vendredi 28 avril 2023

Grand remplacement — « Les Comores sont en train de l'emporter» grâce à la démographie »

L’archipel de l’océan Indien n’a jamais accepté que l’une de ses îles choisisse de rester dans le giron français, rappelle le géographe Gérard-François Dumont. Professeur à Sorbonne Université, le géographe et démographe Gérard-François Dumont enseigne à l’Institut de géographie et d’aménagement. Il préside la revue Population & Avenir. Entretien paru dans le Figaro cette semaine.
 
— Pourquoi les Comores ont-elles refusé d’accueillir les embarcations de migrants ?

— C’était totalement prévisible. Pour comprendre cette attitude, qui n’est pas nouvelle, il faut rappeler que l’État des Comores n’a jamais accepté que Mayotte reste sous souveraineté française. C’est une très vieille histoire. En 1841, le sultan local, préférant être sous protection française plutôt que de subir la pression des autres îles, vendit Mayotte à un capitaine de vaisseau français qui passait par là. Depuis, les Mahorais sont toujours restés jaloux de leur indépendance. Ils n’ont jamais supporté l’idée d’être assimilés au reste de l’archipel. Ainsi lorsqu’en 1974, les Comoriens sont appelés aux urnes pour statuer sur leur indépendance, le « oui » est largement obtenu sur la moyenne de l’ensemble de l’archipel… sauf à Mayotte, où 63,8 % se prononcent pour rester au sein de la République française. La logique de la décolonisation aurait voulu que l’archipel devienne indépendant dans son intégralité, selon le processus entamé par la loi Deferre de 1956, mais la France a considéré le résultat de Mayotte à part.

Les Nations unies ont condamné la France pour non-respect du résultat. Le 21 octobre 1976, l’Assemblée générale adopte une résolution dénonçant deux référendums organisés la même année par la France pour confirmer le maintien de Mayotte dans la République française. Le texte « condamne énergiquement la présence de la France à Mayotte », et estime que ces référendums constituent « une violation de l’unité nationale, de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de la république indépendante des Comores ». Il est voté par 102 États, 28 abstentions, et une seule voix contre, la France. Depuis lors, la souveraineté française sur Mayotte n’a été reconnue ni par l’Union africaine, ni par l’ONU. L’État des Comores (qui se dénomme depuis 2002 Union des Comores) n’a jamais accepté cette souveraineté maintenue. Pour lui, Mayotte doit faire partie de leur État.

— Les Comores procèdent donc à un chantage aux migrants ?

— D’un point de vue de souveraineté stricte, l’Union des Comores n’a pas réussi à obtenir gain de cause et conquérir politiquement Mayotte. Mais elle est en train de l’emporter d’un point de vue démographique pour deux raisons : la moitié de la population de Mayotte est de nationalité étrangère, essentiellement comorienne, et la majorité des naissances sur le département français sont de mère comorienne. La plus grande maternité d’Europe se trouve à Mamoudzou. Elle comptait 10 295 naissances en 2022, dont 7410 (70 %) de mère comorienne, 2580 de mère française, et le reste Malgaches ou d’autres nationalités africaines. L’Union des Comores joue également avec la loi française selon laquelle tout ressortissant mineur est non expulsable. Aujourd’hui, les Mahorais de nationalité française sont minoritaires et risquent de le devenir de plus en plus. On peut parler de conquête démographique !

— Ils accusent la France d’agir de manière « unilatérale », est-ce le cas ?

— C’est totalement faux. Depuis 1976, la France ne cesse de dialoguer avec les Comores pour essayer de trouver une solution. La meilleure preuve est l’aide financière très importante donnée chaque année à leur gouvernement pour développer les Comores en termes de santé ou d’éducation, ou les moyens donnés pour les aider à arrêter le flux de migrants.


