mercredi 7 septembre 2022

Québec — contrairement aux promesses électorales, un record d'immigrants (plus de 100.000/an) [ m à j]

Il y avait en réalité 177 000 immigrants temporaires qui foulaient le sol québécois en 2021. L’an dernier, les personnes ayant un statut de résident temporaire représentaient 77 % du portrait global de l’immigration au Québec, si on se fie aux chiffres du gouvernement.

Notons toutefois que cette donnée présente les immigrants temporaires qui étaient sur le territoire au 31 décembre 2021, ce qui peut donc inclure des travailleurs ou des étudiants internationaux qui avaient obtenu leur permis depuis plus d’un an.

Selon ces mêmes données, le Québec ne contrôlerait que 14 % de son immigration, le reste relevant du Canada.

Plus encore, la proportion de francophones chez les immigrants temporaires n’est pas suffisamment élevée à son goût.

Le fédéral n’ayant aucune exigence en cette matière, seulement 37 % des personnes admises en vertu du programme des travailleurs étrangers temporaires, 52 % de ceux du programme de mobilité internationale et 57 % des étudiants étrangers ont une connaissance du français.


Billet originel du 27 août

Jamais le Québec n’a accueilli autant d’immigrants. En cumulant les résidents permanents et les temporaires, la barre des 100 000 immigrants – hors étudiants étrangers – sera donc aisément franchie cette année.

Un bilan contraire aux promesses faites par François Legault en 2018.

En prendre moins, mais en prendre soin. Tel était le slogan répété, jour après jour, durant la dernière campagne électorale victorieuse de François Legault.

Pourtant, dans les faits, c’est un tout autre scénario qui a déboulé sur le Québec au cours des quatre dernières années.

Retour sur un mandat controversé en matière d’immigration, où les contestations judiciaires, les bisbilles avec Ottawa et les affrontements avec le monde des affaires ont été omniprésents.

Des seuils baissés, mais…

François Legault a tenu sa principale promesse. Dès sa première année au pouvoir, il a baissé les seuils d’immigration d’environ 20 %. Près de 40 000 immigrants permanents ont été accueillis au Québec en 2019.

Mais, au total, il n’y a pas moins d’immigrants au Québec que sous l’ère libérale précédente. Bien au contraire.

Depuis l’arrivée au pouvoir du chef caquiste, le nombre de personnes arrivées dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) a rapidement explosé. Entre 2017 et 2019, ce nombre a même doublé, avant une stagnation due à la pandémie et à la restriction des voyages.


 

L’an passé, près de 36 000 travailleurs étrangers temporaires ont été embauchés au Québec. Aucune autre province n’a connu une telle augmentation durant cette période.

Alors que la frontière canadienne est désormais pleinement rouverte, ce chiffre a de bonnes chances d’être battu cette année. De janvier à mars, plus de 14 000 travailleurs étrangers temporaires ont eu l’autorisation de venir au Québec.

C’est d’ailleurs sur ce thème, l’immigration temporaire, que le gouvernement Legault a réalisé de véritables avancées, qui ont été saluées – une fois n’est pas coutume – à la fois par les immigrants et par les employeurs.

Depuis son arrivée en poste l’automne dernier, Jean Boulet – également ministre du Travail – a négocié avec Ottawa des assouplissements réclamés depuis longtemps au niveau des formalités administratives et du recrutement. Il est maintenant plus facile et moins long d’embaucher un travailleur étranger.

Bien plus de 100 000 immigrants en 2022

L’abaissement des seuils d’immigration n’a quant à lui pas duré très longtemps.

Petit à petit, le nombre d’immigrants permanents accueillis au Québec est revenu à des niveaux similaires vus avant la prise de pouvoir caquiste. Un nombre record de nouveaux résidents permanents devrait même arriver d’ici la fin de l’année.

