dimanche 20 juillet 2025

Le parti « Les Japonais d'abord » émerge comme une force électorale avec un discours musclé sur l'immigration

Le parti devrait remporter entre 10 et 22 sièges à la chambre haute, selon la NHK. 14 selon les dernières prévisions (lundi à 4 heures du matin, heure de Tokyo). La Coalition au pouvoir (PLD+Komeito) serait désormais légèrement minoritaire au Sénat (100 pour le PLD et 21 pour le Komeito).

Le chef du Sanseito, Sohei Kamiya, explique ses promesses de campagne à Tokyo le 30 juin pour les élections à la Chambre haute.

Le parti de droite matginale Sanseito,, est sorti grand vainqueur des élections à la chambre haute japonaise dimanche, remportant le soutien des électeurs grâce à ses avertissements contre une « invasion silencieuse » d'immigrants et à ses promesses de réductions d'impôts et de dépenses sociales.

Né sur YouTube pendant la pandémie de COVID-19 en s'insurgeant sur l'obligation des vaccins ARNm, le parti a fait son entrée dans la politique traditionnelle avec sa campagne « Les Japonais d'abord ».

S'exprimant devant le Club des correspondants étrangers du Japon le 3 juillet, Kamiya a déclaré que son parti n'était favorable ni à un nationalisme extrême ni à un protectionnisme, et visait « l'harmonie mondiale et des relations économiques internationales mutuellement bénéfiques, mais pas un libre-échange excessif ni un mépris de la souveraineté nationale ».

Kamiya, qui a remporté le premier siège du parti en 2022 après s'être fait connaître pour avoir semblé appeler l'empereur du Japon à prendre des concubines, a essuyé une vive réaction en début de campagne cette année, qualifiant les politiques d'égalité des sexes d'erreurs, car elles encouragent les femmes à travailler et les empêchent d'avoir des enfants.

Il a depuis semblé atténuer certaines idées controversées autrefois défendues par le parti. Son programme électoral, par exemple, prévoit des réductions d'impôts et une augmentation des allocations familiales – des mesures promues par de nombreux partis d'opposition qui ont suscité des inquiétudes chez les investisseurs quant à la santé budgétaire et à l'énorme dette du Japon.

La chaîne publique NHK prévoit que le parti remportera jusqu'à 22 sièges, s'ajoutant au seul siège qu'il avait obtenu il y a trois ans dans cette chambre de 248 sièges. Il ne dispose que de trois sièges à la chambre basse, plus puissante.

« L'expression « Les Japonais d'abord » visait à exprimer la volonté de reconstruire les moyens de subsistance du peuple japonais en résistant à la mondialisation. Je ne dis pas qu'il faut interdire complètement les étrangers ou que tous les étrangers doivent quitter le Japon », a déclaré Sohei Kamiya, le leader du parti âgé de 47 ans, dans une interview accordée à la chaîne de télévision locale Nippon Television après les élections.

Le Parti libéral-démocrate du Premier ministre Shigeru Ishiba et son partenaire de coalition, le Komeito, risquent de perdre leur majorité à la chambre haute, ce qui les rendra encore plus dépendants du soutien de l'opposition après leur défaite à la chambre basse en octobre.

Dans un sondage réalisé avant les élections de dimanche, 29 % des électeurs ont déclaré à la NHK que la sécurité sociale et la baisse du taux de natalité étaient leurs principales préoccupations. Au total, 28 % ont déclaré s'inquiéter de la hausse du prix du riz, qui a doublé au cours de l'année dernière. L'immigration arrivait en cinquième position, avec 7 % des personnes interrogées qui la citaient.

« Nous avons été critiqués pour notre xénophobie et notre discrimination. Le public a fini par comprendre que les médias avaient tort et que Sanseito avait raison », a déclaré M. Kamiya.

Le message de M. Kamiya a séduit les électeurs frustrés par la faiblesse de l'économie et la monnaie, qui a attiré un nombre record de touristes ces dernières années, faisant encore grimper les prix que les Japonais ont du mal à supporter, selon les analystes politiques.

La société japonaise, qui vieillit rapidement, a également vu le nombre de résidents nés à l'étranger atteindre un record d'environ 3,8 millions l'année dernière, même si cela ne représente que 3 % de la population totale, soit une fraction de la proportion correspondante aux États-Unis et en Europe.

Émule de Trump ?

Kamiya, ancien directeur de supermarché et professeur d'anglais, a déclaré à Reuters avant les élections qu'il s'était inspiré du « style politique audacieux » du président américain Donald Trump.