La magistrate, Catherine Vannier, qui a suspendu l’opération de destruction du bidonville est une métropolitaine d’extrême gauche

— Ils disent que l’île voisine d’Anjouan n’est pas en mesure d’opérer le débarquement de passagers…

— Nous sommes dans un rapport de force géopolitique. Les Comoriens arrivent bien à laisser partir de nombreux bateaux. S’il y a possibilité d’embarquer, il y a celle de débarquer ! Du point de vue des infrastructures, il est néanmoins évident que les Comores sont restées un pays sous-développé. Depuis l’indépendance, la qualité de la gouvernance est insatisfaisante et l’instabilité politique a été extrêmement forte, avec de nombreux coups d’État, et un niveau de corruption élevé.

— Les Comores ont-elles des alliés dans ce bras de fer ?


— L’Union des Comores fait partie de la Ligue arabe et, à ce titre, elle est soutenue par de grandes puissances telles que l’Arabie séoudite. Le soutien de Riyad est à la fois politique, mais aussi parfois religieux et financier. Comme dans d’autres pays dans le monde, l’Arabie saoudite cherche à diffuser le wahhabisme dans l’archipel, certes très majoritairement musulman, mais avec un islam imprégné de l’héritage culturel local. Concrètement, Riyad invite de jeunes Comoriens, finance leur formation d’imams dans ses propres écoles, puis les renvoie dans leur pays, le plus souvent avec un salaire et des financements pour construire de nouvelles mosquées. Avec le risque de radicalisation que l’on connaît — car le wahhabisme est une lecture littérale du Coran qui se traduit par des positions religieuses assez intégristes.

Un autre soutien de taille est la Russie, qui a toujours pris position pour l’État des Comores face à la France. Évidemment, dans le conflit actuel en Ukraine, Moscou fait en sorte de soutenir tout ce qui peut déstabiliser ses adversaires. Ce soutien a été mis en évidence ces dernières semaines avec l’élection du Président de l’Union des Comores à la présidence de l’Union africaine. Cela signifie évidemment que suffisamment de pays africains ont voté pour elles. Or rappelons qu’en 1976, celle qui s’appelait alors l’Organisation de l’Unité africaine avait condamné la souveraineté française sur Mayotte.

— La violence est-elle réellement « fabriquée » par la France à Mayotte, comme le prétendent les Comores ?

— La violence dans l’île est totalement endémique. Les kwassa kwassa (embarcations qui transportent les migrants des Comores à Mayotte, NDLR) ne repartent pas vides d’où ils sont partis, mais remplis de marchandises souvent volées à Mayotte, par des méthodes violentes.

Si la France a des responsabilités, j’en vois trois. La première, avoir accepté le vœu des Mahorais de rester français sans clarifier d’objectifs. La deuxième, de ne pas avoir agi beaucoup plus tôt pour que les frontières soient respectées. La dernière, d’avoir considéré de façon jacobine le 101e département français comme si c’était la Lozère ou tout autre département de métropole.

Il aurait fallu faire de Mayotte une zone franche, avec une législation propre permettant un réel développement. Par ailleurs, le Code civil de métropole ne correspond pas aux traditions et à la sociologie de Mayotte, fondée sur la solidarité familiale entre générations. Un exemple : la polygamie a toujours existé à Mayotte, et la tradition voulait que l’homme puisse répudier sa femme, mais c’est celle-ci qui conservait le logement. C’était d’une importance capitale : le mari était obligé de partir. Les lois françaises ont bouleversé ces coutumes. On a aussi créé des communes bien trop grandes, sans tenir compte de la réalité des Mahorais.

Hydro-Québec au pied du mur: l’exportation d’électricité en porte-à-faux avec le développement économique et l'immigration de masse

L’électricité propre à faible coût fut l’appât utilisé pour attirer des investisseurs durant le dernier demi-siècle.

Plus de 50 % de l’électricité produite est consommée par les industries auxquelles Hydro vend son énergie au rabais, comme Rio Tinto et Glencore.

 
Aujourd’hui à la veille de manquer d’électricité, devant honorer un contrat d’exportation majeur qui vient tout juste de débloquer avec l’État de New York, Hydro-Québec tente de mettre à nouveau de la pression sur les citoyens pour les inciter à économiser. Pour le site financier Bloomberg, il s’agit d’une « erreur stratégique ».