Pour compenser les effets de la crise sanitaire, le gouvernement a promis d’accueillir 18 000 personnes supplémentaires. Il devrait donc y avoir près de 70 000 nouveaux arrivants en 2022.

En cumulant les résidents permanents et les temporaires, la barre des 100 000 immigrants – hors étudiants étrangers – sera donc aisément franchie cette année.

Et ce décompte ne prend pas en compte, non plus, le nombre de travailleurs venant dans le cadre du Programme de mobilité internationale (PMI). Ce programme permet aux employeurs - selon les professions - de réaliser des embauches sans avoir à fournir une longue, coûteuse et pénible évaluation des impacts sur le marché du travail (EIMT).

Selon Immigration Canada, des dizaines de milliers travailleurs arriveraient ainsi au Québec chaque année, mais le ministère fédéral n'a pas été en mesure de nous fournir des données complètes, puisqu'il dit de pas connaître avec exactitude la province de destination de ces immigrants.

Qu’en sera-t-il pour l’avenir? Québec a refusé de publier sa prochaine planification avant la campagne électorale, mais François Legault a déjà fermé la porte à une révision à la hausse, tout en affirmant privilégier l’immigration économique, au détriment des autres catégories.

Le premier ministre a maintes fois clamé que le Québec a atteint sa capacité d’accueil, même si, comme l’a révélé Radio-Canada, aucune étude n’existe à ce sujet.

Il y a d’ailleurs eu, tout au long de ce mandat, des remous en interne. Plusieurs sources nous ont parlé de différends, au Conseil des ministres, entre les élus à vocation économique et le premier ministre, sur le nombre d’immigrants à admettre.

En mai dernier, le ministre Boulet avait par exemple jugé raisonnable une proposition d’augmenter les seuils à 58 000 immigrants permanents, avant de faire volte-face quelques heures plus tard.

De Jolin-Barrette à Boulet

Il faudrait d’ailleurs diviser ce mandat caquiste en deux parties bien distinctes, tant le style, le ton et les résultats ont été différents.

Au cours des deux premières années, le ministre Simon Jolin-Barrette, qui avait la pleine confiance de François Legault et la responsabilité de mettre en œuvre différentes réformes en immigration, s’est attiré les foudres d’experts, d’avocats et des oppositions.

En interne, on parlait même d’une guerre ouverte entre son cabinet et la machine administrative. À micro fermé, des conseillers et des élus à Ottawa fustigeaient également le comportement et les actions du ministre Jolin-Barrette.

Dans un premier temps, ce dernier a voulu revoir radicalement le Programme de l’expérience québécoise (PEQ), un programme permettant d’accéder rapidement à la résidence permanente pour tous ceux qui ont déjà étudié ou travaillé dans la province. Critiqué de toutes parts, y compris par des sommités internationales, ce projet a dû être suspendu, avant d’être remis en place – avec des changements – quelques mois plus tard.

Ces différentes réformes, qui ont conduit à l’abandon contesté devant les tribunaux de milliers de dossiers d’immigration, avaient un but principal : privilégier Arrima, un nouveau système de sélection des immigrants. Or, ce dernier peine encore à trouver son rythme de croisière.

Les relations entre le gouvernement Legault, en matière d’immigration, se sont par la suite apaisées avec Ottawa et la société civile, après l’arrivée en poste de Nadine Girault (juin 2021), puis de Jean Boulet (novembre 2021).

Seule friction toujours vive : les délais d’immigration, très différents entre le Québec et le reste du Canada. Initialement, le gouvernement fédéral avait publiquement accusé Québec d’allonger ce temps d’attente pour les immigrants avant d’admettre sa part de responsabilité et d’être vivement accusé de négliger les dossiers des étudiants francophones voulant venir au Québec.

Le ministre de l'Immigration, Jean Boulet, a obtenu des gains avec Ottawa afin de faciliter l'importation d'immigrants dits temporaires en réduisant les formalités administratives pour l'embauche de travailleurs temporaires.

