samedi 29 mai 2021

Le français écrit au primaire pâtit de la gestion de la COVID-19

La maîtrise de la grammaire et de l’écriture chez les élèves en a pris un coup à la suite de la gestion de la Covid-19, selon une étude réalisée auprès d’enseignants québécois.

La gestion de la pandémie par le Monopole de l'éducation qui a souvent fermé les écoles (contrairement à la Suède qui les a gardées ouvertes) a entraîné son lot de retards scolaires, mais au primaire, c’est surtout la maîtrise de la grammaire et de l’écriture qui en a pris un coup, selon une enquête réalisée auprès d’enseignants québécois.

Ces résultats sont tirés d’une étude sur l’impact de la COVID-19 dans le milieu scolaire, réalisée par une équipe de chercheurs de l’UQAM en partenariat avec le ministère de l’Éducation.

Près de 500 enseignants provenant de trois centres de services de la grande région de Montréal y ont participé en décembre et en janvier.

Les effets négatifs de la gestion gouvernementale de la pandémie chez les élèves du primaire se font d’abord sentir au niveau de la grammaire et de l’écriture, selon les institutrices interrogées.

«Pour le primaire, il semble que la discipline qui ait été la plus impactée soit le français», a affirmé le chercheur principal de cette étude, Patrick Charland, lors d’un colloque visant à faire le bilan de cette année scolaire en contexte de pandémie.

Au secondaire, la pandémie a surtout eu des effets négatifs au niveau de la capacité d’attention et d’organisation des élèves, selon les enseignants interrogés.

Élèves plus faibles

Ces résultats démontrant l’impact négatif de la gestion de la pandémie sur la maîtrise du français écrit au primaire concordent avec les conclusions d’une autre étude réalisée en janvier par Catherine Turcotte, Marie-Hélène Giguère et Nathalie Prévost.

Ces professeures au département d’éducation de l’UQAM ont interrogé 175 enseignants du primaire pour en savoir davantage sur les compétences de leurs élèves en lecture et en écriture en contexte de pandémie.

Les profs interrogés affirment que leurs élèves avaient des habiletés plus faibles à la rentrée que lors des années passées (de 71% à 78%) et s’inquiètent particulièrement de la maîtrise de l’orthographe grammaticale chez une majorité de leurs élèves.

En lecture, c’est la fluidité et la compréhension de longs textes qui les préoccupent le plus.

Source: Journal de Montréal et UQAM


Histoire — la traite esclavagiste a-t-elle permis le décollage économique de l'Occident ?

La recherche historique démontre que, contrairement aux certains préjugés courants, la traite esclavagiste ne fut en réalité qu’une composante économiquement secondaire, car peu rentable, du commerce que les Européens faisaient avec leurs partenaires africains. Les révolutions industrielles anglaise et française ne s’expliquent nullement par la traite négrière, bien au contraire.

La côte d’Afrique avait reçu des marins européens des noms faisant référence aux principaux articles du commerce colonial. Le littoral de l’actuelle Mauritanie et jusqu’à la Casamance, était ainsi le Pays des gommes (gomme arabique). De l’actuelle Guinée Bissau jusqu’à l’ouest de l’actuelle Côte d’Ivoire, le littoral avait pour nom Côte de Malaguette ou de Maniguette (une variété de poivre) ; l’actuelle Côte d’Ivoire était la Côte des dents (ivoire), cependant que l’actuel Ghana avait pour nom la Côte de l’or. Quant aux Côtes des esclaves, elles s’étendaient de l’actuel Togo jusqu’à l’Angola inclus.

Le long de cet immense arc commercial, contrairement à certaines idées reçues, la traite ne représenta économiquement qu’une part minuscule de l’ensemble du commerce maritime des puissances européennes.

Une usine de tissage de coton en Grande-Bretagne, gravure de 1835.