Il est estimé qu’il faudra 100 TW supplémentaires d’ici 2050, ce qui équivaut à plus de la moitié de la capacité annuelle de génération d’électricité actuelle. Un térawattheure peut alimenter environ 60 000 foyers par an.

La demande d’électricité croissante pour les véhicules électriques, soutenus par le gouvernement et de généreuses subventions, augmentera encore avec l’interdiction de vente de véhicules à essence prévue pour 2030. Le tout exacerbera le problème. En 2024, Énergir refusera les nouvelles demandes de branchement au gaz naturel traditionnel. Beaucoup d’utilisateurs préfèreront se tourner vers le 100 % électrique plutôt que de payer le prix fort pour du biogaz ou de la biénergie. 

L'augmentation débridée de la population (150.000 habitants de plus en an, du jamais vu!) ne pourra qu'exacerber cette pénurie prévue d'énergie. (Voir Coïncidence — Immigration : Le Québec fracasse un record, loyers records à Montréal, pénurie et surcharge de travail à l'école)

Le Québec — qui l’eut cru ? — sera confronté d’ici peu à une pénurie d’énergie. Attendez-vous à des factures salées pour « encourager » une nouvelle fois à économiser.

L’économie du Québec repose en grande partie sur l’hydroélectricité à bon marché. Les grands potentiels hydroélectriques presque tous épuisés, de plus modestes projets sont toujours possibles, mais l’on doit s’attendre à de la résistance de la part des écologistes et des autochtones relayée par les grands médias. 

Ce mois-ci, la compagnie d’électricité a identifié son premier site de barrage potentiel pour la rivière Petit Mecatina, dans une région isolée de l’est du Québec. En 2009, le potentiel hydroélectrique de la rivière avait été évalué à 1200 mégawatts, avec la construction de deux centrales de moyenne taille. « Le projet qui a été présenté dans les années 2000, ça ne veut pas dire que ça serait le même aujourd’hui », précise le porte-parole d’Hydro-Québec, Maxence Huard-Lefebvre.

L’éolien demeure une énergie d’appoint qu’il faut complémenter avec des centrales pilotables à la demande (thermique, hydraulique ou nucléaire) quand il ne vente pas assez ou trop. Le coût du kilowattheure serait, selon Radio-Canada, moins élevé pour l’éolien que pour de nouvelles centrales hydroélectriques, mais il faut prendre en compte d’éléments, notamment le potentiel de stockage d’énergie sur la rivière du Petit Mécatina.

Un réservoir permet un ajustement à la demande, ce que ne permet pas l’éolien. Comme le rappelle le directeur scientifique de l’Institut de l’énergie Trottier, Normand Mousseau, « La valeur est plus complexe à évaluer, ce n’est pas juste le coût du kilowattheure. C’est aussi de savoir s’il livre au moment où on en a besoin. ». Il faut aussi ajouter les frais d’intégration des projets éoliens au réseau d’Hydro-Québec. Ces frais sont quasi nuls pour les autres filières. L’éolien étant de nature irrégulière, il faut équilibrer le réseau
en conséquence et garantir un complément d’énergie d’une autre source si l’électricité produite est moindre que prévu. Selon une note économique de l’Institut économique de Montréal de 2013 (aucune plus récente ne semble avoir été publiée), Hydro-Québec subventionnait indirectement la filière éolienne à hauteur de 695 millions de dollars annuellement.


Sources : Financial Post, Radio-Canada


Québec — Résister au corporatisme des facultés en éducation

Un texte d’Antoine Robitaille paru dans le Journal de Québec.

À quelque chose, malheur est bon.

Puisqu’il manque quelque 1000 enseignants dans nos écoles, on va valoriser le savoir et les connaissances.

Je m’explique : nos écoles sont pleines de « NLQ », dont je vous ai déjà parlé. Ces profs étiquetés « non légalement qualifiés » (NLQ), puisqu’ils n’ont pas complété la voie royale vers le métier : quatre ans dans une faculté des sciences de l’éducation.

