site de Québec, appartenaient à ce même peuple. [Note : On ne connaît la langue des Iroquoiens du Saint-Laurent que par quelque 200 mots sommairement transcrits par Cartier.]

Mais quand Champlain est arrivé, en 1608, les Iroquoiens du Saint-Laurent avaient complètement disparu, tant à Québec qu’à Montréal.

Et quand Jeanne-Mance et Paul de Chomedey de Maisonneuve se sont établis à Montréal, il n’y avait pas de peuplement autochtone sur l’île.

Les [Agniers/]Mohawks, quant à eux, habitaient beaucoup plus bas, dans l’État de New York, et n’avaient pas d’établissements sur le territoire actuel du Québec. Ils remontaient le lac Champlain et le fleuve, pour la pêche, la chasse et le commerce. Mais ils n’étaient pas les seuls. Les Algonquins aussi sillonnaient le Saint-Laurent.

Les Mohawks, qui étaient dans un processus de conquête et d’expansion territoriale, voyaient certainement le territoire montréalais comme faisant partie de leur zone d’influence, même s’ils ne l’habitaient pas. C’est dans cette logique que le député décrit Montréal comme leur territoire traditionnel, tout comme le fait l’Université McGill sur son site internet. Mais ce n’est pas le point de vue d’autres nations autochtones qui occupaient aussi ce territoire. Et cela ne correspond pas non plus au test de la Cour suprême pour reconnaître des droits, celui de l’avoir occupé depuis des temps immémoriaux. Les Mohawks n’occupaient pas ce territoire, et leur présence ne remontait pas à des temps immémoriaux, puisque les Hochelaguiens les avaient précédés.

L’implantation des Mohawks au Québec est plus tardive. Après la paix avec les Français, attirés par le commerce, ou encore [en se réfugiant] dans les missions des jésuites [Note du carnet: pour échapper à leur compatriotes qui les persécutaient parce qu'ils s'étaient convertis au catholicisme], comme à Kahnawake. [Note: Le village agnier de Kahnawake se déplace en son lieu actuel en 1716. La mission s'appelle Saint-Louis du Sault. C'est le village d'origine du trappeur Ignace Francis La Mousse qui aida les jésuites belges, parmi lesquels le R.P. de Smet, à explorer les Montagnes Rocheuses au xixe siècle. Au xixe siècle, certains habitants de Kahnawake sont unilingues iroquois alors que la plupart parlent aussi le français et portent des noms iroquois agencés à des noms de famille français tels que de Lorimier, Giasson, Beauvais, Monique et Delisle. Aujourd'hui, la langue anglaise leur est plus familière.] D’autres, fidèles aux Britanniques, les ont rejoints après l’indépendance des États-Unis. Les litiges territoriaux entre les Mohawks de Kahnawake et les gouvernements portent d’ailleurs sur les terres de la seigneurie du Sault-Saint-Louis qui leur avaient été destinées.

On assiste au même phénomène à Québec où les Hurons-Wendats, originaires de la baie Géorgienne en Ontario, plus loin que Toronto, décimés par les maladies européennes et les guerres avec les Iroquois, ont été rapatriés [dans l'Est de la] Nouvelle-France par les missionnaires, ce qui en fait en quelque sorte des réfugiés.

Le fait de dire que Montréal n’est pas un territoire traditionnel mohawk n’enlève rien aux obligations que nous devons avoir à leur égard. Ce n’est pas parce qu’une Première Nation n’a pas occupé un territoire depuis des temps immémoriaux, comme le veut la formule, qu’elle est privée de droits, qu’on peut faire abstraction de leur histoire, marquée par des guerres, des déplacements, les effets de la conquête européenne, la dépossession et la discrimination dont ils ont été l’objet.

Mais, pour en revenir à mon point de départ, comment adapter à Montréal la tradition canadienne de reconnaissance des Premières Nations ? Le mieux, ce serait de saluer les premiers habitants de ce lieu, les Hochelaguiens.



Le gouvernement veut-il à nouveau réinventer l'école qu'il imposera à tous ?

Billet de SIMON-PIERRE SAVARD-TREMBLAY :

« Réinventer l’école », « école du futur », « école innovante » : tous les termes sont bons pour désigner la nécessité de mettre au rencart l’enseignement « traditionnel » et ses méthodes, soudainement devenus coupables de tous les maux.