Il a également été comparé à l'AfD allemande et à Reform UK, bien que les politiques populistes de droite n'aient pas encore pris racine au Japon comme elles l'ont fait en Europe et aux États-Unis.

Après les élections, Kamiya a déclaré qu'il comptait suivre l'exemple des partis populistes émergents en Europe en nouant des alliances avec d'autres petits partis plutôt qu'en collaborant avec le PLD, qui a gouverné le Japon pendant la majeure partie de son histoire depuis la fin de la guerre.

L'accent mis par le Sanseito sur l'immigration a déjà fait basculer la politique japonaise vers la droite. Quelques jours avant le scrutin, l'administration Ishiba a annoncé la création d'un nouveau groupe de travail gouvernemental chargé de lutter contre les « crimes et les troubles à l'ordre public » commis par des ressortissants étrangers, et son parti a promis de viser l'objectif « zéro étranger en situation irrégulière ».

Kamiya, qui a remporté le premier siège du parti en 202,  a tenté d'atténuer certaines idées controversées autrefois défendues par le parti.

Afin d'adoucir son image « fougueuse » et d'élargir son soutien au-delà des hommes de 20 à 30 ans qui constituent le noyau dur du Sanseito, Kamiya a présenté dimanche une série de candidates féminines.

Parmi elles figurait la chanteuse Saya, qui a remporté un siège à Tokyo.

À l'instar des autres partis d'opposition, le Sanseito a appelé à des réductions d'impôts et à une augmentation des allocations familiales, des mesures qui ont inquiété les investisseurs quant à la santé financière du Japon et à son énorme dette publique. Mais contrairement à eux, il bénéficie d'une présence en ligne beaucoup plus importante, qui lui permet d'attaquer l'establishment politique japonais.

Sa chaîne YouTube compte 400 000 abonnés, soit plus que tout autre parti sur la plateforme et trois fois plus que le PLD, selon socialcounts.org.

Selon M. Kamiya, la percée du Sanseito à la chambre haute n'est qu'un début.

« Nous augmentons progressivement nos effectifs et répondons aux attentes de la population. En mettant en place une organisation solide et en obtenant 50 ou 60 sièges, je pense que nos politiques finiront par devenir réalité », a-t-il déclaré.


Au moins 580 millions de personnes éligibles à l'asile en France

La décision rendue par la Cour nationale [française] du droit d’asile le 11 juillet dernier, ayant établi que les Palestiniens pouvaient « bénéficier du statut de réfugié » en France, est une nouvelle preuve de l’avancée du programme « d’accueil inconditionnel » souhaitée par les associations, pointe le directeur de l’Observatoire de l’immigration et de la démographie, Nicolas Pouvreau-Monti.


Stupeur et inquiétude. La décision rendue par la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) le vendredi 11 juillet, ayant établi que les « ressortissants palestiniens originaires de la bande de Gaza » pouvaient « bénéficier du statut de réfugié » en France, apparaît avoir suscité ces deux sentiments conjoints, dans un pays où l’importation du conflit proche-oriental est un spectre qui plane depuis plus de deux décennies.

Comme toujours en pareille circonstance, la CNDA a fondé cette nouvelle jurisprudence à l’occasion d’un cas particulier : une femme et son fils venus du nord de la bande de Gaza, qu’ils ont fuie dans la foulée des attaques terroristes du 7 Octobre et de l’offensive menée par Israël. Ayant atteint l’Égypte, les deux Gazaouis ont été pris en charge par l’ambassade de France au Caire et ont reçu deux laissez-passer consulaires pour rejoindre le territoire français.

Cette mère a alors déposé une demande d’asile auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), l’établissement public chargé d’instruire les dossiers d’asile en première instance, qui leur a accordé un statut de « protection subsidiaire ». Il s’agit de l’une des formes du droit d’asile dans l’union européenne, dédiée aux personnes qui ne remplissent pas les critères de la convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés (car ne faisant pas l’objet d’actes de « persécution » ciblée), mais qui seraient néanmoins en danger en cas de retour dans leur pays. Par exemple, car ils s’y trouveraient exposés à « situation de violence aveugle d’intensité exceptionnelle». Depuis une précédente décision de la CNDA rendue le 12 février 2024, le système français d’asile considère que Gaza se trouve dans un tel contexte.