L’ennui : une bonne partie des NLQ ont déjà (au moins) un baccalauréat [licence en Europe] dans une discipline donnée. S’ils peuvent exercer le métier, c’est qu’ils se trouvent sous le coup d’une « tolérance d’enseignement » renouvelable une fois par décennie.

Mais ils ne seront jamais admissibles au fameux brevet d’enseignement, à moins qu’ils fassent une « maîtrise qualifiante » de 60 crédits, qui peut prendre deux ans à temps plein et plus longtemps à temps partiel.

Après avoir enseigné plus de 15 ans avec une « tolérance », un lecteur enseignant m’a écrit il y a quelques mois qu’il était enfin devenu « légal » il y a 4 ans, grâce à une telle maîtrise.

Il se disait « particulièrement amer » d’avoir été contraint de débourser « près de 10 k » afin de se former à un métier qu’il exerçait depuis 15 ans… « sans sécurité d’emploi ».


Voie rapide

La pénurie devenant plus aiguë, le ministre Drainville a demandé, en janvier, aux universités de développer des passerelles en pédagogie de 30 crédits. Tous ses prédécesseurs avaient malheureusement refusé cette solution qui tombe sous le sens.

Vous avez un bac en français, mathématiques, anglais, histoire, géographie, etc., etc. ? Vous complétez ce parcours court (les 30 crédits) et vous voilà admissible au brevet.

La Téluq, dont tous les cours sont à distance, est toutefois la seule université (sur 13 candidates potentielles) qui a jusqu’à maintenant proposé un diplôme d’études supérieures spécialisées (DESS) pour les niveaux préscolaire et primaire. Il sera disponible dès l’automne 2023. Le ministre Drainville souhaite étendre ce type de solution au niveau secondaire.

Résistance

Mais la résistance est forte. Fin mars, Jean Bélanger, le président de l’ADEREQ (Association des doyens, doyennes et directeurs, directrices pour l’étude et la recherche en éducation au Québec) déclarait : « On pense que le programme n’est pas suffisant pour obtenir le brevet d’enseignement. »

Dans Le Devoir hier, des professeurs de l’UQAM aussi s’élevaient contre les passerelles « Drainville » : « Diminuer les attentes de formation pour répondre à une crise à court terme […] ne constitue certainement pas une solution durable au double problème de la qualité de l’enseignement et de la constitution d’une solide relève enseignante. »

Les mots peuvent être trompeurs.

Permettre aux personnes diplômées dans une discipline d’accéder plus facilement au métier d’enseignant, est-ce vraiment diminuer « les attentes » ?

Au contraire, n’est-ce pas rendre le métier plus attrayant à des personnes possédant de solides formations disciplinaires ? Ça me semble être une manière de valoriser le savoir, les connaissances. Ceux qui appuient la solution des 30 crédits le soulignent. Souvent, ce sont des voix émanant du « terrain ».

Les universités, qui décernent des diplômes dans tous les domaines, devraient résister à la résistance émanant des départements de sciences de l’éducation. Et le ministre Drainville devrait insister pour persister dans cette voie.


Voir aussi

Des professeurs autrement qualifiés

Québec — Les intérêts du ministère et des syndicats au centre du système scolaire ?

On se rappellera cette histoire rapportée dans Le Devoir d’un excellent prof de latin qui, lui aussi, n’était pas qualifié au sens de la Loi. Il avait dû renoncer à son poste et enseigner le latin à son successeur qui ne le connaissait pas ou peu, mais qui détenait le diplôme nécessaire en pédagogisme. La chose avait même ému Josée Boileau dans le Devoir qui dénonçait « un incroyable salmigondis administratif, goutte d’eau qui s’ajoute à un parcours fait d’obstacles syndicaux et bureaucratiques qui ne peuvent faire rire que dans les films de Denys Arcand ou un épisode des Bougon. » 
 
 
 
 
Le vague à l’âme des pédagogos (bouh, on conteste partout leur réforme, pourtant ils sont des experts)
 
Suède — La baisse du niveau scolaire en partie imputable à l’immigration ? (pénurie d’enseignants à cause de l’afflux d’immigrés qui nécessitent plus de ressources que les Suédois de naissance)