Angleterre

Le cas de l’Angleterre a été remarquablement étudié. Il mérite que l’on s’y attarde. Au XVIIIe siècle, apogée du commerce colonial britannique, les navires négriers totalisaient moins de 1,5 % de toute la flotte commerciale anglaise et moins de 3 % de son tonnage [1]. La raison de ces faibles pourcentages était manifestement économique car, alors que le commerce colonial au sens le plus large était très rentable pour les armateurs, celui des esclaves l’était beaucoup moins. Ses profits n’étaient ainsi en moyenne que de 3 %, avec un retour annuel sur investissement de 2 % [2].

Les historiens britanniques sont allés plus loin dans leurs recherches et ils ont cherché à établir en quoi le commerce des esclaves aurait pu, par ses bénéfices, permettre la révolution industrielle anglaise. Le résultat de leurs recherches est clair : les bénéfices tirés de l’odieux commerce négrier ne représentèrent en effet que moins de 1 % de tous les investissements liés à la révolution industrielle d’Outre-Manche [3] et : « […] l’apport du capital négrier dans la formation du revenu national britannique dépassa rarement la barre de 1 %, atteignant seulement 1,7 % en 1770 et en moyenne la contribution de la traite à la formation du capital anglais se situa annuellement, autour de 0,11 % »[4].

Ce ne furent donc pas les bénéfices tirés de la traite des esclaves qui permirent la révolution industrielle anglaise.

France

La réalité est identique en ce qui concerne la France, même si, en ce qui concerne cette dernière, nous ne disposons pas pour l’époque de la traite esclavagiste, d’analyses économiques aussi poussées que celles faites par les historiens britanniques.

Au XVIIIe siècle les esclavagistes français affirmaient que la traite était nécessaire aux Antilles, que celles-ci étaient indispensables au commerce colonial et que ce dernier était vital pour l’économie française. Ils en tiraient la conclusion que la Traite était nécessaire à la France. C’est en se basant sur ce syllogisme vieux de plus de deux siècles que certains historiens n’ont cessé d’affirmer que la France avait bâti sa richesse sur la traite des esclaves.

Si ce postulat était vérifié, l’interruption de la Traite entre 1792 et 1815 en raison de la guerre maritime aurait donc dû provoquer l’effondrement de l’économie française, or ce ne fut pas le cas.

En outre :

1) Si les profits de la Traite sont à l’origine de la révolution industrielle, comment expliquer qu’à la fin du XVIIIe siècle, et alors que le commerce colonial français était supérieur en volume au commerce colonial anglais [5], la France, à la différence de l’Angleterre, n’a pas fait sa révolution industrielle ?

2) Pourquoi la Révolution industrielle française s’est-elle produite bien plus tard, dans la seconde partie du XIXe siècle, donc bien après l’abolition de l’esclavage ?

3) Pourquoi cette révolution industrielle s’est-elle faite dans l’Est, notamment en Lorraine, dans la région lyonnaise, ainsi que dans le Nord, loin des ports négriers du siècle précédent de la côte Atlantique, Bordeaux ou La Rochelle ?

Ailleurs dans le monde

4) Durant la période 1701-1810, une part très importante du commerce des esclaves était contrôlée par le Portugal. Si le développement industriel s’était mesuré aux profits réalisés dans le commerce négrier, le Portugal aurait donc dû être une des nations les mieux loties. Or, il y a encore trois ou quatre décennies, non seulement ce pays était un pays arriéré économiquement en Europe, mais encore, il n’a jamais fait sa révolution industrielle.

5) Pourquoi malgré sa longue tradition esclavagiste, le monde arabo-musulman n’a-t-il pas connu de révolution industrielle ?

6) Comment expliquer l’industrialisation de l’Allemagne, de la Suède, de la Tchécoslovaquie, pays qui n’ont pourtant pas participé (ou alors d’une manière plus qu’anecdotique) au commerce des esclaves ?

7) Si le postulat de la révolution industrielle reposant sur les profits de la traite esclavagiste était vérifié, ladite révolution industrielle aurait donc dû se produire dans le sud des États-Unis, région esclavagiste et non dans le nord, région abolitionniste. Or, les États du Sud sont demeurés essentiellement agricoles, et c’est précisément parce qu’ils n’avaient pas fait leur révolution industrielle qu’ils furent battus par le Nord industrialisé.


