mardi 12 août 2008

Garderies — plus de places pour les femmes modernes, rien pour les femmes qui gardent elles-mêmes leurs enfants

Le Parti libéral poursuit la mise en place des garderies subventionnées, idée lancée par le Parti québécois, et néglige une fois de plus les femmes qui gardent elles-mêmes leurs enfants à la maison.

Remarquons que ce programme a sans doute très peu avoir avec le « mini-baby-boom » que connaîtrait le Québec, il est tout aussi probable que les baisses d'impôts et de taxes, l'allocation universelle pour jeune enfant et l'embellie économique de ces dernières années aient été responsables de la très petite hausse du taux de natalité québécoise toujours catastrophiquement bas : 1,65 enfant/femme. Rappelons que pendant la même période, sans système de garderie ruineux, la fécondité du Canada (avec en tête l'Alberta) a augmenté et que les chiffres de 2005 (1,54 enfant/femme) étaient les plus élevés depuis 1998...

Revenons un peu en arrière : garderies et natalité

En ce qui concerne la natalité, il est intéressant de remarquer que l'introduction du programme des garderies ne s'est pas accompagné d'un regain de fécondité, contrairement à ce qui s'était produit lors du lancement du programme de primes à la naissance. C'est ainsi que le taux de fécondité passa de 1,37 en 1986 à 1,66 en 1992. Que se passe-t-il depuis 1997 ? Le taux de fécondité a baissé par rapport à la dernière année du « lamentable échec » et il a gravité pendant 4 ans après l'introduction des garderies autour de 1,45. Le ministre d'État à la population de l'époque, M. Trudel, remarquait lui-même récemment « qu'en 2001, seuls 73 500 nouveau-nés avaient vu le jour chez-nous, alors qu'il y a à peine cinq ans, on en comptait 85 000. » Notons que cette inefficacité sur plan de la natalité du nouveau programme-phare du gouvernement québécois ne devrait pas surprendre puisqu'il n'incite pas les femmes à avoir plus d'enfants mais à retourner le plus rapidement possible au travail, ce qui pourrait bien être contradictoire.

Le fameux baby-boom que vivrait le Québec

Les médias québécois ne peuvent s'empêcher de parler de « baby-boom » actuellement. Or celui-ci est équivalent (1,65 enfant/femme) que l'indice synthétique de fécondité en 1992 (1,66), mais avec nettement plusen 2008 d'immigrantes et d'Améridiennes (plus fécondes que les Québécoises francophones de naissance) qu'en 1992. Rappelons que ce 1,66 de 1992 avait été décrié par le PQ de l'époque comme un « lamentable échec »...

Ce programme semble non seulement inefficace dans le domaine de la natalité, il l'est très probablement dans sa dimension économique. En effet, le gouvernement semble vouloir nationaliser le système de garderie alors que les garderies privées et le milieu informel de garde (assuré, par exemple, par la famille ou les voisins) s'avèrent nettement moins coûteux et plus souples. Il faut se méfier des systèmes qui sont basés sur la gratuité (déguisée ici) : ils sont sources de blocage économique, ont un effet boomerang sur la distribution et limitent le libre choix. Il aurait été plus efficace de simplement transférer les sommes considérables en jeu à toutes les familles et de leur laisser le choix du mode de garde de leurs enfants.

Garderies subventionnées - Inéquitable

Contrairement au programme d'allocation à la naissance, le programme des garderies à 7 $ n'est pas un programme universel : il pénalise les familles qui n'utilisent pas le système. Une jeune famille traditionnelle de la classe moyenne avec un seul revenu (l'autre parent garde les enfants) ne reçoit aucune allocation familiale de Québec . Pourquoi, alors qu'un des parents fournit un travail de garde à la maison, ce parent-il n'est-il pas en droit de recevoir les mêmes subsides que les familles qui confient leurs enfants à l'État ? Où envoyer la facture avoisinant les 25$/jour/enfant correspondant à la subvention perçue par les familles « modèles » dont les mères retournent au plus vite au bureau et laissent d'autres s'occuper de leurs enfants ?

« Penser famille », toutes les familles

Les gouvernements successifs ont mis beaucoup de zèle à modifier des pans entiers de la législation pour y inscrire les revendications de certains groupes de pression et concrétiser ou précéder les transformations de notre société. Des mesures fiscales ou subventions ont été consenties dans ce sens. Le programme de garderie à 7 $ est à ce titre emblématique. Des campagnes de sensibilisation ont été entreprises régulièrement pour répondre aux sensibilités de ces groupes de pression : campagne contre la violence faite aux femmes, contre la discrimination faite aux femmes, contre le racisme, contre l'homophobie, pour encourager les jeunes filles à opter pour des carrières masculines, pour la planification familiale, la parité salariale, etc.

On n'a jamais vu le même zèle dans la promotion de la famille comme lieu d'épanouissement, de campagne sur l'importance de la stabilité dans le couple, sur le besoin d'avoir plus d'enfants, sur la possibilité de rester une mère au foyer pendant quelques années. Et pourtant, il faut créer une mentalité d'accueil de plusieurs enfants au sein d'une même famille. Ces campagnes ne suffiraient pas, bien sûr, et il faudrait les accompagner de mesures fiscales qui encourageraient véritablement les familles (en mettant en œuvre un réel transfert de richesse entre les couples sans enfants et ceux ayant cette charge supplémentaire). Une telle fiscalité serait non seulement plus juste, elle aurait en outre des vertus pédagogiques certaines. Il est important de susciter un choc, un choc psychologique et financier en faveur de la famille plutôt que de distiller au compte-gouttes des mesures au fil du temps.

Il ne s'agit pas ici de vouloir exclure les mesures favorisant la réconciliation du travail et de la maternité, mais plutôt de vouloir s'ouvrir à toutes les formes de maternité et, plus généralement, d'encourager la famille et non plus seulement l'émancipation de la femme comme cela semble trop souvent le cas aujourd'hui. Il s'agit de « penser famille » constamment, de penser à toutes les familles sans cet esprit sectaire qui ne favorise qu'une configuration jugée moderne tout en pénalisant celles péremptoirement considérées comme « rétrogrades ».

Espérons qu'un gouvernement saura agir avec discernement sans persévérer par dogmatisme dans la mise en œuvre de solutions à la fois inefficaces et iniques. Il est, en effet, vain d'opposer la mère au foyer et la mère salariée, comme on semble le faire à dessein aujourd'hui, car chacun de ces choix peut se justifier et, surtout, parce que le Québec a besoin des enfants des unes comme des autres.