Francisation, réduction des exigences de français

Outre la baisse du nombre d’immigrants, le gouvernement Legault avait un autre cheval de bataille : améliorer le taux de francisation.

Chaque année, des dizaines de millions de dollars ont été dépensés à cet effet. Lors du plus récent budget, 290 M$ ont d’ailleurs été annoncés pour renforcer l’intégration en emploi des personnes immigrantes.

« Les dépenses du Québec en matière d’intégration et de francisation des personnes immigrantes ont atteint des niveaux historiques. »

— Une citation de Arianne Méthot, porte-parole du ministère de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration du Québec (MIFI)

Malgré ces mesures, qui ont été saluées, la CAQ s’est attiré les foudres des oppositions, notamment du Parti québécois. Ce dernier a par exemple demandé à plusieurs reprises de revoir le système de sélection des immigrants.

À ce jour, ne pas connaître la langue française n’est pas rédhibitoire pour immigrer au Québec. Le gouvernement a même ouvert la porte à une réduction de ces exigences pour permettre plus facilement à des talents – selon les mots utilisés par Nadine Girault – d’arriver dans la province.

Pour la première fois, un programme d’immigration, avec quelques centaines de places, a aussi été créé. Celui-ci est réservé aux non-francophones travaillant dans certains secteurs recherchés, avec des hauts salaires.

D’ailleurs, François Legault a confié ouvertement à des chefs d’entreprises avoir un problème avec les immigrants gagnant moins de 56 000 $ annuellement. Des propos qu’il ne regrette pas et qu’il justifie en invoquant son désir d’augmenter le salaire moyen au Québec.

Source : SRC


États-Unis — Prime au diplôme universitaire décroît alors que le président Biden renfloue les étudiants

« Renflouement des étudiants wokes » c’est le titre d’une analyse rigoureuse d’Allysia Finley du Wall Street Journal au sujet du programme d’annulation des prêts étudiants proposés par le président Biden. 
 
Pour la journaliste, ce programme « perpétuera l’arnaque de la vente de diplômes sans aucune compétence commercialisable. » Ceci alors que les généreux prêts et bourses étudiants di gouvernement sont en partie responsables de l’inflation des coûts de l’éducation universitaire aux États-Unis. En effet, les universités n’ont aucune raison de baisser les frais d’inscriptions alors que l’offre de prêts et de bourses est généreusement soutenue par l’État fédéral.

En outre, ce programme d’annulation est économiquement régressif, « bien pire que vous ne pourriez le penser », car il renfloue massivement les enfants des plus riches, comme le souligne l’économiste Tyler Cowen.

Il est également nettement plus cher que prévu, selon Penn Wharton, avec un coût atteignant entre 600 et 1 000 milliards de dollars, soit deux à trois fois le prix prévu.

Annuler les dettes des diplômés qui ne remboursent pas leur prêt pose enfin un problème moral : ceux qui se sont sacrifiés et ont payé leur dette sont-ils des pigeons ?

Calcul simpliste

Pour comprendre pourquoi cette politique de pardon est viciée, remontons à ses origines. Il y a de nombreuses années, certains décideurs ont remarqué que la petite minorité d’Américains diplômés par l’université gagnait plus que la grande majorité qui n’avait pas de diplôme universitaire. Ils en ont déduit que, si plus de gens allaient à l’université, tous ces diplômés gagneraient davantage et augmenteraient le produit intérieur brut du pays. Il suffisait donc de leur prêter de l’argent pour couvrir les frais de leur scolarité et leurs dépenses.

À un moment donné, le rendement décroît

Tout le monde n’a pas le talent et le tempérament nécessaires pour tirer profit de l’université. Maintenant qu’une majorité des élèves du secondaire commence des études post-secondaires — que ce soit dans une université ou simplement à un collège communautaire — nombreux sont ceux abandonnent. Certains finissent même par gagner moins que s’ils s’étaient abstenus de s’inscrire à l’université et avaient immédiatement trouvé un emploi. Plus grave, ces décrocheurs de l’université s’endettent fortement.