On peut même dire que la Traite et le système esclavagiste ont enfoncé le Sud dans l’immobilisme quand le Nord, qui avait la chance de ne pas dépendre d’une économie esclavagiste, s’était industrialisé.

Notes

[1] Eltis, David, The Rise of African Slavery in the Americas, à New York, en 1999,  page 269.

[2] Thomas, Hugh (traduction), La Traite des Noirs (1440-1870), à Paris, en 2006, pages 461-463.

[3] Richardson, David, The British Empire and the Atlantic Slave Trade. 1660–1807in The Oxford History of the British Empire, volume II, à Oxford, en 1998, pages 440–464

[4] [5] Pétré-Grenouilleau, Olivier, Les traites négrières. Essai d’histoire globale, à Paris, en 2004, page 339.

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Un million d'esclaves européens chez les Barbaresques

Le génocide voilé (traite négrière musulmane)

Un million d'esclaves européens chez les Barbaresques

On sait quelle ampleur avait prise la piraterie barbaresque en Méditerranée et le péril qu’elle faisait courir aux populations riveraines, au point que la prise de la Régence d’Alger par la France, en 1830, fut approuvée et accueillie avec soulagement par toute l’Europe. Même si une cousine de la future impératrice Joséphine, la Créole Aimée Dubuc de Rivery, qui avait pris place sur un bateau pour la Métropole, vit le navire arraisonné et ses passagers vendus en esclavage, elle-même étant destinée au harem du sultan de Stamboul, on sait moins que cette piraterie fut presque aussi active dans l’Atlantique. À partir des côtes marocaines furent ainsi razziés aux XVIIe et XVIIe siècle non seulement des Britanniques mais aussi des Scandinaves, des Islandais, des colons du Groenland et même des Américains.

Après de longs recoupements, Giles Milton estime à plus d'un million le nombre des esclaves occidentaux dont une infirme minorité put recouvrer la liberté, grâce au versement d’une rançon ou par évasion — cas du Cornouaillais Thomas Pellow, enlevé en 1715 à l’âge de onze ans, enfin libre vingt ans plus tard et dont l’autobiographie publiée en 1740, après son miraculeux retour en Angleterre, sert à l’auteur de fil conducteur.

À l’époque comme aujourd’hui en Afghanistan et surtout en Afrique (qu’on pense à la Somalie, au Mali où croupissent plusieurs Français), la prise d’otages occidentaux était pratiquée à grande échelle pour obtenir d’abord d’extravagantes rançons, surtout quand ces otages étaient de hauts personnages, mais aussi pour obtenir aussi des appuis politiques et des retournements d’alliances. Ainsi le Maroc multiplia-t-il au début du XVIIe siècle les razzias d’Anglais dans le dessein d’obliger le roi Jacques Ier Stuart à attaquer l’Espagne.

Une main-d’œuvre à bon marché

Mais la cause principale était évidemment de se procurer au moindre coût une énorme main-d’œuvre. Celle-ci étant par exemple nécessaire à la réalisation des projets pharaoniques du sultan alaouite Moulay Ismaïl qui régna de 1672 à 1727 et dont l’obsession était de surpasser Louis XIV, qu’il sommait d’ailleurs de se convertir à l’islam… Ce qui n’empêchait d’ailleurs pas ce fervent musulman de se saouler rituellement pour fêter la fin du ramadan ! Pour que son ensemble palatial de Meknès, avec notamment le Dar el-Mansour, « haut de plus de cinquante mètres », fût infiniment plus vaste et plus imposant que Versailles, le monarque avait donc besoin d’une masse d’ouvriers mais aussi d’artisans, de contremaîtres et d’architectes que seuls pouvaient lui procurer les pirates écumant les côtes européennes. Selon l’historien arabe Ahmad al-Zayyani cité par Milton, il y eut simultanément à Meknès jusqu’à 25 000 esclaves européens, soit une population « à peu près égale à celle d’Alger ».