Cependant, la requérante palestinienne n’a pas voulu s’en contenter. Elle a fait appel auprès de la CNDA, afin de se voir reconnaître un statut de réfugié plein et entier. Il est permis de s’interroger devant une telle insistance procédurale, dans un contexte personnel que l’on présume bouleversé. Des réponses surgissent à la vue des associations qui ont « accompagné » cette Gazaouie dans son recours. Celui-ci a été lancé par le Collectif des Avocat·es France-Palestine, et appuyé par un ensemble d’organisations qui se sont portées «intervenantes volontaires » à cette occasion : la Ligue des droits de l’homme, la Cimade, le Gisti… De toute évidence, le sujet principal n’était pas le destin personnel de cette femme et son fils - déjà assurés d’un statut de protection sur le territoire français. Il s’agissait, pour ces associations, de saisir une occasion d’étendre plus largement encore les critères d’éligibilité des Palestiniens à l’asile en France, tout en faisant jeter un opprobre juridictionnel sur la politique militaire du gouvernement israélien.

Cette stratégie s’est avérée payante. La CNDA a accordé le statut de réfugiés aux requérants et décidé, ce faisant, que «les ressortissants palestiniens originaires de la bande de Gaza non protégés par L’ONU peuvent se voir accorder le statut de réfugié ». En effet, depuis un précédent jugement de la même Cour rendu le 13 septembre dernier, les 70 % de Gazaouis placés sous mandat de L’UNRWA (l’office spécial des Nations unies pour les réfugiés de Palestine), car descendants des Palestiniens déplacés de 1948, étaient déjà éligibles à l’octroi de ce statut en France. Pour rattacher son nouveau choix d’élargissement aux critères formels de la convention de Genève, la CNDA a estimé que les « méthodes de guerre utilisées par les forces israéliennes » s’apparentaient à une « persécution » fondée sur la « nationalité ».

Cette décision du 11 juillet n’est donc pas exactement la rupture majeure qui est parfois présentée. Elle marque au contraire une continuité, un aboutissement : les deux millions d’habitants de la bande de Gaza peuvent prétendre à la forme la plus protectrice du droit d’asile en France - matérialisée par l’octroi d’un titre de séjour de dix ans, le droit à la « réunification familiale », à la Sécurité sociale et à l’ensemble des aides prévues pour les Français. L’on mesure à quel point cette mécanique du droit d’asile est désormais hors de contrôle. Gérée en autonomie par des institutions spécialisées cultivant une certaine proximité avec le monde associatif, qui les utilise comme un levier permettant de faire avancer son programme «d’accueil inconditionnel», elle prend la forme d’un véritable droit opposable à l’immigration - qui ne connaît aucune limite quantitative, ni aucune délibération démocratique.

Ses bases d’attribution se sont élargies de manière spectaculaire au cours des dernières décennies, en s’appuyant notamment sur la notion de « groupe social ». Celle-ci permet de rendre éligible à l’asile des populations entières pour des motifs sociétaux : les femmes à risque d’excision au Soudan ou en Égypte, les homosexuels birmans, kosovars ou congolais, les anciens esclaves de Mauritanie, les personnes atteintes d’albinisme au Nigeria… En intégrant l’ensemble des critères qui permettent d’obtenir l’un ou l’autre des statuts de protection, au moins 580 millions de personnes à travers le monde sont aujourd’hui éligibles à l’asile en France, si elles se trouvent en mesure de déposer une demande sur le territoire.

Le droit d’asile constitue, de loin, le canal d’immigration en plus forte croissance : 1 habitant sur 100 en France est désormais un étranger bénéficiaire de l’asile ; ils étaient 663 000 à disposer d’une protection au 31 décembre dernier, soit une multiplication par trois en dix ans à peine. Durant les quatre premiers mois de l’année 2025, notre pays a reçu le plus de demandes de protection dans toute l’union européenne - dépassant désormais l’Allemagne.

Quel sera l’effet de cette nouvelle décision de la CNDA, qui s’ajoute à d’autres, sur l’asile des Gazaouis en France? Il est difficile de le prévoir. Seules 250 demandes émanant des Palestiniens de Gaza ou de Cisjordanie ont été enregistrées l’an dernier et il reste, à ce jour, très compliqué de quitter concrètement la bande de Gaza. Mais qu’adviendra-t-il demain, si le gouvernement israélien mène à son terme un plan d’évacuation totale du territoire ? L’Égypte et la Jordanie voisines ont déjà indiqué qu’elles refuseraient d’accueillir sa population.

Comme l’a souligné Didier Leschi, directeur général de l’office français de l’immigration et de l’intégration, dans un rapport publié le mois dernier par L’OID et la Fondapol, la France compte désormais plus de 100 000 Afghans sur son sol - un nombre multiplié par 60 en deux décennies. Personne n’a vraiment souhaité, ni anticipé un tel afflux en provenance d’Afghanistan. L’actuel régime du droit d’asile présente la faculté singulière de faire émerger des diasporas imprévues sur le sol des sociétés d’accueil.

Source : Le Figaro
 
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