L’Amérique semble avoir atteint ce point depuis quelque temps. Le taux de chômage des diplômés et la part d’entre eux qui vivent encore chez leurs parents ont augmenté depuis les années 1990. Les économistes David Autor et Arindrajit Dube ont constaté que le salaire des diplômés universitaires a davantage baissé depuis 2020 que ceux des décrocheurs universitaires ou des diplômés du secondaire (voir le graphique ci-dessous). Le rendement des études post-secondaires semble de plus en plus médiocre, voire négatif, pour les décrocheurs et les diplômés « marginaux » et pourrait même réduire plutôt qu’augmenter le PIB du pays.

On aboutit à ce que l’historien de l’économie Peter Turchin appelle « la surproduction d’élites ». La formation des personnes ayant des diplômes prestigieux, mais qui n’ont pas nécessairement des aptitudes supérieures. Une telle surproduction, soutient Turchin, a historiquement débouché sur une « instabilité socio-politique ». Turchin a prédit en 2010 que cette instabilité serait une caractéristique de la décennie 2010-20. Récemment, les étudiants fuient les sciences humaines pour des diplômes aux débouchés plus en demande. La pléthore de doctorats a entraîné une concurrence accrue pour un nombre décroissant de postes de professeurs permanents. Davantage d’assistants travaillent désormais pour des émoluments proches du salaire minimum.

Tous les diplômes universitaires sont-ils rentables ?

On a tous entendu dire que les Américains qui obtiennent un diplôme universitaire gagnent plus que ceux qui n’en obtiennent pas — et c’est vrai dans l’ensemble. L’Association of Public and Land-grant Universities affirme que les récents titulaires d’une licence/baccalauréat gagnent en moyenne 44 000 $, soit environ 14 000 $ de plus que les jeunes n’ayant qu’un diplôme d’études secondaires. Cette moyenne ne prend en compte que les diplômés sans inclure dans le calcul du rendement des études universitaires les nombreux candidats qui sont passés par l’université, mais qui n’ont pas décroché de diplôme universitaire. Quand on considère ces candidats endettés, mais non diplômés, le gain moyen des gens passés par l’université baisse fortement.

De surcroît, de nombreux diplômés récents avec des diplômes coûteux gagnent moins que les travailleurs sans formation supérieure. Le revenu médian d’un récent diplômé de Columbia titulaire d’un diplôme en anthropologie (prix annuel de la formation : 85 967 $) n’était que de 29 201 $, selon le College Scorecard du Département de l’éducation. Les bas salaires ne sont pas une exemption dans les sciences humaines et sociales.

Beaucoup pourraient gagner plus en occupant des emplois qui ne nécessitent aucun diplôme universitaire. Les employés les plus bas de l’échelle salariale de Deere & Co. gagnent 22,13 $ de l’heure (46 030 $ par an) et les travailleurs les plus qualifiés de l’entreprise, tels que les électriciens, gagnent 33,05 $ de l’heure (68 744 $). Le personnel de construction et d’entretien à l’Université de Californie du Sud gagne plus de deux fois plus que les récents diplômés en anglais.

Une analyse de la Federal Reserve Bank de New York le mois dernier a révélé que 41 % des diplômés universitaires de 22 à 27 ans occupent des emplois qui ne nécessitent pas de diplôme.

Au cours des deux dernières décennies, le nombre d’Américains de plus de 25 ans titulaires d’une maîtrise ou d’un doctorat a plus que doublé. Environ la moitié des 1,6 billion [million de millions] de dollars de la dette étudiante fédérale est maintenant détenue par des Américains titulaires d’un diplôme d’études supérieures.