Certes, il y avait un moyen pour les captifs d’adoucir leur servitude : embrasser l’islam, comme l’avait fait le renégat hollandais Jan Janszoon, devenus l’un des plus redoutables et des plus riches chefs pirates sous le nom de Mourad Raïs. Mais la foi étant encore si grande et si profonde à l’époque, bien peu s’y résolurent, préférant l’enfer sur terre à l’Enfer au Ciel.




Car c’est bien la géhenne que ces malheureux subissaient sous la férule d’une sanguinaire Garde noire, qui terrorisait autant qu’elle surveillait. Ces Noirs, « d’une hauteur prodigieuse, d’un regard épouvantable et d’une voix aussi terrible que l’aboiement de Cerbère » selon l’ancien esclave français Germain Moüette, n’hésitaient pas à recourir aux châtiments les plus extrêmes, voire à la peine capitale, à l’encontre des prisonniers rétifs, ou simplement trop malades et donc incapable de fournir le labeur exigé d’eux malgré les rations de vin et d’eau-de-vie procurées par les juifs, courtiers habituels entre les pirates et Moulay Ismaïl.

Non content de procéder aux pires profanations — après la prise de la place-forte espagnole de la Memora en 1688, le souverain alaouite se fit apporter les statues de la Vierge et des saints afin qu’il puisse « cracher sur elles » avant de les faire briser— Moulay Ismaïl prenait grand plaisir au spectacle de la torture. Selon le récit de Harrison, ambassadeur anglais venu négocier le rachat de ses compatriotes et surtout des femmes, le sultan, qui se déplaçait volontiers sur un « char doré, tiré non par des chevaux mais par un attelage d’épouses et d’eunuques », pour la plupart européens, « faisait battre les hommes presque à mort en sa présence, certains sous la plante des pieds et il les forçait ensuite à courir sur des cailloux et des épines. Certains des esclaves avaient été traînés par des chevaux jusqu’à être mis en pièces. D’autres avaient même été démembrés alors qu’ils étaient encore vivants, leurs doigts et orteils coupés aux articulations ; bras et jambes, tête, etc. »

Un traitement sadique que ne subirent jamais les victimes de la traite triangulaire. « Etre esclave en Géorgie, voilà le vœu d’un ouvrier lyonnais », devait d’ailleurs écrire l’humoriste français Alphonse Karr à la veille de la guerre de Sécession. Certes, tous les « captifs en Barbarie », et notamment au Maroc, pays dont on nous dit être de haute civilisation et profondément humaniste, ne furent pas traités de manière aussi inhumaine. Comme dans d’autres camps, plus récents, beaucoup succombèrent non sous les coups ou la question, mais du fait d’épidémies décimant des organismes affaiblis par la faim, le froid des nuits d’hiver et surtout une promiscuité immonde, les esclaves regroupés dans des cellules surpeuplées vivant dans leurs immondices.

À lire aussi

On lira aussi avec profit sur le même thème l'ouvrage de Robert C. Davis, professeur d'histoire, spécialiste de l'histoire sociale de l'Italie, à l'université d'État de l'Ohio.

Dans son ouvrage Esclaves chrétiens, maîtres musulmans : L'esclavage blanc en Méditerranée, Davis se penche également sur la traite des Blancs pratiquée en Méditerranée par ceux que l'on nommait alors les Barbaresques. Cette traite a duré près de trois siècles et a causé plus d'un million de victimes. Qui étaient ces esclaves ? Comment se les procurait-on ? Comment fonctionnaient les marchés d'Alger, de Tunis et de Tripoli, les trois villes formant le noyau dur de la Barbarie ? Quelle forme prenait l'asservissement physique et moral de ces hommes et femmes originaires de toute l'Europe ? Comment l'Église catholique et les États européens tentèrent-ils de les racheter ? Les réponses que l'auteur apporte à ces questions et à bien d'autres battent en brèche l'idée élaborée au XIXe siècle et encore dominante d'un esclavage fondé avant tout sur des critères raciaux. Sur un sujet négligé ou sous-estimé par de nombreux historiens mais volontiers exploité par le roman populaire, cet ouvrage très sérieusement documenté, fruit de dix années de recherches, a reçu lors de sa première édition en France le prix Madeleine Laurain-Portemer de l'Académie des sciences morales et politiques.