En effet, on apprenait récemment que le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, a confié aux « vedettes » Pierre Lavoie, Ricardo Larrivée et Pierre Thibault le mandat (avec un budget de 5 millions de dollars sur ans) de « concevoir un nouveau milieu de vie qui donne le goût aux enfants d’apprendre ». Le premier est un sportif reconnu, le second un cuisinier à la tête d’un véritable empire médiatique, et le troisième un architecte. On oublie au passage de demander leur avis aux principaux concernés : les profs. [Note du carnet : Et les parents..., mais bon les organisations parentales ne sont pas représentatives, et la meilleure façon de demander l’avis des parents c’est de libérer l’école et de les laisser choisir l’école de leur choix (publique, privée, école du futur, école à l,ancienne, sans pénalité financière.]

Et ce n’est pas tout. Comme nous le révélait aujourd’hui Isabelle Ducas dans La Presse, la Commission scolaire des Rives-du-Saguenay mettra sur pied, dès la rentrée scolaire, un nouveau type d’école. Citons l’article :

Entrer dans une forêt de bouleaux, puis emprunter un pont couvert pour aboutir à New York [On a les mythes fondateurs qu’on peut...]. Sortir de la bibliothèque de Harry Potter par la glissoire menant au gymnase. Lire en se balançant dans une bulle de plexiglas suspendue au plafond ou blotti sur des coussins au coin du feu. Cuisiner sous la supervision d’un grand chef. Cultiver des légumes dans la serre et les vendre au magasin général. Visiter un musée parisien grâce à la réalité virtuelle. À la prochaine rentrée, les élèves de l’école Au Millénaire, à La Baie, pourront faire tout ça pendant leurs journées de classe. [...] Deux autres particularités de la nouvelle école : l’utilisation des nouvelles technologies (iPad pour chaque élève, télés interactives, lunettes de réalité virtuelle) et l’initiation à l’entrepreneuriat (culture en serre et vente des produits au magasin général).

D’où provient l’inspiration pour un tel projet ? Voici ce qu’en dit Chantal Cyr, la directrice de la CSRS :
« Pour trouver des idées, on n’est pas allés en Scandinavie ou ailleurs », poursuit-elle, faisant allusion aux intentions du trio à la tête du Lab-école d’aller chercher l’inspiration ailleurs dans le monde pour améliorer l’école québécoise.
« On a simplement surfé sur l’internet. Ce ne sont pas les belles écoles dans d’autres pays qui nous ont inspirés, mais les bureaux colorés d’entreprises comme Facebook, Apple, Google. »

Eh bien ! On ne pense pas l’école à partir d’une réflexion culturelle, scientifique, pédagogique, historique. Non : on surfe sur internet et on trouve....
Facebook... Apple... Google !

Vous avez bien lu !

Quand même le lieu à partir duquel on pense l’école devient internet, c’est que quelque chose ne tourne pas rond dans ce bas monde. Éric Martin, professeur au Collège Édouard-Montpetit, a bien raison de souligner que la production de la norme en éducation part ici directement de la machine informatique et vient réorganiser l’école.

L’esprit de la chose est clair : l’éducation, ce n’est plus apprendre une culture générale et ça ne s’acquière pas par obligation sur les bancs d’école ; on apprend plutôt des savoir-faire éphémères grâce à des incitatifs liés au plaisir et à des bidules technologiques, parce qu’« apprendre » doit être cool et ludique. J’ai parlé de connaissances et de culture ? Mes excuses ! Ces mots sont beaucoup trop ringards et passéistes, contraires au projet pédagogique contemporain, et relèvent d’un « mythe » : celui que quelque chose d’important existait avant et mérite être transmis.

Aujourd’hui, seule compte la construction de savoirs opérationnels pour les futurs soldats du marché du travail.

Tant qu’à y être, pourquoi ne pas concevoir une application pour téléphone intelligent (un fléau que le ministre refuse d’interdire en classe) où le savoir pourra être littéralement attrapé en jouant dans une réalité « augmentée », à la manière de Pokémon Go ?

Les penseurs des « écoles du futur » (et je crains que ce soit vraiment le cas) se plaignent du manque de moyens, et du fait qu’ils n’ont pas le soutien du ministère. La commission scolaire des Rives-du-Saguenay a présenté son projet au ministre Proulx, qui l’a rejeté non pas parce le modèle qu’il prône est bête, mais parce qu’il va « trop vite par rapport à ce qui s’en venait ».

Autrement dit, leur défaut est d’être en avance sur la bêtise à venir. Mais ça reste le plan à moyen terme.

Et ça, ça fait vraiment peur.

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