Les diplômes avancés peuvent augmenter le potentiel de revenus, mais souvent ce n’est pas le cas. Un récent récipiendaire d’une maîtrise en cinéma de l’Université de New York gagne environ 30 581 $ et a une dette de 113 180 $. Les récents titulaires d’un doctorat en sciences humaines gagnent en moyenne 55 000 $. La plupart travaillent comme assistants à l’université, des postes qui ne paient pas particulièrement bien puisque le marché du travail universitaire est saturé.

« Oui, mais l’université permet de sélectionner de bons futurs employés »

D’aucuns soutiennent que même si ces postes ne nécessitent pas une formation universitaire, une licence [baccalauréat au Québec] peut aider les employeurs à rechercher des attributs tels qu’une solide éthique de travail et un sens accru des responsabilités personnelles. Cela aurait pu être vrai autrefois. Mais les professeurs rapportent que, de nos jours, de nombreux étudiants ne se présentent pas en classe ou ne rendent pas leurs travaux à temps, trouvent des excuses ridicules et essaient d’intimider les instructeurs pour qu’ils soient traités avec indulgence. Cette intimidation passe notamment par les notes que les étudiants attribuent à leurs professeurs. [Voir Inflation des notes dans les universités nord-américaines ?]

 


Pourtant, la plupart de ces étudiants obtiennent leur diplôme, souvent avec des moyennes pondérées élevées. Les taux d’étudiants qui complètent leurs études universitaires augmentent depuis 1990, phénomène qui serait, selon une étude menée l’année dernière par les professeurs Brigham Young et Purdue, lié à l’inflation des notes attribuées aux étudiants. Pour vérifier cette hypothèse d’inflation des notes, les chercheurs ont notamment utilisé les résultats à des examens qui sont restés inchangés pendant 12 ans dans une université. C’est ainsi que, pour deux cours de sciences obligatoires qui ont fait passer des examens presque identiques en fin d’année au fil du temps, même si les notes finales attribuées aux étudiants augmentaient, leur performance à ces examens presque identiques n’a pas augmenté. Pendant ce temps, le taux de diplomation de cette faculté est passé de 83,1 % à 85,9 % et les moyennes générales (GPA) des élèves sont passées de 2,77 à 3,02, où un A (très bien) vaut 4,0 et un F (échec) égale 0,0.

Les auteurs ont noté que les instructeurs qui donnaient des notes plus élevées étaient mieux notés par les étudiants, cette popularité auprès des étudiants est prise en compte dans les décisions de titularisation et les renouvellements de contrat.

Les facultés qui distribuent les meilleures notes attirent également plus d’étudiants et donc plus de subventions. Ceci pourrait expliquer pourquoi l’inflation des notes est plus marquée en sciences humaines et sociales, où les postes d’enseignants sont plus précaires.

Pénurie de techniciens qualifiés

Pendant ce temps, les employeurs disent qu’ils peinent à trouver de travailleurs qualifiés tels que des électriciens et des machinistes. On compte environ 10,7 millions d’offres d’emploi aux États-Unis, dont la plupart sont dans des professions qui ne nécessitent généralement pas de diplômes universitaires. Beaucoup ont besoin d’une formation professionnelle, mais voilà, les étudiants des camps de codage et de nombreuses écoles de métiers ne sont pas éligibles à l’aide fédérale.

Où est passé l’argent ? 

Mais où est donc passé tout l’argent des prêts étudiants distribués par le gouvernement ? Il n’a pas servi à augmenter le nombre d’étudiants : même les universités aux énormes dotations n’ont pas admis davantage d’étudiants.

Au lieu de cela, les collèges et les universités ont siphonné l’argent en augmentant les frais de scolarité, les frais des résidences universitaires et d’accès à des gymnases plaqués or — et en augmentant leur masse salariale. De 2000 à 2020, les frais de scolarité ont augmenté de 170 %, soit plus du double du taux d’inflation, tandis que les prix des biens fournis par le marché ont à peine augmenté (voitures, meubles, vêtements) ou fortement baissé (téléphones portables, logiciels).