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Un pays à très faible fécondité peut-il jamais renouer avec le taux de renouvellement des générations ?

Dans un article récent consacré à l’hiver démographique, le New York Times écrivait que « aucun pays avec un ralentissement sérieux de la croissance démographique n’a réussi à augmenter son taux de fécondité bien au-delà de la légère hausse que l’Allemagne connaît actuellement ».

La fécondité allemande est passée de 1,25 en 1995 à 1,54 en 2019 après avoir élargi l’accès à des services de garde d’enfants abordables et à un congé parental payé. En 2019, 75,6 % des enfants sont nés de mères de nationalité allemande, tandis que 24,4 % des enfants sont nés de mères de nationalité étrangère. La population allemande d’origine immigrée s’élève à 21 millions, soit environ 26 % de la population allemande. Quelque 65 % de toutes les personnes issues de l’immigration venaient d’un autre pays européen. En 2019, le taux de natalité des immigrés était bien supérieur à la moyenne et dépassait 2 enfants par femme.

Au moins un pays a réussi à remonter la pente démographique, la Géorgie dans le Caucase. Cet ancien pays de l’URSS, a augmenté son indice de fécondité de 1,53 enfant/femme en 1994 à 2,31 enfants/femme en 2015. Ensuite, bien qu’en diminution, l’indice de fécondité est resté proche du taux de renouvellement des générations.

Ce pays subit depuis la fin de l’Union soviétique une très forte émigration. Selon le recensement de 2014, la population de la Géorgie atteignait 3 729 635 habitants. Il s’agissait d’une diminution de 14,7 % depuis 2002, alors que la population était de 4 371 535 habitants.

Cette émigration est causée par les conflits, le départ des Russes de la Géorgie, un haut niveau de chômage depuis deux décennies et un pouvoir d’achat en baisse. Un facteur additionnel accentue cette tendance : la généralisation — initiative soutenue par les États-Unis — de la langue anglaise comme première langue étrangère, plutôt que le russe, et l’appétence des jeunes générations diplômées à une formation universitaire à l’étranger et leurs souhaits d’expatriation définitive. 

Malgré ces obstacles, la Géorgie est parvenue à redresser sa fécondité.

En 2013, la Géorgie a considérablement augmenté les aides financières à la maternité. Le congé parental payé a été prolongé de 126 à 183 jours et le congé sans solde de 477 à 730 jours. De même, le gouvernement a augmenté la « prime pour bébé », une somme unique payée à la naissance d’un enfant, d’environ 250 $ à environ 400 $ américains (le PIB par habitant de la Géorgie n’était que d’environ 9 000 $ à l’époque), et il a augmenté la prime pour un quatrième enfant à près de 800 $. Puis, en 2014, les autorités augmentèrent à nouveau cette somme pour offrir aux parents de trois enfants ou plus dans les régions faiblement peuplées un paiement annuel de 850 $.

L’Église orthodoxe géorgienne a également entrepris une campagne afin de relancer la natalité et le Gouvernement a créé un Secrétariat d’État à la diaspora afin de garder le contact avec les émigrés et en particulier encourager les retours.

Pour Lyman Stone de l’Institute for Family studies, le rôle de l’Église orthodoxe est primordial.