Les établissements d’enseignement supérieur ont englouti cet immense flux de subventions des prêts étudiants du gouvernement et l’ont dépensé en grande partie sur leurs administrateurs, dont le nombre depuis 20 ans dépasse celui des enseignants.

Leur tâche principale semble être de réglementer les relations sexuelles prénuptiales, de censurer et d’éliminer toute pensée dissidente. Comme le souligne Walter Russell Mead du Wall Street Journal, tout cela risque de rendre l’enseignement supérieur américain moins attrayant pour les élites étrangères — ce qui entraînera une diminution de l’influence américaine dans le monde et met en danger la vache à lait que constitue l’enseignement supérieur (les étudiants étrangers paient des frais de scolarité complets).

Pendant ce temps, comme d’autres institutions de gauche, les universités se sont causé un grand tort. Elles ont imposé aux étudiants l’obligation du port du masque, de se conformer à des quarantaines et à se faire vacciner contre la Covid alors que le risque mortel pour les étudiants était proche de zéro. Les règlements sur le discours (acceptable) et les simulacres de tribunaux sexuels rendent l’enseignement supérieur peu attrayant pour de nombreux candidats potentiels.

Comme le souligne Nate Silver de 538.com, la proportion des jeunes qui vont à l’université n’a pas augmenté depuis 10 ans, alors même que le total des subventions et des prêts fédéraux et institutionnels a pour sa part augmenté. Les inscriptions ont diminué avec l’apparition de la COVID, elles ont baissé de 1,2 million d’étudiants entre l’automne 2019 et l’automne 2021. Et elles continuent de baisser, avec une baisse totale des inscriptions dans l’enseignement supérieur de 4,1 % entre le printemps 2021 et le printemps 2022.

Effets pervers et renvoi d’ascenseur

L’annulation des prêts étudiants souffre d’effets pervers. La campagne électorale de Biden 2020 a reçu 64 millions de dollars de dons de la part d’employés de l’enseignement supérieur. Nombreux sont ceux qui se demandent si ce pardon de prêts impayés ne serait pas que le premier renvoi d’ascenseur parmi beaucoup d’autres. Parmi les effets pervers relevés par le président du Conseil des conseillers économiques d’Obama, Jason Furman, dans une tempête de tweets dévastateurs, citons le fait de « favoriser la hausse des frais de scolarité à l’avenir, d’encourager davantage d’emprunts [et] de susciter l’espoir que les dettes seront à nouveau annulées ».

À l’avenir, comme le savent les administrateurs de l’enseignement supérieur, le nombre de jeunes de 18 ans commencera à chuter précipitamment en 2026, écho du faible taux de natalité après la récession de 2007-09. L’industrie universitaire escompte sans doute que le précédent de cette annulation des dettes étudiantes sera fermement établi d’ici là et que le gouvernement fédéral annulera à nouveau les prêts étudiants et qu’il renflouera une nouvelle fois les diplômés wokes qui ne parviennent pas à rembourser leurs prêts.

 

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En janvier 2011, Richard Arum et Josipa Roksa ont publié une étude qui indiquait que moins de la moitié des étudiants américains de premier cycle avait suivi un cours lors du semestre précédent qui les obligeait à écrire un texte de 20 pages. Un tiers d’entre eux n’avait suivi aucun cours qui leur demandait de lire au moins 40 pages. Chez 45 % des étudiants, les auteurs n’ont pu constater aucune amélioration dans leurs compétences logiques, d’esprit critique ou d’écriture… Raisonner, lire, écrire : qui en a besoin ? Certainement pas les futurs enseignants : les étudiants en sciences de l’éducation manifestaient le moins de progrès éducatifs.

La même étude révélait que l’étudiant américain d’aujourd’hui passait deux fois moins d’heures à étudier que son homologue des années soixante. Lire et écouter un reportage impeccablement progressiste de NPR sur cette étude.

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