En 2007, le patriarche Élie II de l’Église orthodoxe géorgienne a pris une décision : face à un pays avec une population en déclin, de faibles taux de natalité et des taux d’avortement élevés, le chef de l’église a annoncé qu’il baptiserait personnellement et deviendrait le parrain de tout troisième ou ultérieur enfant orthodoxe né d’un couple marié en Géorgie et officiellement enregistré auprès du gouvernement. La Géorgie est orthodoxe à près de 90 %. Le patriarche Élie II jouit d’une grande confiance et est respecté. Enfin les Géorgiens sont les plus susceptibles de tous les pays à majorité orthodoxe de dire que leur religion est une question de foi personnelle. En d’autres termes, la Géorgie est un cas type idéal pour voir si les dirigeants nationaux peuvent utiliser le capital social ou culturel pour effectuer des changements sociaux ciblés. Depuis les premiers baptêmes de masse fin 2007, Élie a baptisé plus de 36 000 bébés (jusqu’en 2018), soit environ 5,8 % du total des naissances en Géorgie au cours de cette période, ou environ 34,5 % des troisièmes et ultérieures naissances, de sorte que le nombre de ces baptêmes est significatif sur le plan démographique. 

Comme on peut le voir sur le graphique ci-dessus, la Géorgie connut une forte augmentation des naissances en 2008. Les reportages et les politiciens de l’époque attribuaient cette hausse à la campagne nataliste et antiavortement du patriarche.

Mais la campagne du patriarche Élie était-elle vraiment la cause de cette montée en puissance ? Le moyen le plus simple de vérifier cette hypothèse est de voir si cette augmentation concernait principalement les troisièmes naissances et au-delà, c’est-à-dire les bébés susceptibles d’être baptisés par le patriarche.

La figure ci-dessus montre que de 2007 à 2008, les naissances ont augmenté pour chaque rang de naissance. De 2008 à 2009, elles ont de nouveau augmenté pour chaque rang de naissance. Mais à partir de là, les premières naissances ont diminué, les deuxièmes naissances sont restées stables, tandis que les troisièmes naissances ont continué d’augmenter. Il s’agit pour Lyman Stone d’un élément qui suggère que la campagne du patriarche Élie aurait fonctionné : les naissances de troisième rang ont presque doublé entre 2007 et 2010, puis ont continué à augmenter avec le temps. Surtout, il est possible que sa campagne puisse stimuler même la première ou la deuxième naissance si les parents espèrent avoir plus de bébés plus tard pour profiter de l’offre de baptême spécial pour les futurs enfants. Ils peuvent devancer les naissances planifiées, car le patriarche Élie n’est pas un jeune homme (il a 88 ans) et son successeur pourrait ne pas s’engager à suivre le même programme de baptêmes de masse.

Mais le pic des première et deuxième naissances est-il vraiment lié à l’accélération de la fertilité des couples pour obtenir le baptême patriarcal ? Eh bien, c’est difficile à dire avec certitude, mais on peut répartir la fécondité en fonction de l’état matrimonial. L’offre de baptême n’a été officiellement proposée qu’aux couples mariés, on peut donc s’attendre à ce que la fertilité des mariés augmente, tandis que la fertilité des mères célibataires ne devrait pas être affectée. 


Comme l’indique la figure ci-dessus, la totalité de l’augmentation observée de la fécondité s’est produite dans la fécondité des femmes mariées, tandis que le nombre de naissances pour les femmes non mariées a en fait diminué. Il est vrai que les naissances des femmes mariées avaient commencé à augmenter avant même 2008, la première année où la politique d’Élie devrait vraiment avoir eu un effet significatif, ce qui suggère qu’il y a peut-être eu une tendance sous-jacente à la hausse. Mais la divergence est si grande et persistante que, combinée aux données sur le rang de naissance présentées ci-dessus, il semble extrêmement probable aux yeux de Lyman Stone qu’une grande partie de ce sursaut soit due à l’offre de baptême du patriarche Élie.

Il est souvent difficile en démographie d’établir l’impact des facteurs culturels ou sociaux sur la démographie. Mais le cas de la Géorgie serait assez clair pour Lyman Stone et montrerait que la présence de capital social — c’est-à-dire un acteur non étatique qui peut influencer le comportement d’autrui sans coercition — peut être un atout énorme pour une société, lui permettant de faire des changements démographiquement significatifs avec un prix relativement bas, car les politiques natalistes relativement efficaces sont coûteuses. C’est ainsi qu’en Hongrie les sommes allouées à la politique familiale représentaient près de 4 % du PIB.

Voir aussi
  
 
 
 

Russie — aides aux familles, baisses des avortements, naissances en hausse en mars 2021

Démographie de la Russie pour le premier trimestre 2021

Le premier trimestre 2021 a vu 336 691 naissances contre 338 268 naissances pendant le premier trimestre 2020, soit une diminution de 0,4 % et 1 307 naissances. Statistiquement, on peut dire que la natalité n’a pas diminué pendant le premier trimestre de 2021 par rapport au premier trimestre de 2020. 

Les mariages sont eux en hausse de 3 % et les divorces en hausse de 0,7 %.

Quant à mars 2021, il a vu 128 217 naissances contre 111 021 naissances en mars 2020 soit une hausse de 15,5 % pour 17 196 naissances supplémentaires.

La mortalité infantile au plus bas en Russie

En Russie, la mortalité infantile a atteint un niveau historiquement bas en 2020, s’élevant à 4,5 ‰ selon le ministre russe de la Santé Mikhaïl Mourachko le 16 mars 2021 lors d’une réunion élargie du Comité de la Douma d’État sur la protection de la santé.

Ce taux de mortalité infantile est le plus bas de toute l’histoire non seulement de la Fédération de Russie, mais aussi de l’URSS.

En 2019 la mortalité infantile en Russie était de 5,3 ‰. Ce taux de 4,5 ‰ est celui de la France de 2019 ce qui veut dire qu’un enfant qui nait en Russie en 2020 n’a pas plus de chances de mourir qu’un enfant qui naît en France en 2019.

À noter qu’en 2019 la mortalité infantile était de 5,8 ‰ en Slovaquie, 6,5 ‰ aux États-Unis ou encore 8,4 ‰ en Ukraine.

Avortement en forte baisse depuis

La Russie a construit des centres de soutien médical et social pour les femmes enceintes en situation de vie difficile. À titre d’exemple en 2020, malgré la pandémie, plus de 230 000 femmes ont été consultées dans ces centres et près de 50 000, soit 22 %, ont finalement décidé de ne pas avorter. La politique russe est de venir en aides aux femmes enceinte, de décourager ainsi les avortements sans les interdire.

Selon Tatiana Golikova la vice-première ministre, le nombre d’avortements aurait diminué de 39 % entre 2015 et 2020 ce qui voudrait dire que 2020 devrait voir autour de 510 000 avortements.

Il faut cependant pondérer ce chiffre par la baisse du nombre de femmes en âge de procréer et donc d’avorter.

Nouvelles aides sociales en Russie

À la suite des propositions du président russe Vladimir Poutine, exprimées dans son message à l’Assemblée fédérale d’avril dernier, voici la liste des mesures principales annoncées pour soutenir les familles avec enfants et les femmes enceintes :

  • à partir du 1er septembre, les arrêts maladie pour s’occuper d’un enfant de moins de 8 ans sont remboursés à hauteur de 100 % du salaire moyen ;
  • à partir du 1er juillet, les foyers monoparentaux avec des enfants de 8 à 17 ans se verront attribuer des paiements mensuels de 50 % équivalant à la moitié du minimum de subsistance de l’enfant dans la région (en moyenne en Russie, il est de 5,6 mille roubles) ;
  • à partir du 1er juillet, les femmes enregistrées avec une grossesse jusqu’à 12 semaines se verront attribuer une allocation de 50 % du niveau de subsistance ; à partir du 1er août et avant le 31 août, un paiement unique de 10 000 roubles pour chaque élève qui va à l’école, de 8 à 16 ans ;
  • Une allocation mensuelle pour les femmes enceintes qui se trouvent dans une situation de vie difficile soit au sein d’une famille avec un revenu familial moyen par habitant inférieur au niveau de subsistance ;
  • Le montant de l’allocation sera égal à la moitié du niveau de subsistance dans la région de résidence d’une femme enceinte qui est en moyenne en Fédération de Russie de 6 350 roubles et sera payé jusqu’au jour de la naissance.

Source : Journal d’un Frussien